FrançafriqueTout comme Barack Obama lorsqu’il a accédé à la Maison blanche, l’opinion publique aspirait majoritairement au changement avec l’élection de François Hollande. Il y a bien eu quelques promesses tenues : un millier de professeurs supplémentaires créés à la rentrée 2012 à l’école primaire, au lieu des 5.100 postes qui devaient être supprimés ; 280 professeurs de plus pour le secondaire ; baisse du plafond du quotient familial, plafonnement du cumul des niches fiscales à 10.000 euros, etc. Des mesures caractéristiques de la social-démocratie qui sont fondamentalement loin de remettre en cause les cures d’austérité imposées par l’union européenne et la classe dominante. Les premiers mois de Hollande à la présidence sont bien décevants.

 

Tout comme Barack Obama en matière de politique étrangère, les résultats n’ont pas été au rendez-vous. Élu par un électorat un tantinet plus pacifiste que son prédécesseur, F. Hollande a fini en à peine quelques mois par se placer dans la continuité de ce dernier. Tout comme Obama avec Bush sur les dossiers brûlants de l’Afghanistan ou de l’Irak, notre locataire de l’Élysée ne se révèle pas moins impérialiste et belliqueux que Sarkozy.

 

Le modus operandi diffère. Mais les objectifs restent les mêmes : Sarkozy forçait la main à la communauté internationale et avait tendance à mettre cette dernière devant le fait accompli (on pense à l’agression de la Libye et à l’attaque du convoi de Kadhafi en direction de Benghazi). Hollande, quant à lui, joue la séduction tout en soutenant les « rebelles » en Syrie. Il n’a eu de cesse, avec le Qatar et d’autres pays membres de l’OTAN, d’appeler à agir contre Damas.

Il a appris de son prédécesseur que les coups sur la tête et la fuite en avant ne sont d’aucune aide, surtout si la Russie et la Chine ne se décident pas à baisser la garde, et la Syrie de Bachar el-Assad est d’une autre consistance que la Jamahiriya libyenne. Cette prudence s’explique aussi par le fait que la France a travaillé en Libye pour le compte des États-Unis, lesquels ont envoyé les Français et les Britanniques opérer leur œuvre destructrice… avant de les exclure au dernier moment du partage du butin, resté en grande partie dans les mains des Étatsuniens et des Qataris. Contrairement à Sarkozy, Hollande est conscient de la faible influence de la France à l’échelle internationale. Il joue donc la mouche du coche, en excitant la Turquie, les États-Unis et le Qatar à ouvrir la route de Damas. Mais il semble, là aussi, que les résultats ne soient pas à la hauteur des efforts diplomatiques consentis.

 

C’est l’échec sur le front syrien. On tente alors d’ouvrir un nouveau front sur ce qu’on appelait il y a encore très peu de temps de la Françafrique. Cette Afrique autrefois française où l’influence de la métropole s’effrite chaque jour un peu plus au profit de la Chine et des puissances régionales. Cette fois, l’occasion d’intervenir est fournie par le Mali. Ironie du sort : le bourbier dans lequel est plongé ce pays est la conséquence directe, à un an d’intervalle, du conflit libyen. Le Sahara, ce désert où les frontières et l’autorité des États sont purement théoriques, sera le théâtre de cette nouvelle guerre.

 

Dans un premier temps, les Touaregs conquièrent le nord du pays et fondent même l’État qu’ils appelaient de leurs vœux depuis si longtemps. Viennent ensuite les militants liés à Al-Qaïda qui ont enrichi leur arsenal en pillant les dépôts libyens ouverts aux quatre vents et en acquérant des armes que la France et les autres belligérants avaient fournies aux rebelles du CNT. Contre ces gens-là, l’armée malienne, faiblement équipée et désorganisée, ne put qu’opposer une résistance symbolique. Les soldats maliens, en grande partie originaires du sud du pays, étaient pressés de quitter ces régions inhospitalières du nord pour retourner chez eux. Face à ce chaos politique et militaire, Paris et Washington fomentèrent un coup d’État qui portera au pouvoir un nouveau gouvernement philo-occidental à Bamako. Celui-ci en appellera à une intervention internationale au Mali, avant que l’armée française aux ordres de F. Hollande n’entre en action.

 

D’aucuns penseront qu’il y a une contradiction fondamentale entre soutenir les fondamentalistes en Syrie et les combattre au Mali. En réalité, de contradiction il n’y en a pas. Dans les deux cas, ils fournissent le prétexte pour s’ingérer dans les affaires d’un autre pays. Ce qui importe, en revanche, c’est que ce casus belli soit fourni par la situation chaotique que connaît ce dernier, qu’il s’appelle la Syrie ou le Mali.

 

En ce qui concerne la Syrie, elle est l’alliée de la Russie, de la Chine et de l’Iran. Á ce titre, elle est difficilement attaquable. Le Mali au contraire se trouve encore dans la sphère d’influence française, et Paris peut agir plus librement, en s’appuyant sur quelques alliés locaux et sur des partenaires internationaux.

 

Les raisons pour lesquelles F. Hollande a attaqué le nord du Mali sont nombreuses et comprennent, outre la nécessité de mettre la main sur une région stratégique riche en ressources naturelles,  la volonté d’intervenir dans la vie interne de quelques États limitrophes parmi lesquels la Mauritanie et surtout l’Algérie. Bien qu’elle ait ouvert son espace aérien aux aéronefs français, Paris a, depuis l’époque de Sarkozy, des comptes à régler avec elle. L’ancien président n’a-t-il pas dit plusieurs fois, à mots couverts, que la capitale algérienne pouvait être la prochaine victime des révolutions arabes. Des déstabilisations qui ont déjà été opérées avec succès dans d’autres pays arabes, comme la Libye…

 

Les prochaines semaines nous diront si la tactique de François Hollande permettra de réaliser cette percée belliqueuse dans la Françafrique. Une chose est néanmoins certaine : de changement, il n’y en a pas !

 

Capitaine Martin

Par Résistance – Publié dans : Les petits papiers du capitaine Martin