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28 mars 2024

Michael Yates : « Clinton est une criminelle de guerre active et elle a fait beaucoup de dégâts dans le monde »


 


Michael Yates. D.R.

Vendredi 11 mars 2016

English version here:https://mohsenabdelmoumen.wordpress.com/2016/03/11/michael-yates-clinton-is-an-active-war-criminal-and-has-done-a-great-deal-of-damage-in-the-world/

Mohsen Abdelmoumen : Y a-t-il vraiment une différence entre la candidate Hillary Clinton et le candidat Bernie Sanders ?

Michael Yates : Ils ont beaucoup en commun : ce sont des politiciens de carrière, il y a beaucoup de similitude dans leur manière d’envisager la politique étrangère, y compris le soutien pour l’État criminel israélien, ils sont liés au parti démocrate et incapables ou réticents à critiquer le capitalisme lui-même. Cependant, il existe de réelles différences. Clinton est une criminelle de guerre active et elle a fait beaucoup de dégâts dans le monde, depuis sa connivence avec son mari pour mettre fin au système d’aide aux pauvres et accroître considérablement la population des prisons, jusqu’à faire des ravages dans les nations du monde entier. Elle est totalement redevable aux riches financiers capitalistes et à leurs institutions, et continuera à exécuter leurs ordres si elle est élue. Et il n’est pas étonnant que ces derniers les aient rendus extrêmement riches, elle et sont mari. Elle fera n’importe quoi pour se faire élire. Sanders, en revanche, est un homme de principes, du moins en soutenant la population active aux États-Unis et en se tenant à l’écart des grands intérêts d’argent. Bien qu’il ne soit pas socialiste, il soutient les programmes sociaux-démocrates qui sont un anathème pour Clinton, quels que soient les mensonges qu’elle raconte tout au long de la campagne. Sanders fait partie d’une longue lignée de politiciens populistes qui apparaissent sur la scène de temps à autre aux États-Unis. Il est immensément populaire auprès de certains groupes, en particulier les jeunes dont l’ascension sociale a été sévèrement bloquée, peut-être de façon permanente. Il est toutefois fragilisé auprès des électeurs noirs et il ne s’est senti concerné par eux que lorsque ses premières apparitions ont commencé à être perturbées par des activistes noirs. Cependant, bien que je sois sceptique sur sa capacité à réaliser une révolution politique, il est beaucoup mieux que Clinton. Le problème se posera dans le fondement de ce qu’il favorise et sa radicalisation, quel que soit le mouvement qu’il développe. Il y a une raison pour que nous disions que le parti démocrate est le cimetière des mouvements radicaux naissants.

Comment expliquez-vous la médiocrité qui caractérise le débat de la présidentielle américaine ?

Nous avons une société dans laquelle toutes les institutions importantes qui ont soutenu la communauté et la solidarité par le passé ont disparu, détruites par l’offensive néolibérale et par l’échec absolu d’entités telles que le mouvement ouvrier à développer des éléments sociaux indépendants et radicaux. Nous nous retrouvons avec la quasi-totalité d’entre nous qui pensent qu’il vaut mieux se débrouiller tout seul. Cela ouvre la porte aux plus bas instincts humains qui peuvent prospérer, permettant à ceux qui ont le pouvoir de jouer sur ceux-ci, nous manipulant et nous menant toujours plus loin dans la division. Dans de telles circonstances, les questions fondamentales sur la nature de la société ne peuvent même pas être posées, encore moins discutées et analysées. Au lieu d’une politique sérieuse, nous avons la politique du spectacle et de la trivialité, et même les actualités ressemblent à de la téléréalité. Le système scolaire s’est gravement dégradé, de sorte que les étudiants n’apprennent presque rien de l’histoire et des luttes des peuples pour un monde meilleur. Gagnez de l’argent, protégez-vous des prédateurs, ne montrez pas de faiblesses, et ainsi de suite. C’est un pays mûr pour un Donald Trump, pour un régime autoritaire. S’ajoutent au problème des guerres sans fin qui génèrent et vulgarisent une violence de la pire espèce. Il n’est pas étonnant que la jeunesse noire continue à être assassinée dans nos rues. Pas étonnant qu’il y ait la haine des étrangers, en particulier les musulmans. Il y a ceux qui s’opposent à tout cela et qui offrent un espoir. Mais la barbarie est en bon chemin ici. Et bien que la campagne de Bernie Sanders ait galvanisé de jeunes personnes, je doute que ce soit suffisant pour combattre l’ignorance virulente qui définit la politique, les médias et tant d’autres forces actuellement au travail. La démocratie est devenue lettre morte. Ainsi la médiocrité pourrait être un mot trop généreux pour décrire le débat dans les élections présidentielles.

Comment expliquez-vous qu’avec l’échec du modèle capitaliste, aucune force d’encadrement ouvrier n’a pu voir le jour ?

L’échec du mouvement ouvrier remonte à la période suivant la seconde guerre mondiale, quand le milieu des affaires a commencé son assaut sur les gains réalisés au cours du New Deal de la Grande Dépression. L’attaque de la Guerre Froide contre les « Rouges » et tout ce qu’ils représentaient, droits des travailleurs, droits civils, anti-impérialisme, résonnait dans les syndicats les plus conservateurs et parmi les opportunistes dans la plupart des nouveaux syndicats ouvriers industriels. Ces forces ont rejoint la croisade anti-communiste, purgeant impitoyablement leurs membres radicaux et leurs dirigeants. Ensuite ils ont traité avec des employeurs et lancé une longue période de « coopération syndicale patronale ». Pour ce faire, ils ont dû détruire les mouvements de base dans leurs propres syndicats, pour se débarrasser des fauteurs de troubles. En peu de temps, ils ont commencé à imiter dans leur structure les mêmes sociétés qui avaient été jadis leurs ennemis acharnés. Et ils sont devenus de très jeunes membres du parti démocrate, aidés par les politiciens libéraux. Tout cela a éloigné beaucoup de membres, qui ont commencé à faire défection politiquement. Alors, quand le « deal » conclu avec les entreprises n’a plus convenu aux patrons, quand la croissance de la concurrence mondiale a menacé les profits, les employeurs ont abandonné le « deal » et sont passés à l’attaque. Dépourvus de principes et cherchant à sauver leurs propres positions confortables, les dirigeants syndicaux ont été incapables et peu disposés à résister. Le reste est l’histoire, pour ainsi dire. Un mouvement syndical vidé de sa substance, avec peu de pouvoir et un ennemi de classe affamé de plus de concessions et de défaites syndicales, et une fin de la résistance de la classe ouvrière. Même la campagne de Bernie Sanders sera incapable de renverser cet état de choses. Je crains que la lutte de classe réelle ne soit très éloignée aux États-Unis. Qui parle de cela maintenant ? Sanders parle de « révolution » mais il a avili le sens de ce mot sacré. Comme il a également présenté un « socialisme » qui ferait se retourner Marx et Engels dans leur tombe.

Ne pensez-vous pas que la vision révolutionnaire d’Henry Giroux, un de mes intervenants dont les écrits prolifiques sont très riches, est indispensable en ce moment précis ?

Henry est un ami, et son travail a grand besoin d’être largement lu, discuté et suivi. Plutôt que de répondre à cette question en détail, permettez-moi de vous citer l’avant-propos du dernier livre d’Henry dans Monthly Review Press, America’s Addiction to Terrorism (La dépendance de l’Amérique au terrorisme), que j’ai écrit. En voici le début :

Henry Giroux est un phénomène. Il a écrit plus de soixante livres, il est l’auteur de centaines d’essais, a remporté de nombreux prix, et a été un enseignant exceptionnel pendant près de quarante ans. Son influence dans le domaine de la pédagogie critique est sans égale, et il a apporté des contributions significatives à beaucoup d’autres domaines aussi, incluant tant des études culturelles que des études de médias. Ce qui distingue l’écriture de Giroux est une combinaison d’analyse lucide et de critique incisive et à juste titre intransigeante sur la détérioration de la condition humaine sous les assauts d’un capitalisme moderne sauvage. Cependant, son examen de cette sauvagerie ne se limite pas à une description des attaques vicieuses contre les travailleurs menées par les entreprises et leurs alliés au sein du gouvernement. Il ne se contente pas d’énumérer les conséquences économiques, politiques et sociales de ces agressions telles que l’augmentation de la pauvreté, la stagnation des salaires, le chômage déraisonnablement élevé, la détérioration de la santé, l’accroissement stupéfiant de la population carcérale, et une augmentation générale de l’insécurité matérielle pour ne citer que quelques-unes. Au lieu de cela, il transcende ceux-ci pour interroger les plus subtils mais non moins dévastateurs effets du capitalisme néolibéral, et implicitement le capitalisme lui-même, sur nos psychés et sur notre capacité à résister à notre paupérisation croissante.

Voici un lien vers l’avant-propos, qui a été publié séparément:

http://monthlyreview.org/2016/01/01/on-henry-giroux/

Le Parti Démocrate américain peut-il produire une radicalité quelconque, et notamment de la part de Bernie Sanders à qui on prête une vision radicale ?

Non. Le parti démocrate n’est que le second parti du capital. Il offre parfois un visage plus humain que le parti républicain, mais il est aussi redevable au capital, en particulier le secteur de la finance, que le parti républicain. Et ses politiques diffèrent à peine de celles de son supposé parti rival. Les deux partis sont agressivement pro-capitalistes, nationalistes, et impérialistes, une trinité hostile au changement radical. Bernie Sanders court comme un démocrate, en dépit de sa revendication d’être un démocrate socialiste. Sans doute le fait-il parce que cela donne à ses idées une plus grande visibilité que s’il courait pour le compte d’un troisième parti. Cependant, une fois qu’il l’a fait et une fois qu’il a dit qu’il soutiendra la misérable Hillary Clinton si elle obtient l’investiture, il a montré qu’il ne projette pas de rompre avec les démocrates. J’espère qu’il le fera finalement, mais s’il le fait, il perdra sa position au Sénat américain. Mais en tout état de cause, le Parti démocrate est immunisé contre une transformation radicale. Il l’a toujours été et le sera toujours. Vous pouvez voir quelle position de facto Sanders a tenu pour sa politique globale en tant que sénateur du parti démocrate. Il est devenu beaucoup moins radical et est maintenant ce que nous pourrions appeler un social-démocrate décent. C’est ce que le monopole des deux partis sur la politique aux États-Unis fait aux gens qui s’y trouvent. Compromis sans fin avec vos principes.

Comment expliquez-vous que des syndicats ouvriers et estudiantins progressistes se soient laissés séduire par un sénateur démocrate, membre de l’establishment ?

Les étudiants veulent sortir de la dette étudiante onéreuse, et Sanders a une position décente sur ce point. De plus, des étudiants et des jeunes diplômés généralement blancs, mieux instruits, ont vu leur ascension sociale bloquée puisque le marché du travail a échoué à produire suffisamment d’emplois de haute qualité et bien rémunérés. Sanders promet de les aider, et ils aiment ça. Sans doute aussi de nombreux jeunes sont désabusés par le système politique actuel qui les a laissés tomber, et ils sautent sur l’occasion de soutenir quelqu’un qui semble comprendre leur aliénation et veut faire quelque chose à ce sujet. Avec le travail, Sanders a un bon dossier de soutien aux travailleurs dans leurs luttes contre les employeurs. Comme l’a dit un de mes amis, journaliste du travail, activiste, et membre de longue date du personnel de syndicat :

(http://www.counterpunch.org/2016/02/19/labor-the-left-sanders-an-interview-with-steve-early-and-rand-wilson/)

« Bernie a non seulement invité les Vermonters à voter « oui » dans des élections de représentation syndicale comme la campagne de CWA (ndlr :Communications Workers of America) en 1994 parmi 1.500 travailleurs du centre d’appels de la compagnie de téléphone, il voulait organiser des réunions annuelles des militants syndicaux locaux pour les aider à développer des stratégies plus efficaces de renforcement des syndicats. Pour stimuler la nouvelle réflexion de base, Sanders et son équipe ont invité des orateurs du syndicat hors-État qui ont fait partie des efforts nationaux pour relancer un syndicat organisé. Il est lui-même devenu le seul membre du Congrès à avoir jamais discouru dans une conférence du Labor Notes (ndlr : mouvement ouvrier) national, et aussi à avoir fait une donation au Labor Notes. » Ainsi les ouvriers progressistes voient maintenant la campagne de Sanders comme le meilleur moyen de relancer le mouvement ouvrier en réunissant les activistes de base qui tentent de démocratiser leurs syndicats et communautés. Il y a des raisons d’être sceptique que tout de cela mènera dans une direction vraiment radicale, anticapitaliste. Je deviendrai optimiste quand je commencerai à entendre que les militants ouvriers et étudiants parlent et écrivent sur la nécessité de mettre fin au patriotisme aveugle, au nationalisme, à l’impérialisme, sur la nécessité pour les travailleurs et la communauté de contrôler la production, et de mettre fin à la division débilitante du travail dans lequel la plupart sont confinés à des emplois inutiles et abrutissants, une planification nationale, une attaque directe contre le racisme, et bien plus encore.

L’impérialisme US et ses alliés de l’OTAN s’apprêtent à intervenir en Libye comme ils sont intervenus en Irak, pensez-vous que cette intervention sera utile ?

Il n’y a pas d’interventions américaines et de l’OTAN qui soient utiles. Tout d’abord, ils détruisent des pays, comme les États-Unis l’ont fait en Irak et dans beaucoup d’autres nations. Puis, quand des choses terribles se produisent en conséquence, ils disent qu’ils continueront d’intervenir ou de faire pareil à nouveau pour remettre les choses sur la bonne voie. Ironie des ironies ! La meilleure chose que les États-Unis pourraient faire pour le monde est de le laisser tranquille pendant une longue période. Leur record de destruction et d’assassinat de masse est sans précédent dans l’histoire humaine.

Avec ce qui passe dans le monde, les guerres impérialistes et la domination capitaliste sur fond de crise systémique, ne faudrait-il pas relire Karl Marx et en tirer les conclusions ?

Oui, bien sûr que nous devrions. Le capitalisme fonctionne toujours autant que Marx le disait. Les travailleurs sont exploités, privés du plein fruit de leur travail, et la plupart d’entre nous travaillent pour soutenir la richesse de quelques uns. Ça se passe dans presque tous les pays du monde. Les paysans continuent d’être dépossédés de leurs terres. D’énormes réserves d’armées de travail existent dans le monde entier. L’impérialisme demeure un fait fondamental de la vie. La violence continue à être en bout de compte à la base de l’exploitation. Les démocraties bourgeoises semblent être le meilleur de ce que nous pouvons faire. Le marché règne encore. Bien sûr, Marx a écrit à un certain moment dans le temps, et le capitalisme a continué à développer de nouvelles façons toujours plus insidieuses et détournées de faire chuter l’excédent des masses de travailleurs. L’État est devenu plus puissant et intrusif. La solidarité internationale a été plus ou moins bloquée par le nationalisme dans les pays riches. L’hégémonie du capital semble plus imperméable à la révolution qu’elle ne l’était à l’époque de Marx. Cependant, une lecture du Capital, Livre 1, est toujours la meilleure chose qu’une personne puisse faire pour comprendre la nature du système et la tâche ardue de le renverser. Une bonne solution pour le romantisme libéral, que le système peut être modifié par la politique électorale et des réformes socio-démocratiques graduelles et au coup par coup.

Dans ce monde des ténèbres où règnent les vieux démons capitalistes et le minotaure impérialiste, ne faut-il pas le bon vieux schéma de lecture marxiste pour expliquer le processus d’anéantissement actuel ?

Oui. M-C-C’-M’ est toujours la clé, comme la théorie de la valeur du travail. Et, très important, nous avons besoin de voir que la notion d’aliénation de Marx s’applique non seulement aux êtres humains au travail mais à notre relation avec la nature. Marx était visionnaire concernant la faille entre les humains et le monde naturel qui se produit et s’approfondit avec le capitalisme. Ici, les travaux du rédacteur en chef de Monthly Review, John Bellamy Foster, sont d’une grande importance et doivent être lus et appris par cœur par tous ceux qui ont commencé à réaliser que le capitalisme sonne littéralement le glas du monde naturel. En outre, la dégradation quotidienne du travail humain ne peut pas s’achever dans le capitalisme, peu importe à quelle hauteur sont les salaires ou le nombre de réformes socio-démocratiques qui sont faites.

Avez-vous un livre en préparation, et quel en est le thème ?

Je n’ai pas de livre en préparation, mais je viens juste d’en publier un en février cette année. Son titre est The Great Inequality (La grande inégalité), et il a été publié par Routledge. Le livre se compose d’un ensemble d’essais qui examinent la nature, l’étendue, les causes et les conséquences de l’inégalité des revenus et de la richesse en croissance rapide aux États-Unis et dans le monde. J’examine également les diverses manières d’éradiquer le fléau de l’écart grandissant entre le 1% et presque tous les autres. Voici le lien Amazon pour le livre :

http://www.amazon.com/Great-Inequality-Critical- Interventions/dp/1138183458/ref=sr_1_1_twi_pap_1?s=books&ie=UTF8&qid=1457301049&sr=1-1&keywords=the+great+inequality+michael+yates

Interview réalisée par Mohsen Abdelmoumen

Qui est Michael Yates ?

Michael Yates est un auteur américain, éditeur et pédagogue. Il est rédacteur en chef adjoint du magazine Monthly Review, directeur éditorial de Monthly Review Press, et professeur émérite à l’Université de Pittsburgh-Johnstown où il a enseigné l’économie et les relations de travail de 1969 jusqu’à sa retraite en 2001. Il a écrit plusieurs livres, dont : Wisconsin Uprising: Labor Fights Back ; The ABCs of the Economic Crisis: What Working People Need to Know (coécrit avec Fred Magdoff, Monthly Review Press, 2009) ; In and Out of the Working Class(Arbeiter Ring, 2009) ; Cheap Motels and a Hotplate: an Economist’s Travelogue(Monthly Review Press, 2007) ; Naming the System: Inequality and Work in the Global Economy (Monthly Review Press, 2002) ; Why Unions Matter (Monthly Review Press, 1998 et seconde édition, 2009) ; Longer Hours, Fewer Jobs(Monthly Review Press, 1994) ; et Power on the Job (South End Press, 1994). Il a également publié plus de 150 articles et critiques dans une grande variété de revues, magazines et journaux. Ses ouvrages ont été traduits en dix-sept langues.

Published in English in American Herald Tribune, March 11, 2016:http://ahtribune.com/us/2016-election/651-clinton-an-active-war-criminal.html

In Oximity:https://www.oximity.com/article/Michael-Yates-Clinton-est-une-criminel-1

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