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19 avril 2024

Voyage au cœur du pays de Bachar (6) : de Lattaquié au monastère de Qara


chaos

Rédaction de Breizh-info

Lattaquié, principale porte de la Syrie sur la méditerranée. Photo Sana

Lundi 19 avril 2016

Depuis 5 ans le conflit syrien est au cœur de l’actualité. Pour en parler, la plupart des médias se contentent de reprendre les dépêches de l’Agence France presse, qui s’appuient sur les communiqués de l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), une officine très controversée. 

Alors pour tenter de comprendre la réalité, trois membres  de la rédaction de Breizh-info ont séjourné en Syrie, où ils se sont rendus avec le concours de l’association de solidarité France-Syrie (contact : syrianafrance@gmail.com). Ce voyage d’une semaine s’est entièrement déroulé dans la partie du pays sous contrôle du gouvernement légal. De Damas à Lattaquié, notre équipe est allée à la rencontre de la population : combattants, victimes de guerre, déplacés, chrétiens, musulmans, religieux,  mères de famille, enfants, universitaires, industriels, artisans, commerçants, agriculteurs… Sans préjugés ni tabous, récit d’un voyage dans un pays en guerre. 

De Lattaquié au monastère de Qara

Dans les ruines d’Ougarit, désertées par les touristes

Arrivés à Lattaquié après voir traversé la montagne où est installée la communauté alaouite, nous nous installons dans notre hôtel situé au bord de la mer, au nord de la ville. Si les touristes sont absents, on remarque vite la présence de Russes. Après le déjeuner, nous visitons le site  d’Ougarit à Ras Shamra dans une ville moderne au nord de Lattaquié. Ce sont des archéologues français qui le découvrirent et entreprirent les fouilles de  1930 à 1970. Ils en ont  dégagé les principaux monuments, le palais royal qui comportait des dizaines de salles de réception, la cour d’honneur , des entrepôts et aussi des quartiers d’habitation. L’architecture de la cité était essentiellement faite en pierre, ce qui a assuré une bonne conservation de tout le bâti, et donne à ce site un attrait non négligeable. La technique de construction est assez semblable à celle des villes mycéniennes. Les fouilles de ce site ont permis de découvrir une abondante documentation en tablettes cunéiforme. Elles  sont écrites dans une langue dite « ougaritique » considérée comme la plus ancienne écriture alphabétique connue à ce jour. Seul un sixième du site à été dégagé. alors qu’elle connaissait une prospérité sans précédent, Ougarit sera détruite vers – 1200 avant notre ère sous l’assaut des peuples de la mer.

Quoique protégé, le site est fouillé de manière clandestine depuis le début du conflit. Il  a fait l’objet par l’UNESCO d’une inscription sur la liste du patrimoine en péril en juin 2013. A la fin de la visite nous faisons  halte dans un café boutique situé en face de l’entrée du site. Son patron nous accueille en français avec chaleur.  Ougarit n’est plus guère visité. Avec le conflit, les touristes sont aux abonnés absents. « Quand les archéologues français vont-ils revenir ? » nous demande-t-il. Bonne question.

A Lattaquié, les alliés russes sont bien présents  

Premier port de Syrie, Lattaquié  est une ville moderne, sans charme particulier, avec une population en majorité chrétienne et alaouite. Depuis le début du conflit, celle-ci a doublé avec l’installation de près d’un demi-million de déplacés originaires d’Alep et de Homs. Nous passerons devant l’université où, en novembre 2015, deux missiles lancés par les terroriste sont fait 20 morts et des dizaines de blessés.

Depuis octobre 2015, l’aéroport de Lattaquié sert de base à l’aviation russe  qui effectue – avec le succès que l’on sait – des frappes aériennes contre les positions de Daech et des djihadiste affiliés à Al-Qaïda du Front al-Nosra.

La présence des Russes est visible dans la ville. Nous en croiserons plusieurs dans notre hôtel situé dans le quartier de Chaati al-Azrak, seule station balnéaire de Syrie.

Nous rencontrerons le bureau d’une association féminine de soutien aux combattants et aux martyrs. Son objet est d’apporter une aide matérielle en s’occupant en particulier de l’intendance. Sa devise est  » Vivre ensemble  » car leur ambition est de retrouver l’harmonie qui existait jusqu’en 2011 entre tous les Syriens, quelle que soit leur appartenance ethno-religieuse.

Étape à Tartous « La capitale des martyrs »

Tartous. L’ancienne cathédrale Notre-Dame abrite aujourd’hui un musée
Tartous. Un palais sur le front de mer

Après avoir quitté Lattaquié en début de matinée, nous faisons route vers Tartous en suivant  le littoral. La ville se situe à 30 km an Nord de la frontière libanaise. Elle est peuplée de 100 000 habitants en majorité alaouite. Tartous est nommée La capitale des martyrs. Elle a donné un lourd tribut à la guerre, comptant le plus fort ratio de victimes dans l’armée et la milice depuis 2011.

Cité touristique et balnéaire, Tartous est aussi  un port qui abrite une importante base russe. C’est une installation permanente de la flotte maritime militaire russe depuis 1971, la seule en Méditerranée.

Nous faisons halte dans la vieille ville devant la cathédrale Notre Dame qui date du XIIIème siècle. Transformée en mosquée, elle abrite aujourd’hui un musée archéologique.

Rejoints par un guide local,nous nous promenons dans le centre ancien et sur le front de mer où d’importants travaux de restauration ont été entrepris  avant le déjeuner. 

Le monastère de Qara

Ce monastère, consacré à saint Jacques, date du sixième siècle. Il a joué un rôle important dans la région jusqu’en 1720 avant de décliner jusqu’à disparaître en 1930. En 1993, Mère Agnès Mariam de la Croix en découvre les ruines et décide de le reconstruire. Elle trouve des financements en Europe et en Syrie et réussit son pari de lui redonner vie. Aujourd’hui, ce carmel compte huit sœurs et 3 frères. Ils recueillent des orphelins, les éduquent et leur donnent une formation. Mère Agnès est connue entre autre pour avoir intercédé auprès du gouvernement afin d’obtenir des visas pour les journalistes. Elle estime en effet que ceux qui ne viennent pas sur le terrain ne font pas leur travail et qu’ils ne respectent pas la charte de Munich…
La communauté du monastère de Saint Jacques, à Qara.
Un havre de paix au milieu du conflit syrien

Pour arriver au monastère, il nous faudra emprunter un car local pour ne pas attirer l’attention. Le coin demeure sensible. Sœur Claire Marie, la religieuse qui nous reçoit et nous fait visiter les lieux, est originaire de Nort sur Erdre en Loire Atlantique. Les djihadistes  ont occupé  le village voisin pendant deux ans. Ils ont tourné à de multiples reprises autour du monastère sans y pénétrer. Aussi, les membres de la communauté, qui sont toujours restés sur place, se considèrent comme des miraculés.

(à suivre)

Précédemment :

Un pays en guerre
De Seydnaya à Maaloula, aux sources des chrétiens d’Orient
Homs, ville martyre

A Hama, ville sunnite, le calme règne
Sur le front

(à suivre)

Crédit photos : Breizh-info.com ( mention obligatoire)
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Source: Breizh-info
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