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24 avril 2024

LA BATAILLE DE L’OR BLEU – L’eau dans le Machrek et le Maghreb


France-Irak Actualité : actualités sur l’Irak, le Proche-Orient, du Golfe à l’Atlantique

Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak, au Proche-Orient, du Golfe à l’Atlantique. Traduction d’articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne, enquêtes et informations exclusives.

France-Irak Actualité : actualités sur l’Irak, le Proche-Orient, du Golfe à l’Atlantique

Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak, au Proche-Orient, du Golfe à l’Atlantique. Traduction d’articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne, enquêtes et informations exclusives.

Publié par Gilles Munier sur 28 Septembre 2018, 07:45am

Catégories : #Irak, #Syrie, #Palestine, #Israël, #Liban, #Turquie, #Iran, #Machrek, #Maghreb

Par Georges Amine Lebbos (revue de presse : Crésus – 25/9/18)

Coulant dans une région aride et semi-aride les cours d’eau du Moyen-Orient sont très convoités. La tentation de les exploiter au seul profit des économies nationales et l’absence d’un climat politique et idéologique propice à la coopération, favorisent incontestablement les actions unilatérales menées par les Etats en amont pour aménager les sections de cours d’eau relevant de leur souveraineté. Cette situation est aggravée par une ambigüité juridique et l’absence d’un régime uniforme qui organise le partage de l’eau des fleuves ou des nappes souterraine entre deux ou plusieurs états riverains.

Crésus, hebdomadaire économique algérien

en langue française.

La notion de fleuve international : une évolution constante  

Traditionnellement les fleuves internationaux sont définis comme étant des cours d’eau qui dans leur cours naturellement navigable séparent ou traversent des territoires dépendant de deux ou plusieurs états. Ces cours d’eau sont appelés successifs lorsqu’ils traversent deux ou plusieurs Etats et contigus lorsqu’ils séparent deux ou plusieurs Etats.

Cette définition des fleuves internationaux ne tenait compte que de la navigation qui était alors considérée comme leur mode d’utilisation exclusive à tel point que le droit conventionnel en la matière se confondait avec le droit conventionnel de la navigation fluviale.

La navigation allait perdre son exclusivité en tant que fonction économique des « voies d’eau d’intérêt international » à l’issue de la conférence de Barcelone. Certes, la navigation est toujours prise en considération mais d’autres usages sont également prévus. C’est ainsi que le paragraphe 6 de l’article 10 du statut de la convention de Barcelone stipule, à titre exceptionnel il est vrai, « que si un état justifie d’un intérêt économique manifestement supérieur à celui de la navigation, il peut en disposer » ainsi donc une évolution dans la définition était nécessaire compte tenu du progrès technique.

Cette évolution s’est confirmée avec le temps ; la navigation n’est plus qu’un mode d’utilisation parmi d’autres. Cette remise en cause de la conception classique du fleuve international avec la primauté donnée à la navigation a entraîné l’élaboration doctrinale de la notion de bassin (une zone qui s’étend, en plus du cours d’eau en question, aux affluents et aux sous-affluents et même aux eaux souterraines.

Les utilisations des ressources en eau sont aujourd’hui nombreuses et complexes et les problèmes qu’elles soulèvent ne peuvent pas être envisagés de façon isolée, c’est pourquoi le droit actuel des ressources en eau développe une conception unifiée des bassins hydrographiques internationaux. Cette approche vise une exploitation au maximum du potentiel des ressources en eau du bassin en débordant le cours de la voie principale. Cette utilisation optimale de l’ensemble des ressources en eau du bassin est appelée « théorie du bassin intégré ». Cette théorie d’origine doctrinale a été développée au sein de l’association de droit international. La réflexion amorcée lors de la réunion de Dubrovnik en 1956 a été élaborée à la session de New-York en 1958 où l’Association adopta le principe selon lequel « les cours d’eau et les lacs qui constituent une aire de drainage doivent être considérés non pas isolément mais comme un tout intégré. Ces réflexions seront confirmées par les règles d’Helsinki » en 1966 qui apparaissent comme la synthèse juridique de longs travaux menés par l’association sur les problèmes hydrauliques qui se posent en droit international. Le fondement de la théorie du bassin intégré repose sur l’utilisation complète et intégrale des ressources et des possibilités du bassin géographique à des fins multiples et dans une perspective d’intégration économique.

La dimension économique de la théorie du bassin intégré est celle d’un aménagement optimum du bassin que les négociateur de la convention  relative à aménagement  des forces hydrauliques intéressant plusieurs états (Genève , 9 décembre 1923) avaient bien perçu dans le cadre de l’utilisation hydro électrique les voies d’eau internationales « une exploitation aussi intensive que possible des ressources du bassin considéré « abstraction faite de toute frontière politique » l’objectif  d’un tel aménagement est de tirer  le meilleur parti de l’utilisation maximale et du développement de toutes les portions du cours d’eau cet aménagement rationalisé était en pratique assez mal reçu chaque état cherchant à réserver les sections de ses cours à son propre usage il était néanmoins apte à résoudre les difficultés les plus importantes en la matière

En ce qui concerne la dimension géographique du bassin une évolution relative à l’étendue physique de la notion de bassin fluvial devait se produire jugée trop restrictive géographiquement car liée aux eaux de surface la notion de bassin fluvial a toutefois évolué vers des notions voisines qui renvoient désormais à tout le complexe constitué par le cours d’eau principal et ses affluent et se référent non seulement aux eaux de surface mais également aux eaux souterraines qui forment ensemble un tout unifié.

Une application arbitraire du droit au moyen orient  

L’utilisation des cours d’eau au moyen orient est toujours suspendue à des impératifs de caractère politique et il est assez rare que les comportements étatiques dans cette région se définissent en fonction de principes directeurs  plus ou moins ambigus du droit international fluvial or dans une perspective de pénurie et en présence d’une ambiguïté juridique l’état en amont fait jouer son avantage sur les riverains en aval ou alors c’est l’état le plus puissant qui dicte sa loi.

Le découpage territorial qui a suivi la qui a suivi la dislocation de l’empire ottoman mit fin à l’unité politique des bassins du Jourdain et de l’Euphrate qui relèvent désormais de plusieurs souverainetés

L’exemple des aménagements projetés par la Turquie sur l’Euphrate apparaît le plus significatif dans l’hypothèse  ou la Turquie réaliserait  la totalité  des prélèvements qu’elle envisage le débit restant à disposition de la Syrie serait réduit de 30 à 40 %

Et lorsque la Turquie et la Syrie auraient prélevé l’une et l’autre  dans l’Euphrate la quantité d’eau nécessaire à leurs besoins le débit serait réduit pour l’Irak de un huitième  à un quart environ  de ce  qu’il reçoit actuellement .

D’une manière générale, les États sont tenus d’empêcher les activités exercées dans les limites de leur juridiction de causer des dommages sur les territoires d’autres États. L’institut de Droit international, à sa session de Madrid en 1991, apportait quelques limitations concrètes à la souveraineté de l’État en amont, parmi lesquels l’interdiction de prélever des quantités d’eau tel que le caractère utilisable et le caractère essentiel du cours d’eau, à son arrivée sur le territoire en aval, s’en trouvent gravement modifiés. Il est généralement admis que le préjudice causé doit avoir une certaine importance de nuisance sur le pays situé en aval et que les effets négatifs  mineurs doivent être interprétés  par l’État en aval comme conséquences des incommodités  inhérentes au voisinage. La difficulté en la matière réside dans le choix de critères objectifs permettant de qualifier le dommage et de déterminer le seuil à partir duquel un dommage ne pourrait être toléré. Deux cas nous intéressent et ils sont fréquents au Moyen-Orient : d’une part, le cas où la diminution du volume d’eau disponible en aval dérive d’une dérivation du cours d’eau ; d’autre part, le cas où la baisse du niveau du cours  d’eau a pour origine une utilisation excessive des eaux par l’État en amont.

A suivre…

*Source : Crésus.dz (PDF – article p.12)  ou Crésus.dz

Sur le même sujet, lire aussi :

Guerre de l’eau au Pays des deux fleuves

Le réchauffement climatique aggrave la situation au Moyen-Orient

Guerre de l’eau turco-syrienne : 7 millions de Syriens menacés

L’hydro-apartheid israélien maintient la Cisjordanie assoiffée

Comment et dans quel but Israël «vole» des nuages à l’Iran?

Publié par Gilles Munier sur 28 Septembre 2018, 07:45am

Catégories : #Irak, #Syrie, #Palestine, #Israël, #Liban, #Turquie, #Iran, #Machrek, #Maghreb

Par Georges Amine Lebbos (revue de presse : Crésus – 25/9/18)

Coulant dans une région aride et semi-aride les cours d’eau du Moyen-Orient sont très convoités. La tentation de les exploiter au seul profit des économies nationales et l’absence d’un climat politique et idéologique propice à la coopération, favorisent incontestablement les actions unilatérales menées par les Etats en amont pour aménager les sections de cours d’eau relevant de leur souveraineté. Cette situation est aggravée par une ambigüité juridique et l’absence d’un régime uniforme qui organise le partage de l’eau des fleuves ou des nappes souterraine entre deux ou plusieurs états riverains.

Crésus, hebdomadaire économique algérien

en langue française.

La notion de fleuve international : une évolution constante  

Traditionnellement les fleuves internationaux sont définis comme étant des cours d’eau qui dans leur cours naturellement navigable séparent ou traversent des territoires dépendant de deux ou plusieurs états. Ces cours d’eau sont appelés successifs lorsqu’ils traversent deux ou plusieurs Etats et contigus lorsqu’ils séparent deux ou plusieurs Etats.

Cette définition des fleuves internationaux ne tenait compte que de la navigation qui était alors considérée comme leur mode d’utilisation exclusive à tel point que le droit conventionnel en la matière se confondait avec le droit conventionnel de la navigation fluviale.

La navigation allait perdre son exclusivité en tant que fonction économique des « voies d’eau d’intérêt international » à l’issue de la conférence de Barcelone. Certes, la navigation est toujours prise en considération mais d’autres usages sont également prévus. C’est ainsi que le paragraphe 6 de l’article 10 du statut de la convention de Barcelone stipule, à titre exceptionnel il est vrai, « que si un état justifie d’un intérêt économique manifestement supérieur à celui de la navigation, il peut en disposer » ainsi donc une évolution dans la définition était nécessaire compte tenu du progrès technique.

Cette évolution s’est confirmée avec le temps ; la navigation n’est plus qu’un mode d’utilisation parmi d’autres. Cette remise en cause de la conception classique du fleuve international avec la primauté donnée à la navigation a entraîné l’élaboration doctrinale de la notion de bassin (une zone qui s’étend, en plus du cours d’eau en question, aux affluents et aux sous-affluents et même aux eaux souterraines.

Les utilisations des ressources en eau sont aujourd’hui nombreuses et complexes et les problèmes qu’elles soulèvent ne peuvent pas être envisagés de façon isolée, c’est pourquoi le droit actuel des ressources en eau développe une conception unifiée des bassins hydrographiques internationaux. Cette approche vise une exploitation au maximum du potentiel des ressources en eau du bassin en débordant le cours de la voie principale. Cette utilisation optimale de l’ensemble des ressources en eau du bassin est appelée « théorie du bassin intégré ». Cette théorie d’origine doctrinale a été développée au sein de l’association de droit international. La réflexion amorcée lors de la réunion de Dubrovnik en 1956 a été élaborée à la session de New-York en 1958 où l’Association adopta le principe selon lequel « les cours d’eau et les lacs qui constituent une aire de drainage doivent être considérés non pas isolément mais comme un tout intégré. Ces réflexions seront confirmées par les règles d’Helsinki » en 1966 qui apparaissent comme la synthèse juridique de longs travaux menés par l’association sur les problèmes hydrauliques qui se posent en droit international. Le fondement de la théorie du bassin intégré repose sur l’utilisation complète et intégrale des ressources et des possibilités du bassin géographique à des fins multiples et dans une perspective d’intégration économique.

La dimension économique de la théorie du bassin intégré est celle d’un aménagement optimum du bassin que les négociateur de la convention  relative à aménagement  des forces hydrauliques intéressant plusieurs états (Genève , 9 décembre 1923) avaient bien perçu dans le cadre de l’utilisation hydro électrique les voies d’eau internationales « une exploitation aussi intensive que possible des ressources du bassin considéré « abstraction faite de toute frontière politique » l’objectif  d’un tel aménagement est de tirer  le meilleur parti de l’utilisation maximale et du développement de toutes les portions du cours d’eau cet aménagement rationalisé était en pratique assez mal reçu chaque état cherchant à réserver les sections de ses cours à son propre usage il était néanmoins apte à résoudre les difficultés les plus importantes en la matière

En ce qui concerne la dimension géographique du bassin une évolution relative à l’étendue physique de la notion de bassin fluvial devait se produire jugée trop restrictive géographiquement car liée aux eaux de surface la notion de bassin fluvial a toutefois évolué vers des notions voisines qui renvoient désormais à tout le complexe constitué par le cours d’eau principal et ses affluent et se référent non seulement aux eaux de surface mais également aux eaux souterraines qui forment ensemble un tout unifié.

Une application arbitraire du droit au moyen orient  

L’utilisation des cours d’eau au moyen orient est toujours suspendue à des impératifs de caractère politique et il est assez rare que les comportements étatiques dans cette région se définissent en fonction de principes directeurs  plus ou moins ambigus du droit international fluvial or dans une perspective de pénurie et en présence d’une ambiguïté juridique l’état en amont fait jouer son avantage sur les riverains en aval ou alors c’est l’état le plus puissant qui dicte sa loi.

Le découpage territorial qui a suivi la qui a suivi la dislocation de l’empire ottoman mit fin à l’unité politique des bassins du Jourdain et de l’Euphrate qui relèvent désormais de plusieurs souverainetés

L’exemple des aménagements projetés par la Turquie sur l’Euphrate apparaît le plus significatif dans l’hypothèse  ou la Turquie réaliserait  la totalité  des prélèvements qu’elle envisage le débit restant à disposition de la Syrie serait réduit de 30 à 40 %

Et lorsque la Turquie et la Syrie auraient prélevé l’une et l’autre  dans l’Euphrate la quantité d’eau nécessaire à leurs besoins le débit serait réduit pour l’Irak de un huitième  à un quart environ  de ce  qu’il reçoit actuellement .

D’une manière générale, les États sont tenus d’empêcher les activités exercées dans les limites de leur juridiction de causer des dommages sur les territoires d’autres États. L’institut de Droit international, à sa session de Madrid en 1991, apportait quelques limitations concrètes à la souveraineté de l’État en amont, parmi lesquels l’interdiction de prélever des quantités d’eau tel que le caractère utilisable et le caractère essentiel du cours d’eau, à son arrivée sur le territoire en aval, s’en trouvent gravement modifiés. Il est généralement admis que le préjudice causé doit avoir une certaine importance de nuisance sur le pays situé en aval et que les effets négatifs  mineurs doivent être interprétés  par l’État en aval comme conséquences des incommodités  inhérentes au voisinage. La difficulté en la matière réside dans le choix de critères objectifs permettant de qualifier le dommage et de déterminer le seuil à partir duquel un dommage ne pourrait être toléré. Deux cas nous intéressent et ils sont fréquents au Moyen-Orient : d’une part, le cas où la diminution du volume d’eau disponible en aval dérive d’une dérivation du cours d’eau ; d’autre part, le cas où la baisse du niveau du cours  d’eau a pour origine une utilisation excessive des eaux par l’État en amont.

A suivre…

*Source : Crésus.dz (PDF – article p.12)  ou Crésus.dz

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