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28 mars 2024

Colonies : Une nostalgie française ?


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Franck Nda à AFRIQUE MON AFRIQUE

QUAND ‘’VALEURS ACTUELLES’’ CÉLÈBRE LA COLONISATION

‘’Valeurs Actuelles’’, le magazine d’actualité hebdomadaire français, créé en 1966 par Raymond Bourgine en reprenant le contenu de l’hebdomadaire Finances, qui était essentiellement une revue d’information boursière a célébré dans un hors-série, publié en avril 2018, les bienfaits de la colonisation. Cette célébration est la preuve qu’il existe encore des mentalités dans le déni. Un numéro hors-série, au contenu désolant, intitulé « La vraie histoire des colonies ».

Dans un article titré ‘’Colonies, une nostalgie française’’ publiée le 03 avril, Léo Pajon, journaliste pour la section culture de jeune Afrique, décortique la publication du magazine Valeurs Actuelles.

Le magazine Valeurs Actuelles a sorti un hors-série de 132 pages en avril 2018. En titre, on pouvait lire ‘’La vraie histoire des colonies’’. Là où on devrait s’attendre à lire 132 pages de dénonciation et de critique de la colonisation, on voit en légende : « Des pionniers du Nouveau Monde aux larmes de l’Algérie française… Quatre siècles d’épopée coloniale. Dont la France n’a pas à se repentir. ». La publication vendue en kiosque faisait les éloges des ‘’magnifiques résultats de la colonisation française’’. Dans le chapitre réservé à l’Afrique, plusieurs articles nous expliquent que la France a contribué à l’élévation de l’Afrique en soignant, enseignant, cultivant et bâtissant le continent.

Bernard Lugan, historien français, proche de l’extrême droite, qui entame le premier chapitre avec ‘’le bilan positif de la France’’. Dans le hors-série, Lugan essai de montrer que les bénéfices économiques de l’aventure coloniale ont été bien faibles en s’appuyant sur des chiffres. Pour lui, il faut en finir avec la honte française imprégnée dans les esprits par des slogans culpabilisateurs. Il illustre ses propos avec l’ouvrage de l’universitaire Jacques Marseille : empire colonial et capitalisme français (Albin Michel).

Plutôt, que de déplorer le coté meurtrier de la colonisation, Lugan se vocalise sur la France qui « a considérablement investi », « le plus souvent à son détriment ». Il va même jusqu’à faire un encadré célébrant « la France bienfaitrice à Madagascar » où elle aurait laissé « un héritage exceptionnel.»

L’horreur et la bêtise de la démonstration sont moins dans ce qui est écrit que dans ce qui est nié. Que l’on résume la colonisation à un bilan comptable sans prendre en compte les dommages humains qu’elle a causé. Que l’on évoque ensuite les Africains tombés pour la France sans parler du massacre de Thiaroye, ces tirailleurs sénégalais massacrés en 1944 parce qu’ils osaient réclamer le paiement de leurs indemnités. Que l’on glose plus loin sur « le Sahara, trésor français », sans parler des essais nucléaires qui y ont été pratiqués, et dont les conséquences sur les populations et l’environnement restent encore inconnues.

Que l’on puisse célébrer enfin la présence française à Madagascar alors qu’un système d’apartheid y était maintenu, où deux systèmes d’enseignement, de santé et de justice cohabitaient pour les indigènes et les « vazaha » («étrangers »). Un pays, surtout, ou la révolte de 1947 a été écrasée avec une violence inouïe, occasionnant des dizaines de milliers de morts (entre 30 000 et 40 000, selon l’historien Jean Fremigacci) et des épisodes atroces. Tels ces rebelles enfermés de longues heures dans des wagons à bestiaux, dans la région de Moramanga, avant que les troupes françaises mitraillent le convoi. Tels ces prisonniers jetés vivants d’un avion en vol au-dessus d’un village par l’officier français Guillaume de Fontanges !

On pourrait penser que le hors-série de Valeurs Actuelles est anecdotique, qu’il ne s’adresse qu’à une frange infime de nostalgiques. On pourrait aussi se dire qu’il est à contre-courant d’un mouvement plus ample, reconnaissant la barbarie coloniale. En visite à Alger le 15 février 2017, Emmanuel Macron, alors candidat à l’élection présidentielle, n’a-t-il pas vu dans la colonisation « un crime contre l’humanité » ?

Mais tant que les manuels scolaires français seront dans le déni, tant que les pratiques les plus inhumaines de la République (l’esclavage, le travail forcé, la torture…) seront éclipsés par les « bienfaits » français ; tant que des statues comme celles de thomas Roberts Bugeaud ‘’ pacificateur’’ de l’Algérie qui proposait d’enfumer « comme des renards » ceux qui se réfugiaient dans les grottes, se dresseront sans débat dans les rues de nos villes ; tant, donc, que l’histoire des colonisés ne sera pas prise en compte, il faudra la rappeler encore et encore.

KHOUDIA GAYE
Negronews

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