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29 mars 2024

Tragédies africaines


Tragédies africaines

Publié le 12 octobre 2013par 

Refugiés africains

Le Messager

 

Jadis, les Africains étaient traqués, arrêtés, traités comme des bestiaux, parqués dans les cales des bateaux pour être vendus aux Amériques et ailleurs.

C’était l’esclavage. Après la traite vint la colonisation. Les Européens se sont partagés des pans entiers de l’Afrique pour en faire leurs possessions, pourvoyeuses de matières premières. Puis arrivera le néocolonialisme sous la couverture des indépendances.

Ce vocable n’étant qu’un doux euphémisme d’une nouvelle tragédie des peuples africains. Les Européens vont placer à la tête des Etats africains des satrapes qui perpétuent l’exploitation des richesses du continent pour les Européens et de plus en plus pour les Asiatiques. Pendant ce temps, les Africains croupissent sous une misère endémique qui contraint des milliers d’entre eux vers l’exil.

L’Europe, de l’autre rive de la Méditerranée s’avère être la terre de Cocagne où les damnés de l’Afrique espèrent  trouver ce que les terres de leurs ancêtres n’arrivent pas à leur donner. Aussi c’est par milliers que jeunes et adultes, hommes et femmes cherchent à braver le Sahara et la Méditerranée  pour se retrouver dans ces pays où tout semble facile : des emplois qui les attendent avec des salaires mirobolants. Chimérique que tout cela.

L’Europe pour laquelle se sont battus nos parents et grands parents pendant les deux grandes guerres perpétrées par des Européens entre eux n’a plus tant besoin de la « racaille » africaine et, elle fait tout pour la maintenir le plus loin possible de ses frontières.A Ceuta et Melila, les Européens ont érigé une muraille.De l’autre côté, au large de l’Italie, Lampedusa est devenue l’enclos où s’achève l’aventure vers le nouveau paradis terrestre.

Les mots ne me semblent pas assez forts pour parler de la dernière tragédie de Lampedusa, cette île italienne incrustée entre Malte, la Sicile et la Tunisie.Lampedusa est depuis quelques années déjà l’une des portes d’entrée de l’El dorado européen pour la jeunesse africaine désespérée et désemparée. Le cimetière de milliers de victimes de ces embarcations  de fortune et d’une mer qui, depuis une  vingtaine d’années a englouti 17 000  desesperados – officiellement – qui n’auront jamais atteint le paradis européen.

Le dernier naufrage en date, celui du 3 octobre a abondamment noirci les colonnes des gazettes des deux côtés de la Méditerranée. Sur quelque 500 boat people, on a pu repêcher 155 rescapés, plus de 300 morts, ou portés disparus. Le bilan est si lourd que l’Europe politique, fortement émue, a dû donner de la voix dans la perspective d’arrêter l’hécatombe. Alors qu’en face, c’est  le silence le plus implacable dans le continent d’origine des naufragés, notamment des Erythréens et des Somaliens. Autant les gouvernements africains restent curieusement muets, autant la panafricaine association des chefs d’Etat est restée sans voix une semaine après ce naufrage qui a fait dire à Mme Giusi Nicolini, le maire de Lampedusa qu’ « on n’a plus de place ni pour les vivants ni pour les morts ».

Quand on sait que devant le flux davantage croissant de la « négraille » les Européens multiplient des stratagèmes pour, autant que faire ce peut, réduire la déferlante humaine, on peine à comprendre l’attitude des dirigeants africains qui ne semblent point se soucier du suicide volontaire et collectif des leurs en proie à la misère. Et pourtant, il leur suffit de dire à leurs  homologues européens de s’asseoir pour examiner les contours de ces contrats léonins qui concernent nos matières premières et notre environnement. En fait, les Occidentaux  ne peuvent que s’émouvoir (par hypocrisie ?) du drame qui se joue des années durant sous les murailles de leurs forteresses. Pas plus.

Dans « Sans Tricher » l’un de ses récents ouvrages, la Franco-norvégienne Eva Joly démontre avec force détails comment les Occidentaux pillent les ressources du Tiers-Monde, en saccageant l’environnement au point de mettre en péril la santé et la vie des peuples. Prenant entre mille exemples, celui des dégâts environnementaux dans le delta du Niger, au Nigeria, dégâts imputables aux grandes compagnies pétrolières que sont Shell, Total ou Eni. Ces dernières exploitent le pétrole dans ce delta depuis les années 70.

Dans l’intervalle, révèle Eva Joly, « la mortalité infantile a augmenté, l’espérance de vie a baissé, le taux de pauvreté est passé de 30 % à 70 %.. Les experts évaluent à 500  milliards de dollars l’ensemble  des recettes pétrolières. Dans le même temps, les autorités nigérianes ont recensé… 7000  marées noires. Wwf, une Ong internationale évalue à cinq millions de tonnes la quantité  de  brut qui s’est déversé dans les eaux du delta, l’un des dix plus importants écosystèmes humides du monde ».

Simultanément, martèle Eva Joly, les habitants ont vu leurs droits fondamentaux violés par les compagnies pétrolières. Celles-ci font du flairing, c’est-à-dire brûlent le gaz au-dessus des puits, ce qui provoque d’intenses élévations de chaleur et une dramatique pollution de l’air. Comme d’énormes pipelines traversent, à ciel ouvert, le paysage, on estime à 15 % le pourcentage de brut volé par piratage sur ces pipelines , soit 350 000 barils par jour.Ces  prélèvements, sources d’accidents, sont meurtriers, et révèlent un degré de corruption inimaginable. La réglementation anti-corruption, celle de l’Ocde et de l’Onu n’est jamais appliquée.Il n’y a pas eu de procédures dignes de ce nom engagées contre la corruption et la pollution industrielle.

Une compagnie comme la Shell  qui, bénéficie d’un régime fiscal très avantageux, emploie en outre une armée d’avocats fiscalistes. De leur côté, les officiels nigérians, à en croire Eva Joly, se cantonnent à un discours vindicatif, anticolonialiste en refusant de se reconnaître la moindre responsabilité.

Il en est de même du Fmi qui dispose d’une batterie d’experts qui, aux dires de l’auteure de « Sans tricher », ne sont pas des « stagiaires inattentifs ». Ils épousent l’idéologie dominante. Suivez mon regard. Les économistes du Fmi pensent, de bonne foi,  que la meilleure façon d’accélérer  le développement dans le Sud, c’est de faire venir des sociétés en quête d’uranium par exemple, en leur offrant les conditions les plus avantageuses possibles : par exemple 3 % seulement de royalties à verser au pays qui produit le minerai et une exonération fiscale pendant 10 ans.

Ainsi, un homme d’Etat corrompu peut passer des contrats engageant pour des décennies la vie de son pays et la gestion de ses ressources futures. Il y trouve un bénéfice personnel. La multinationale donne, en sous-main, 500 millions de dollars à l’homme corrompu et obtient en retour un droit   de pillage quasi illimité. L’argent des Africains file à Londres, à Paris ou à Bruxelles. Depuis 50 ans, les biens mal acquis par la corruption  prospèrent à la City, à Paris, à Genève. Dans les paradis fiscaux.

La bataille qui oppose en ce moment  le milliardaire franco-israélien Beny Steinmetz et le président guinéen Alpha Condé illustre au plus haut point comment les richesses de nos pays sont spoliés et le péril auquel peuvent s’exposer ceux des patriotes africains déterminés à obtenir  le juste prix de nos produits de base. Pour nos « partenaires », pas question.

A titre d’illustration, la hargne et le déterminisme du Franco-israélien Beny Steinmetz qui, parlant du président Alpha Condé vocifère en ces termes : « il connaît mal les Israéliens. Ce n’est pas fini. Nous ne rendrons pas ces concessions ». On n’est quand même pas à Gaza, ni en Cisjordanie ou dans une terre conquise militairement par Tsahal. Il s’agit d’un gisement de fer logé dans le sous-sol guinéen. En Guinée. Un gisement concédé à Beny Steinmetz pour moins qu’une bouchée de mil.

Quand les Occidentaux s’emparent ainsi de nos ressources avec la complicité active de  nos dirigeants corrompus, ils nous exigent le beurre, l’argent du beurre et la main de la crémière. Et quand les enfants de cette dernière,  miséreux et affamés vont frapper aux portes de l’Occident pour quêter pitance, on érige des murailles. Pour offrir de la chair de nègres et de basanés en ripailles aux requins. Trop de tragédies pour l’Afrique !

Doo Bell

http://www.cameroonvoice.com/news/article-news-12848.html

 

 

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