Le génie africain
5 avril 2015
Le génie africain
par Bainville – samedi 4 avril 2015
Aujourd’hui, en France, le droit supplémente l’action et la perspective. La privatisation de l’action politique passe par cette normalisation à outrance en bas et jusque dans les détails de la vie des hommes et la corruption, en haut, dont le régime républicain est un familier, substituant l’essence du politique : « l’art des possibles ». On comprend mieux l’hostilité de toute l’élite décadente de nos belles contrées envers le régime libyen ; une hostilité qui est même, au-delà de ce cas particulier, envers toute forme de bon sens.
Il est, parmi la multitude des hommes, des figures qui ouvrent les esprits et œuvrent pour la liberté.
Kadhafi représentait un véritable monarque africain, au sens le plus noble, allégorie de tout son peuple, imposant aux ingérences étrangères la force de son autorité. Il fut, pour une grande partie de l’Afrique, le représentant de l’avenir du continent, refoulant des dissensions intérieures inévitables car inhérentes de l’histoire africaine. Histoire d’ethnies et de tribus, parfois de royaumes, jamais de nations. Tel est le message politique que portait, et porte toujours ce colonel farouche : les nations africaines étaient peut-être fragiles, sinon chimériques, mais la stabilité et la souveraineté obtenues par l’indépendance pourraient créer ce sentiment national ; car les grandes puissances d’argent se nourrissent des tensions entre l’Afrique millénaire et l’Afrique colonial, affaiblissant tout le continent à leur profit.
En quarante années le « guide de la révolution » apporta à sa population le niveau de vie le plus élevé de tout le continent alors qu’elle fut une des plus pauvres au monde. Que ce soit au niveau sanitaire ou sur le plan des infrastructures, la stabilité et la paix qu’apporta Mouammar Kadhafi n’a aucun égal.
Le roi fut tué car il s’était donner les moyens de parvenir à cette puissance nationale, par l’intelligence et le pragmatisme : compromis entre l’esprit africain et les exigences des rapports de force du monde contemporain. Ce sont les moyens importants des forces étrangères dites occidentales qui, jouant sur les sentiments tribaux, mirent fin à cette œuvre.
La situation en Libye nous rappelle que les grandes nations sont le produit de grands régimes et de grands hommes qui se font initiateurs d’un équilibre. Elles ne surgissent pas d’un quelconque miracle, elles sont le fruit de mains d’hommes, de circonstances et d’intelligences qui, par le travail du temps, forment un grand peuple. Ces équilibres sont fragiles et délicats, comparables à l’ordre naturel dans lequel chaque atome participe à l’harmonie.
La chute de Kadhafi a fait ressurgir les dissensions millénaires, les excès récents de l’Islam et du Moyen-Orient, et apporté le chaos dans ce qui fut le germe d’un génie africain du politique. Depuis différentes tribus, coalitions et organisations se disputent les territoires. Nombre d’hommes qui reprirent le flambeau de la grande figure démissionnèrent face à une anarchie qu’ils ne sauraient conjurer.
C’est que la Libye n’est pas seule et que tout le Moyen-Orient est en flammes. La chute d’une puissance c’est la chute de ses frontières et l’abondance de tout ce qui profite du non-droit.
Il y a une voracité, un manque de raison et de clairvoyance, inquiétantes pour l’avenir. Les États-Unis semblent aborder leur politique internationale comme si chaque jour préparait leur effondrement. Leur travail de guerre visible ou en sous-main démontre des excès que l’histoire ne leur pardonnera pas. Nul ne ferait mieux s’il voulait attirer la guerre à nous, car les massacres et les déstabilisations successives resteront dans les mémoires des populations. Il est désormais temps que la grandeur revienne. Il faut que, partout dans le monde, des Saint-Louis et des de Gaulle s’élèvent et œuvrent dans leur territoire respectif à un ordre qui s’étendra au monde.
La priorité est désormais de stabiliser les rapports entre nations pour les futures générations. Les relations qu’entretiennent les grandes puissances avec les pays africains ne peuvent s’inscrire sur ce temps long. Notons que l’État est désormais l’intermédiaire de multinationales dont certains noms apparaissent comme français mais dont l’esprit et les impôts ne le sont plus. Les peuples sont, au nord comme au sud, otages de cette réalité qui va bien au-delà de notre pays. La France a désormais intérêt à arrêter toute ingérence dans les affaires intérieures de quelconque pays. Il faut à notre niveau remettre l’État à sa place et organisait des coopérations et des échanges négociés avec nos partenaires africains. Si nous devons occuper une place dans l’histoire, occupons celle de la droiture et de la raison. Nos gouvernants, en choisissant le chaos aux portes de l’Europe, démontrent que la France n’est plus de leur préoccupation.