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28 décembre 2024

Harraga. L’Empire européen impose ses « limes »


Publié par Saoudi Abdelaziz

Harraga tunisiens en décembre 2012. Photos DR

Harraga tunisiens en décembre 2012. Photos DR

A la rentrée parlementaire de l’automne 2008, l’APN votait une loi criminalisant la harga. Après Kadhafi, le pouvoir algérien se pliait donc aux injonctions occidentales. Parodie de l’histoire de l’Empire romain: après la Libye, l’Algérie acceptait de devenir un des limes protégeant l’Occident de « l’invasion africaine« . En échange de quoi? Le pauvre Kadhafi a eu la récompense que l’on sait… 

A l’époque, le blog avait mis en ligne un article de Philippe Bernard intitule « En Algérie, les émigrants clandestins seront passibles de prison « . Il notait : « On connaissait l’immigration clandestine, c’est-à-dire l’entrée irrégulière dans un pays étranger. Voici l’émigration illégale, autrement dit l’interdiction de quitter son propre pays sous peine de sanction pénale (…) Les pressions exercées par l’Union européenne sur les pays africains pour contrôler les flux migratoires ont remis au goût du jour la pénalisation des départs. Le Maroc, particulièrement coopératif avec l’UE, a adopté en 2003 une loi réprimant sévèrement l’émigration irrégulière. La Tunisie s’est aussi lancée dans la chasse aux « brûleurs », l’équivalent des « harragas ». Le Sénégal se targue d’interpeller les candidats à l’émigration qui tentent de rejoindre les Canaries. Cette politique est considérée par les pays de départ comme une monnaie d’échange pour obtenir des aides ou faire pression sur des négociations commerciales. Ainsi, l’accord sur le règlement du contentieux colonial italo-libyen récemment paraphé par MM. Kadhafi et Berlusconi prévoit-il notamment, en échange de la construction d’une autoroute, une participation libyenne aux patrouilles de surveillance en Méditerranée.

Dans un article du 12 juillet 2013  intitulé ce matin « Mort de harraga : ce que la Marine nationale ne veut pas dire »,  Adlène Meddi écrivait dans El Watan Week-end:« D’autres cas ont été enregistrés au large de Annaba, sans que la lumière soit faite annonce-t-il d’émblée en posant la question : Accident ou nouvelle méthode pour terroriser les migrants clandestins ? ». Il met en rapport l’évènement du 7 juin 2013 avec celui survenu en août 2009 causant la mort d’Ikram Hamza un autre Harrag décédé après une intervention musclée. Ce décès a eu des conséquences, décrite par une sources italien de Cagliari en Sardaigne (destination habituelle des Annabis) « Depuis le 8 août 2009 et l’affaire de ce jeune homme tué suite à une intervention des garde-côtes, les flux de harraga se sont brusquement interrompus». Adlène Meddi conclut: « De là à dire que la méthode libyenne (foncer sans ménagement sur les harraga) a été adoptée chez nous, il n’y a qu’un pas à faire ».

Les choses ont donc suivi leur cours. En octobre 2013, parti des côtes libyennes, un bateau clandestin chargé de 450 à 500 migrants, des Érythréens et des Somaliens, a coulé en vue de Lampedusa après un incendie accidentel. Le bilan estimé est d’environ 300 morts. L’Europe avais mis pourtant en place le fameux dispositif Frontex dont le gouverneur de sicile faisait le bilan après le recensement des 300 morts lors de cette catastrophe : « Où était Frontex jeudi matin ? N’ont-ils pas de radar ? Est-il plausible que personne n’ait vu ce bateau ? Quel genre de contrôle avons-nous si nous ne trouvons les gens que lorsqu’ils sont en train de mourir, si nous n’avons pas assez de radars? » (Frontex est l’agence chargée de coordonner la surveillance des frontières extérieures de l’UE). La maire de Lampedusa, Giusi Nicolini, affirme de son côté : « Notre pays a traduit en justice des pêcheurs et des propriétaires de bateaux qui avaient sauvé des vies et qui ont été accusés d’avoir favorisé une immigration illégale. Le gouvernement doit changer ces normes inhumaines ».

 

POST SPRIPTUM AUDIO

Par Salima Ghezali, sur Medi1

Naufrages, naufragés et naufrageurs

http://www.medi1.com/player/player.php?i=6441499

 

 

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