Cet uranium avait été extrait de la mine de Shinkolobwe (Katanga) et fourni aux États-Unis à partir de septembre 1942 par l’Union minière du Haut Katanga (UMHK), selon le professeur Coolsaet, qui en fait mention dans un livre. Tout comme l’écrivain Luc Barbé dans son ouvrage « België en de bom ». Le reste de l’uranium utilisé par les États-Unis pour leur projet Manhattan provenait du Canada, avait précisé le professeur Coolsaet en 2005 à l’agence Belga lors du 60ème anniversaire de l’explosion de la première bombe A de l’histoire, lors d’un essai baptisé « Trinity », en plein désert du Nouveau-Mexique (sud-ouest des Etats-Unis). Rik Coolsaet, ancien chef de cabinet adjoint au ministère de la Défense et aux Affaires étrangères, est l’auteur d’un ouvrage intitulé « België en zijn buitenlandse politiek, 1830-2000 » (« La Belgique et sa politique étrangère ») paru en octobre 2001 aux éditions Van Halewyck, dans lequel il explique que la fabrication de ces bombes n’a été possible qu’avec la fourniture d’uranium provenant de Shinkolobwe, près de Likasi (Jadotville du temps de la colonisation belge).
Selon lui, les livraisons ont débuté en septembre 1942, quelques mois seulement après que les États-Unis eurent décidé de développer des armes nucléaires par crainte d’un programme similaire en Allemagne. Les mines d’uranium du Katanga (sud-est du Congo) étaient à l’époque les plus importantes et les plus riches au monde. En 1939, un ingénieur belge, Edgar Sengier, alors directeur de la Société Générale et directeur général de l’UMHK, qui avait compris les possibilités futures de l’uranium, avait ordonné en 1939 que la moitié du stock disponible en Afrique, soit un millier de tonnes, soit envoyée en secret à New York, de peur qu’il ne tombe entre des mains ennemies. Sengier lui-même partit pour New York lors du déclenchement de la guerre afin de conduire les opérations mondiales de l’Union Minière pendant l’occupation. Pourtant, l’uranium resta oublié dans un entrepôt de Staten Island. En septembre 1942, le colonel (devenu ensuite général) Kenneth Nichols, qui avait été chargé par le patron du projet Manhattan, le général Leslie Groves, de trouver de l’uranium, rendit visite à M. Sengier à son bureau de New York. L’officier demanda à M. Sengier si l’Union minière pouvait fournir de l’uranium, précisant qu’il comprenait que cette demande serait peut-être difficile à satisfaire rapidement.
La réponse de M. Sengier est entrée dans l’histoire: « vous pouvez avoir le minerai maintenant. Il est à New York, 1.000 tonnes. J’attendais votre visite ». M. Sengier établit immédiatement un contrat de vente et le minerai de Staten Island, sur la rivière Hudson, fut transféré à l’armée américaine qui obtenait en même temps une option sur les 1.000 tonnes encore stockées à Shinkolobwe. Selon le professeur Coolsaet, ce n’est qu’en mars 1944 que le gouvernement belge, alors en exil à Londres, a été – partiellement – informé des contrats passés entre l’Union minière et les Etats-Unis. Ils ne les auraient approuvés qu’en septembre 1944, alors que le projet Manhattan – le développement, dans le plus grand secret de la bombe atomique – était déjà bien lancé, puis qu’il avait débuté en 1943. D’autres sources affirment que les livraisons d’uranium du Congo belge ont représenté 70 à 75% des quantités nécessaires pour la recherche et le développement des premières bombes atomiques et font état de la livraison d’environ 30.000 tonnes de minerai d’uranium et de thorium. A la fin du mois de juin, trois bombes étaient prêtes. Deux d’entre elles, « Little Boy » (à l’uranium) et « Fat Man » (au plutonium), s’apprêtaient à embarquer pour le Pacifique, mais il fallait encore vérifier le bon fonctionnement de l’arme la plus puissante jamais produite. Ce qui s’est produit le 16 juillet à 05h29 et 45 secondes locales à Alamogordo, un lieu-dit au nom prédestiné de « voyage de la mort » et qui fait actuellement partie du White Sands Missile Range, un centre d’essais de l’armée américaine.