Par Gilles Munier/
Le sort de la population martyrisée de Falloujah – estimée aujourd’hui à 300 000 habitants – ne semble plus intéresser grand monde. En 2004, il avait ému l’opinion publique lorsque les troupes américaines ont attaqué la ville sous prétexte de venger la mort de 4 mercenaires de la société Blackwater tués par la résistance irakienne.
Le bilan de l’opération baptisée « Furie fantôme » s’était soldé par la mort de 4000 à 6000 civils, notamment sous des bombes au phosphore blanc interdites par les conventions internationales. En 2005, le Comité de rémunération chargé d’évaluer les dégâts dénombrait la destruction de 36 000 maisons, 9 000 magasins, 65 mosquées 60 écoles, les deux gares, un des deux ponts, deux centrales, trois usines de traitement de l’eau…
Que pouvait-il arrivé de pire ? Aujourd’hui – douze ans plus tard – la ville est de nouveau assiégée, mais cette fois par les troupes du régime de Bagdad, appuyées par des milices chiites ou tribales sunnites pro-américaines, pour la « libérer » de l’emprise de l’Etat islamique qui l’a conquise en 2014.
Selon un rapport d’Human Rights Watch, 140 personnes – dont des enfants et des personnes âgées – sont décédées ces derniers mois faute de nourriture et de médicaments. Une mère se serait suicidée avec ses deux enfants parce qu’elle n’arrivait plus à les nourrir. Toutes les voies d’approvisionnement sont coupées. Les habitants de Falloujah en sont réduits à faire du pain avec des graines de dates et des soupes à base d’herbes. Un sac de 50 kg de farine est vendu 750$, alors qu’il ne coute que 15$ à Bagdad, à 70 km de là.
Des dizaines de milliers d’Irakiens sont pris au piège car l’Etat islamique exécute ceux qui bravent son interdiction de quitter la ville. Un nouveau massacre va se produire: qui s’en soucie?