Avec Hillary Clinton à la Maison-Blanche, une Troisième Guerre mondiale ne tient qu’à un fil
22 avril 2016
Hillary D. Clinton en effet, n’est pas une colombe de la paix, loin s’en faut.
Les Français, qui pourtant devraient se méfier, puisqu’ils ne savent plus comment distinguer (en politique) la gauche de la droite, pourraient être tentés d’appliquer à la politique extérieure américaine la même grille de lecture qui prévaut depuis G.W. Bush : les républicains déclarent la guerre, les démocrates s’efforcent d’y mettre un terme. Ce serait une grave erreur.
Même s’il a inspiré la politique étrangère des États-Unis sous George W. Bush (républicain), le fameux Project for the New American Century (Projet pour le nouveau siècle américain), qui est au cœur de la pensée néoconservatrice et qui prône un interventionnisme à tous crins, ne fait pas partie de l’ADN du Parti républicain.
D’ailleurs, historiquement, interventionnisme et isolationnisme ne sont pas attachés à un parti politique particulier. Lors du premier conflit mondial, Woodrow Wilson (démocrate) était isolationniste et Theodore Roosevelt (républicain) prônait l’intervention. En 1940, les rôles sont inversés : Franklin D. Roosevelt (démocrate) s’était résolu à l’interventionnisme, en opposition frontale avec les républicains, majoritaires au Sénat. À partir de la guerre froide, on observe une alternance entre les deux camps. Lyndon B. Johnson (démocrate) a jeté l’armée américaine à fond dans la guerre du Vietnam et Richard M. Nixon (républicain) y a mis fin.
Mais curieusement, lorsqu’un président plutôt isolationniste occupe la Maison-Blanche, il a presque toujours été flanqué d’un secrétaire d’État (ou de conseillers) farouchement interventionniste : Nixon (républicain) et Kissinger, Carter (démocrate) et Brzeziński, G.W. Bush (républicain) et les neocons, Obama (démocrate) et Hillary Clinton.
Hillary D. Clinton en effet, n’est pas une colombe de la paix, loin s’en faut. Depuis son entrée dans la vie politique comme sénatrice de l’État de New York en janvier 2001, elle a systématiquement pris le parti des faucons, parfois avec une détermination qui fait froid dans le dos (je laisse le lecteur consulter par lui-même sur Internet les nombreuses vidéos qui en attestent, notamment sur les questions du Honduras, de la Libye et, bien sûr, de l’Irak). Tout dernièrement, le soutien que lui a apporté Robert Kagan, néoconservateur pur jus et mari de Victoria Nuland (la « pasionaria blanche ») en dit long sur ses futures intentions.
D’une certaine manière, Mme Clinton tient à la fois des deux grands courants interventionnistes qui traversent la politique américaine de ces trente dernières années, celui incarné par les néoconservateurs et celui incarné par l’auteur du fameux Grand Échiquier précédemment cité 1, les bobos démocrates d’Hollywood apprécieront.
Mais alors, de quel foyer de tensions pourrait venir la catastrophe ?
Sur ce dernier point, il y a hélas peu de place pour le doute. C’est un conflit direct entre l’Iran et l’Arabie saoudite qui, de loin, est le plus à craindre. Ces deux pays ont interrompu leurs relations diplomatiques en 2015 et, on l’oublie, il existe une minorité chiite en Arabie saoudite (12 % de la population) qui est maltraitée, un peu comme les Sudètes autrefois – le lecteur comprendra. Ajoutez-y un prix du baril de pétrole suicidaire pour leurs économies et tous les ingrédients sont sur la table pour entraîner une déflagration (l’Iran n’a-t-il pas boycotté la réunion de Doha ce dernier weekend ?).
Et si, pour provoquer un incident funeste, les Saoudiens n’attendaient qu’une chose, l’élection d’une femme à la Maison-Blanche (quel paradoxe !) mais connue pour faire partie des plus féroces adversaires de l’Iran ? Si j’étais citoyen américain, je ne prendrais pas ce risque-là.
Notes:
- Zbigniew Brzeziński, puisque c’est de lui qu’il s’agit, n’est pas à proprement parler un néoconservateur mais il poursuit le même but qu’eux par d’autres chemins (l’Europe orientale plutôt que le Moyen-Orient) et d’autres moyens (subventions sanctions et négociations plutôt que les bombardements).