Jacky Hénin va saisir le préfet face à la décision de la maire de Calais d’interdire la distribution de repas aux réfugiés
9 mars 2017
Par Laurence Mauriaucourt
Jeudi 2 Mars 2017, sur son compte Facebook, l’ancien maire du Parti Communiste Français (PCF) de Calais, Jacky Hénin, publiait un long texte appelant à résister. Il venait d’apprendre que Natacha Bouchart, maire des Républicains de Calais interdit désormais aux associations de distribuer des repas aux réfugiés. Le responsable du PCF saisira le préfet dès Lundi 6 Mars 2017 pour dénoncer l’illégalité du décret paru.
Au lendemain de la visite du ministre de l’intérieur Bruno Le Roux dans sa ville, la maire de Calais, Natacha Bouchart a signé, Jeudi 2 Mars 2017, un arrêté visant à interdire la distribution des repas aux migrants. Plus de trois cent repas distribués chaque jour, cela constitue selon l’élue de droite le risque d’un appel d’air. Autrement dit, le risque d’attirer d’autres réfugiés sur la commune, dont la population a déjà trop souffert, selon l’élue.
« Nous distribuons de la nourriture de jour comme de nuit depuis deux mois et nous continuerons de le faire pour une simple raison, les gens ont faim », a rétorqué Gaël Monzy, de l’association Utopia Cinquante Six au quotidien local de la Voix du Nord.
Apprenant, cette nouvelle, l’ancien maire du PCF de Calais, Jacky Hénin, a immédiatement publié le message suivant sur son compte Facebook.
« A tous ceux qui sont des amis, j’ai besoin que vous m’aidiez à populariser la position qui suit, d’avance, merci à tous. Natacha Bouchart veut empêcher les distributions de repas aux migrants. Éloigné de Calais pour raisons professionnelles la semaine, je me tiens cependant quotidiennement au courant de la vie locale par l’intermédiaire de mon abonnement numérique à la presse locale, mais également par les informations que mon épouse et mes camarades ne manquent pas de m’envoyer.
Ce matin très tôt, j’ai failli tomber de ma chaise à la lecture des décisions que Natacha Bouchart entendait prendre au nom de Calais. Un positionnement qui appelle de ma part la réaction suivante. J’ai honte.
C’est à l’occasion d’une visite du ministre de l’intérieur Bruno Le Roux dans notre ville que l’ancienne sénatrice, aujourd’hui vice présidente de la région, présidente de la communauté d’agglomération du Calaisis et maire de Calais, a réalisé cette magnifique saillie médiatique.
Alors que le ministre de l’intérieur rappelait la position de l’état d’empêcher tout lieu de fixation des migrants à Calais, nous en reparlerons d’ici l’été, mais pas les distributions de repas, Natacha Bouchart, selon la presse, a aussitôt réagi en annonçant qu’elle ferait tout pour s’opposer à ces distributions. Elle dit vouloir prendre un arrêté en ce sens dès aujourd’hui.
C’est donc au nom de tous les calaisiens que notre maire entend non pas refuser de participer, mais interdire aux associatifs de distribuer un repas aux migrants qui sont à la rue. Ainsi, cette élue du peuple qui émarge à huit mille euros par mois, dont les repas et les boissons au restaurant sont réglés par le contribuable, qui est venue un jour au conseil municipal nous expliquer qu’elle aurait des difficultés à vivre avec juste ses huit mille euros et qui n’avait pas hésité à solliciter de son successeur au sénat un contrat d’assistante parlementaire pour percevoir un salaire supplémentaire, veut interdire que des femmes et des hommes de cœur puissent offrir à ceux qui errent dans les rues, dont de nombreux mineurs, un repas chaud. Il s’agit ni plus ni moins que de la non-assistance à personne en danger.
C’est un positionnement abject qui donne presque envie de vomir. Jusqu’à présent je n’ai jamais participé à une distribution estimant que cela aurait pu être pris pour de la récupération, par contre bon nombre de mes camarades qui se reconnaîtront participent depuis de nombreuses années à la solidarité entre les peuples. Après avoir pris connaissance des propos de Natacha Bouchart, je me sens obligé d’entrer en résistance et d’appeler à résister. Si les associations veulent bien accepter ma présence, en fonction de mes disponibilités, alors je participerai aux distributions de repas. Rien ni personne ne m’empêchera d’avoir ce simple geste d’humanité. Aujourd’hui, c’est l’interdiction d’aider l’autre à survivre et, demain, ce sera quoi, l’ouverture de camps ou bien l’autorisation du tir à vue ?
La France, celle qu’a chantée Jean Ferrat, n’a rien à voir avec ce type de comportement honteux. Calais, notre ville, cette ville reconnue et honorée par la république pour son courage, cette ville qui s’est toujours efforcée de respecter et d’aider ceux qui souffrent, n’a rien à voir avec ce type de positionnement. Oui, j’ai honte et j’ai la rage qu’on puisse vouloir prendre de telles décisions en mon nom et au nom de milliers d’hommes et de femmes qui, je le sais, ne seront pas d’accord. Ensemble, rendons à Calais son honneur, entrons en résistance et opposons-nous à un véritable trouble à l’ordre public ».
Samedi 4 Mars 2017, Jacky Hénin, interrogé par téléphone, déclare qu’il saisira le préfet du Pas-de-Calais, Lundi 6 Mars 2017, pour dénoncer le caractère illégal de cet arrêté municipal.
Au niveau national, dans un communiqué, le PCF juge « l’arrêté municipal décrété par Natacha Bouchart non seulement infâme mais illégal au regard du respect des droits humains fondamentaux ». Le PCF analyse qu’il s’agit là « pour la droite, de courir toujours davantage après le Front National ». Aux dernières élections régionales, le Front National a devancé la droite avec plus de cinquante pour cent des voix à Calais.
Cette décision de la maire de Calais « en dit long sur le projet brutal d’une droite de plus en plus extrême, cultivant elle aussi désormais populisme et xénophobie et tirant toute la société vers le bas sur fond de régression sociale sans précédent pour tous », poursuit le PCF, qui apporte sa « totale solidarité aux bénévoles et aux associations qui viennent en aide aux migrants » et demande à l’état « de casser cet arrêté municipal honteux ».