Revue de presse : Assawra (24/5/17)*
Le président américain Donald Trump a laissé une droite israélienne aux anges en quittant Jérusalem. Mais l’absence de propositions précises pour mettre fin à des décennies de conflit avec les Palestiniens soulève de vives interrogations.
Un éloge ardent d’Israël, mais pas un mot sur la création d’un Etat palestinien, rien non plus sur la colonisation israélienne, a fortiori pas la moindre mention de concession territoriale qu’Israël serait appelé à faire un jour…
La jubilation du Premier ministre Benjamin Netanyahu entendant M. Trump exalter « l’esprit irréductible du peuple juif » et le soutien pour « toujours » de son administration à Israël en disait long sur l’allégresse à droite.
Des responsables palestiniens assuraient croire, eux, que la politique américaine demeurait inchangée. Sur un séjour d’environ 28 heures, M. Trump en a consacré à peu près deux à Bethléem, en territoire palestinien occupé.
Encore le passage éclair côté palestinien était-il dénué de la symbolique ostensible affichée côté israélien. M. Trump est devenu le premier président américain en exercice à se rendre au mur des Lamentations, site de prière le plus sacré du judaïsme, et il a déposé une gerbe au mémorial de la Shoah.
Après le discours du président américain mardi, les journalistes ont entendu le ministre israélien des Sciences Ofir Akounis envisager que le Likoud, parti gouvernemental de droite auquel M. Akounis appartient, comptait en M. Trump un nouveau membre dans ses rangs.
Pour la droite israélienne, la visite de M. Trump tournait la page des relations difficiles avec son prédécesseur Barack Obama, partisan de la création d’un Etat palestinien et pourfendeur de la colonisation, c’est-à-dire l’établissement par Israël de communautés civiles en territoire occupé.
La colonisation est illégale aux yeux du droit international et considérée par une grande partie de la communauté internationale comme faisant obstacle à la paix.
M. Trump « n’a pas morigéné Israël à cause des colonies, il n’a pas pris d’engagement américain quant à la solution à deux Etats », se réjouissait auprès de l’AFP le ministre de la Coopération régionale Tzahi Hanegbi, également du parti Likoud de M. Netanyahu.
Plusieurs membres du gouvernement Netanyahu sont des adversaires déclarés de la création d’un Etat palestinien et des supporteurs de la colonisation, voire d’une annexion de la Cisjordanie, territoire jouxtant Israël et censé s’intégrer dans un futur Etat palestinien. La Cisjordanie est occupée depuis 50 ans par l’armée israélienne.
La création d’un Etat palestinien, solution dite à deux Etats, est la référence de la diplomatie américaine, mais aussi de la communauté internationale, depuis des années.
Nombre de commentateurs s’accordaient pour juger que l’important était dans ce qui n’avait pas été dit au cours de la visite de M. Trump, sa première depuis sa prise de fonction.
Hossam Zomlot, un conseiller du président palestinien Mahmoud Abbas, minimisait les silences américains.
« Ces deux jours n’avaient rien de politique, nous en retenons que la politique américaine reste ce qu’elle était », dit-il. « C’était une visite d’intention, l’intention étant de nouer la relation et de nous aider à parvenir à un règlement final ».
M. Trump s’est contenté d’appeler Israéliens et Palestiniens à prendre des « décisions difficiles », sans jamais préciser comment il comptait s’y prendre pour obtenir ce qu’il a appelé l’accord « ultime ».
Nathan Thrall, expert à l’International Crisis Group, met en garde contre les conclusions hâtives. « La véritable question, c’est de savoir s’il se passe quelque chose de substantiel en coulisses », dit-il, faisant référence à des efforts menés sans fanfare par la diplomatie américaine pour une reprise des tractations, enlisées depuis avril 2014.
Dans un communiqué rendant compte des entretiens entre MM. Trump et Abbas, la Maison Blanche a rapporté que le président palestinien s’était dit « prêt à engager des négociations immédiatement ».
La Maison Blanche ne fait état d’aucune condition préalable dont M. Abbas assortirait la reprise des pourparlers, comme il l’a fait pendant des mois.
M. Thrall souligne que M. Abbas s’expose à un « problème de crédibilité » si les Palestiniens reprennent langue sans avoir obtenu aucune concession israélienne.
L’action de M. Abbas, impopulaire, est minée par les divisions intestines entre l’Autorité palestinienne qu’il préside et qui est l’interlocutrice de la communauté internationale, et le Hamas, mouvement islamiste considéré comme terroriste par les Etats-Unis ou l’Union européenne. L’Autorité siège en Cisjordanie, le Hamas gouverne la bande de Gaza.
Le discours de M. Trump à Jérusalem était « raciste », a dit à l’AFP le porte-parole du Hamas Fawzi Barhoum, « les illusions sur l’équité qu’aurait pu apporter Trump ont fait long feu ».
*Source : Assawra