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9 novembre 2024

Minorité religieuse irakienne : les Mandéens en milieu hostile


Publié par Gilles Munier sur 8 Septembre 2017, 08:11am

Catégories : #Irak, #Bagdad, #Mossoul

Le mandéisme, plus vieille religion monothéiste de l’humanité

Le mandéisme, plus vieille religion monothéiste de l’humanité

Par Adnan Abu Zeed (revue de presse : Al Monitor – 30/8/17)*

 

Mazen Nayef,  chef de la communauté Sabéenne Mandéenne de Bassora, a déclaré à Al-Sumaria News, le 23 juillet, que les autorités irakiennes ont récemment rejeté la requête de la communauté d’ériger un lieu de culte sur un terrain qu’elle détient légalement. Les Mandéens craignent que cela ne conduise à une plus grande marginalisation de leur culture.

 

La campagne lancée contre cette communauté,  et qui s’est répandue comme un feu de paille, se base sur des vidéos et des rumeurs qu’elle a recours à la magie et à la sorcellerie, ce que le chef des Mandéens, Cheikh Satar Jabar Hebou, a fortement démenti, le 16 août.

 

Le mandéisme est la plus vieille religion monothéiste de l’humanité, ayant son origine en Mésopotamie, dans la ville d’Ur et les régions côtières des marais du sud de l’Irak. Selon l’Union des Associations Mandéennes, la doctrine mandéenne proclame qu’Adam est  « le premier mandéen qui ait reçu les instructions religieuses directement de Dieu ». 

 

Avant l’invasion américaine de 2003, la communauté mandéenne comptait 70 000 personnes mais depuis, beaucoup ont émigré en raison des enlèvements et des déplacements de population. Actuellement, il ne reste plus que 10 000 individus au Moyen-Orient, don un grand nombre en Iran.

 

En avril 2017, les autorités douanières irakiennes ont empêché l’introduction, au poste frontière de Shalamjah, du livre sacré des Mandéens « le Grand Live, Ginza Rba » qui est la source des commandements et de la profession de foi. « Les membres de la communauté ne peuvent pratiquer leur culte en public » dit un Sabéen de Diwaniya sous couvert de l’anonymat. «  Ils sont obligés de le faire en privé. En même temps, ils se sentent contraints d’adopter les rites musulmans avant d’éviter tout malentendu ». Un petit nombre de Mandéens habite toujours Diwaniya en raison de la dispersion de la communauté.

 

« Certains partis et groupes religieux ont un programme de déplacement des minorités afin de faire de l’Irak un Etat purement islamique » atteste Nazar Yasser al-Haider, un Sabéen Mandéen vivant aux Etats-Unis. De telles actions font que « la communauté se sent marginalisée et persécutée à cause de ses croyances comme si ses membres étaient des citoyens de seconde classe » continue-t-il. « De tels actes sont une violation de la constitution irakienne qui garantit la liberté de croyance, protège les minorités religieuses et leur permet de pratiquer leur religion ». A propos de la décroissance de la population mandéenne, Haider constate que «  l’environnement extrémiste culturel et idéologique pousse les minorités à l’émigration et les groupes armés adopte cette politique du vide pour s’emparer des biens des déplacés ».

 

Ryad Bankani, intellectuel mandéen, émigré au Canada, confiait au al Monitor au téléphone que «  le défi le plus important auquel doivent faire face les Mandéens est l’insécurité que certains extrémistes exploitent. (Ils) menacent les Sabéens pour qu’ils abandonnent leurs croyances, leur religion pacifique qui ne recherche pas le prosélytisme, et prêche seulement la coexistence  et ne force personne à l’embrasser. » Cette absence de prosélytisme, conjuguée à l’interdiction de conversion et de mariage hors de la communauté expliquent son déclin. Pour Bankani, l’instabilité du système politique irakien rend difficile «  d’appliquer les lois qui protègent les minorités, dont la loi 2012, connue sous l’appellation  de loi 58 qui garantit l’exercice libre d’un culte. Le Parlement a élaboré la loi sur le Endowments of the Christian, Ezidian anda Sabean Mandean Religions (Fondation pour les religions chrétienne, ezidienne et sabéenne mandéenne) en 2003 pour fournir, à ces religions, des services. Les Sabéens sont représentés par un député au parlement et ont un siège au conseil de la province de Bagdad. Ce député, Harith al-Harty, assure que les « Mandéens sont harcelés et mis sous pression pour quitter l’Irak ». Un journaliste, Alaa al-Hamidi, qui couvre généralement le droit des minorités, a déclaré à Al-Monitor « Une douzaine de Mandéens habite encore dans les provinces irakiennes… L’un des dilemmes quotidien pour les minorités religieuses, particulièrement les Sabéens, est la loi sur la carte d’identité nationale, qui établit une discrimination entre les Irakiens sur la base de la religion et des croyances ». Selon l’article 26, elle « encourage l’islamisation des (jeunes) de la minorité quand un des parents se convertit à l’islam, ce qui constitue une menace à la liberté de religion » et Hamidi ajoute « aucune école en Irak ne s’intéresse à la jeune génération de Sabéens ».

 

Pour Selim Khamisi, 70 ans, orfèvre dans la province de Babylone, « la peur de l’instabilité et le conflit religieux permanent nous obligent à une pratique de nos rites religieux, comme la prière, le jeûne et le baptême, difficile, dans des sites relativement isolés et hors de la vue d’autrui ». Il ajoute que les demandes de la communauté pour obtenir des terrains pour un cimetière mandéen ont été « totalement ignorées » par les autorités locales.

 

Les Mandéens  ont émigré dans une vingtaine de pays. Leur nombre est estimé à 150 000 personnes.

 

Avant de passer des lois et de satisfaire les besoins matériels des Mandéens, il est nécessaire de promouvoir une culture du respect et de la tolérance vis-à-vis des croyances différentes et de combattre la discrimination religieuse.

 

Adnan Abou Zeed est journaliste et écrivain.

 

Traduction et Synthèse: Xavière Jardez

 

*Source : Al Monitor

 

http://www.al-monitor.com/pulse/originals/2017/08/sabian-mandaeans-minorities-iraq.html

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