Par Mahdi Darius Nazemroaya / 13 octobre 2011
Sous l’administration Obama, les Etats-Unis ont étendu la «longue guerre» à l’Afrique. Barack Hussein Obama, le soi-disant «fils de l’Afrique» est devenu en réalité un des pires ennemis de l’Afrique.
Outre son soutien infaillible aux dictateurs en Afrique, c’est sous sa responsabilité que la République de Côte d’Ivoire a été déstabilisée. Le découpage du Soudan a été soutenu publiquement par la Maison Blanche avant le referendum, la Somalie a été davantage déstabilisée, la Libye a été agressée de façon brutale par l’Otan, et le commandement US unifié pour l’Afrique (AFRICOM) est en plein essor.
La guerre en Libye n’est que le début d’un nouveau cycle d’aventurisme militaire au sein de l’Afrique. Les Etats-Unis veulent installer maintenant davantage de bases militaires en Afrique. La France a également annoncé qu’elle avait le droit d’intervenir militairement partout en Afrique où des citoyens français et ses intérêts étaient en danger. L’Otan renforce aussi ses positions dans la Mer Rouge et au large de la Somalie. Alors que le désordre et le chaos déracinent une fois de plus l’Afrique avec les interventions extérieures, Israël reste dans l’ombre sans se manifester. Tel-Aviv a, en réalité, largement participé à ce nouveau cycle de bouleversements, lié au projet Yinon pour reconfigurer son environnement stratégique. Ce processus de reconfiguration s’appuie sur la technique éprouvée qui est de créer des divisions sectaires qui permettront en fin de compte de neutraliser les états visés ou se solderont par leur dissolution.
De nombreux problèmes qui affectent les régions actuelles en Europe de l’est, en Asie Centrale, en Asie du sud, du sud-est, de l’est, en Afrique et en Amérique Latine sont en fait le résultat du déclenchement délibéré de tensions régionales par des puissances extérieures.
Les divisions sectaires, les tensions ethnolinguistiques, les différences de religion, et les violences internes ont été de tous temps exploitées par les Etats-Unis, la Grande Bretagne et la France dans diverses parties du monde. L’Irak, le Soudan, le Rwanda et la Yougoslavie ne sont que quelques exemples récents de cette stratégie de «diviser pour régner» qui est utilisée pour faire plier les pays concernés.
Les soulèvements en Europe centrale et orientale et le projet pour un «nouveau Moyen-Orient»
Le Moyen-Orient, à certains égards, présente des analogies frappantes avec les Balkans et l’Europe centrale et orientale au cours des années qui ont précédé la Première Guerre mondiale. A la suite de la guerre, les frontières des états multiethniques des Balkans et d’Europe centrale et orientale avaient été retracées par les puissances extérieures, avec l’appui des forces d’opposition locales. Depuis la Première Guerre mondiale jusqu’à la période après la Guerre Froide, les Balkans et l’Europe centrale et orientale ont encore connu une période de soulèvements, de violences et de conflits qui ont constamment divisé la région.
Il y a depuis des années des activistes qui réclament un «nouveau Moyen-Orient» avec des frontières redéfinies dans cette région du monde à la croisée de l’Europe, de l’Asie du sud-ouest et de l’Afrique du nord. On trouve essentiellement ces partisans dans les capitales de Washington, Londres, Paris et Tel-Aviv. Ils demandent que la région soit constituée d’états ethno-religieux homogènes. La formation de ces états signifierait le démantèlement des grands pays existant dans la région. Cette transition aurait pour but d’établir des états plus petits du genre du Kuwait ou de Bahreïn, qui pourraient être facilement contrôlés et manipulés par les Etats-Unis, la Grande Bretagne, la France, Israël, et leurs alliés.
Manipulation du premier «printemps arabe» au cours de la Première Guerre mondiale
Les projets pour reconfigurer le Moyen Orient avaient commencé plusieurs années avant la Première Guerre mondiale. Toutefois, c’est au cours de la Première Guerre mondiale qu’on avait pu constater la manifestation de ces desseins coloniaux avec la «Grande Révolte Arabe»» contre l’ Empire Ottoman.
Alors que les Britanniques, les Français et les Italiens étaient des puissances coloniales qui avaient empêché les Arabes de jouir de libertés dans des pays comme l’Algérie, la Libye, l’Egypte et le Soudan, ces puissances coloniales parvenaient à se faire passer pour des amis et des alliés de la libération arabe. Durant la «Grande Révolte Arabe» les Britanniques et les Français utilisaient, en fait, les Arabes comme fantassins contre les Ottomans pour servir leurs propres desseins géopolitiques.
Les accords secrets Sykes–Picot entre Londres et Paris en sont une bonne illustration. La Grande Bretagne et la France s’étaient débrouillés pour utiliser et manipuler les Arabes en leur faisant gober l’idée que de la soi-disant «répression» des Ottomans résulterait la libération arabe.
En réalité, l’Empire Ottoman était un empire multiethnique. Il donnait une autonomie locale et culturelle à toutes ses populations, mais avait été manipulé pour se diriger vers la création d’une entité turque. Même le génocide arménien qui s’en est suivi dans l’Anatolie ottomane doit être analysé dans la même perspective que les attaques actuelles dirigées contre les chrétiens d’Irak comme faisant partie d’un plan sectaire mis en oeuvre par des acteurs externes pour diviser l’Empire ottoman, l’Anatolie et les citoyens de l’Empire ottoman.
Après l’effondrement de l’Empire ottoman, c’est Londres et Paris qui ont refusé la liberté aux Arabes tout en semant les germes de la discorde parmi les différents peuples arabes. Les dirigeants arabes locaux corrompus étaient également associés au projet et beaucoup d’entre eux étaient bien contents de devenir des clients de la Grande Bretagne et de la France. De même qu’aujourd’hui le «printemps arabe « est manipulé. Les Etats-Unis, la Grande Bretagne, la France et d’autres sont à l’oeuvre actuellement pour restructurer le monde arabe et l’Afrique avec l’aide de dirigeants et de personnalités arabes corrompus.
Le projet Yinon
Le projet Yinon, qui est le prolongement du stratagème britannique au Moyen-Orient, est un projet stratégique israélien destiné à assurer la supériorité d’Israël. Il stipule qu’Israël doit reconfigurer son environnement géopolitique grâce à la balkanisation des états du Moyen-Orient et des pays arabes pour former des états plus petits et moins puissants. Les stratèges israéliens considéraient l’Irak comme leur plus grand défi stratégique. C’est la raison pour laquelle l’Irak avait été défini comme étant la pièce maîtresse de la balkanisation du Moyen-Orient et du monde arabe. En Irak, en s’appuyant sur la théorie du projet Yinon, les stratèges israéliens réclament la partition de l’Irak, avec un état kurde et deux états arabes, un pour les musulmans chiites, l’autre pour les sunnites. La première étape pour atteindre cet objectif a été la guerre entre l’Irak et l’Iran, qu’évoque le projet Yinon.
L’»Atlantic», en 2008, et l’»Armed Forces Journal», périodique de l’armée US, en 2006, ont tous deux publié des cartes largement diffusées qui reprenaient les grandes lignes du projet Yinon. En plus de la partition de l’Irak, ce que propose également le projet Biden (publié en 2006, NDT), le projet Yinon préconise le démembrement du Liban, de l’Egypte et de la Syrie.
Le morcellement de l’Iran, de la Turquie, de la Somalie et du Pakistan fait également partie de ces objectifs. Le projet Yinon réclame également la dissolution de l’Afrique du Nord et prévoit de commencer par l’Egypte, puis de l’étendre au Soudan, à la Libye et au reste de la région.
L’élimination des Communautés chrétiennes du Moyen-Orient
Ce n’est pas un hasard si les chrétiens égyptiens ont été agressés en même temps que se déroulait le référendum au Sud Soudan et avant la crise en Libye. Ce n’est pas non plus une coïncidence si les chrétiens d’Irak, une des communautés chrétiennes les plus anciennes, ont été poussés à l’exil, contraints de quitter leurs terres ancestrales d’Irak. En même temps que l’exode des chrétiens irakiens, qui a eu lieu sous le regard attentif des forces armées US et britanniques, les quartiers de Bagdad sont devenus sectaires, les musulmans chiites et sunnites ayant été contraints à cause des violences et des escadrons de la mort de créer des enclaves sectaires. Tout cela est lié au projet Yinon et la reconfiguration de la région fait partie d’un dessein plus ambitieux.
En Iran, les Israéliens ont tenté en vain de pousser la communauté juive iranienne à quitter le pays. La population juive en Iran est en fait la deuxième la plus importante au Moyen-Orient et peut-être la plus ancienne communauté juive au monde à ne pas avoir été perturbée. Les Juifs iraniens se considèrent comme des Iraniens, attachés à l’Iran, qu’ils considèrent comme leur patrie, tout comme les iraniens musulmans et chrétiens, et pour eux, l’idée qu’il faut qu’il se délocalisent en Israël parce qu’ils sont juifs est absurde.
Au Liban, Israël cherche à exacerber les tensions sectaires entre les différentes factions chrétiennes et musulmanes ainsi que les druzes. Le Liban est un tremplin pour atteindre la Syrie et la division du Liban en
plusieurs états est également considérée comme un moyen de balkaniser la Syrie en créant plusieurs petits
états arabes sectaires. Les objectifs du projet Yinon sont de diviser le Liban et la Syrie en plusieurs états selon les identités sectaires et religieuses pour les sunnites, les chiites, les chrétiens et les druzes. Il n’est pas impossible qu’un exode des chrétiens de Syrie soit également prévu.
Le nouveau patriarche maronite d’Antioche, la plus grande des églises catholiques orientales autonomes, a exprimé ses craintes d’une purge des chrétiens arabes. Le patriarche Mar Beshara Boutros Al-Rahi et bien d’autres chefs chrétiens au Liban et en Syrie craignent que les Frères Musulmans prennent le pouvoir en Syrie. Comme en Irak, des groupes non identifiés s’en prennent aux communautés chrétiennes en Syrie.
Les chefs de l’église orthodoxe orientale chrétienne, parmi lesquels le patriarche de l’église orthodoxe de Jérusalem, ont également exprimé publiquement leurs vives inquiétudes. Outre les Arabes chrétiens, ces craintes sont également partagées par les communautés assyriennes et arméniennes qui sont en majorité chrétiennes.
Bechara Boutros Rahi était récemment en visite à Paris où il a rencontré le président Nicolas Sarkozy. Le patriarche maronite et Sarkozy auraient eu des désaccords sur la Syrie, ce qui a incité Sarkozy à déclarer que le régime syrien allait tomber. La position du patriarche était qu’il fallait oublier la Syrie et lui permettre d’engager des réformes. Le chef maronite a également déclaré à Sarkozy qu’il fallait traiter Israël comme un danger si la France voulait légitimement que le Hezbollah dépose les armes.
A cause de ses prises de position en France, Al-Rahi était aussitôt remercié par les chefs religieux chrétiens et musulmans de la république arabe de Syrie qui étaient allés lui rendre visite au Liban. Le Hezbollah et ses alliés politiques au Liban, parmi lesquels la majorité des parlementaires chrétiens au parlement libanais, ont également félicité le patriarche maronite qui s’est ensuite rendu en tournée au Sud Liban.
Le Sheikh Al-Rahi subit actuellement les critiques de l’Alliance du 14-mars, dirigée par Hariri – à cause de sa position vis-à-vis du Hezbollah et de son refus de soutenir le renversement du régime syrien.
En fait, Hariri projette d’organiser une conférence de personnalités chrétiennes pour s’opposer au patriarche Al-Rahi et à la position de l’église maronite.
Depuis qu’Al-Rahi a annoncé sa position, le parti Tahrir, présent à la fois au Liban et en Syrie, l’a également pris pour cible.
On a dit également que de hauts responsables US avaient annulé leur rencontre avec le patriarche maronite pour montrer leur désapprobation concernant ses prises de position en faveur du Hezbollah et de la Syrie. L’Alliance du 14-mars d’Hariri au Liban, qui a toujours été une minorité populaire (même quand elle avait la majorité parlementaire), travaille main dans la main avec les Etats-Unis, Israël, l’Arabie saoudite et les factions qui utilisent la violence et se livrent à des actes terroristes en Syrie.
Les Frères Musulmans et d’autres soi-disant groupes salafistes de Syrie ont établi une stratégie commune et ont mené des discussions secrètes avec Hariri et les partis politiques de l’Alliance du 14-mars. C’est la raison pour laquelle Hariri et ses alliés s’en sont pris à Al-Rahi. C’est également Hariri et l’Alliance du 14-mars qui ont fait venir le mouvement islamiste Fatah Al-Islam au Liban et qui ont aidé certains de ses membres à quitter le pays pour aller combattre en Syrie aujourd’hui.
L’exode chrétien est programmé pour le Moyen-Orient par Washington, Tel-Aviv et Bruxelles. On nous apprend aujourd’hui que le Sheikh Al-Rahi a été informé par Nicolas Sarkozy lors de son passage à Paris que les communautés chrétiennes du Levant et du Moyen-Orient pourront venir s’installer dans l’UE.
Cela n’a rien d’une offre bienveillante. C’est une gifle donnée par ces mêmes puissances qui ont créé délibérément les conditions pour éliminer les communautés chrétiennes anciennes du Moyen-Orient. L’objectif semble être la réinstallation des communautés chrétiennes à l’extérieur de la région de façon à délimiter les pays arabes afin que ces pays deviennent exclusivement musulmans.
Cet objectif est en adéquation avec le projet Yinon.
Re-diviser l’Afrique: le projet Yinon est bel et bien vivant et à l’oeuvre
Dans le même contexte que les divisions au Moyen-Orient, les Israéliens ont dressé les plans pour reconfigurer l’Afrique. Le projet Yinon veut établir les frontières des pays africains selon trois critères:
La couleur de peau
La religion
Les particularités ethnolinguistiques
Il veut tracer des lignes de démarcation en Afrique entre une soi-disant «Afrique Noire» et une prétendue Afrique du Nord «non noire». Cela fait partie d’un projet destiné à créer un schisme en Afrique entre ceux qui sont qualifiés d’»Arabes» et les soi-disant «Noirs».
Une tentative de séparer les points de convergence d’une identité arabe et africaine est en cours.
Cet objectif explique pourquoi l’identité absurde d’un «Sud Soudan africain» et d’un «Soudan du Nord arabe» a été entretenue et véhiculée. C’est également la raison pour laquelle les Libyens de couleur noire ont été pris pour cible dans une campagne destinée à «épurer la Libye de ses populations noires».
L’identité arabe en Afrique du Nord est actuellement dissociée de son identité africaine. Parallèlement, il y a une tentative d’éradiquer les importantes populations d’»Arabes à la peau noire» de façon à ce qu’il y ait une démarcation nette entre l’»Afrique noire» et une nouvelle Afrique du Nord «non noire», qui sera transformée en un terrain d’affrontements entre les Berbères «non noirs» et les Arabes.
Dans cette même perspective, les tensions sont entretenues actuellement entre les musulmans et les chrétiens en Afrique, dans des endroits comme le Soudan et le Nigeria, pour créer davantage de lignes et de points de fracture.
Le fait d’entretenir ces divisions sur la base de la couleur de la peau, de l’appartenance ethnique, de la religion et de la langue a pour but d’alimenter la dissociation et la désunion en Afrique. Ceci fait partie d’une stratégie plus large destinée à séparer l’Afrique du nord du reste du continent africain.
Israël et le Continent Africain
Les Israéliens sont engagés discrètement sur le Continent Africain depuis des années. Dans le Sahara occidental, occupé par le Maroc, les Israéliens ont participé à la construction d’un mur de séparation comme celui de la Cisjordanie occupée par Israël.
Au Soudan, Tel-Aviv a armé les mouvements et les insurgés séparatistes. En Afrique du sud, les Israéliens ont soutenu le régime d’apartheid et son occupation de la Namibie. En 2009, le ministre des affaires étrangères israélien annonçait que l’Afrique serait le nouveau centre d’intérêt de Tel-Aviv.
Les deux principaux objectifs d’Israël en Afrique sont d’imposer le projet Yinon, qui est en conformité avec ses propres intérêts, et de seconder Washington pour que les Etats-Unis deviennent les maîtres de l’Afrique. A cet égard, les Israéliens ont également vivement encouragé la création d’AFRICOM. L’»Institute for Advanced Strategic and Political Studies (IASPS)» en est un exemple.