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26 décembre 2024

Comment le lobby israélien a mis en place le programme de l’UE sur l’antisémitisme


Publié par Gilles Munier sur 5 Octobre 2019,

Catégories : #Sionisme, #Palestine, #Gaza, #Union Européenne

Par David Cronin (revue de presse : Agence Médias Palestine – 30/9/19)*

Depuis presque quatre ans, Katharina von Schnurbein s’est fait passer pour une championne des Juifs d’Europe.

Pris au pied de la lettre, ses discours dans de nombreuses conférences suggèrent qu’elle est une consciencieuse fonctionnaire animée du désir de mettre fin à la persécution. Un examen plus détaillé révèle qu’elle a suivi un agenda mis en place par Israël et ses soutiens.

Le véritable objectif de cet agenda a été de museler le mouvement de solidarité avec la Palestine.

Von Schnurbein a été nommée en décembre 2015 première coordinatrice de l’Union Européenne contre l’antisémitisme.

L’idée de ce poste n’est pas née dans les bureaux de Bruxelles.

Au cours du mois de mai 2015, le gouvernement israélien a reçu à Jérusalem un « forum mondial pour combattre l’antisémitisme ».

Un « plan d’action » pour l’Europe a été dressé à cette occasion par les lobbyistes pro-israéliens de Grande Bretagne, de France et des Pays Bas.

L’une de ses recommandations était que l’UE nomme un coordinateur contre l’antisémitisme. Une autre était que l’Union « envisage » d’impliquer des forces de police ostensiblement dédiées à l’amélioration de la sécurité des Juifs.

Sinistre

Une proposition similaire a été faite le même mois à une conférence organisée à Bruxelles par le Comité Juif Américain, importante association pro-israélienne.

L’ « appel à agir » émis à cette occasion a déformé la réalité. Il prétendait que « les Juifs dans tout le continent [Europe] avaient subi l’été dernier une levée de violence antisémite et des menaces, au moment du conflit provoqué par le Hamas avec Israël ».

La réalité, c’est que l’attaque sur Gaza a été provoquée par Israël.

Son gouvernement s’est servi du tir de roquettes par quelques combattants de la résistance comme prétexte pour infliger une violence pire sur les habitants de Gaza, qui vivaient déjà sous blocus.

Il est vrai que quelques incidents antisémites – tels que le bris de vitres d’une synagogue de Belfast – sont arrivés l’été dernier.

Cependant, Israël et ses soutiens ont également cherché à dénaturer les très importantes manifestations de solidarité avec Gaza à travers le monde comme étant conduites par de l’antisémitisme.

Il faudrait regarder dans ce contexte la recommandation faite par le Comité Juif Américain pour que les gouvernements de l’UE « engagent les autorités policières » à combattre l’antisémitisme.

Vera Jourova, commissaire européenne à la justice, a participé en 2015 à la conférence du Comité Juif Américain.

Travaillant en tandem avec von Schnurbein, elle a par conséquent pris des initiatives recherchées par le lobby pro-israélien.

En juin de cette année, par exemple, Jourova a mis en place un groupe de travail officiellement dédié à la rédaction de nouvelles stratégies contre l’antisémitisme.. Ce groupe comprend des représentants des forces de police des pays de l’UE.

C’est une sinistre démarche.

Le travail de l’Union Européenne dans ce domaine est maintenant conduit par une définition douteuse de l’antisémitisme approuvée en 2016 par un club de 33 Etats connu sous le nom d’Alliance Internationale pour le Souvenir de l’Holocauste (IHRA).

Cette définition est assortie d’exemples hautement contestables de commentaires condamnés pour être antisémites. On trouve parmi eux l’affirmation comme quoi la création d’Israël a été une « tentative raciste ».

Israël a été conçu comme un Etat où les colonisateurs juifs auraient plus de droits que les indigènes palestiniens. Les Palestiniens expulsés de force de leur terre natale à la création d’Israël, ainsi que leurs descendants, n’ont pas eu le droit de revenir chez eux pour la seule raison qu’ils n’étaient pas Juifs.

Rappeler ces faits historiques serait sans doute considéré comme antisémite selon cette définition.

A l’origine, la définition a été rédigée il y a plus de dix ans par des associations pro-israéliennes – comme faisant partie d’un exercice sponsorisé par l’UE.

Théoriquement, cette définition n’est pas juridiquement contraignante. Cependant, on ne peut voir l’implication des forces de police dans l’évaluation de commentaires sur Israël que comme une tentative pour criminaliser ceux qui disent la vérité sans fard sur les activités de l’État.

Pernicieux

Von Schnurbein n’a cessé de salir le mouvement de solidarité avec la Palestine.

En visite à Jérusalem au début de l’année, elle a déclaré qu’on peut percevoir deux nouvelles formes d’antisémitisme en Europe depuis la deuxième Guerre Mondiale.

La première a été la banalisation de l’Holocauste par la droite. La seconde a été « l’idée anti-sioniste de gauche que l’existence de l’État d’Israël en elle-même était une tentative raciste ».

Son allégation était pernicieuse. Elle suggérait qu’on pouvait comparer les apologues d’Adolf Hitler aux militants qui s’opposent à l’oppression d’Israël sur les Palestiniens précisément parce qu’ils sont indignés par le fanatisme sous toutes ses formes.

Et en plus, elle emmêlait – délibérément, comme on s’en rendrait compte – deux tendances politiques distinctes.

La haine des Juifs par l’extrême droite est issue de la simple haine des gens qui appartiennent à une ethnie ou une religion différentes. L’opposition de gauche au sionisme, d’autre part, est fondée sur une critique de l’idéologie de l’État d’Israël.

S’attaquer au sionisme est un devoir moral pour de véritables socialistes, comme ce l’est de lutter contre toute discrimination envers les Juifs, fondée sur leur identité religieuse ou ethnique.

La semaine dernière, von Schnurbein a participé au lancement d’un rapport du gouvernement israélien qui accusait d’antisémitisme la campagne de boycott, désinvestissement et sanctions menée par les Palestiniens.

De façon absurde, le rapport suggérait que mon collègue Ali Abunimah avait une arrière-pensée en faisant remarquer la conduite criminelle d’Israël.

Dans son discours lors du lancement, von Schnurbein a relevé un incident de 2015 au cours duquel des militants BDS ont demandé au chanteur Matisyahu de démasquer Israël pendant une visite en Espagne.

Elle a prétendu que mettre Matisyahu sur le gril à propos des activités d’Israël était antisémite.

Comme c’est un Juif de citoyenneté américaine, Matisyahu ne peut être tenu pour responsable de ce que fait Israël, a-t-elle argumenté.

Von Schnurbein a oublié d’expliquer que Matisyahu est apparu dans des vidéos de propagande israélienne et qu’il a fait partie de ceux qui ont levé des fonds pour l’armée israélienne.

Il a été questionné sur son amour déclaré pour Israël, pas parce qu’il est Juif.

Von Schnurbein a été acclamée comme une « infatigable héroïne » par un lobbyiste pro-israélien.

Elle a été également récompensée d’un « prix des droits de l’Homme » par une association qui soutient les colonies illégales d’Israël en Cisjordanie occupée et ses crimes de guerre à Gaza.

Il n’est pas difficile de découvrir pourquoi elle reçoit de telles accolades. Plutôt que de combattre la persécution, elle a soutenu un Etat d’apartheid malfaisant.

*Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine

Version originale : The Electronic Intifada

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