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18 novembre 2024

Procès : Georges Ibrahim Abdallah contre l’Etat français


MADANIYA

Jeudi 24 octobre 2019

In Memoriam : Gilbert Hanna (1948-2019), visiteur régulier du parloir de Lannemezan ; Inlassable dans sa défense de la cause de la libération de Georges Ibrahim Abdallah, le grand combat de sa vie.

Membre truculent et éminent du clan de Kaolack, (Sénégal), pays de l’Afrique noire francophone, majoritairement musulman, cette naissance a signé la culture de base de Gilbert Hanna, une culture de métissage culturel et de brassage humain, où se conjuguent, Islam et Chrétienté, bi culturalisme franco-arabe, sur fond de rapport colonial entre oppresseurs et opprimés, exploiteurs et exploités.

Fondé dans la décennie 1950, sans le moindre lien de consanguinité, ni la moindre attache familiale, mais mu par une commune capacité d’indignation inexpiable contre l’injustice, le clan va se consolider dans le mythique Couloir L de la Cité universitaire de l’Université de Dakar qui sera d’ailleurs à 18 ans le théâtre de la première manifestation de l’engagement militant de Gilbert Hanna, avec l’organisation de la première grève étudiante de l’espace francophone.

Un engagement opéré sous le parrainage de son mentor absolu, le philosophe libanais Roger Naba’a, un homme sans qui rien n’aurait été possible. Avec qui, toute cette équipée a été possible. Un homme de conviction. Un être inoxydable, incorruptible, inflexible, d’une détermination sans faille, d’une extrême discrétion, la parfaite incarnation d’un militantisme intégral, un des grands intellectuels arabes contemporains.

Une grève préludant à la révolte de Mai 1968 en France… à la fermeture corrélative de l’Université de Dakar et à la dispersion du clan : Les Naba vers Beyrouth, foyer de la contestation pan arabe à l’apogée de la guérilla palestinienne, les Hanna- réflexe atavique ?- vers Bordeaux, le plus important port négrier de l’époque coloniale.

Avec à la clé 40 ans de luttes syndicales de cet être au dynamisme inépuisable… de France télécom à Fralib et Ford Blanquefort, sans parler de la grande messe de mobilisation de l’UTOPIA.

Une césure de vingt ans colmatée à la faveur de la guerre des ambassades entre Paris et Téhéran, en 1987, scellée à l’aéroport de Bordeaux Mérignac, par des retrouvailles rocambolesques, dont le cerisier du jardin familial des Hanna à Eysines en fera les frais..…Irrémédiablement.

Une amitié sans faille, sans la moindre anicroche, qui a pris la forme d’une interminable poilade de plusieurs décennies sur deux continents… Une amitié de 60 ans. Une amitié de sous-développés en somme, aux antipodes de l’amitié sophistiquée à la française –les fameux «amis de trente ans», qui se fracasse sous le choc des ambitions contraires avant de sombrer dans les affres d’une guerre fratricide.

Homme de principe, Gilbert Hanna a vécu ses convictions, exigeant, dévoué à la défense des opprimés et des réprimés, des proscrits et des exclus. Militant syndical et associatif, fondateur de Sud PTT et Solidaires en Gironde, Gilbert Hanna a présidé et animé la Clé des Ondes, radio alternative bordelaise. Son décès le 6 Mai 2019 à 71 ans, a coïncidé, tout un symbole, avec le jour de l’ouverture du procès de FRANCE TELECOM, dont les méthodes de management ont poussé au suicide 19 salariés.

Tribunal d’opinion, Bordeaux 24 octobre 2019

Réquisitoire du procureur René Naba, mandaté par Georges Ibrahim Abdallah devant le tribunal de l’opinion.
Substitut : Gilbert Hanna, Directeur de la Radio Clé des Ondes-Bordeaux
Co publié par le journal libanais Al Akhbar : https://www.al-akhbar.com/
La version arabe du texte, œuvre de San’a Yazigi Khalaf, enseignante, se trouve dans le prolongement du texte français

Monsieur Le Président, Messieurs Les Assesseurs,

La confiance que m’accorde mon mandant Georges Abdallah m’honore et m’oblige.

Elle implique pour moi une lourde responsabilité devant l’histoire et la justice des hommes de démontrer que l’affaire Georges Ibrahim Abdallah, qui était au départ, pour la résumer caricaturalement, l’affaire de l’assassinat de deux diplomates en France, va générer par les interférences du politique sur le judiciaire, sur une série de dysfonctionnements débouchant sur une parodie de justice, un parfait exemple de la négation de la notion même de justice. Pour finir par accréditer l’idée d’un état, Israël, bénéficiant d’une immunité de juridiction et ses séides français d’une impunité.

L’affaire Georges Ibrahim Abdallah : un parfait exemple de la négation de la notion même de justice

L’Affaire Georges Ibrahim Abdallah est un parfait exemple de la négation de la justice et de la notion même de Justice. Avec un procès biaisé, une culpabilité non établie, un parjure, un engagement non tenu, dans un contexte de légitime défense, elle mérite à ce titre de figurer dans les annales de l’Ecole de la Magistrature comme le parfait contre-exemple d’une bonne administration de la Justice.

Un procès biaisé

Un avocat sous-marin de la DGSE. Le ver était dans le fruit. Ce fait résume à lui seul toute l’ignominie du procès fait à Georges Ibrahim Abdallah, en ce que son propre défenseur, Jean Paul Mazurier, était en mission commandé pour le compte des services de renseignements français. Du jamais vu dans les annales judiciaires. Mais ce fait exorbitant n’a pas pour autant entraîné l’annulation du procès.

Le 28 février 1987, Georges Abdallah était condamné à la réclusion à perpétuité après 70 minutes de délibération d’une cour spéciale composée de 7 magistrats.

Quelques jours après, Me Jean Paul Mazurier, un de ses avocats, publiait un livre où il déclarait avoir travaillé pour les services secrets français. Le procès n’a pas pour autant été annulé. La France, «Patrie des Droits de l’Homme» n’a cure de ses contingences.

Une culpabilité non établie

Georges a été détenu et condamné sur la base de fausses preuves. Un revolver enveloppé dans un journal arabe daté de 2 ans postérieures à son incarcération. L’auteur de l’assassinat est en fait une militante communiste libanaise Jacqueline Esber, alias camarade Rima, décédée des suites d’une longue maladie en 2016, à Beyrouth où elle vivait dans la clandestinité. L’identité du meurtrier de Yaacov Barsimentov, l’attaché militaire israélien à l’ambassade israélienne de Paris, en 1982, à l’origine de l’inculpation de Georges Ibrahim Abdallah, a été révélée 34 ans après l’assassinat du faux diplomate israélien, en pleine campagne électorale française.

Mais si cette révélation a placé en porte à faux le pouvoir politique français, elle n’a pas pour autant conduit à une révision du procès en ce qu’elle remettait en question le bien-fondé de l’incarcération du militant communiste libanais.

Un parjure

Au-delà de la culpabilité ou non de Georges Ibrahim Abdallah, la France avait donné son engagement à la remise en liberté de Georges Ibrahim Abdallah en contrepartie de la libération de Sydney Peyrolles, un diplomate français en poste à Tripoli (Nord Liban), retenu en otage par les Fractions Armées Révolutionnaires Libanaises (FARL) qui avaient revendiqué l’attentat contre le diplomate israélien.

Sydney Peyrolles, fils de l’écrivain Gilles Perrault, a été libéré, mais Georges a été maintenu en prison du fait d’une curieuse coïncidence : la découverte de l’arme du crime, le fameux pistolet enroulé dans un journal arabe portant une date postérieure de deux ans à son incarcération. La France avait donné son engagement à l’Algérie via Yves Bonnet, à l’époque Directeur de la DST.

Le contexte de l’époque : un cas de légitime défense.

L’assassinat des deux diplomates -en fait deux agents des services de renseignements, Charles E Ray (CIA Etats Unis) et Yaacov Barsimentov (Mossad Israël) agissant sous couvert de la protection diplomatique d’attachés militaires de leurs pays respectifs-, est intervenu en janvier 1981 à la veille d’un semestre lourd de conséquences pour l’avenir du Liban et des Palestiniens culminant avec l’invasion israélienne du Liban :

  • L’occupation de Beyrouth, en juillet 1982, la perte du sanctuaire libanais de l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine) ; l’exil de son chef Yasser Arafat vers la Tunisie;
  • L’élection du chef milicien Bachir Gemayel, allié des Israéliens à la présidence de la République libanaise ; son assassinat à la veille de son entrée en fonction ; enfin le massacre des camps palestiniens de Sabra Chatila par les milices chrétiennes sous la protection israélienne, pour venger la mort du chef phalangiste.

En proie à la guerre civile depuis 1975, Le Liban n’était pas à l’époque –il ne le sera pas davantage par la suite-, un long fleuve tranquille. Pour des militants pro-palestiniens, l’élimination de deux attachés militaires en France ne relevait pas d’un crime crapuleux, mais d’un acte de justice révolutionnaire visant deux cibles militaires de deux pays -Israël et les Etats Unis- qui vont jouer un rôle déterminant dans le malheur du Liban et des Palestiniens. Un acte de résistance à l’occupation. Un cas de légitime défense.

N’en déplaise à Emmanuel Macron qui tend à criminaliser l’antisionisme comme une forme déguisée de l’antisémitisme, Israël était- et est – toujours perçu comme un état agresseur par les pays bordant le bassin historique de la Palestine (Palestine, Liban, Syrie, Jordanie), pratiquant en toute impunité l’intimidation par le terrorisme, à en juger par les coups de boutoir répétitifs de l’Etat Hébreu contre son environnement. Et pour la majorité des peuples arabes et du tiers monde, un usurpateur de la Palestine. Et « le droit à la sécurité d’Israël», la rengaine traditionnelle des Occidentaux, ne doit pas signifier l‘insécurité permanente des états arabes.

Dans ce contexte, la résistance à l‘occupation ne relevait pas d’une création ex nihilo. Mais d’une une réalité vécue quotidiennement notamment à Beyrouth, cible régulière de l’aviation israélienne, dans une opération de déstabilisation de l’échiquier politique libanais. En vue de susciter des dissensions inter confessionnelles de dresser les chrétiens contre les Musulmans. Ce qui sera fait en 1975.

Pourquoi un libanais chrétien pro palestinien ?

Le combat pour la restauration des droits nationaux du peuple palestinien ne concerne pas exclusivement les Arabes ou les Musulmans, mais tous les hommes épris de paix et de justice, au-delà des critères ethnico-religieux.

Beyrouth, dans la décennie 1970, faisait office de vivier du nationalisme militant, le dernier carré de la contestation arabe. La capitale libanaise qui fera l’objet de deux invasions israéliennes, en 1982 et 2006, a ainsi exercé une fonction tribunicienne compensant par le verbe la défaite du Nationalisme arabe, consécutive à la défaite de juin 1967.

Elle sera la plateforme révolutionnaire de tous les mouvements de Libération de la zone de l’ASALA armée secrète arménienne pour la Libération de l’Arménie, aux kurdes du PKK, au Front de Libération de la Péninsule arabique et du Dhofar, à l‘Armée Rouge Japonaise et la Rote Armee Fraktion, et la kyrielle des mouvements de la guérilla palestinienne. Au même titre qu’Alger pour le continent africain. Toutes les chapelles du nationalisme, du marxisme et du fondamentalisme religieux y avaient pignon sur rue et disposaient de journaux forts documentés sur la situation dans leur pays d’origine, aux côtés de nombreuses maison d’édition, qui toutes tendances confondues, ont édité, à elles seules, une littérature politique supérieure à l’ensemble de la production littéraire des pays arabes, et se jouant de la censure, courante dans ces états, en a assuré sa diffusion.

C’est ici que la Résistance palestinienne a trouvé aide et refuge après le «septembre noir» jordanien et que se sont aguerris les premiers chefs des pasdarans iraniens.

C’est ici également que tous les opposants arabes, révolutionnaires ou non, pourchassés par les autorités de leur pays y ont cohabité pêle-mêle aux côtés des maquisards de la Méditerranée au Golfe –Arméniens, Kurdes, Somaliens, Érythréens– et des guérilleros d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine.

C’est là enfin que sunnites libanais en rupture de bourgeoisie, chrétiens en délicatesse avec l’idéologie phalangiste et «dépossédés» chiites venus du sud-Liban en quête d’instruction, donneront le ton à toutes les manifestations de protestation dans le Monde arabe, comme ce fut le cas en septembre 1970 contre le massacre des Palestiniens en Jordanie, en 1972 contre le massacre des communistes au Soudan ou encore contre la «trahison» du président égyptien Sadate en 1977.

Pourquoi un chrétien, alors que la totalité des milices chrétiennes, alliées inconditionnels d’Israël, faisaient office de supplétifs des pays occidentaux?

Très simplement pour la simple raison que l‘appartenance religieuse si elle peut prédéterminer un engagement politique d’un individu, elle n’assigne pas son titulaire d’une sujétion éternelle envers la religion de sa naissance. Un chrétien peut combattre vigoureusement une dictature de type du chrétien Augusto Pinochet et voué une admiration sans borne au musulman Gamal Abdel Nasser, l’artisan de la première nationalisation réussie du tiers monde, le Canal de Suez.

Le dépassement des clivages ethnico religieux dans les sociétés fragmentées du Moyen orient a été l’honneur du Mouvement Nationaliste Arabe et la clé du succès de son combat de Libération National au Yémen, contre le protectorat britannique, en Syrie contre le Mandat français au Levant, en Egypte contre les Anglais.

Les chrétiens arabes dans la résistance palestinienne : Georges Habbache, Mgr Hilarion Capucci, Kamal Nasser, Atallah Hanna.

Les chrétiens arabes ont joué un rôle d’avant-garde dans la renaissance intellectuelle arabe et seront à l’origine de la constitution des grandes formations politique arabes contemporaines : Antoun Saadé, (parti populaire syrien), Michel Aflak (Parti Baas), Georges Habbache, (Mouvement Nationaliste Arabe), Fouad Chémaly, fondateur du Parti Communiste Libanais, FARJALLAH HELOU, son successeur, mort sous la torture en Syrie, en 1959 et son cadavre dilué dans l’acide et immergé dans le fleuve longeant Damas pour éliminer toute trace de sa présence.

Et les chrétiens assumeront des responsabilités dans le combat de libération arabe, notamment le combat palestinien : Georges Habbache, fondateur du Front Populaire pour la Libération de la Palestine, de tendance marxiste, sera un des grands dirigeants les plus respectés de l’OLP, alors que Kamal Nasser, poète chrétien palestinien, a été le porte-parole de la centrale palestinienne et que Mgr Hilarion Capucci, Archevêque grec catholique de Jérusalem, a été incarcéré par les autorités israéliennes pour son soutien actif à la résistance palestinienne, tout comme d’ailleurs Mgr ATALLAH HANNA, Archevêque grec-orthodoxe de Sébaste en Palestine.

Sans oublier SERHANE BECHARA SERHANE, chrétien palestinien natif de Taybé en Cisjordanie, meurtrier du sénateur Robert Kennedy, le 5 juin 1968, à la date commémorative de la défaite arabe de juin 1967, pour le soutien inconditionnel manifesté à Israël par le frère du président américain assassiné. Doyen des prisonniers politique à travers le Monde, Serhane Béchara Serhane (75 ans), détenu depuis 52 ans, purge sa peine à la prison de Pleasant Valley en Californie.

Plus surprenant que cela puisse paraître aux lecteurs non avertis, le mouvement palestinien incluait des personnalités juives anti sionistes à l’instar d’Ilan Halévi, qui sera le représentant de l’OLP au sein de l’Internationale socialiste. Et de grandes convergences de lutte s’étaient développées au Moyen orient entre les Black Panthers israéliens et les Palestiniens dans la décennie 1970. La libération de la Palestine n’est pas exclusivement l’affaire des Musulmans comme tend à le suggérer la stratégie atlantiste de bipolarisation tendant à présenter le conflit comme le combat de «l’unique démocratie du Moyen Orient, la sentinelle avancée du monde libre, face à la barbarie arabo musulmane».

La stratégie de déstabilisation régionale menée par Israël.

La chronologie témoigne de la stratégie de déstabilisation menée par Israël

  • Décembre 1968 : raid de l’aviation israélienne contre l’aéroport de Beyrouth entrainant la destruction de la totalité de la flotte civile libanaise.
  • En juillet 1972 – Ghassane Kanafani, porte-parole du Front Populaire de Libération de la Palestine, et sa nièce de 17 ans, sont tués à Beyrouth dans une voiture piégée qui aurait été placée par des agents israéliens. Kanafani était considéré comme une des grandes figures littéraires du monde arabe.
  • Moins d’un an plus tard, en Avril 1973 : Un raid israélien contre le centre de Beyrouth tue trois dirigeants palestiniens, Kamal Nasser, porte-parole de l’OLP, Abou Youssef Najjar, ministre de l’intérieur de la centrale palestinienne, Kamal Adwane, chargé du mouvement de la jeunesse palestinienne au sein du Fatah.
  • La guerre civile libanaise éclatera 2 ans plus tard, en avril 1975. Le hasard du calendrier n’est pas constamment fortuit. Il arrive qu’il soit prémédité.

Sur le plan régional

L’attentat à l’origine de l’inculpation de Georges Ibrahim Abdallah a eu lieu en janvier 1982, dans un contexte régional particulièrement exacerbé marqué notamment par :

  • La destruction de la centrale nucléaire irakienne de Tammouz par l’aviation israélienne le 7 juin 1981
  • L’Annexion du Plateau syrien du Golan le 14 décembre 1981
  • La proclamation de Jérusalem capitale éternelle d’Israël Décembre 1981

Janvier 1982, faut-il le rappeler, est à six mois de l’invasion israélienne du Liban visant à porter au pouvoir Bachir Gemayel, le chef des milices chrétiennes alliées d’Israël.

Sur le plan européen, les attentats anti palestiniens se multiplient en toute impunité pour les Israéliens.

  • 1983 – Le 21 août, un haut dirigeant de l’OLP et principal collaborateur de Yasser Arafat, Mamoun Meraish, est abattu par des agents israéliens à Athènes. Selon des articles de presse israéliens ultérieurs, la future ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, aurait été impliquée dans l’assassinat. Mme Livni ne sera jamais inquiétée par Interpol.
  • 1986 – Le 9 juin, Khalid Nazzal, secrétaire du Front démocratique pour la libération de la Palestine, est abattu par des agents israéliens à Athènes, en Grèce.

L’équation personnelle de Georges Abdallah

L’équation chrétienne de Georges Abdallah va jouer toutefois un rôle sous-jacent déterminant dans le traitement inique qui lui sera réservé par la France. L’assassinat des deux diplomates en France et la procédure judiciaire engagée contre Georges Ibrahim Abdallah vont se dérouler sur fond d’un conflit de puissance contre la France, cobelligérant de l’Irak dans sa guerre contre l’Iran et les contestataires à l’ordre hégémonique israélo-américain dans la zone : la Syrie, l’Iran, le camp progressiste au Liban agrégé autour du parti communiste et des mouvements de la guérilla palestinienne.

Dans ce contexte, Georges Ibrahim Abdallah va apparaitre comme un DOMMAGE COLLATERAL d’un conflit de puissance. UN BOUC EMISSAIRE IDEAL. Georges Ibrahim Abdallah, un libanais chrétien de naissance, mais militant communiste pro palestinien, cassait la grille de lecture traditionnelle des représentations. IL CASSAIT LE CODE. Il sera un bouc émissaire.

Un bouc émissaire n’est pas nécessairement un coupable, mais un coupable idéal en ce que sa culpabilité ne remet pas en cause l’ordre social. Ou plutôt elle peut être actée sans dommage pour le corps social.

Une incarcération symptomatique de la pathologie française.

Au-delà des faits, l’incarcération de Georges Ibrahim Abdallah sous-tend un mal profond, symptomatique de la pathologie dans laquelle baigne la France depuis la fin de la seconde guerre mondiale en raison d’un quadruple fait :

A- La tétanie du débat public en France du fait juif consécutif à la collaboration nazie du régime de Vichy qui condamne la «Patrie des lumières» à une solidarité expiratoire inconditionnelle à l’égard d’Israël, conférant à ses dirigeants une impunité, et à leurs thuriféraires français, une immunité corrélative.

B – L’OPA exercée par la France sur la chrétienté arabe, découlant de son statut de «fille aînée de l’Eglise», l’autorisant à préempter le rôle de «protectrice des chrétiens d’Orient», assujettissant ses pupilles non à un rôle protecteur, mais à un «protectorat de fait», leur assignant une fonction d’obéissance, qui condamne aux mines de sel tout récalcitrant à ses aberrations politiques.

C- Le décalage qui existe entre l’image que la France s’emploie à projeter d’elle-même sur le plan international et la réalité de sa politique interne. Le mythe sur lequel elle prospère et la mythomanie dans laquelle elle se vautre, avec sa codification juridique longtemps fondée selon le principe du gobino darwinisme (Code Noir de l’Esclavage, Code de l’Indigénat), au mépris du principe de la Liberté. L’impunité de sa technostructure au mépris du principe d’égalité, au mépris du principe de la fraternité.

D – La confusion que se fait la France de son rôle qui l’autorise à s’arroger abusivement le statut de «Patrie des Droits de l’homme», alors qu’elle n’est en fait que la «Patrie de la Déclaration des Droits de l’Homme», en raison de ses abus répétitifs en ce domaine : Du Code Noir de l’Esclavage, au Code l’Indigénat, à la Colonisation, à la cristallisation des pensions des anciens combattants de l’outre-mer, à la torture durant la guerre d’Algérie, aux repentances successives à propos de la déportation des juifs français vers les camps de la mort, au confinement des Harkis dans les recoins concentrationnaires de la République, eux, qui ont pris le parti de la France contre leur patrie d’origine.

De la théorie israélienne du «crime de sang» et de sa distorsion

Le cas israélien. Etude comparative des cas de Samir Kintar et de Georges Abdallah
Israël considère qu’un crime de sang de nature «terroriste» est imprescriptible de même que la peine y afférente. Par crime de sang s’entend tout acte commis par un étranger (goy) ayant abouti au meurtre et à l’assassinat d’un israélien, qui se définit d’ailleurs par acte de terrorisme. Les règlements de compte au sein de la mafia juive américaine ou au sein de la mafia israélienne ne figurent pas dans cette catégorie de même que les crimes passionnels. De même que les crimes commis par des goyims ou contre des goyims. Israël s’est ainsi exonéré des massacres de Sabra Chatila, en septembre 1982, à Beyrouth, faisant valoir, selon le premier ministre de l’époque, Menahem Begin que « Des goyims ont tué d’autres goyims en quoi Israël est responsable ? ».

Samir Kintar, le militant libanais pro palestinien, a commis un attentat en Israël même provoquant une dizaine de victimes dont plusieurs morts. Son crime était théoriquement imprescriptible et sa peine aussi. Pourtant Samir Kintar, doyen des prisonniers politiques arabes en Israël, a été libéré après 24 ans de captivité au terme d’un échange, matérialisé par la restitution de dépouilles de soldats israéliens contre sa libération et celle de plusieurs dizaines de prisonniers libanais, palestiniens et arabes.

Le cas de la France : étude comparative des cas d’Anis Naccache et de Georges Ibrahim Abdallah
Anis Naccache, libanais sunnite converti au chiisme, chef du commando qui a tenté d’assassiner Chappour Bakhtiar, le dernier premier ministre du chah d’Iran, le 18 juillet 1980, à Neuilly sur Seine, a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité le 10 Mai 1982.

L’opération s’était soldée par le bilan suivant : 3 tués et deux blessés. Parmi les tués, deux policiers, Bernard Vigna (22 ans) et Jean-Michel Jamme (23 ans) ainsi qu’une voisine de Bakhtiar, Yvonne Stein (45 ans). Parmi les blessés, un policier Georges Marty (23 ans) et la sœur de Mme Stein. En dépit de ce lourd bilan, Anis Naccache sera gracié le 27 Juillet 1990 par le président François Mitterrand dans le cadre de la négociation globale menée entre la France et l’Iran à l’arrière-plan de l’affaire des otages français détenus au Liban. Anis Naccache aura ainsi purgé dix ans de prison pour une affaire qui aura coûté la vie à trois français dont deux agents de l’état français. A croire que la France parait plus vulnérable aux pressions des puissances étrangères qu’à la protection de ses propres nationaux.

La spirale des otages : un message codé sans ambiguïté

Lorsque en ce premier jour du printemps de 1985, Marcel Carton et Marcel Fontaine sont enlevés à Beyrouth, nul ne pouvait prévoir que cette prise d’otages allait provoquer le plus formidable imbroglio diplomatico-médiatique de l’histoire récente de la France, tétaniser sa politique au Moyen orient, et, en devenant un enjeu politique, mettre à nu les rivalités interrégionales et inter-françaises.

Au départ, l’enlèvement des deux diplomates français, le 22 mars 1985, dans le secteur musulman de la capitale libanaise, pouvait donner à croire qu’il s’agissait d’un évènement fortuit, d’une opération crapuleuse, semblable à tant d’autres dont Beyrouth, livrée à l’anarchie et à la lutte de factions, était quotidiennement le théâtre. Rétrospectivement, le choix de deux ressortissants français représentant leur gouvernement se révèlera être une action délibérée, qui, au fil des jours, va s’institutionnaliser pour être érigée en politique systématique visant à faire fléchir la position de Paris sur la guerre du Liban et le conflit irako-iranien.

De 1984 à 1989, soit en cinq ans, au plus fort de la guerre irako iranienne, Trente et un (31) occidentaux y compris des officiers, des religieux, des journalistes, ont été pris en otage au Liban dont 10 périront en captivité.

Au terme de cette sarabande mortifère, Anis Naccache sera libéré, la France consentira à apurer le contentieux Eurodif, le remboursement d’un milliard de dollars à l’Iran, contrepartie de la participation iranienne au consortium nucléaire franco iranien, alors que les Etats Unis sombraient dans le scandale de l’Irangate, la fourniture clandestine d’armes à l’Iran dans sa guerre contre l’Irak.

La négligence criminelle des dirigeants libanais

Pourquoi une telle disparité de comportement à l’égard de ces deux libanais Anis Naccache / Georges Abdallah, deux militants de la cause palestinienne ? Très simplement parce que l’un, Anis Naccache, était fermement soutenu par un état qui se vit en puissance régionale et entend se faire respecter sur la scène internationale, l’Iran, alors que l’autre, Georges Abdallah, est ressortissant d’un pays, le Liban, dont les dirigeants successifs sombraient dans l’affairisme avec leurs homologues français sans se soucier aucunement de leur concitoyen libanais injustement incarcéré en France.

A l’exception du président Emile Lahoud (1998-2007), mis à l’index par les Occidentaux pour son soutien au Hezbollah, pas un président libanais n’a soulevé le cas de Georges auprès de ses interlocuteurs français.

Ni le phalangiste Amine Gemayel, qui a conclu un traité de paix mort-né avec Israël, en 1983, ni Elias Hraoui, un factotum de son premier ministre le milliardaire libano saoudien Rafic Hariri, ni non plus le général Michel Sleimane, plus soucieux de se trouver un point de chute auprès de ses amis français plutôt que de défendre la cause de son compatriote. De surcroît, en vingt-trois ans de connivence franco libanaise au plus haut niveau, sous le Tandem Rafic Hariri / Jacques Chirac, puis sous le partenariat Sarko-Qatari, sur fond d’affairisme, pas un premier ministre libanais n’a soulevé la question de la détention arbitraire de leur compatriote.

En contrechamp, Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah libanais, réussissait l’exploit de libérer des prisons israéliennes plusieurs dizaines de combattants pro-palestiniens libanais et arabes, -notamment le doyen des prisonniers politiques arabes en Israël, le druze libanais Samir Kintar, sans le moindre chiite dans le lot.

Le parcours atypique d’un homme de conviction

Il aurait été judicieux, -et il serait judicieux pour se dégager de cette souillure morale-, d’appliquer à Georges Ibrahim Abdallah, la jurisprudence israélienne au sujet de Samir Kintar, dans une sorte de démonstration par l’absurde.

Laurent Fabius, le petit télégraphiste des Israéliens dans le dossier sur le nucléaire iranien, et Manuel Valls, le «petit caniche» d’Hillary Clinton, secrétaire d’état américain, se sont refusés à cette option cédant aux oukases de leur patronne américaine.

C.f. à ce propos le message reproduit en bas de page du département d’état intimant aux deux ministres français de contourner la décision judiciaire française pour maintenir en détention Georges Ibrahim Abdallah.

Devant une telle disparité de traitement, la question se pose de savoir «pourquoi ce qui est bon pour Israël n’est pas bon pour la France», un pays pourtant souverain ? Ou, alors, faudrait-il tuer deux soldats israéliens pour obtenir la libération de Georges Ibrahim Abdallah, en échange de leurs dépouilles ?

Militant pro palestinien d’origine libanaise, emprisonné en France depuis 36 ans, Georges Ibrahim Abdallah a été l’objet d’un invraisemblable déni de droit de la part de la France, dans l’indifférence générale de l’opinion arabe et internationale, particulièrement libanaise. Incarcéré depuis 1984, il a battu le record détenu jusque-là par Nelson Mandela (24 ans), le chef du combat nationaliste sud-africain.

L’homme, il est vrai, est atypique en ce que son parcours transcende les traditionnels clivages ethnico religieux qui constituent les habituelles grilles de lecture du conflit israélo-palestinien. Militant communiste issue d’une famille chrétienne du Nord-Liban, ancien élève des congrégations religieuses chrétiennes françaises au Liban, Georges Ibrahim Abdallah a été condamné à la peine maximale prévue par la loi, pour l’exécution d’un responsable du Mossad israélien et celle d’un attaché militaire américain à Paris en 1982.

Au-delà du bien-fondé de sa condamnation sur la base de preuves sujettes à caution, l’homme a purgé sa peine. Libérable, selon le droit français, depuis 1999, soit depuis 20 ans, il a été maintenu en détention sur ordre direct des États-Unis, aiguillonnées en sous-main par Israël. Georges Abdallah est en fait un homme libre en captivité. Tel est le paradoxe de cet homme de conviction et de rare courage, victime des contradictions françaises.

Pleinement Libre, mais retenu en otage des considérations politiques françaises où le ministère de l’intérieur fait capoter une remise en liberté, non au nom de la raison d’état, mais pour des considérations électoralistes; où la duplicité tient lieu de posture morale en ce que le principe de la séparation des pouvoirs, hautement proclamé de manière répétitive à chaque scandale politico financier, est régulièrement mais subrepticement bafoué par des arguties de basses manœuvres politiques. Georges Abdallah est ainsi arbitrairement maintenu en prison au terme de sa détention, au point que le quotidien libanais «Al Akhbar», le journal de la gauche patriotique libanaise, a émis l’hypothèse d’une prise d’otage d’un français en vue d’obtenir son échange avec Georges Ibrahim Abdallah. http://www.courrierinternational.com/article/2014/11/07/faut-il-kidnapper-un-francais-pour-faire-liberer-georges-ibrahim-abdallah

La Cour d’appel avait ordonné la libération de Georges Ibrahim Abdallah en subordonnant sa remise en liberté à un arrêté d’expulsion du territoire du ministre de l’intérieur. Beaucoup y ont vu dans cette décision de justice une double peine déguisée infligée au prisonnier. Un principe prohibé par le droit français. D’autres, tout aussi nombreux, ont considéré que le fait de subordonner, à tout le moins de conditionner la mise en application d’une décision de justice, à une décision administrative du ministère de l’intérieur, a constitué un cas flagrant d’atteinte aux principes généraux du droit, un principe constitutionnel, le principe de la séparation des pouvoirs.

La Cour de cassation a, elle, rendu un arrêt sans renvoi à propos de Georges Ibrahim Abdallah. Une décision qui coupe la voie à tout recours ultérieur possible devant une juridiction française. Un arrêt à la Kafka en somme en ce que le doyen des détenus politiques de France a déjà purgé sa peine et sa libération ordonnée. La Cour de cassation le renvoie à sa case départ : La prison sans fin, sans issue.

Pour l’histoire et pour information des lecteurs, en sa qualité de ministre de l’intérieur, Manuel Valls avait volontairement retardé la signature du décret d’expulsion de Georges Ibrahim Abdallah, exigé par la justice française pour sa sortie de prison, prolongeant ainsi arbitrairement de deux mois la détention du militant pro palestinien qui avait purgé sa peine depuis dix ans. Dans l’attente d’une décision de la Cour de cassation. Pire. Son philo-sionisme le portera à surenchérir sur le standard israélien en matière de crimes de sang. Dans un excès de zèle propre aux néophytes, il établira un standard qui outrepasse le standard israélien en la matière.

Mais la France n’a pas respecté ses lois, l’expression de la volonté générale représentée par l’Assemblée nationale, artisan du Code Pénal. Une peine a été accomplie dans sa totalité. Elle impliquait la libération du détenu. Une libération qui n’est pas une faveur, mais par application du principe de la légalité des délits et des peines. La peine, accomplie de manière exemplaire, c’est-à-dire en conformité avec les règles de bonne conduite, ouvrait droit à une libération anticipée. Cela n’a pas été le cas. Mais cela n’aurait jamais dû se compenser pour autant par une détention sinon illégale, à tout le moins arbitraire.

Son comportement exemplaire a constitué une éclatante victoire morale de grande portée stratégique et psychologique en ce qu’il a conduit un état se réclamant abusivement comme la «Patrie des Droits de l’Homme» a commettre un déni de droit. A contraindre son bourreau, dans ce bras de fer, à se désavouer et à se rendre coupable d’abus de droit.

Né le 2 avril 1951 à Al Qoubaiyat (Nord-Liban), ce militant communiste pro palestinien a été blessé lors de la première invasion israélienne du Sud Liban en 1978. Il passe pour avoir été le chef des FARL (Fractions armées révolutionnaires libanaises) dont il aurait dirigé depuis Lyon les opérations en France sous les pseudonymes Saleh Al-Masri et Abdel Kader Al Saadi.

En 1982, les FARL revendiquent l’assassinat de Charles E. Ray, attaché militaire américain à Paris, le 18 janvier 1982, ainsi que Yaacov Barsimentov, diplomate israélien (le 3 avril 1982, et blessent gravement Robert Onan, consul américain à Strasbourg). Arrêté à Lyon le 24 octobre 1984, il a été condamné à perpétuité par la Cour d’assises spéciale, sous les pressions conjuguées des États-Unis et d’Israël pour complicité d’assassinat, le 28 février 1987.

«Qu’un combattant arabe soit jugé par une Cour Spéciale en Occident, rien de plus normal. Qu’il soit traité de criminel et de malfaiteur, rien de vraiment nouveau, déjà les « bandits de l’Aurès » (1), les « terroristes » de Palestine, ainsi que les « fanatiques lépreux » d’Ansar et Khiam (2) ont été l’objet de ces honorables qualificatifs. Ils rappellent à tous ceux qui ont la mémoire courte le patrimoine de votre justice occidentale ainsi que votre civilisation judéo-chrétienne», lancera Georges à ses juges lors de son procès devant la Cour d’Assises Spécial le 28 Février 1987.

  1. Allusion aux combattants du FLN pendant la guerre d’Algérie, qualifiés ainsi dans la presse française de l’époque.
  2. Ansar est un camp de concentration israélien, Khiam un camp de concentration et de torture de la milice fasciste libanaise «Armée du Liban Sud» qui était organisée, armée et financée par Israël » .

Georges Ibrahim Abdallah, un des doyens des prisonniers politiques à travers le Monde, est l’honneur des Arabes, la conscience des révolutionnaires, le remord vivant des mystificateurs et des imposteurs. Né libre et demeuré tel. Fidèle à son engagement. Fidèle à lui-même. Fidèle à sa liberté, sa compagne de captivité, durant sa période d’incarcération.

En 34 ans de captivité, l’homme n’a jamais renié ses convictions, jamais déserté le combat politique, jamais été intimidé par le comportement dilatoire de son geôlier, le ministre socialo néo-conservateur de l’Intérieur, Manuel Valls, relai fidèle des pressions américaines et israéliennes. Dans l’adversité, il a vaincu ses adversaires fielleux qui, au déni de droit, lui ont superposé un abus de pouvoir. L’arbitraire dans la «Patrie des Droits de l’Homme». Quelle infamie. Quelle forfaiture. La marque d’un nanisme politique.

Qu’on se le dise et que cela se sache : Georges appartient à la race des hommes libres. Pas plus « Uncle Ben’s » que «Bounty». Ni un « native informant» (1) ou un «rented negros» (2) qui peuplent malheureusement nos lucarnes et polluent nos esprits.

Qu’on se le dise et que cela se sache : Entre Georges Ibrahim Abdallah, Samir Kantar, ancien doyen des prisonniers politiques arabes en Israël et la version moderne de l’opposition arabe, désormais invariablement off-shore, invariablement dans les rets de l’ancien pouvoir colonial, il existe une différence d’échelle : Une différence de stature. «Y’a pas photo».

La même différence de stature entre Shirine Ebadi, Prix Nobel de la Paix, militante des Droits de l’Homme en Iran même, sur le territoire de son propre pays, et les mondaines de l’opposition cathodique de Syrie et d’ailleurs. « Y‘ a pas photo » non plus. C’est parure de diamants contre peanuts.

Georges Ibrahim Abdallah est le parfait contre-exemple des opposants modernes arabes qui se déploient off-shore téléguidés depuis les chancelleries des anciennes puissances coloniales, en costume cravate et des golden-cartes de crédit alimentées par les pétrodollars monarchiques. Son incarcération prolongée a signé une forme de forfaiture, le propulsant par contrecoup, au rang du symbole du militantisme intégral. Inclinons nous devant Georges Ibrahim Abdallah, Samir Kintar, Marwane Barghouti (Fatah) et Ahmad Saadate (FPLP) des compagnons de lutte dans la captivité et la dignité. Des hommes de conviction qui ont transcendé leur clivage ethnico-confessionnel, qui gangrène le Monde arabe, pour maintenir vivante la flamme de la Résistance et l’empêcher de sombrer dans la reptilité.

Que les hommes épris de paix et de justice dans le Monde nous rejoignent dans ce combat pour le respect de la parole de la France tant il importe que la France respecte sa parole pour que le monde puisse continuer à respecter la parole de la France.

Un des grands maux de la France contemporaine a été diagnostiqué par Noël Mamère en ces termes : La France cache sa politique de ségrégation derrière le vocabulaire de la révolution française. http://blogs.rue89.nouvelobs.com/chez-noel-mamere/2015/02/02/la-france-cache-sa-politique-de-segregation-derriere-le-vocabulaire-de-la-revolution-francaise-234189

Mal jugé, mal condamné, le cas de Georges Ibrahim Abdallah constitue une ignominie dans l’ignominie. L’ostracisme dont il est l’objet l’a projeté, par contrecoup, au rang de héros mythique du combat palestinien, au même titre que Marwane Barghouti, le chef du Fatah, et Ahmad Saadate, le chef du Front Populaire de Libération de la Palestine, indice du nanisme politique des dirigeants tant libanais que français.

Inflexible, inaltérable, inoxydable, incorruptible, Georges Ibrahim Abdallah jusqu’au bout, sûr de son droit, aura défié ses tortionnaires, purgeant néanmoins une peine, inique, sans le moindre trébuchement, sans le moindre fléchissement, sans le moindre vacillement. Homme debout, dans une posture qui le propulse au rang d’exemple. Une référence du combat de libération. Un brave parmi les plus braves.

Au fur et à mesure que le temps s’écoulera, se réduira la marge de manœuvre de la France qui la conduira à des comportements aberrants, erratiques. Hillary Clinton, la fausse démocrate, a été carbonisée sur le bucher de ses vanités, éliminée par le xénophobe populiste Donald Trump, lors de la compétition présidentielle américaine de 2016. Son interlocuteur français Manuel Valls, en transfuge socialiste, a déserté le combat socialiste en France pour un rôle de fugitif à Barcelone, glanant au passage le titre d’ «homme politique le plus détesté de la gauche française» et Laurent Fabius, le sobriquet du plus célèbre ronfleur des forums internationaux. Tous les trois rejetés dans les poubelles de l’Histoire.

Il est à craindre qu’un lointain successeur de Jupiter de France ne procède à son tour à une «repentance» pour le comportement de la France à l’égard de Georges Ibrahim Abdallah; La marque de fabrique de la «Patrie des droits de l’homme» depuis la fin de la seconde guerre mondiale, tant à l’égard des Juifs que des Harkis, que du mathématicien Maurice Audin, mort sous la torture des Français pour son opposition à la guerre d’Algérie.

«Les lignes de fuite sont les plus belles, mais elles comportent le plus grand risque, c’est de se transformer en lignes de mort» (Antonin Artaud).

«Plaise à la Cour de condamner l’Etat français du «crime de forfaiture morale» et de frapper d’ «indignité nationale» ses servants, Manuel Valls, ministre de l’Intérieur, et, Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, «pour avoir failli aux obligations de leurs charges, aggravé la déchirure du pacte républicain, trahi la confiance du peuple souverain, bafoué les valeurs de la justice dans une démocratie et partant les principes fondateurs de la République».

Vive la Palestine. Longue vie à Georges Ibrahim Abdallah. Que son exemple serve de référence à la génération de la relève. Que dans la mémoire des peuples en lutte son nom vive éternellement.

Who wants George in jail ?

Bande annonce. C-P Productions.

Notes

Illustrations

  1. Fresque quartier Saint-Gilles, Bruxelles. Sources : Palestine Vaincra freeabdallah.red Free Georges Abdallah
  2. Alain d’Orso – Docteur en médecine, Dakar.
  3. Gilbert Hanna.

Sites à consulter

Annexe documentaire

Injonction de Hillary Clinton à Laurent Fabius et Manuel Valls pour entraver la décision de la justice française ordonnant la remise en liberté de Georges Ibrahim Abdallah.

UNCLASSIFIED U.S. Department of State Case No. F-2014-20439 Doc No. C05797452 Date: 11/30/2015.
(SBU) Georges Ibrahim Abdallah was sentenced to life in prison in 1987 for his involvement in the 1982 murders of U.S. military attaché Charles Ray and Israeli diplomat Yakov Barsimentov in Paris, as well as for the 1984 attempted murder of the U.S. Consul General in Strasbourg,
Robert Homme. A former leader of the Marxist-Leninist guerilla group Lebanese Armed Revolutionary Factions, Abdallah is reputedly one of the longest-serving prisoners in Western Europe. He became eligible for release in 1999, but seven successive appeals were consistently denied on the grounds he has shown no remorse for his crime and likely will resume his revolutionary struggle if released and deported to Lebanon. Although the French Government has no legal authority to overturn the Court of Appeal’s January 10 decision, we hope French officials might find another basis to challenge the decision’s legality.

Source : https://wikileaks.org/clinton-emails/Clinton_Email_November_Release/C05797452.pdf

 

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Source : René Naba
https://www.renenaba.com/…
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