par Alaeddin Saleh.
En lançant une campagne militaire en Libye aux côtés du gouvernement d’accord national (GAN), la Turquie ne pouvait pas imaginer que le principal obstacle au succès décisif de son opération serait l’inertie de son allié libyen.
Mais, il s’est avéré que le gouvernement de Tripoli, dirigé par le premier ministre Fayez Sarraj, n’est pas non seulement prêt à aider les Turcs dans de nouvelles actions contre l’armée nationale libyenne (ANL) du maréchal Khalifa Haftar, mais aussi met en péril des progrès de l’opération militaire accomplis jusqu’à présent.
Selon des sources bien informées, qui ont demandé l’anonymat car elles ne sont pas autorisées à parler aux médias, Ankara a été confrontée à un certain nombre de problèmes insurmontables liés à l’inaction ou au sabotage du GAN. A ce moment-là, la principale affaire qui compromet considérablement la mise en œuvre du plan turc en Libye est le refus des groupes armés contrôlés par les autorités de Tripoli de se joindre à la bataille.
De plus, les autorités de Tripoli elles-mêmes manifestent une certaine réticence à accélérer l’offensive contre le ANL. Selon les sources, malgré les appels de la communauté internationale à une trêve humanitaire, Sarraj prévoyait sous la pression de la Turquie de lancer début avril une offensive à grande échelle pour repousser les troupes dirigées par Khalifa Haftar des banlieues ouest et sud de la capitale Tripoli.
Cependant, invoquant la menace de propagation du coronavirus et le manque de soins médicaux, le leader du GAN n’a pas donné le feu vert à Ankara pour reprendre les opérations offensives. De toute évidence, le refus de son allié libyen a provoqué un énorme ressentiment au sein des militaires turques qui attribuait à la force terrestre de Tripoli un rôle central dans la défaite de l’ANL. En conséquence, les Turcs ont été forcé d’abandonner les plans d’une grande offensive et intensifier leur campagne de frappes aériennes avec une forte utilisation des drones d’assaut pendent ce qu’ils ont appelé l’opération ‘Tempête de paix’.
Selon les sources, la frustration d’Ankara est également liée au fait que les dirigeants du GAN, en particulier le premier ministre Fayez Sarraj et son adjoint Ahmed Maiteeq, le représentant informel de la ville de Misurata, ne répondent pas à ses attentes.
Il y a une compréhension croissante dans les milieux politique et militaire turcs que le gouvernent libyen, reconnu par l’ONU, est impuissante face à la pression de Haftar qui a affaibli la capacité de Fayez Sarraj à contrôler ses loyalistes parmi les chefs des milices armées. Le dernier exemple de sa perte d’influence sur les militants est devenu l’incapacité du premier ministre libyen de fournir aux Turcs un nouveau site pour lancer des véhicules aériens sans pilote à l’intérieur de la capitale.
Certains sources proches des autorités de Tripoli ont affirmé que le commandant des forces turques en Libye avait personnellement demandé à Fayez Sarraj d’apporter un autre site qui pourrait être utilisé comme alternative à l’aéroport de Mitiga en raison de sa vulnérabilité aux frappes aériennes et aux bombardements de l’ANL.
Cependant, Sarraj a ignoré la demande du commandant turc. L’homme politique libyen, comme on l’a connu, n’a pas pu parvenir à un accord avec les chefs des groupes armés pour permettre aux militaires turques d’accéder à des zones potentiellement propices au décollage et à l’atterrissage de drones. Il est probable que les chefs des milices ont refusé d’offrir des zones sous leur contrôle aux Turcs de peur de devenir la cible idéale des frappes aériennes de Haftar.
En outre, les sources ont indiqué que des groupes armés locaux pillent régulièrement des dépôts d’armes et de munitions fournis par la Turquie dans le cadre du soutien au GAN. Ce fait entraîne donc de fréquentes pénuries de matériels et de fournitures militaires lors des affrontements. Dans le même temps, l’absence de réserves d’armes a un impact direct sur le moral des groupes actuellement impliqués dans des accrochages incessants aux côtés des instructeurs turcs et des mercenaires syriens.
Il est clair que la passivité de Sarraj coûte cher à Ankara. Alors que la réticence des autorités libyennes à fournir les infrastructures nécessaires au fonctionnement des drones facilite leur abattage, le refus des factions locales de mener la guerre tue un nombre croissant de militaires turcs et leur supplétifs syriens. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, le nombre de combattants syriens tués en Libye a atteint 182.
Il apparaît clairement que un an après une ingérence active dans le pays d’Afrique du Nord, la Turquie a commencé à réaliser que ses plans avaient vraiment mal tourné. Ankara ne s’attendait pas à ce que le GAN et ses dirigeants apparaissent de tels alliés inutiles, de sorte que l’armée turque en Libye n’a que des regrets.
Alaeddin Saleh
L’auteur est un journaliste libyen avec une longue expérience professionnelle en matière de l’étude et la couverture médiatique de la Libye et de la région
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