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17 novembre 2024

Personne ne devrait vivre le cauchemar que les Égyptiens vivent aujourd’hui


Fille d’Hoda Abdelmoneim qui croupit dans les geôles du régime égyptien depuis novembre 2018, je ne peux qu’écrire et lancer des appels comme autant de bouteilles à la mer. Ma mère, avocate âgée de 60 ans, ancienne membre de la Coalition révolutionnaire des femmes égyptiennes a dû être hospitalisée en urgence, et n’a rien à faire derrière les barreaux. Elle est emprisonnée comme plus de 60 000 personnes simplement parce qu’elles ne sont pas d’accord avec le régime en place.

 

Personne ne devrait vivre le cauchemar qui me fait écrire ce texte.

Je suis chez moi, au chaud et en sécurité, tandis que ma mère malade, 62 ans, croupit depuis plus de deux ans dans une cellule glaciale et infecte d’une prison en Égypte. Seulement parce qu’elle est une militante des droits humains.

Hoda Abdelmoneim est avocate depuis plus de 40 ans. Elle a fait partie du Conseil National des Droits de l’Homme en Égypte. Elle est aussi épouse, maman et une merveilleuse grand-mère. Mais elle est détenue depuis le 1er novembre 2018.

Selon l’ONG WeRecord, parmi les 60 000 prisonniers politiques que compte l’Égypte figurent au moins 225 femmes. Pour leurs enfants, leurs parents, leurs maris, leurs frères et sœurs, leurs amis, la vie s’est arrêtée avec leurs arrestations.

Alors que je prendrais volontiers sa place en prison, je ne peux qu’écrire et taper à toutes les portes pour défendre ma mère.

Je voudrais tant qu’elle sache que tant qu’elle n’est pas libre, saine et sauve, je ne cesserai de me battre.

Malheureusement, mon rêve le plus immédiat n’est même plus sa liberté mais sa santé.

Par des fuites, nous savons en effet qu’elle souffre désormais d’insuffisance rénale et qu’elle a dû être hospitalisée. Nous n’avons pas accès à son dossier médical et l’administration pénitentiaire reste totalement silencieuse.

Depuis 2013, plusieurs centaines de prisonniers politiques (dont l’ancien président Mohamed Morsi) sont morts en détention en raison du manque d’accès à des soins médicaux adéquats. Ma mère est-elle à son tour condamnée à une lente agonie en détention ?

Personne ne devrait vivre le cauchemar que les Égyptiens vivent aujourd’hui.

Pour les membres de la société civile, les journalistes, les militants des droits humains, les avocats, les activistes et même les médecins, se sentir plus ou moins en sécurité ou libres d’agir n’est plus qu’un lointain souvenir. Les Égyptiens sont désormais les otages de la terreur d’un régime totalitaire.

Comme tant d’autres, ma mère a été kidnappée par des membres des forces de « sécurité » un soir, sans mandat d’arrêt, après avoir saccagé notre maison et menacé ma sœur avec une arme. Pendant 21 jours, nous ne savions même pas où elle était jusqu’à ce qu’elle apparaisse, épuisée, frêle et terrifiée, devant un procureur.

Depuis deux ans, privés de visites ou d’appels téléphoniques, nous n’avons la certitude qu’elle est toujours vivante que tous les 45 jours (parfois plus) lorsqu’elle apparaît devant le procureur pour le renouvellement de sa détention provisoire. Comme des milliers d’autres prisonniers politiques, son cas n’est pas traité par un tribunal civil mais par une cour dédiée à la sécurité de l’État.

Le drame que vivent l’Égypte et ma mère est le résultat d’années de négligence de la part de gouvernements qui n’ont pas fait assez pour empêcher cette situation ou du moins l’améliorer.

L’Égypte est en train de s’effondrer sous les yeux de « partenaires stratégiques » qui ne font rien.

Pire, la banalisation de leurs relations avec un dictateur l’autorise à toujours plus de cruauté envers ceux et celles qui défendent les droits des Égyptiens.

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