Le ministère israélien des Sciences a son siège près de Ammunition Hill à Jérusalem Est occupée
(Heidi Levine / SIPA)
Par David Cronin
L’Union Européenne a tranquillement négocié un accord de coopération avec un ministère du gouvernement israélien situé à Jérusalem Est Occupée.
Tandis que l’accord a bénéficié d’un large soutien de la bureaucratie de Bruxelles, certain fonctionnaires ont affirmé qu’il ne peut être signé avec un organisme situé dans un territoire conquis pendant la Guerre de 1967.
En 2018, le Centre Commun de Recherche de l’UE – qui gère un réseau de laboratoires – a engagé des pourparlers avec le ministère des Sciences et Technologies. L’objectif était d’arriver à un accord qui permettrait une collaboration dans « de multiples domaines d’intérêt commun », un document interne à l’UE.
Ce document, obtenu en vertu des règles de la liberté de l’information, indique qu’un tel accord a été rédigé et diffusé qu cours de l’année 2019 à l’intérieur de la Commission Européenne, comme on appelle l’exécutif de l’UE.
La totalité des 11 départements de la Commission Européenne consultés à propos du projet d’accord ont émis une « opinion positive », déclare le document – voir ci-dessous.
Cependant, le service diplomatique de l’UE et les avocats de la maison ont émis une demande « de changement de la contrepartie israélienne ». Ils ont fait objection, ajoute le document, parce que le ministère des Sciences d’Israël a son siège social dans la rue Clermont-Ganneau – près de Ammunition Hill à Jérusalem Est.
Ces diplomates et ces avocats devraient-ils être remerciés pour avoir demandé que l’on fasse une distinction entre Israël et les territoires qu’il a saisis en juin 1967 ? La réponse courte est « non ».
Leurs inquiétudes concernant la localisation d’un ministère dans une zone sous occupation militaire sont annulées par leur volonté générale d’embrasser Israël, l’État qui impose cette occupation.
« Potentiel inexploité »
Par ailleurs, il faudrait souligner que les diplomates et les avocats ne faisaient que s’opposer à la signature d’un contrat officiel avec le ministère des Sciences. Ils n’ont pas stipulé qu’il fallait éviter d’interagir avec le ministère.
Stephen Quest du Centre Commun de Recherche a confirmé que son organisation était « toujours en contact avec le ministère des Sciences et Technologies, bien que la COVID-19 et les élections en Israël entre 2019 et 2021 aient affecté la fréquence des interactions et des discussions sur les accords officiels ».
Répondant à une question par mel, Quest a déclaré que le Centre Commun de Recherche avait consulté d’autres départements de la Commission Européenne sur « la forme et pas le contenu de la collaboration avec le ministère des Sciences et Technologies ».
En 2013, le service diplomatique de l’UE a donné son feu vert pour prendre contact avec le ministère des Sciences. Le ministère est représenté dans l’organisme israélien qui gère l’utilisation du financement de la recherche par l’Union Européenne.
L’UE a un nouvel ambassadeur en Israël, Dimiter Tzantchev. Peu avant son arrivée à Tel Aviv, il a fait remarquer que les liens entre l’UE et Israël sont « déjà si étroits mais ont encore un énorme potentiel inexploité ».
Tzantchev n’a pas donné de détails quand je lui ai demandé d’expliquer quel « potentiel inexploité » il avait en tête. Pourtant, les activités du Centre Commun de Recherche de l’UE offrent un indice sur ce qui est envisagé.
Un autre document obtenu grâce à une requête de liberté de l’information montre que le Centre Commun de Recherche a pris part à sept projets qui impliquent l’industrie nucléaire d’Israël. A partir de 2017, le document – voir ci-dessous – dit que le centre envisageait de « poursuivre la collaboration ».
Un accord sur la recherche nucléaire liant l’UE et Israël a expiré en 2018. Stephen Quest du Centre Commun de Recherche a confirmé que l’accord a été étendu jusqu’en 2024.
Toute cette collaboration est « pacifique », d’après les documents internes de l’UE.
Personne ne devrait être trompé par cette affirmation. Étant donné qu’Israël a introduit les armes nucléaires au Moyen Orient, cette industrie nucléaire menace l’avenir de l’humanité.
Parce qu’il a refusé de signer le Traité de Non-Prolifération, Israël n’autorise pas d’inspection internationale de ses installations nucléaires. Le technicien Mordechai Vanunu a été condamné à 18 ans de prison pour avoir révélé en 1988 des détails sur les armes nucléaires israéliennes.
De même qu’il est artificiel de faire une différence entre Israël et « l’occupation », il est artificiel de faire une différence entre le programme israélien de puissance nucléaire et ses armes nucléaires.
Le Centre Commun de Recherche a directement fait équipe avec la Commission de l’Énergie Atomique d’Israël. Il gère le complexe Dimona où sont assemblées les armes nucléaires israéliennes.
Par ailleurs, l’UE ne sollicite pas de contrôle de sa coopération nucléaire avec Israël. Certains détails de ce travail ont été censurés – soi-disant pour des raisons de « sécurité publique » – dans les documents qui m’ont été remis.
Il n’est pas surprenant que les bureaucrates de l’UE soient moins que transparents – pour le dire charitablement.
Une façon de s’occuper du « potentiel inexploité » dans les liens entre l’UE et Israël serait de renforcer la collaboration avec l’industrie nucléaire. Cela stimulerait les ambassadeurs à Tel Aviv, mais terrifierait quiconque se soucie de paix et de justice.
Lire le document en entier ici
Source : The Electronic Intifada
Traduction J. Ch. pour l’Agence média Palestine
Source : Agence Média Palestine
https://agencemediapalestine.fr/…