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22 novembre 2024

Les voleurs de paysage


Les voleurs de paysage

Olivier Cabanel

Sep 26

OLIVIER CABANEL — Où que se porte notre regard, il est arrêté aujourd’hui, non pas à la ligne bleue des Vosges, ou au sommet du Mont Blanc, mais à une myriade de panneaux tous aussi géants les uns que les autres : la publicité.

Ces affiches géantes, censées nous pousser à consommer, se sont tant multipliées qu’il devient difficile aujourd’hui d’apercevoir le paysage.

Nous avons sous les yeux des messages accrocheurs qui veulent nous faire rêver mais les appartements avec « vue sur la mer » sont devenus « vue sur l’amer ».

C’est appelé, sans rire, les arbres à pub. http://www.dailymotion.com/video/x1ioak_les-arbres-a-pub

Tout est bon pour convaincre le chaland : une fille à moitié nue pour nous inciter à acheter une voiture ou un fromage blanc.

Coluche l’avait compris avec son sketch sur des lessives qui lavaient plus blanc que blanc.

« Blanc, je connais », disait-il », « moins blanc, c’est gris, mais plus blanc que blanc, je ne vois pas… transparent ? »

Coluche a en même fait des contrepeteries : on se souvient de « mamie écrase les prouts », et dans ces temps là, la pub nous faisait passer à son insu de bons moments.

Mais la pub est devenue insupportable.

On ne peut pas y échapper : elle est présente sur tous les supports, de la radio à la télé, en passant par les journaux, mais aussi internet, les téléphones portables, et même nos propres habits car la plus subtile des publicités, c’est celle que nous faisons involontairement.

De la marque de jean, estampillée sur notre derrière, à celle du polo, nous sommes en quelque sorte des espaces publicitaires bénévoles.

Elle se glisse aussi dans les films et inconsciemment, nous allons enregistrer la présence de telle ou telle marque : voiture, parfum, alcool, et cela nous incitera à l’acheter.

Les publicistes le savent bien et c’est pour cette raison qu’ils financent beaucoup de films.

La pub nous amène aussi à nous poser d’étranges questions.

EDF dépense des sommes folles pour nous convaincre d’acheter son électricité.

A quoi bon, puisqu’elle en a encore le monopole.

Cela va bientôt changer, mais on peut se demander dans quel but elle dépense autant d’argent en espace publicitaire ?

Mettre sur nos boites aux lettres les autocollants « stop pub » est efficace, mais contre le reste, que faire ?

La résistance à la pub commence à s’organiser pour nous redonner nos paysages.

Pour mener une action citoyenne, une association s’est crée : les casseurs de pub.

http://www.casseursdepub.org/

Tous les ans, ils proposent des initiatives : une journée sans achats, une semaine sans télé avec comme mot d’ordre « la télé ou la planète ».

Il y a aussi les « barbouilleurs de pub », qui, pinceau à la main, attaquent la pub manu militari, et barbouillent ou détournent les affiches qui polluent nos murs.

Ces pubs ont une autre conséquence : 180 kg de papier sont consommés par an et par personne en France, et des forêts entières disparaissent chaque jour pour publier des messages racoleurs.

Plus de la moitié de la pâte à papier est importée.

Les Chinois n’en sont encore qu’à 35 kg, mais nul doute qu’ils vont bientôt nous rattraper.

L’utilisation du papier recyclé n’est qu’un pansement provisoire, puisqu’il provient lui-même du papier, et donc auparavant, des arbres.

10 millions d’hectares de foret sont détruits toutes les deux secondes, et le réchauffement planétaire s’accélère pour quelques publicités idiotes.

Alors comme disait un vieil ami africain :

« Celui qui rame dans le sens du courant, fait rire les crocodiles ».

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