Le monde, se serait mis un frein au seizième siècle afin d’écouler des photographies qui n’auraient pas jauni ? Des hommes, en tenue de combat et armés, de la vieille Europe, encadrant, refoulant, menaçant et sommant le naturel du coin dans un sempiternel enchaînement chorégraphique, sans jeu de mots ?
Comment accrocher ces fresques douteuses d’un autre temps ? Pour y parvenir, nous plongerons dans une rubrique désuète en surface, mais ô combien vivace en profondeur et malmenant la planète. Brutaliser ? Non, une attitude dangereuse, susceptible de conduire le globe terrestre à sa perte, car le loup perd son poil en conservant son vice.
– Que représente Mayotte ? Afin d’appréhender le sujet.
– De quels agissements, la situation actuelle tire-elle son origine ?
– Assurément, aux yeux du monde, ces images rétrogrades procurent honte et sentiment de lassitude, car le temps semble figé.
– Ces entités infantilisées, ne seraient aucunement capables de subvenir à leurs besoins ?
– Quelles raisons supérieures adjugent aux colonisateurs le droit d’humilier ad vitam æternam des peuples ?
Vers le milieu du 19e siècle, à la faveur de l’entente cordiale, la France profita de la bienveillance anglaise pour occuper l’archipel et y demeurer jusqu’au mois de juillet de l’année 1975, date de l’indépendance des Comores. Point repu, en dépit de ce bon siècle d’occupation, l’oppresseur s’arrangea afin de conserver une partie de l’ensemble, en l’occurrence, Mayotte. Quelle motivation française explique cette décision d’amputer les Comores de cette île de 374 km2 ? La réponse, accentuée par le code noir, est inscrite dans l’histoire depuis Colomb. Quoi qu’il en soit, le procédé employé pour réaliser la malhonnêteté paraît instructif afin de pénétrer l’art de coloniser. Natif de la Caraïbe, ce fait épargnera au responsable du texte, le voyage dans l’océan indien dans le but de démêler le processus de trépanation. Ce savoir-faire se maintient dans un exercice consistant à remplacer le cerveau par une pile assujettissante sans ouvrir le crâne. Comprenons bien que les méthodes destinées à provoquer la dégénérescence mentale, utilisées dans le dit outremer, restent identiques dans les différents points de cette étendue. Quelles sont ces techniques ? Bien sûr, nous les avons vues à l’œuvre en Nouvelle-Calédonie. L’occupant organise un référendum au sujet de l’indépendance en conservant son autorité, son pouvoir, sa justice, ses moyens de répression et surtout sa presse écrite, parlée et audiovisuelle. Retenons que les médias, dans les colonies, créent une arme plus redoutable et destructrice que le Sarmat2 russe.
Autre bombe hypersonique corruptrice, la fable de l’éducation nationale dans ce monde dit, périphérique de l’Europe. Ainsi, presse et éducation programment une préparation d’artillerie face à laquelle le colonisé, présumé votant lors du prochain scrutin, ne peut répondre. Tels des immeubles éventrés et soufflés par les déflagrations, les organes de la tête, en premier lieu le cerveau, sont dispersés à l’instar des ruines de Nagasaki. Privé de son libre-arbitre et répondant comme un automate aux desideratas de son parrain, le créolisé, sourire aux lèvres, agite son bulletin reçu. Ce dernier introduira son papier dans l’urne sous un magnifique oui-missié parfaitement démocratique, le jour de la consultation. Toutefois, avant de parvenir à cette étape, la corruption des élites de ces peuples demeure obligatoire afin de décerner un cachet démocratique à la stratégie. Est-ce une phase cruciale ? La réponse à cette interrogation réside dans l’apport des parlementaires des Dom-Tom aux décisions prises durant les travaux des assemblées françaises. En tout cas, cela suffit à donner une image d’intégration réussie au sein de la « mère patrie », donc à tromper son monde. Telles sont les pratiques usitées afin de conserver les débris de l’empire : la fabrication de pantins déculturés, servant les intérêts d’accapareurs prêts à tout pour maintenir une gestion datant de Colomb, en dépit de ses innovations de circonstances, comme l’abolition ou la départementalisation.
Néanmoins, les plages de sable fin et les forets luxuriantes de Mayotte ne sauraient expliquer cette obsession de poursuivre la colonisation envers et contre tous. Que représente pour la France, cette île de 374km2 à la population d’origine bantoue et musulmane comme l’ensemble de l’archipel comorien ? Est-ce un besoin vital pour la nation européenne de se maintenir à l’autre bout du monde, quand d’autres nations du dit vieux continent à l’image des pays scandinaves ou de l’Allemagne possèdent un excellent niveau de vie sans aucune colonie aux quatre coins de la planète ? Après tout, l’Angleterre est finalement parti de la Caraïbe, d’Afrique et d’ailleurs. L’Espagne s’est retiré du Sahara occidental, même si le problème reste entier pour les sahraouis. Comment saisir la soif française forcenée de coloniser encore de nos jours ? Certes, la colonisation demeure un manque de respect évident à l’égard des peuples sous domination, voire du monde entier. Leur histoire s’estompe pour distinguer celle du mentor. Leur pays devient une région administrative de l’autre, bien qu’un océan les sépare. Leur idiome ancestral disparaît en laissant le champ libre au parler de l’occupant. Les richesses du désormais colonisé deviennent les intérêts de l’accapareur. Le monde, dans sa diversité cesse d’exister. Une seule voix retentit et diffuse l’odyssée depuis les premiers temps. L’humanité est verrouillée, l’unique façon de penser vient d’occident, nous sommes dans la cristallisation du racisme. Où se situe la source de cette situation de fait ? La phobie de perdre son hégémonie et de disparaître ? Le parti-pris, désespéré, de s’accrocher à un monde radieux mais capricieux et tenté par de probables revirements ?
Le monde se transforme et ces tableaux désuets choquent. Des militaires étrangers à la région aux prises avec une population africaine ? La vision susurre de l’autre côté de l’écran une expression malaisée. Qu’on le veuille ou pas ces spectacles évoquent des scènes, éloignées dans le temps, mais demeurées impérissables dans les mémoires : des cohortes d’ouvriers de la canne fuyant les tirs, les godillots et les bâtons de la soldatesque défendant le droit béké. Ces supports dessinent en pointillés les populations du continent ancestral des 16e, 17e, 18e et début du 19e siècle fuyant les négriers européens afin d’échapper à la déportation. Ces vues rappellent, en outre, que nous sommes, à l’instar des populations palestiniennes des territoires occupés, les seuls êtres de la planète qui se font contrôler par des militaires étrangers sur nos propres sols. La France a provoqué cet ennui à Mayotte en conservant l’île.
De quoi à peur la France ? De perdre son hégémonie, son grade de grande puissance, son titre de fille aînée de l’église, sa médaille de championne toutes catégories des droits de l’homme, son diplôme en démocratie ? Particularités acquises suite à une longue nuit d’esclavage, de colonisation et de guerres coloniales imposées à des victimes toujours zombifiées, donc invisibles. Non ! Nous sommes dans le symbole ! L’impossibilité pour le colonisé de se gouverner, de se tirer d’affaire. Depuis 1804, tous les efforts occidentaux ont conjugué pour faire de ce pays, Haïti, l’emblème de l’impuissance africaine. Aristide, sur le point de redresser cette partie occidentale de Saint-Domingue fut déposé et expédié en Afrique du Sud par l’oncle Sam. Ainsi, se retrouve ce désir fou de domination, parfumé à la philosophie des lumières.
Toutefois, une sénatrice de la Martinique réclamait une plus grande implication de la France dans les affaires haïtiennes, suite à la prolifération des gangs criminels qui agitent ce pays. La parlementaire créolisée oubliait que le naufrage d’Haïti résulte des antécédents occidentaux dans l’île depuis le début du 19e siècle. Accablement qui pourrait être le sort des Comores si l’abcès Mayotte persistait.
Pourtant, bâtir un autre monde demeure possible, à condition que l’occident, tourmenté par la maladie de l’accaparement, s’éveillait pour saisir que son monde unipolaire était dépassé. Le reste de l’humanité ne peut rester aphone. D’autres intelligences, plus prometteuses et fraîches doivent se manifester. Du coup, ces images malsaines apparaissent comme un sentiment de gêne. En effet, la république des Comores n’a point reconnu la diminution de l’archipel. Pourquoi la France s’emploie à préserver cette réputation de pays possédant des peuples, comme un milliardaire détient des biens ? Par amour de l’humanité, désintéressement ? Voilà qui dérangerait un rien les morts de la traite dite négrière et des guerres coloniales. Sa philanthropie la pousserait à tirer de la misère ces peuples incapables de subvenir, par eux-mêmes, à leurs propres besoins ? Que nenni ! Dans ces pays soumis, un mensonge permanent est organisé afin de convaincre les populations de leur manque cruel de ressources, convertissant ainsi, la présence française en action de charité.
L’expression « indépendance nationale » provoque chez le naturel de la Martinique un tremblement comparable à celui d’un enfant épouvanté à l’idée de dormir seul dans une chambre obscure, à la suite d’un récit sombre. Cependant, on s’interroge sur l’inceste et les agressions sexuelles essuyés par les mineures dans le pays. Si l’adulte l’était vraiment, s’abaisserait-il à la hauteur d’un enfant de six, sept ou huit ans afin de satisfaire ses besoins sexuels ? Voilà la relation héritée d’un passé, colonial et captif, qui permet au tyran de tirer profit de la situation en rivant un peuple à la médiocrité. Quand on serine à longueur d’année, des mots comme grandeur et valeur, en effet, c’est aussi cela l’occident. C’est ce traitement qui suscite la peur et ferme les yeux du créolisé quant à ses capacités à tourner le dos à l’oppression coloniale rétrograde. La Martinique possède des atouts majeurs pour s’en sortir. L’île peut disposer de la ressource énergétique fournie par la géothermie. A partir de cette sève , nos usines pourraient fonctionner et donner naissance à de multiples industries, puisque le travail se crée. Grâce à un transfert de technologies et aux échanges, nous pourrions concevoir des activités industrielles plus lourdes. L’île de la Barbade demeure le 35e état développé de la planète, elle est plus restreinte et détient moins d’atouts que la Martinique.
Pourquoi la France s’entête à avilir puis à exercer un génocide par substitution de personnes à l’encontre de ses dernières colonies ? Le désir inassouvi de réaliser des colonies de peuplement comme les anglais en Australie ou en Nouvelle-Zélande ? L’angoisse de perdre un statut de « grand », usurpé ? Le besoin rassurant de conserver à tout jamais et à tout prix un symbole de domination ? Où se situe l’évolution de l’occident, perdu dans ses contradictions depuis l’âge du bronze ? Les raisons profondes de ce comportement interpellent et les questions s’amoncellent, sans réponse. Sans réponse ?
Emmanuel DUMORNE