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24 novembre 2024

Avec Séjourné, Macron transfère le Quai d’Orsay à Bruxelles


Le JDD : Avec Séjourné, Macron transfère le Quai d’Orsay à Bruxelles© par Ludovic Marin
Certains se demandent pourquoi avoir nommé comme ministre des affaires étrangères un individu sans aucune envergure mais exécuteur zélé des visées macroniennes, en tous les cas si l’on en croit cet article de Ludovic Marin, journaliste photographe de l’AFP, île de France qui se fait l’écho d’une fronde larvée du Quai d’Orsay. Un article très bien informé qui décrit la logique macronienne à l’œuvre dans cette nomination et plus généralement dans une politique de destruction accélérée de la souveraineté française au profit d’une intégration ultrarapide dans une UE dont le parlement est une simple chambre d’enregistrement. L’article que nous publions par ailleurs sur madame Meloni, montre à quel point on ne peut pas tabler sur le Rassemblement National pour s’opposer à ces visées qui sont celles du gouvernement Attal conçu comme l’exécutant des basses œuvres non pas de Macron mais de ceux dont il a toujours été l’exécutant fidèle. Cela doit être pris en compte dans les choix aux élections européennes, il est évident que la Nupes est incapable de résister au choc, sans parler des compromis des “verts” et des Glucksmann. (note de Danielle Bleitrach histoire et societe)

Stéphane Séjourné est devenu ministre des Affaires étrangères le 11 janvier dernier. Rapidement éclipsée, la nouvelle mérite pourtant une analyse en profondeur. L’inexpérience du secrétaire général de Renaissance à ce poste nous donne une première indication sur le projet d’Emmanuel Macron. D’abord agacé par la relative indépendance de Jean-Yves Le Drian, puis gêné par la maitrise technique de Catherine Colonna, le Président de la République a décidé qu’un homme lige, sans assise politique, lui permettrait d’accomplir plus aisément sa philosophie institutionnelle préférée : la fusion de tous les ministères avec les services de l’Élysée. Ce choix nous informe sur les véritables visées politiques d’Emmanuel Macron pour la suite de son mandat. Des enseignements d’autant plus graves qu’ils seront au cœur des négociations pour l’installation de la prochaine Commission européenne et de son programme.

Le Parlement européen est jusqu’à aujourd’hui la plus pure expression du macronisme

Stéphane Séjourné affirme avoir adoré l’esprit de négociation et de compromis du Parlement européen. Son expérience à Bruxelles lui servira de boussole au Quai d’Orsay. Il faut dire que le Parlement européen est jusqu’à aujourd’hui la plus pure expression du macronisme : l’immense majorité des groupes politiques y votent la confiance à une Commission européenne aussi bigarrée que toute puissante, se privant ainsi mécaniquement du pouvoir d’exercer leur contrôle sur l’agenda européen.

L’action de Stéphane Séjourné à la tête du groupe Renaissance est très documentée : votes, discours, inscriptions à l’ordre du jour, etc. Les décisions du Ministre ont été scrutées par toutes les chancelleries pendant quatre ans et tout le monde a donc les idées claires sur ce qu’il voudra accomplir. C’est déjà un grave danger pour les diplomates français dans le monde entier. Peu apprécié au Maroc, le nouveau Ministre des Affaires étrangères a par ailleurs voté des deux mains une avalanche de résolutions qui condamnent des dizaines de pays dans le monde. Afrique, Asie, et notamment Asie Centrale, Moyen-Orient, Amérique du Sud : bon courage aux Ambassadeurs qui seront reçus avec le résultat des votes de Monsieur Séjourné au Parlement européen lors de leurs prochains rendez-vous diplomatiques.

La fin du droit de véto est le tombeau de notre souveraineté
Ne doutons pas que Monsieur Séjourné reniera discrètement ses positions, arguant d’une discipline de groupe qui n’est rien d’autre qu’une trahison des intérêts français au profit du « grand tout » européen et de la religion des droits de l’homme et des minorités. Et c’est bien là que réside l’inclination la plus dangereuse de l’ancien protégé de Dominique Strauss Kahn.

On peut résumer sa philosophie générale en une phrase : accélérer le programme macronien d’abandon de la politique étrangère de la France au profit de l’Union européenne et notamment au Service européen pour l’action extérieure.

A Bruxelles, les députés d’Emmanuel Macron soutiennent l’élargissement de l’Union européenne jusqu’à l’absurde. Il faudrait se préparer à une Union Européenne à plus de 30 membres, peut-être même à 35 ou 36 comme l’a déclaré Bernard Guetta, en commission des affaires étrangères du Parlement européen le 27 avril 2023. À nous les conflits nationaux et religieux des Balkans, à nous l’influence de la Turquie qui règne en maître chez de nombreux pays candidats, à nous l’intégration aux forceps de l’Ukraine et son dumping social et agricole. Le projet des petits soldats de la Macronie est le même que leurs cousins technocrates bruxellois : dissoudre les pays fondateurs de l’UE dans un magma qui penchera de plus en plus à l’est plutôt que vers l’Atlantique et la Mer Méditerranéenne. Une tendance qu’Emmanuel Macron a embrassé depuis longtemps, soldant par ses errements les reliquats de notre influence en Afrique et au Moyen-Orient.

Le lundi 23 janvier le mouvement Renaissance appelait à une révision des traités pour s’adapter à un élargissement qu’il juge souhaitable et inéluctable. Au cœur de cette révision, plusieurs évolutions seraient une véritable trahison de la souveraineté nationale, comme l’abandon de la règle de l’unanimité au Conseil pour les décisions de politique étrangère ou de défense. Derrière ces termes techniques, une réalité pratique : la fin du droit de véto des Etats. La France pourrait donc être contrainte par une majorité d’autres membres de l’Union européenne à déclencher des sanctions contre des pays amis, à financer l’armement d’alliés engagés dans un conflit militaire, et qui sait, demain à soumettre ses armées à des puissances qui n’ont ni force militaire, ni politique étrangère indépendante. C’est le sens de la déclaration de Vienne, signée par Stéphane Séjourné le 26 septembre 2023 qui affirme : « L’Union européenne doit être en mesure de mener rapidement des actions décisives, aussi faut-il mettre fin au vote à l’unanimité des décisions en matière de politique étrangère et de sécurité » Ces « actions décisives », menées donc au nom de l’UE, la France ne pourrait pas s’en désolidariser ou s’y opposer, puisque son véto aurait disparu.

Adieu l’indépendance française
C’est tout simplement la fin de la lutte séculaire de la France pour son indépendance en Europe. Le combat de Philippe Auguste, Richelieu et du Général de Gaulle, celui qui justifia les sacrifices de la Résistance et l’audace du Gouvernement Provisoire de la République française, est abandonné comme un héritage trop lourd, trop imposant pour les petites mains d’Emmanuel Macron.

Cette évolution sera maquillée. Séjourné et Macron parleront de nécessité d’avancer, d’admettre les évolutions du monde, ou évoqueront l’Europe puissance, stratégiquement autonome, que les fédéralistes font miroiter aux peuples depuis le début de la construction européenne. La réalité est toute autre : n’ayant plus confiance dans le peuple français, les hommes de Macron veulent fondre son destin dans celui du Léviathan idéalisé bruxellois. A l’inverse, chacun constate que les Nations qui font le pari de l’indépendance parviennent à garder la maitrise sur leur destin. Il suffit de constater la haine contre l’indépendance effrontée de la Hongrie de Viktor Orban à Bruxelles pour s’en convaincre.

Finalement, en nommant Stéphane Séjourné au Quai d’Orsay, Emmanuel Macron a certainement voulu clore définitivement l’ère de l’indépendance diplomatique française. L’extinction du corps des conseillers des affaires étrangères et des ministres plénipotentiaires effective depuis le 1er janvier 2023 est le prélude au transfert des compétences, humaines et souveraines, à Bruxelles, où Macron organise la migration des derniers pans de souveraineté française. C’est logique d’ailleurs : pourquoi conserver un corps d’excellence faisant rayonner la France dans le monde ? Il est évident que l’accélération de l’élargissement de l’UE, la fin du droit de véto, conjugués aux impératifs de coordination de la politique étrangère des Etats membres déjà présents dans le Traité de Lisbonne, actent la vassalisation des Français à la loi du nombre au sein du Conseil européen.

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