Mistral russes : les factures cachées de la non-livraison
Info Le Point ( Par GUERRIC PONCET) – La France pourrait avoir à payer plus de 2 milliards d’euros, pour un contrat qui devait s’élever à 1,2 milliard. Explications.
L’accord trouvé entre la France et la Russie pour la non-livraison des deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) de classe Mistral commandés en 2011 par Moscou, prévoit un remboursement inférieur, selon Jean-Yves Le Drian, au montant initial du contrat : 1,2 milliard d’euros. Mais le ministre de la Défense s’est bien gardé d’évoquer les frais annexes. Selon Le Canard enchaîné, le total pourrait dépasser les deux milliards d’euros.
Le gros de la facture pour la France consiste en un remboursement des 896 millions d’euros qui avaient déjà été payés. Mais le chèque russe ne se limitera pas au simple remboursement : Moscou aurait exigé durant les négociations une compensation pour d’autres frais engagés, comme la formation des 400 membres d’équipage, les travaux dans le port d’attache, ou encore l’adaptation de 32 hélicoptères d’attaque KA-52 (ou K52) en version maritime KA-52K. Une grosse centaine de millions en plus qui fait monter la facture à près d’un milliard.
Deux Mistral en soldes
Mais ce n’est pas tout. L’État doit aussi prendre à sa charge le manque à gagner pour le constructeur DCNS, qui s’élève à 350 millions d’euros, selon l’hebdomadaire satirique, ainsi que les travaux de réadaptation en vue d’une vente à un autre client. La restitution à la Russie des équipements électroniques, et leur remplacement, pourrait coûter plus de 200 millions d’euros. Enfin, les frais de gardiennage, d’entretien et d’assurance des navires à Saint-Nazaire s’élèvent à 5 millions d’euros par mois. De quoi, selon le Canard, pousser DCNS à envisager sérieusement de couler les deux bateaux au milieu de l’Atlantique. Une solution qui n’est, en termes d’image, pas envisageable…
Seule consolation : si la France trouve un repreneur, la facture sera allégée. Les experts évoquent le Brésil, l’Inde, le Canada ou l’Algérie comme clients potentiels, mais aucun ne s’est pour le moment déclaré intéressé.
Les marins français ne veulent pas des Mistral russes
Côté russe, c’est « le jackpot », selon le Canard. Leurs ingénieurs ont reçu à l’oeil 150 000 pages de documentation technique, dans le cadre du transfert de technologie prévu par le contrat, et ils ont lancé la construction de leurs propres versions du Mistral. En outre, grâce à la baisse du rouble face à l’euro entre le moment où la Russie a payé et le moment où elle a été remboursée, Moscou a récupéré 65 milliards de roubles alors qu’elle n’avait payé « que » 40 milliards…
En attendant, la marine nationale est terrorisée à l’idée que le gouvernement lui impose de récupérer ces deux navires dont elle ne veut pas, car cela l’obligerait (à budget constant) à faire une croix sur d’autres navires, notamment des frégates. Et puis des Mistral, elle en a déjà trois, et c’est largement suffisant…
L’examen en septembre par l’Assemblée nationale de l’accord signé par le gouvernement avec la Russie devrait permettre de connaître les détails des frais engagés.
Posted on août 12, 2015 @ 17:40
Allain Jules