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23 novembre 2024

Les Grosses Orchades, les Amples Thalamanèges


 

 

 

 

 

 

 

Axiome de la sphère

 

 

 

 

Karl Marx aurait aujourd’hui 202 ans

 

 

 

 

En guise de bouquet de fleurs, un livre qui sort des presses, dont on peut penser qu’il y jetterait un coup d’œil intéressé.

 

 

« Les foules n’ont jamais soif de vérités.
Devant les évidences qui leur déplaisent, elles se détournent, préférant déifier l’erreur, si l’erreur les séduit.

Qui sait les illusionner est aisément leur maître ; qui tente de les désillusionner est toujours leur victime. »

Gustave Le Bon, Psychologie des foules

[Cité par Georges Stanechy, nous comptons y revenir]

 

 

« Je confesse, très hypothétique lecteur contemporain, ma lassitude à te gaver de mots dont tu n’as sans doute que faire, plus soucieux de ton feuilleton télévisé que des aventures d’Ishtar et de Gilgamesh. Mais ce n’est pas à toi que s’adressent prioritairement mes phrases, et Jérôme Bosch m’encourage à terminer cette Œuvre au Rouge en pensant à tous ceux qu’elle enchantera dans cinq siècles ou millénaires. »

Anatole Atlas, Axiome de la sphère

 

 

 

 

 

Anatolae ATLAS

Axiome de la sphère

Miroir sphérique – Avril 2020

496 pages  – 17 x 24 cm

20 €

En ligne, au Miroir spérique (spherisme.be)

et en ces temps de confinement, chez Tropismes, à Bruxelles.

Bientôt, on l’espère, ailleurs : indication ici.

 

 

 

 

Dès AJIACO, l’auteur annonçait clairement la couleur :

 

« Un spectre hante la littérature : le spectre de l’aède. Il est le refoulé d’une ère prosaïque interdisant que soit traduit en chant le poème du monde. Sa mélopée, depuis la guerre de Troie, dans un miroir sphérique, offre une vision globale dont s’élucident les trompe-l’œil du dernier demi-siècle. »

 

C’est le rôle qu’il s’est assigné et c’est ainsi qu’il se voit : en Homère des temps post-modernes. On pourrait penser qu’il souffre de narcissisme ou de folie des grandeurs. Mais chaque grande convulsion de l’humanité a ses bardes, ambulants ou pas. Qui le sait de leur vivant ? Fou littéraire parce qu’il s’autoédite ? Nous l’avons déjà dit mais répétons-le : ne peut désormais plus être considéré comme condition d’accès à la folie littéraire le fait de s’éditer soi-même. Assurément Plus depuis que la censure, devenue économique, interdit l’édition et la publication de quiconque a quelque chose à communiquer à ses semblables. Et peu importe que ce quelque chose soit politiquement orienté à droite, à gauche ou ailleurs (sauf à l’extrême-centre). Penser, dire ou écrire ce qu’on pense et le faire avec talent constitue, pour les parasites à la barre de notre piteuse Nef des Fous, un bien trop mortel danger. Ils n’éradiqueraient pas avec plus de frénésie des rats porteurs de la peste et du choléra.

 

Est-il besoin d’un avertissement supplémentaire ?

Oui, peut-être, pour les néophytes.

Quiconque a lu, dans notre langue,  Rabelais et Robespierre – qui est son verbe incarné – sait qu’il faut pour les lire autant d’énergie qu’il leur en a fallu pour dire. C’est une énergie de cette espèce qu’il faut pour s’approcher d’Atlas, dont la prose ressemble un peu, si on ose ainsi comparer, à la musique de Wagner : quand on croit que c’est fini, cela recommence et cela n’en finit pas de recommencer en irrépressibles spirales  qui naissent, meurent et renaissent les unes des autres, car il s’agit d’un chant, pas de dissertations. Or, goûter la musique de Wagner n’est généralement pas un goût inné, il faut l’acquérir, mais, dieu, qu’on en est récompensé ! Et laissez quimper Salvador Dali, qui trouvait que cela fait trop de bruit. Vous aurez le temps de vous reposer quand l’âge et le Heavy Metal vous auront rendus sourds.

Donc, si les torrents d’éloquence d’Atlas vous effarouchent, faites comme nous : lisez-en ce que vous pouvez sans perdre pied, interrompez-vous de temps en temps pour aller vous écouter, les pieds sur la table, un CD du Maestro Fagioli ou de Max Emmanuel Cencic, puis revenez-y, dispos et d’attaque. Bientôt vous ne pourrez plus le lâcher, même pour reprendre haleine.

 

 

 

 

Dans une de ses errances antérieures, celle d’AMEN qui précédait AJIACO, Atlas-Homère assistait à une curieuse partie de poker entre quatre fameux truands : le roi d’Arabie Saoudite, l’émir du Qatar, le sultan de Turquie et le parrain d’Israël en Palestine Biblik Bibi. On était en Atlantide, pas loin du Rocher des Djinns, au Maghreb.

Dans cette errance-ci, l’ancêtre qui le guide n’est plus Ulenspiegel ni Maigret, ni Avicenne, c’est Gilgamesh, mythique roi d’Uruk en Mésopotamie, encore bon pied bon œil malgré ses 5.000 ans.

 

 

 

 

1ère Digression

Bien que ce soient les femmes de son peuple qui aient inventé l’écriture – sinon pourquoi la déesse Nidaba et non un dieu ?  –  Gilgamesh en tient pour la transmission orale qui nous a valu les plus grands et les plus immortels chefs d’œuvres, d’Homère à Rabelais, en passant par l’Odyssée qu’improvisa, en s’accompagnant sans doute à la cithare, la jeune Sicilienne sans nom dont les parents ou les grands-parents, immigrés venus d’Ionie, cette Grèce d’Orient patrie d’Homère et de Sapho, avaient fondé sa ville de Trapani et celle de Marseille.

Ici, Gilgamesh, voyageant en terre d’Arménie, pas loin du mont Ararat, murmure son rêve éveillé, ses pensées, ses prémonitions, ses songes autant que ses souvenirs, et son scribe Anatole sténographie ce qu’il dit, comme faisaient au XVIe siècle les secrétaires du duc de Langeais et du cardinal du Bellay, assis aux pieds de Rabelais, pour que ne soient pas perdues les histoires qu’on le priait de conter à table.

 

 

Sachez cependant que le jeune roi cinq fois millénaire ne voyage ni en jet ni accroché à un drone, mais en carriole tirée par un âne, et en compagnie d’un couple à première vue improbable mais tout ce qu’il y a de plus réel et contemporain : Elisabeth Badinter, féministe et philosophe, milliardaire présidente de Publicis, et son époux Robert, ex-maître du barreau et Garde des Sceaux de feu François Mitterrand.

Ce dont ne se doute pas le couple Badinter, c’est que l’âne fatigué qui les tracte n’est autre, précisément, que le quatrième président de la Ve République Française, le beau François lui-même, condamné pour ses péchés à se réincarner en ce modeste équidé, qui entend tout ce qui se dit, y compris de lui, n’en pense pas moins, et c’est peu dire que, souvent, il enrage.

On retrouve aussi, dans cet AXIOME, le duo de Léviathans chers à l’auteur (façon de parler) : Kapitotal et Tour Panoptic, et des personnages de rencontre qu’il faut bien qualifier d’inévitables dès lors qu’il est question des maux universels d’aujourd’hui, mais déjà vieilles connaissances, Killer Donald, Baby Mac et Biblik Bibi, mais en outre quelques survenants nouveaux  tels que BHL et Jacques Attali, Elon Musk et un MBS ne se séparant pas d’un carton à chapeaux où il transporte une tête, avec passages, en guest stars, de la déesse Ishtar et de la divine Shéhérazade, ce qui nous vaut, en fin de volume, quelques intrusions éloquentes du calife des Mille et Une Nuits contemporain de Charlemagne Haroun al-Rachid lui-même, dont nous apprenons sans trop de surprise qu’un pion de son jeu d’échecs, pillé avec tant d’autres trésors à Bagdad, trône sur la table du Bureau Ovale.

 

 

Plus facilement transportable, il est vrai qu’un taureau ailé.

 

 

Parler d’un livre, c’est bien, mais le laisser parler lui-même vaut mieux. Citations, donc. Bonnes feuilles. La difficulté, cette fois encore, était de choisir, en avançant dans cette forêt touffue, c’est-à-dire dans ce jardin qui se déploie de mille façons, à l’infini, et n’en finit pas de se déployer, parce que l’imagination de celui ou celle qui regarde n’en finit pas d’y ajouter des déploiements nouveaux.

Nous y avons relevé pour vous, au passage et au petit bonheur la chance, des formules qui nous ont frappés ou qu’on voudrait avoir écrites, et nous y joindrons, en annexe, deux ou trois extraits.

Vous aurez même droit à quelques digressions de notre cru, que vous pourrez sauter sans dommage, mais où le savant auteur apprendra de nous que YHWH ne vient pas du tout de JOVIS…

 

D’Ève et de Nidaba

Nidaba, déesse sumérienne de l’écriture

3.000 ans avant Sumer : l’écriture de Vinca

Le Jardin des Délices, source d’inspiration littéraire

 

Ce qu’il vous faut savoir surtout,

c’est que le chant de l’aède se poursuit – au fil des événements qui ont suivi la dernière page de son livre – sur le site spherisme.be. Ces pages, qu’il intitule « Invitations »,  seront réunies l’an prochain dans son volume suivant. À ce jour, il y en a quinze et les voilà : http://www.spherisme.be/Texte/ShalomofMoloch.htm

 

 

 

 

Glané en lisant AXIOME

 

L’âne :

« Laissez-vous tenter par une balade à dos d’âne sur ces terres bibliques, ai-je envie de braire à l’adresse d’un invisible public. Vous aurez la chance  d’obtenir une vue panoramique sur l’histoire d’au moins trois millénaires, et recevrez en prime une vision détaillée des secrets d’État les plus actuels. »

 

C’est Ishtar qui parle :

« Une logique binaire n’autorise d’alternative qu’entre conservatisme nationaliste et multinationalisme progressiste, mâchoires carnassières du même Moloch. Qui vend les passeports au plus offrant : de 100.000 à plusieurs millions de dollars. Un membre de la race élue peut disposer de 100 nationalités, quand plusieurs milliards de damnés, déracinés et dépossédés, n’ont plus d’autre pays que la Terre Promise par la secte évangélique du Royaume de Dieu. »

 

Le scribe (ou Gilgamesh ?) :

[…] Car la valorisation du capital est inséparable d’une dévalorisation de la force de travail, et cet antagonisme fondamental ne peut être révélé, qui ouvrirait l’hypothèse d’une alternative aux dictatures de valeur d’échange et travail mort sur valeur d’usage et travail vivant, soit la possibilité d’un au-delà du capitalisme…

[…] Trident Juncture massera quelquie 50.000 hommes aux frontières de la Russie et de l’Arménie. Dans le même temps l’Occident prendra l’Orient à la gorge en frappant l’Iran. Que cent ans après la première guerre mondiale, des manœuvres guerrières d’une telle ampleur se déploient dans une aussi complète passivité des milieux intellectuels, signifie bien l’interdiction de toute conscience…

 

Gilgameshn, magicien d’Irak, prend l’apparence de son propre crâne dans les mains d’Ishtar, qui s’amuse à contrefaire Hamlet parlant à Yorik :

« Quelle ère de l’histoire a-t-elle engendré plus de persécutions massives que la vôtre ? Aux migrations des campagnes vers les villes ayant produit les vagabonds d’antan, nécessaires pour fournir la main d’œuvre de vos usines, a succédé l’errance mondiale des migrabonds. »

 

Là, c’est nettement le scribe :

À ce titre, l’ouvrage Histoire et conscience de classe (écrit à partir de 1918) de Georg Lukács est assurément le travail théorique ayant fait l’objet de l’omerta la plus absolue dans les milieux universitaires et médiatiques au cours du XXe siècle ; et La société du spectacle de Guy Debord, celui qui fit le plus d’usage idéologique depuis cinquante ans…

 

Encore l’âne Tonton :

[…] Mésopotamie, chair femelle des fertilités originelles, quelle métaphore pour le phallus des bombes. Chaque pays d’Europe moins lié aux autres que tous soumis au nerf de bœuf de l’Oncle Sam. Quand j’étais l’équarisseur du peuple français, l’écornifleur de toutes les gauches occidentales, pouvais-je imaginer que j’aurais un jour à trembler pour ma propre barbaque ?

 

Gilgamesh :

« Nous sommes vos boucliers », clament ces glaives aux peuples en les saignant ; « Payez et nous vous défendrons ! »

[…] … quand Baby Mac, réfugié dans une casemate militaire sur l’arrière-front du Tchad, pousse l’obscénité jusqu’à contrefaire une posture morale digne de l’agent du MOSSAD Benalla (muni d’un passeport diplomatique, son barbouze l’avait précédé dans cette garnison française en Afrique, où se nouent tous les trafics d’armes, de djihad et de métaux rares)…

 

Gilgamesh encore, sur les Gilets Jaunes :

[…] « L’ordre et la concorde doivent régner » proféra depuis son bastion néocolonial cet employé de Rothschild à l’Élysée, pour mater par les mots un peuple insurgé.

[…] Kapitotal a-t-il pris son envol en France (deux ans après le coup d’État monétaire de Nixon en 1971) grâce à la loi Rothschild, sommant l’État d’obéir aux marchés financiers, prélude à l’esclavage par la dette ? Les Gilets Jaunes sont complices de génocide en vitupérant ces gangs, rétorque la Tour Panoptric…

Une étincelle a donc jailli. Cette flamme a traversé des corps, erré dans les têtes qui se sont mises à parler. La gangue de rêves morts et de mémoire falsifiée s’est fissurée, des foules inconnues d’elles-mêmes se découvrant en vie, parant la grise misère ordinaire aux couleurs d’une commune oriflamme. Aux carrefours, les silhouettes anonymes se sont intronisées les unes les autres en Jasons rédempteurs d’une antique chevalerie, celle de la Toison d’Or.

 

Gilgamesh sur un des plumitifs à la mode :

« Très peu de carnage » ânonnera le plus célèbre grabataire français du verbe aux ordres de ses commanditaires, pour décrire la situation. Non sans féliciter Killer Donald pour avoir mis fin à l’impérialisme américain, quand celui-ci relance le pillage de l’Irak. Soit la dose maximale de remugles toxiques imposés par Kapitotal à l’industrie de l’insignifiance promotionnée par la Tour Panoptic…

[…] Cet organisme acéphale dont l’appareil digestif a colonisé le cerveau, n’ayant plus guère que des productions culturelles excrémentielles, ne déclenche-t-il pas des perplexités faisant se demander où est son bec ? Baptisons donc « Où-est-le-bec » ce lombric illustratif d’une structure où se confondent les orifices de la parole et de la défécation, caractérisée par médiocrité d’inspiration et plat prosaïsme d’expression…

[…] À dates fixes, gazettes et magazines font l’unanime réclame d’un même putride orviétan, vendu comme panacée pour troubles gastriques et intestinaux d’une Animal Farm où lois de la gestion et de la digestion se confondent…

[…] C’est Drieu la Rochelle (panache et style en moins) discréditant la Révolution Française et la Commune de Paris, comme toute Résistance à Vichy, sous le brillant prétexte que mieux vaut prendre un comprimé de sérotonine…

 

Gilgamesh (et son scribe, grand amateur d’anagrammes) :

Capture et prise en otage de la littérature dans un numéro de dressage pour le cirque du MOLOCH : à ces exercices excelle BHL. N’est-il pas le pontife de la Multinational’s Oligarchic Leaders & Opinioners Church ?

Un livre sans égal signalait cet automne qu’au sommet de cette occulte synarchie siège un synode composé de six prélats, choisis pour leur expertise en l’art de la mystification, groupés sous le nom de SHALOM.

Ce constat ne pouvait bien sûr être ébruité par une presse aux ordres, qui passa sous silence le contenu de cet ouvrage. Le quotidien belge de référence poussa la servilité jusqu’à ne pas mentionner son existence. Et la Commission des Lettres de ce pays, qui prescrit l’achat pour les bibliothèques de toute publication belge, ordonna son élimination des tablettes officielles. Ces vilenies produisirent un effet comique, AJIACO bouclant en beauté la seule œuvre qui assume l’héritage épique de Charles De Coster. Si la valetaille prostituée fit disparaître ce péril, il incombait donc au destin d’en offrir l’éclatante confirmation : cinq des six prélats du MOLOCH acoquinés dans SHALOM ne viennent-ils pas de lancer leurs dernières salves en bombardement groupé ?…

Sollers : « Une conversation infinie »             Janvier 2019
Houellebecq : « Sérotonine »                         Janvier 2019
Attali : « Les Chemins de l’Essentiel »                 Mai 2018
Lévy : « Looping for Europe »                        Janvier 2019
Onfray : « Sagesse »                                     Janvier 2019
Minc : « Voyage au centre du système »        Janvier 2019

 

 

 

 

Tout à coup, les voyageurs sont face à face (ou sont-ils dedans ?) avec le plus fameux triptyque du monde : Le Jardin des délices. Est-ce Anatole Atlas qui poursuit, telle une tournée des grands-ducs, celle des génies de sa Lotharingie ou quoi ? Après Simenon et De Coster, maintenant Bosch ? Pourtant, c’est toujours Gilgamesh qui parle :

 

Le couple Badinter scrute mon éblouissement devant l’image même des origines et des fins dernières. Élisabeth prend ma main. « Revenez sur terre, n’ayez pas peur. Vous êtes ici chez vous. Nous sommes bien sur le plateau du Caucase où prennent source le Tigre et l’Euphrate, ces fleuves qui, selon le mythe, baignent le jardin d’Éden. »

 

Mais que vient faire en Anatolie, le tableau de Jérôme Bosch ? Certes on y attend du beau monde,Trident Juncture obligeant, cependant…

 

Convaincu de la sorcellerie dont est irradié ce chef d’œuvre halluciné, je n’ose demander pourquoi l’on a pris le risque de lui faire effectuer un si aléatoire voyage. Élisabeth pouffe d’un rire de jeune fille timide. « C’est encore un secret. Robert et moi serons gênés de le divulguer. »

 

On n’en finirait pas de citer.

 

 

 

 

Extraits

 

Le Sens, la Sensure et les Sentinelles

pour Michèle, mon Ishtar

 

Quand le cercle se ferme, s’ouvre la Sphère. Ces jours-ci, mon scribe accueillait Thyl Ulenspiegel et Jules Maigret sur le Rocher des Djinns, ultime contrefort de l’Atlas plongeant dans l’Atlantique. Le fameux commissaire sortait pour l’occasion de sa retraite à Meung-sur-Loire, en raison d’une enquête à mener sur le dernier projet de la firme Google. Welcome in Smartworld, pouvait-on lire en lettres d’or géantes au sommet de la montagne. Pour que le taux de croissance de la cybersécurité continue de grimper à deux chiffres, il n’était rien de plus indispensable que d’augmenter le taux de la cybercriminalité… Maussade, bougon, la pipe aux dents, Jules fait à ses deux compagnons le constat que l’utilisation des algorithmes s’est généralisée dans la police pour croiser les données relatives aux crimes, quand il paraît certain qu’une banalisation de la société panoptique fait d’abord le jeu du crime organisé, lui-même aux ordres de la finance mondialisée.

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Une double traversée du miroir (suite)

 

(C’était en mai 2018)

 

 

Plus encore que de surdité, c’est de cécité que souffre un monde ayant, voici 50 ans, craché le slogan situationniste : « À bas la Société du Spectacle »

Quel sens a ce slogan, sinon l’injonction des futurs shows à une occultation des Lumières ? Voici l’axe Washington-Jérusalem-Riyad réitérant pareille déclaration de guerre. Le sionisme salafiste, sous protectorat yankee, a vu s’écrouler sa créature dite « État islamique ». Cette hydre à trois têtes vient donc de frapper le 8 mai – date symbolique de victoire contre une précédente hydre meurtrière –, non sans que Killer Donald ne se fût assuré de la parfaite soumission de Baby Mac et des autres vassaux européens, récemment convoqués à ses pieds par le Chief Executive Officer de la Maison Blanche.

1968-2018 : un demi-siècle de progressif enténèbrement. Que refuse-t-on de voir, tant cela crève les yeux, dans Mai 68 ? Telle serait la question posée par Aragon cinq ans plus tard…

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Pièce à conviction

 

Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre ! »

VILLON

 

 

 

 

 

UNE PÂLEUR ÉCLAIRE L’HORIZON D’ORIENT, baiser d’aurore sur le blanc laiteux d’un océan. L’existence ne repose-t-elle pas sur de tels mirages ? Depuis que nous avons repris la route après ce long bivouac, je trottine en silence…

Comme plus d’un condamné subit son sort pour ses qualités davantage que pour ses défauts, n’est-ce pas à ses dons que l’âne doit l’opprobre qui l’accable ? On raille sa stupidité, quand nul autre animal ne se voit confier la mission de conduire à bon port des maîtres endormis…

Qui soupçonnerait la présence de fantômes, chez ces représentants de la race d’équidés la plus méprisée parmi celles qui descendirent de l’arche de Noé ? J’exerce humblement mon apostolat, tirant un lourd charroi dans ces chemins enneigés, non sans ourdir en secret, depuis les coulisses, une représentation dont les acteurs ne peuvent guère plus avoir idée que de leur audience auprès d’un éventuel public…

En ce temps de séismes et de cyclones, d’incendies et de raz-de-marée dont une cause occultée rend les effets chaque jour plus désastreux – dirigeant l’espèce humaine vers un avenir de feu et de sang – quelle catastrophe pire encore pourrait-elle frapper ces êtres doués de parole, s’ils couraient le risque de prêter l’oreille à un bourricot ?…

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Vous pouvez lire ou relire aussi, sur Les Grosses Orchades :

 

Berlues d’Hurluberlu

AMEN

AJIACO

Anatole Atlas au Chili

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                  

 

 

Outre un auteur de thrillers honoré de plusieurs prix internationaux, Michael DIBDIN est le plus italien des écrivains britanniques. Avec ses onze titres consacrés au sous-commissaire (vice questore) Aurelio Zen, se déroulant chacun dans une ville ou une région différente du pays, il a brossé un tableau de l’Italie des années de plomb que ne pourront pas ignorer les historiens futurs. Il y a parlé des Italiens comme quelqu’un qui non seulement les connaissait très bien – il a enseigné des années à Pérouse – mais qui les aimait. Et comme quelqu’un qui a été capable de comprendre, en profondeur, tout ce qui agitait la péninsule, des affrontements du passé jamais cicatrisés aux aspirations et aux déchirements du présent, sur fond d’interventions étrangères de tous ordres. L’Italie de cette époque mouvementée a trouvé en lui son nouveau Stendhal. Michael DIBDIN a fini sa vie à Seattle (USA) en 2007.

Pour les curieux, nous avons griffonné un rapide résumé de ces deux livres.

Lire ici…

 

Comme l’auront compris ceux qui auront eu la curiosité de lire nos 5e de couvertures, le premier des deux livres est aussi sombre et désespéré que l’autre est irrésistiblement drôle et allègre, avec le même Zen pour personnage principal.. On peut ne pas s’en apercevoir, si on ne les lit pas à la suite l’un de l’autre, bien qu’ils se suivent très intentionnellement dans le canon de l’auteur.

L’explication en est donnée à la fin de Cosi fan tutti, quand Aurelio Zen déclare, à toute la troupe rassemblée pour le finale :

 

— Un célèbre philosophe a remarqué un jour que tout arrive deux fois. Un philosophe ultérieur – encore plus célèbre dans ma jeunesse, mais maintenant presque oublié – a remarqué que son prédécesseur aurait dû ajouter « que la première fois, c’était une forme de tragédie, et la deuxième fois une farce ».

 

ajoutant :

 

— Je ne suis pas philosophe, mais mes expériences récentes m’ont convaincu que cela correspond à ma propre vie. Et, si l’on peut me permettre d’ajouter ma modeste note en la matière, il vaut mieux que ce ne soit pas le contraire.

 

Le premier philosophe pourrait bien être Hegel, mais le second est assurément Karl Marx, qui a fait cette remarque à propos des deux empereurs Napoléon de la France.

Presque oublié lui aussi est aujourd’hui Michael Dibdin, dont les éditeurs français n’ont même pas attendu la mort pour le laisser tomber. Ses trois derniers romans – dont Back to Bologna, un bijou plein de pépites –  n’ont jamais été traduits.

Espérons que l’ingrate indifférence de nos cieux incléments tant pour l’auteur que pour le philosophe ne sera que temporaire et que l’illettrisme venu d’en-haut qui nous accable sera à son tour oublié le plus tôt possible.

 

Bon anniversaire, camarade !

 

 

 

 

Mis en ligne le 5 mai 2020

 

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