Printemps, Frères et lendemains par Ahmed Halfaoui
25 juin 2012
http://www.lesdebats.com/editions/250612/les%20debats.htm
Printemps, Frères et lendemains
Les Libyens, les «révolutionnaires» s’entend, ont bénéficié de la plus mémorable révolution que l’humanité ait connue, avec rien qu’à cueillir les victoires sur les traces des bombardiers de l’OTAN et à parader sur les écrans des télévisions du monde entier, offertes comme jamais. Le jour venu, ils refusent de se plier au pouvoir qui leur est livré sur un plateau et se battent, pour de vrai cette fois-ci, entre eux, pour décider qui va se servir sur la population. Les Egyptiens ont voulu leur révolution, du moins les plus visibles, ils ont eu les «Frères», élus par de vrais électeurs, mais dont l’armée ne veut pas. Une chance pour les «Frères» qui n’ont rien à proposer que Moubarak n’ait pas fait et qui peuvent retarder le temps où il décevront les rêves. Les Tunisiens, parrains patentés du «printemps des arabes et assimilés», ont aussi eu les «Frères» pour les diriger et qui n’en finissent pas de tenter de rétablir ce que Zine El Abidine assurait, avec la sécurité en prime. Les Marocains, encore, ont élu des «Frères» sans qu’ils sentent le moindre frémissement qui augure du nouveau dans leur environnement.
Ces quatre peuples sont censés avoir réalisé le «changement», tel que c’était écrit dans l’air du temps. Ils devaient être portés par un enthousiasme sans limite et vivre une liesse sans pareille d’avoir gagné cette «démocratie», remède à tous leurs maux. Ce n’est pas le cas, ils n’en sont pas contents du tout et ils le montrent tous les jours. Et, coïncidence ou pas, le «printemps» a été remisé, vidé des écrans de télévision et interdit de cité au sein du «comité de rédaction international». En Syrie, où il devient de plus difficile de parler de «printemps», le temps est à des «brigades internationales» d’un nouveau type. Car, faute de pouvoir bombarder et de trouver suffisamment de «révolutionnaires», la «communauté internationale» soutient l’option de les importer.
Qu’importe, comme en Libye, s’ils sont islamistes. Chez nous, les chercheurs de «printemps» qui écumaient les hôtels et les résidences huppées, qui étaient sûrs de le voir se produire, qui trouvaient toutes les raisons et toutes les prémices de son éclosion, qui finirent par s’interroger sur «l’exception algérienne», ont plié bagages et sont rentrés bredouilles. Mais n’empêche que, comme prévu, nous avons eu des élections avec plein de promesses, dont on attend les premières esquisses de mise en œuvre. Pour attendre on a eu le «printemps» des partis. Des plus «grands» aux plus «petits», ils sont rares ceux qui ne l’ont pas connu. Peut-être est-ce là le vrai printemps qui va nous changer de l’indigence ambiante et provoquer un minimum d’animation sur la scène politique avec de vrais débats, des idées clairement exprimées et, par-dessus tout, des programmes identifiables et publics. On peut en rêver car, en principe, il n’y a rien de plus simple à nous expliquer en quoi notre choix serait différent selon qu’il aille à l’une où à l’autre des chapelles qui se proposent à nous gouverner. Parler juste de «démocratie» ne suffit plus.
Par Ahmed Halfaoui