On dit « il faut » à l’Algérie
17 avril 2013
On dit « il faut » à l’Algérie
A force de reculades de nos gouvernants, les immixtions des Occidentaux se banalisent au point que n’importe quel quidam peut se permettre de proférer des « il faut » aux relents de directives, que les règles de la diplomatie la plus permissive ne peuvent tolérer. Le dernier préposé à la chose a eu droit à une interview publiée par El Watan sous le titre « Il faut aller vers plus d’ouverture du système politique en Algérie». A ceux qui ne prêtent pas attention à la forme, il faudra rappeler que la mise en exergue d’une phrase n’est jamais fortuite. Et ce type de phrase plus que tout autre. Le monsieur est le président du groupe social-démocrate au Parlement européen, le même parlement qui considère que le Makhzen est un modèle de démocratie pour la région. Il parle aussi au nom de cette Internationale Socialiste dont l’entité sioniste est membre à part entière. C’est en visite en Algérie, indépendante depuis 50 ans après s’être libérée au prix du sacrifice de centaines de milliers de ses enfants, qu’il a dit son « il faut », sûr de ce droit que confère la soumission et l’acceptation de celui auquel il s’adresse. Ainsi d’accords léonins, en concessions à l’ordre de la prédation internationale, le pouvoir algérien est en train de brader les derniers espaces de la souveraineté chèrement acquise. Au rythme où vont les choses, si nous n’y sommes pas déjà, les « il faut » vont être devancés, tant la leçon aura été apprise.
Nous avons, depuis 35 ans au moins, assisté à cet exploit économique, unique en son genre, qu’aucun gouvernement n’a pas même pensé à réaliser une seule usine. Les 20 dernières années nous avons enregistré le démantèlement de tout ce qui tendait vers un développement national et à la destruction de l’idée même de décision indépendante du diktat assumé du capitalisme mondial. Mieux encore, sous la pression du mouvement populaire, peu enclin à comprendre ou à s’encombrer des circonvolutions de la « science économique » en vogue, nous pouvons avoir des réponses aussi compulsives qu’irraisonnées. L’essentiel étant de ne pas déroger aux engagements, sinon de pas toucher le sacro-saint principe de la libre-entreprise.
Passons sur le saupoudrage financier, à l’efficacité douteuse, à travers la procédure de distribution de micro-crédits à tout-va. Il y a plus décisif, telle la politique énergétique qui subit un tir nourri d’exigences de libéralisation, car elle gênerait l’arrivée des capitaux, alors même qu’elle est à la base de l’explosion du marché automobile, qui ne connaîtrait pas ces niveaux d’importation si les acheteurs devaient tenir compte du prix d’un carburant non subventionné. Une forme de soutien financier aux constructeurs. Suivront, selon un agenda non encore connu mais que l’on devine à travers les déclarations sybillines, tous les acquis sociaux, des moins sensibles vers les plus vitaux. Tout dépendra du sens du risque et du degré d’exigences des partenaires du « il faut » qui, il faut le leur reconnaître, disent par la bouche du parlementaire cité plus haut « qu’on ne peut pas avoir le même regard sur l’Egypte, la Tunisie, le Maroc ou l’Algérie. Les situations sont différentes, chaque peuple trouve sa voie adaptée aux conditions de chaque pays. » A la bonne heure ! C’est plus compliqué et il le sait.
Ahmed Halfaoui