Uranium appauvri : un tueur méconnu
3 octobre 2013
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Depuis quelques décennies, plusieurs pays ont recours aux armes à l’uranium appauvri (UA). Très chimiotoxique, ce sont aussi de puissantes armes radiologiques. Malgré les dangers qu’elles représentent, leur utilisation est encore légale. Revenons sur les dangers et les impacts de ces armes terribles. Uranium appauvri : un tueur méconnuLes armes à l’uranium appauvri, c’est quoi ?L’uranium appauvri (isotope U238, abréviation « UA ») est un sous-produit de l’enrichissement de l’uranium et du traitement du combustible usé. Il ne possède pas les propriétés nécessaires pour être utilisé dans un réacteur mais cela ne le rend pas moins dangereux, bien au contraire. Cette substance est très toxique. Par ailleurs, de tous les éléments radioactifs, l’uranium appauvri est celui qui reste radioactif le plus longtemps, avec une demi-vie de 4,47 milliards d’années. L’uranium appauvri est utilisé dans l’armement pour ses propriétés physiques. Étant un métal lourd, il est d’une efficacité redoutable pour transpercer les parois des chars blindés et des tanks. Il est tellement dur qu’il ne se déforme pas lorsqu’il entre en contact avec sa cible. On peut comparer cette pénétration à celle d’un caillou dans l’eau.
Au contact de sa cible, l’uranium s’enflamme, relâchant en grande quantité de minuscules particules radioactives. Transportées par le vent, ces particules peuvent se retrouver dans l’eau, le sol, les nappes phréatiques… contaminant tout l’environnement. L’usage de l’uranium appauvri vient une nouvelle fois contrecarrer le mythe d’une frontière imperméable entre le nucléaire militaire et le nucléaire civil. En effet, l’uranium appauvri utilisé pour la fabrication d’obus-flèches provient de la filière civile, et notamment des étapes d’enrichissement et retraitement du combustible. L’armement est un débouché bien utile pour se débarrasser de cette matière encombrante ! L’UA équipe aujourd’hui les chars Leclerc. En France, deux sites militaires accueillent les essais d’obus à l’uranium appauvri : à Bourges (Cher,) les essais se font en plein air, tandis qu’ à Gramat (Lot), les tirs d’obus ont lieu dans des cavités souterraines . La Direction Générale de l’Armement assure qu’il n’y a aucun risque de contamination de l’air et des nappes phréatiques mais le secret défense entourant ces essais ne permet pas d’en être certain. Où ces armes ont-elles été utilisées et quand ?Ces armes ont d’ores et déjà fait beaucoup de victimes sur la planète, ayant été utilisées dans de nombreux conflits. En Ex-Yougoslavie (Bosnie, Serbie, Kosovo), pendant le conflit qui a entraîné une intervention des forces de l’OTAN. En Irak, pendant la Guerre du Golfe de 1991 et pendant l’intervention américaine de 2003 justifiée par la prétendue présence d’ « armes de destruction massive ». On soupçonne aussi les États-Unis d’avoir utilisé des armes à l’uranium appauvri en Afghanistan.
De plus, il y a de fortes suspicions d’utilisation d’UA pendant la guerre du Liban par l’armée israélienne. On estime que 140 000 kg d’uranium appauvri auraient été utilisés dans ces conflits avant 2004. Quels sont les impacts des armes à l’uranium appauvri ?Les propriétés chimiques et radiologiques de l’uranium appauvri ont des impacts désastreux sur l’environnement et les êtres humains. La contamination à l’uranium appauvri se fait quasi exclusivement de manière interne, car le rayonnement émis par l’UA est de type alpha, et donc très court. Ainsi, il y a trois voies majeures de contamination, par inhalation, ingestion ou lésion cutanée. C’est l’inhalation de particules qui est la plus dangereuse pour les êtres vivants. Étant à la fois chimiotoxique et radiotoxique, l’uranium appauvri atteint les reins, les poumons, le squelette, les organes reproducteurs, la thyroïde, les muscles, les ganglions lymphatiques ainsi que le système neurologique. Les types de pathologies observées sont principalement les cancers (dont leucémies) et les malformations congénitales. Les effets ne sont pas les mêmes selon l’intensité et la durée d’exposition, mais aussi selon la nature physique et chimique de l’uranium appauvri, qui peut varier d’un obus à l’autre. En outre, les enfants sont beaucoup plus vulnérables aux effets de l’uranium appauvri. Même une faible dose peut avoir des effets. La Commission Internationale de Protection Radiologique a été obligée d’admettre officiellement que, si le risque augmente en fonction de la dose reçue, il n’existait pas de seuil d’innocuité. On observe ces pathologies chez les populations victimes de bombardements à l’uranium appauvri, mais aussi chez les vétérans des conflits irakiens, des Balkans ou encore d’Afghanistan. Une arme qui ne respecte pas le Droit International HumanitaireMalgré leur incroyable dangerosité, les armes à l’uranium appauvri sont toujours « légales », bien qu’elles ne remplissent aucun des critères du droit international humanitaire, censé définir ce qui est « acceptable » lors d’un conflit. Tout d’abord parce qu’on ne peut pas limiter les effets de l’uranium appauvri au champ de bataille. Avec le vent, les particules radioactives sont dispersées dans l’environnement et ne peuvent être circonscrites à un lieu donné. Cette dispersion peut donc atteindre des cibles dites « illégales » : les civils, voire les pays voisins qui ne sont pas en guerre. Deuxièmement, l’UA continue d’avoir des effets sur l’environnement et la population même après la fin du conflit. Rappelons qu’il faut 4,47 milliards d’années pour qu’il perde la moitié de sa radioactivité ! Il continue donc d’agir pendant des laps de temps impossibles à se représenter à l’échelle humaine. _ En outre, procéder à un nettoyage des lieux contaminés apparaît complètement irréel au vu de la volatilité des particules, et l’UA continue à tuer, même des centaines d’années après la fin d’un conflit, quand plus aucun belligérant n’est encore en vie…
Au regard des effets de l’UA sur l’être humain, on ne peut qualifier cette arme « d’humainement acceptable ». Elle provoque des cancers, des leucémies, des fausse-couches, des malformations congénitales, des maladies des reins. Mais le plus inhumain ici vient du fait qu’en s’attaquant à l’ADN, l’uranium appauvri met en péril le capital génétique des personnes et détruit donc à petit feu des populations entières. De génération en génération, les effets s’accumulent… Son utilisation constitue un crime contre l’humanité. Enfin, les effets de l’UA sur l’environnement peuvent être considérés comme irréversibles tant ils perdurent dans le temps et sont néfastes. Les eaux, les terres agricoles, l’air et, au final, toute la chaîne alimentaire sont contaminés. Des effets pour l’éternité… Les armes à l’uranium appauvri devraient donc être considérées comme illégales. Mais pour un arrêt définitif de leur utilisation, il faudrait que les instances internationales se saisissent du problème. Or le chemin à parcourir est encore très long. D’autant plus que cela sous-entendrait que les pays utilisateurs de ces armes doivent procéder à la décontamination des zones où ils ont utilisé l’UA et au dédommagement des victimes. Les sommes à débourser sont tellement colossales que rendre illégale l’utilisation de l’UA serait difficile à assumer financièrement pour les pays utilisateurs… Au détriment de vies humaines. Les nouvelles révélations sur l’usage de l’uranium appauvri en IrakDepuis 1959, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) est liée à l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA) par un accord qui lui interdit de publier des rapports qui concernent la radioactivité, sans l’aval de cette dernière. De ce fait, aucun des rapports « critiques » de l’OMS sur les armes à l’uranium appauvri n’a jamais été publié. Pour la première fois en 2011, une prestigieuse revue médicale, l’International Journal of Environmental Research and Public Health, publiait des données sur les conséquences de l’usage d’armes chimiques par l’armée américaine en Irak, et plus particulièrement d’armes à l’uranium appauvri. Les chercheurs font le lien entre les assauts de l’armée – dont la terrible opération militaire Phantom Fury de 2004 – à Falloujah et la croissance brutale des cancers, la hausse spectaculaire des fausse-couches, des naissances prématurées, et des malformations congénitales. Les armes utilisées dans ces combats contiennent des substances chimiques comme le phosphore, le napalm, et l’uranium appauvri. C’est sur ce dernier que se concentrent plus particulièrement les études. Le bilan humain de ces assauts ne peut être définitif, et ne le sera jamais, l’uranium appauvri provoquant des modifications génétiques irréversibles et qui s’accumulent dans le temps. Les Irakiens vont continuer de subir les détériorations de leur patrimoine génétique au fil du temps… Mais de nouveaux chiffres sur les effets de l’uranium appauvri sur la population irakienne ont récemment été dévoilés. Des médecins de l’hôpital de Falloujah ont observé une croissance très inquiétante du nombre de bébés naissant avec des malformations congénitales : celles-ci y concerneraient 144 naissances sur 1000, soit 14,4%. Ce taux est normalement inférieur à 2%, explique le docteur Alaani, qui étudie ce phénomène depuis de nombreuses années à Falloujah. Afin d’alerter la communauté internationale sur ces crimes, et de demander à l’Organisation Mondiale de la Santé de révéler ces nouvelles informations, elle a lancé une pétition :
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