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25 avril 2024

Les pays de l’Union européenne ont vendu des sommes records d’armes à Israel en 2012 et 2013 : stop à l’hypocrisie


EU-ban-on-dairy-from-Israeli-settlements-destructive_strict.pngLes pays de l’Union européenne ont vendu des sommes records d’armes à Israel en 2012 et 2013 : stop à l’hypocrisie

Article AC pour http://www.solidarite-internationale-pcf.fr/

Le Parlement européen vient de se prononcer pour la reconnaissance d’un État palestinien, après certains parlements nationaux. Dans le même temps, les pays européens continuent d’armer un État qui tue au quotidien les Palestiniens. Retour sur les livraisons de la honte.

L’Union européenne, comme les pays qui la composent, ont l’art de manier le double discours, les manifestations d’indignation théoriques face aux offensives israéliennes et les accords de coopération pratiques, à multiples facettes, avec l’État sioniste.

La plaisanterie. « Un code de conduite sur les exportations d’armes » ?

Depuis 1998, l’UE dispose d’un Code de conduite sur les exportations d’armements poussant les États à n’exporter des armes qu’à des pays qui respectent : (1) les droits de l’Homme ; (2) les engagements internationaux ; (3) la paix et la sécurité régionale ; (4) un refus du terrorisme.

Quinze ans après, les pays de l’Union européenne continue de vendre des armes prioritairement à l’Arabie saoudite, au Qatar, au Pakistan qui sont loin de respecter ses critères, ainsi qu’à Israël.

Savoir l’étendue de la coopération militaire de l’Union européenne avec Israël n’est pas chose aisée tant elle peut se draper dans des accords de coopération à dominante civile, des projets de recherche aux finalités diverses.

On se rappelle qu’en juillet 2012 l’UE avait signé un accord de coopération portant sur 60 programmes concrets, dans 15 domaines d’actions.

Une collaboration institutionnalisée dans des secteurs stratégiques et hautement politiques :coopération policière (Europol), judiciaire (Eurojust), spatial (ESA), et militaire enfin euphémisée derrière la collaboration dans les domaines de la « sécurité maritime et aérienne ».

Les livraisons d’armes sont certes plus limitées que les colossales aides américaines à Israël, mais loin d’être nulles, elles sont surtout multi-formes, difficiles à tracer. Nous allons tâcher ici d’en donner quelques exemples illustrant cette collaboration concrète des pays européens.

La France, un partenaire militaire fidèle d’Israël

Quelle place occupe la France dans les autorisations d’exportations ? Selon les chiffres même de l’UE, une place privilégiée.

Un rapport de 2008 de l’UE sur les licences d’exportations soulignait que, pour l’année 2007, la France était de loin le premier pays à accorder des licences d’exportations d’armes vers Israel : 120 millions, soit 60 % des autorisations d’exportation.

Selon le rapport, la France était en première place pour la « livraison de matériel lié aux avions de chasse » pour 10 millions d’€, ainsi que pour les « équipements électroniques » à finalité militaire – systèmes de guidage, de navigation, de brouillage de satellite – pour 89 millions d’€.

On se rappelle que certains observateurs avaient été frappés de voir le label « Made in France » sur des missiles Hellfire retrouvés à Gaza, en 2009.

Si l’année 2007 a marqué un pic, cela n’a pas marqué la fin de ces licences d’exportation. Sur la période 2008-2012, la France occuperait toujours la troisième place pour les licences d’exportation, 200 millions d’€

Concernant l’arme fatale du XXI ème siècle, les drones, c’est en collaboration étroite avec Israel que la France avance. Dès les années 1990, Lagardère puis EADS se dote des drones israéliens Hunter/Heron pour en faire les fameux Eagle One, maintenant Harfang entrés en service en 2008.

La France prépare les drones de nouvelle génération, cette fois avec la collaboration de Dassault et Thalès. C’était le sens de l’achat programmé de la plate-forme Heron TP (ou « Eitan ») en 2011 pour 500 millions d’€. Les drones Eitan étaient entrés en service lors de la guerre de Gaza de 2009.

Si Israel a perdu en 2013 les contrats pour la livraison de 10 à 12 drones (670 millions d’euros!) pour le renouvellement de la flotte française, face aux américains de General Atomics, elle devrait collaborer étroitement au projet, tant les experts israéliens sont liés à l’entreprise américaine.

Le Royaume-uni : pour quelques millions (ou milliards) de £ de plus ?

Le Parlement britannique a, lui aussi, voté pour la reconnaissance de l’Etat palestinien. Il est même allé plus loin, en annonçant cet été la « review » (révision) de plus de 8 milliards de £ (10 milliards d’€) de licences d’exportation commerciales et militaires.

Le chiffre donne le vertige, le gouvernement britannique a tenu à préciser : il ne s’agit même epas d’annuler ces autorisations d’exportation, ni les contrats déjà signés.

Et le gouvernement souligne que les autorisations militaires ne concerneraient que 275 millions de £ (400 millions d’€), une somme déjà énorme.

Mais les 9 autres milliards d’€ auraient surtout à voir avec des dispositifs de télécommunications, des systèmes de cryptage, dont on peut aisément devenir la porosité avec le domaine militaire.

Une somme énorme qui concernerait avant tout des logiciels de cryptage, de communications militaires mais aussi des pièces détachées pour des véhicules militaires. Des licences qui concerneraient 130 entreprises britanniques, toucheraient aux composantes du drone israélien Hermes mais aussi certaines pièces des chars d’assaut d’Israël.

Concrètement, de janvier à juin 2014, le Royaume-uni avait déjà vendu pour 9 millions d’€ d’armes : des composantes pour les avions de chasse (400 000 €), pour les drones (150 000 €), pour la guerre électronique (2 millions d’€), pour le ciblage (1,5 millions d’€), pour l’imagerie et les tirs de nuit (2 millions d’€), ou encore des systèmes d’armes à énergie dirigée (800 000 €).

L’Allemagne, des sous-marins nucléaires pour Israël

L’Allemagne la joue beaucoup plus franchement. Pas question de reconnaître l’Etat palestinien, et l’alliance avec Israel reste intouchable pour la chancelière Merkel.

L’Allemagne est même allée plus loin. Elle a livré cette année le 4 ème de ses sous-marins Dolphin. Elle prévoyait d’en livrer un cinquième d’ici la fin de l’année, et un sixième d’ici 2017. Des sous-marins qu’Israel aurait empressé d’armer de missiles à tête nucléaires.

Chaque sous-marin coûte près de 700 millions d’€, mais l’Etat allemand a décidé de subventionner (!) un tiers de la somme, soit autour de 200 millions d’€ par sous-marin, soit plus de 1 milliard d’€ de cadeau allemand à l’Etat israélien.

C’est aussi en fin d’année 2013 que l’Allemagne a accepté la vente de 3 destroyers destinés à protéger les pipelines israéliens (pour le transport de l’énergie). Elle a encore accepté une réduction de 30 % du prix de vente, réduisant la facture pour Israël de 950 millions d’€ à 650 millions.

L’Italie, championne d’Europe des licences d’exportation ?

C’est que soulèvent les militants des Associations de lutte pour le désarmement en Italie. Pour la seule année 2012, l’Italie aurait acté pour 475 millions d’€ de licences d’exportations vers Israel, une conséquence de l’Accord de coopération militaire et de défense signé par Berlusconi en 2005.

L’Italie a ainsi exporté en 2012 un système de satellite optique pour l’observation de la terre, des dispositifs de contrôle des vols de drones/planeurs, ou encore des systèmes de télécommunications aux normes de l’OTAN.

Le groupe italien Finmeccanica – partenaire privilégié de Dassault, EADS dans les projets européens – a surtout livré en 2014 deux avions d’entraînement M-346, des aéronefs à la pointe de la technologie, qui peuvent être configurés comme bombardiers légers.

Ce n’est que le début, un contrat pour la livraison de 30 modèles M-346 a déjà été conclu, pour la somme d’1 milliard d’€.

Les entreprises italiennes du secteur de l’armement importent également du matériel israélien, pour une valeur de 50 millions d’€ sur ces deux dernières années : Simmel importe ainsi des composantes pour ses bombes, Beretta pour ses armes automatiques, en particulier les pistolets-mitrailleurs.

21 pays sur 27 dans l’UE ont vendu des armes en 2012

Sur la période 2008-2012, 21 pays européens sur 27 ont vendu des armes, ou tout du moins des licences d’exportation à caractère militaire, à Israël.

Y compris l’Espagne qui se gargarisait aussi de reconnaître l’Etat palestinien dans son Parlement, elle a vendu pour 25 millions d’€ de licences dans la période 2008-2012, 5 millions d’€ pour la seule année 2013, ce qui en fait officiellement le 6 ème pays exportateur européen d’armes vers Israël.

Craignant toutefois pour ses approvisionnements en Europe de l’ouest, Israel a diversifié au cours des années 2000 ses approvisionnements en … Europe de l’Est. Russie et Ukraine pour l’armement lourd, République tchèque, Bulgarie, Roumanie, Pologne et Finlande pour l’armement léger.

Pour les pays désormais intégrés à l’UE, il est intéressant de remarquer que la Roumanie est, pour la période 2008-2012, le 4 ème partenaire militaire européen d’Israël, ayant accordé près de 95 millions d’€ de licences d’exportation.

Sur les ventes de licences d’exportation réalisées en 2007 (la Roumanie y occupait déjà une surprenante 3 ème place), on s’aperçoit que la Roumanie vend à Israel surtout des armes légères, des matériels explosifs mais aussi des composantes pour ses aéronefs.

Sur le terrain, l’entreprise israélienne Elbit dispose en Roumanie de quatre filiales – Elbit System, Elmet International, AE Electronics et Simultec – qui assurent l’essentiel de la mise à jour des systèmes électroniques de l’armée roumaine.

En 2011, Elbit a obtenu un contrat de 18 millions de $ pour mettre à jour l’avion de transport C-130 de la flotte aérienne roumaine.

La Bulgarie, la République tchèque et la Pologne font partie du « Top 10 » européen des exportateurs d’armes, avec un total de 50 millions d’€ à eux trois.

La République tchèque avait déjà vendu des systèmes de missile tactique (d’origine russe) en 2006, les Totchka, tandis que la Bulgarie avait fourni 6 systèmes d’artillerie de 130 mm en 2004.

La Bulgarie a confirmé par un accord en 2012 de coopération militaire, comprenant entraînement communs, projets industriels et de recherche avec Israël.

La Pologne : liaisons dangereuses avec le lobby militaro-industriel israélien

La Pologne, suivant le grand frère allemand, développe des accords de coopération militaire de grande ampleur avec l’Etat israélien.

Elle a annoncé depuis 2010 son intention de renouveler sa flotte aérienne composée de vieux appareils soviétiques et américains, le Ministère de la Défense pousse pour l’achat de drones israéliens Eitan et Hermès.

Le Général Skrzypczak, vice-ministre de la Défense et ancien commandant des forces armées polonais, formé aux États-Unis, est connu pour ses relations très étroites avec l’industrie militaire israélien. Il a été démis de ses fonctions fin 2013 pour « conflit d’intérêts » avec le groupe industriel israélien Rafael, pour avoir favorisé la signature de contrats avec Israël.

Des accords militaires ont d’ores et déjà été signés depuis 2010 pour livrer à la Pologne des technologies de surveillance et de contrôle, achetés à Elbit pour 16 millions de $. Elbit est responsable du contrôle du mur de séparation, ainsi que pour la réalisation des drones Hermes.

Israël avait déjà aussi convenu de la formation des pilotes de la flotte aérienne polonaise ainsi que des forces spéciales. Le groupe industriel Rafael avait signé un contrat d’investissement de 450 millions de $ pour construire des armes en Pologne, dont les missiles anti-chars Spike.

Quand même la paisible Finlande fait du business avec Israel…

Même la vertueuse Finlande n’y échappe pas. De 2002 à 2010, la Finlande aurait fourni pour près de 4 millions d’€ de missiles anti-char, en faisant dans le domaine, le second fournisseur derrière les Etats-unis.

La Finlande a auassi importé pour 37 millions d’€ de missiles moyenne portée de l’entreprise Rafael en 2000-2001, et pour 21 millions d’€ de systèmes électroniques militaires. Elle aurait acquis pour 170 millions d’€ d’armes israéliennes depuis 1999.

Et la coopération continue, elle est même florissante. La Finlande a des contrats de livraisons de matériel de plusieurs dizaines de millions d’euros avec les plus grands groupes d’armement israéliens Elbit, Rafael ou Fibrotex.

En tout, en Europe, les licences d’exportation sont passées de 150 millions d’€ en 2008 à 600 millions d’€ en 2012. Depuis 2007, les entreprises israéliennes Elbit et Israeli Aerospace Industries ont été autorisés à participer à des projets de recherche d’une valeur de 244 millions d’€.

A combien vont s’élever les licences d’exportation pour 2013 ? On ne le sait pas encore, pas de doute qu’on risque d’atteindre un nouveau record.

Les contrats réellement signés – ceux pour les destroyers et sous-marins allemands, les avions d’entraînement italiens, et ce malgré les accrocs pour les drones que la France et la Pologne prévoyaient d’acheter en Israel – devraient se chiffrer à plusieurs milliards d’euros.

Combien vaut une reconnaissance formelle de l’Etat palestinien dans les Parlements européens quand chaque jour la possibilité réelle qu’un Etat palestinien voit le jour est annihilée par des armes, ou des composantes, ou des technologies venant d’Europe ?

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