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20 avril 2024

2011, la France livre des armes aux islamistes en Libye. 2015, la Libye est une place forte du terrorisme islamiste


libye_sarkozy.jpg 2011, la France livre des armes aux islamistes en Libye. 2015, la Libye est une place forte du terrorisme islamiste

Article AC pour http://www.solidarite-internationale-pcf.fr/

La France est en guerre. C’est la bonne résolution de 2015. A coup d’indignation humanitaire, le gouvernement a préparé l’ingérence en Syrie et en Irak. Elle prépare les conditions d’une seconde guerre en Libye. L’occasion de rappeler comment la France porte une responsabilité majeure dans le développement du terrorisme dans la région.

Depuis un mois, le Ministre de la Défense français Le Drian ne cesse de presser pour une intervention française en Libye, avec cherchant l’aval des pays africains. Des frappes aériennes, tandis que la France établit la base militaire de Madama à la frontière entre le Niger et la Libye.

Le Drian avance comme prétexte à l’intervention : la Libye devient un centre de formation pour djihadistes, un sanctuaire du terrorisme international.

La Libye, sanctuaire du terrorisme islamiste. A qui la faute ?

A qui la faute ? Il y a trois ans, la France sonnait l’hallali contre la Libye de Kaddafi. Le pays qui disposait de l’Indice de développement humain le plus élevé d’Afrique a sombré en quelques mois dans la barbarie que l’instauration de la Charia et la féodalisation du pays illustrent.

L’hypocrisie de la rhétorique sur les droits de l’Homme, sur la mission humanitaire de la France ne tient plus quand les libérateurs d’hier se révèlent sur leurs vrais visages : chefs de gang tribaux véreux, anciens bureaucrates kaddafistes corrompus, seigneurs de guerre islamistes.

La France n’a pas seulement envoyé plus d’un millier de missiles sur la Libye dans le cadre de l’opération Harmattan. Elle a aussi contribué à l’armement des forces rebelles, largement dominées par les forces islamistes, faisant basculer la situation sur le terrain.

Notre ami le Qatar, premier bailleur de la rébellion islamiste à Benghazi

Rappel rapide : le foyer de la rebellion contre Kaddafi venait de l’est, de Benghazi. Fief des islamistes radicaux, elle rassemblait aussi une bourgeoisie locale, issue pour partie de l’appareil d’Etat kaddafiste et du commerce international dans le principal port du pays.

Le Qatar a ouvertement soutenu la rébellion, d’abord en étant les premiers à reconnaître le gouvernement rebelle du CNT (Conseil national de transition) établi à Benghazi.

La monarchie absolue du Golfe l’a surtout armée. Les armes étaient convoyées en avion à Benghazi, puis redistribuées par bateau jusqu’à la ville encerclée de Misrata.

Après plusieurs mois de conflit, malgré les bombardements, le gouvernement de Kaddafi continue de résister tandis que la désorganisation des milices – plus attirées par le butin des pillages que structurées par la discipline militaire – fait craindre une débandade générale.

Les parachutages français : kalach et missiles anti-char Milan

C’est là où la France, en coordination avec le Qatar, a joué un rôle décisif. En juin 2011, selon une révélation du Figaro, elle organise plusieurs parachutages d’armes dites légères dans l’ouest et le sud du pays pour créer un nouveau front.

Ces armes « légères », ce sont des lance-roquettes, des fusils d’assaut, des mitrailleuses et des missiles anti-char Milan.

Officiellement, elles auraient été envoyées à des rebelles berbères – une minorité marginalisée culturellement, politiquement et prompte à la sécession – sur les hauteurs du Djebel Nafousa, aux portes de Tripoli.

L’émir Belhadj, le libérateur de Tripoli : d’Al Qaeda à la France

La réalité, c’est que le maquis passe rapidement sous contrôle d’Abdelhakim Belhadj et de sa « Brigade du 17 février ». Disciplinée, bien formée, au moral à toute épreuve, la Brigade de Belhadj va faire la différence et va prendre Tripoli en août 2011 marquant la fin du conflit.

La Brigade du 17 février est formée pendant trois mois au Qatar au début de la Guerre libyenne, financée et armée par le Qatar, les Emirats arabes unis et la France.

Belhadj n’est pas un inconnu. A seulement 45 ans, il est un vétéran de l’islamisme combattant. Ce libyen passé par l’Arabie saoudite s’est engagé fin des années 1980 dans le djihad contre l’URSS en Afghanistan – soutenu par les USA.

Il revient en Libye au début des années 1990, fonde le Groupe islamiste de combat libyen (GICL) qui mène de 1994 à 1998 une guérilla dans l’est du pays, tentant de renverser violemment Kaddafi. Après son échec, il trouve refuge en Afghanistan, chez ses amis talibans.

Passant d’Afghanistan au Pakistan, puis en Irak, il s’intègre aux cercles dirigeants d’Al-Qaeda, se rapprochant du chef de l’organisation dans ce pays, Moussab Al-Zarkaoui.

La CIA le traque, l’arrête en Malaisie en 2003, le passe à la « question » en Thailande dans une de ses prisons secrètes.

Il est ensuite livré à la Libye de Kaddafi – revenu en grâce au milieu des années 2000 dans le camp occidental. Nul ne sait si Belhadj a été retourné dans les prisons de la CIA. Promis à la mort, Belhadj est libéré en 2010 sur un ultime coup de poker de Kaddafi, espérant calmer ainsi les islamistes.

Mauvais calcul. Feignant le repenti, Belhadj prend la balle au bond et rejoint l’insurrection dès le début de l’année 2011 dans l’Ouest, sur les montagnes berbères. Il devient entre-temps l’agent privilégié du Qatar sur le terrain, le meilleur allié de l’Etat-major français.

Ce seigneur de guerre expérimenté se fait passer pour un homme de paix, cet islamiste matois pour un modéré incompris. De fait, il est l’homme le plus puissant de l’ouest libyen, contrôlant un ensemble de milices sur la base de l’islamisme, ainsi que du clientélisme et d’un certain charisme.

Le général Haftar, un agent de la CIA corrompu à la tête de la Libye

Un rôle qu’il partage avec le maître de l’Etat libyen, le Général Haftar. L’actuel chef de l’Etat-major libyen est capturé par les Tchadiens en 1987. Les Etats-unis le retournent, envisagent d’utiliser ses troupes pour lancer une attaque contre le régime de Kaddafi.

En fin de compte, il s’exile aux Etats-unis en 1990. Formé par la CIA, il tente d’organiser une insurrection en Libye au milieu des années 1990 (en même temps que le GICL de Belhadj), un échec.

Son retour en 2011 le conduit – après 25 ans d’absence – à reprendre immédiatement la tête de l’armée libyenne, grâce au parrainage américain.

Des militaires français au Mali face aux armes françaises parachutées en Libye !

Pour revenir à la France, le conflit au Mali pose un certain nombre de questions. L’armée française a pu constater que les djihadistes étaient bien armées, dotés d’un armement moderne. Des armes qui proviennent pour bonne partie de Libye.

Les rebelles islamistes ont pillé les arsenaux capturés du régime, notamment ceux situés dans le Djebel Nefoussa à l’ouest, et dans la banlieue de Tripoli. Mais ils sont aussi profité des 40 tonnes d’armement – lance-roquettes, fusils mitrailleurs, explosifs – parachutés par la France.

Selon des sources convergentes maliennes, dès août 2011, les touaregs maliens avaient mis la main sur une partie des armes parachutées par les forces françaises dans les montagnes de l’ouest libyen.

Depuis la fin de la guerre en 2011, la Libye est devenue une plaque-tournante du trafic d’armes dans la région avec jusqu’à 1 million d’armes légères en circulation dans un pays qui compte à peine 3 millions d’habitants.

Soumise à la loi des milices locales, des brigades islamistes, la Libye est sans doute déjà devenue un camp d’entraînement régional pour les djihadistes, en particulier ceux de l’Etat islamique (EI). Des combattants qui ne viendraient pas de l’étranger mais auraient été recrutés sur place, parmi nos anciens alliés. Leur bastion se trouve à Benghazi, point de départ de la dite Révolution de 2011.

A l’heure où les pires crimes ciblés peuvent servir de prétexte pour les crimes de masse à venir, où la barbarie dont l’islamisme combattant est un visage, il est bon de rappeler ce que les médias gomment délibérément : la conscience historique des origines de la Terreur. Et de ses responsables qui sont parmi nous, et nous commandent.

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