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19 avril 2024

Mina ou la critique du Hajj en Arabie Saoudite


Photo de Olivier Mukuna.

Mina ou la critique du Hajj en Arabie Saoudite

 

27/09/2015

Après réflexions, il me semble que je dois quelques précisions concernant mon post sur le dernier massacre intervenu à proximité de la Mecque dont le bilan s’élève actuellement à plus de 700 morts et plus de 800 blessés…

D’abord, d’où je m’exprime ? De par mon éducation, mes expériences et mon métier, j’ai toujours éprouvé du respect pour les croyants, les agnostiques et les athées. Pour autant, je considère l’athéisme comme une « religion bancale » et ne m’inscris dans aucune des 3 religions du Livre. Inexorablement déçu et révolté par les dérives interprétatives et dogmatiques qu’en font toujours les hommes. Plus attiré par ce proverbe amérindien sioux : « La religion est pour ceux qui ont peur d’aller en enfer ; la spiritualité est pour ceux qui y ont déjà été ».

Je refuse également de cautionner les facilité et paresse d’esprit avec lesquelles nombre de croyants et athées « croient » leur religion supérieure à celle des autres. Cette hiérarchisation m’exaspère et je la rejette. Comme je rejette l’injonction à me taire ou à diluer mon expression sous prétexte que je suis pas musulman, juif ou chrétien.

Que mes amis croyants et athées comprennent sinon acceptent que je demeure un esprit libre. Je ne me soumets à aucune religion interprétée par des hommes, faibles et critiquables par définition. Comme je ne demande à personne de suivre mes croyances d’homme, faible et critiquable par définition.

Ensuite, pourquoi ai-je utilisé les mots « massacre » et « tragédie criminelle » pour qualifier ce qui s’est déroulé à Mina ? Parce que ces centaines de morts et de blessés auraient dû être évités et – comme le détaille l’article en 1er com’ – parce ce que ces « tragédies » se répètent depuis 40 ans…

Les responsables sont connus : il s’agit des Autorités despotiques, milliardaires et racistes de Ryad. Leur impunité demeure grâce à leur énorme pouvoir financier et le fait qu’ils abritent le premier lieu Saint de l’Islam. Mais qu’en font-ils exactement ? Quels préceptes du Coran ou du message du Prophète mettent-ils en oeuvre depuis 40 ans ?

Eriger et consolider une dictature pétrolière ? Perpétuer des lois barbares et d’oppression contre leur propre population ? Mettre en esclavage et en viol un sous-prolétariat immigré ? Collaborer militairement et financièrement avec des colonialistes islamophobes tels les gouvernements nord-américains et israéliens ? Bombarder, assiéger et affamer le Yémen, pays voisin musulman parmi les plus pauvres du monde ? Mépriser à ce point les pèlerins africains, chiites ou asiatiques jusqu’à mettre chaque année leur vie en danger par des négligences et décisions criminelles ?

Et c’est bien là que j’ai une critique fondamentale – pas « une attaque » – à l’adresse d’une partie des croyants musulmans francophones. Celles et ceux que je surnomme les fatalistes ou les bigots. Celles et ceux qui concluent que c’était « le destin » de leurs coreligionnaires de crever écrasés et étouffés ; qu’en mourant lors de leur pèlerinage « ils iront au paradis »…

A mes yeux, il s’agit là d’une déresponsabilisation qui n’a rien de divin mais relève d’une lâcheté bien humaine. Cette façon de tout mettre entre les mains d’Allah, de Dieu ou de Yahvé et d’estimer chaque destin intangible, je la connais bien : elle participe du pillage et de la destruction centenaires de mon pays, le Congo.

Pourtant, des hommes et des femmes, tels Gamal Abd Nasser, Djamila Bouhired, Hugo Chavez ou Ellen Johnson Sirleaf nous ont montré que l’on peut être croyant tout en se battant pour améliorer le destin de son peuple. Quel que soit notre niveau, nous ne sommes pas sur terre pour nous en laver les mains, pour refuser de prendre position entre justice et injustice, entre solidarité et égoïsme, entre résistance et oppression.

Que cela plaise ou non, accomplir le Hajj en Arabie Saoudite revient à soutenir financièrement l’une des pires dictatures ainsi qu’à financer indirectement les USA et Israël, oppresseurs coloniaux des Palestiniens et d’autres musulmans dans le monde.

A mon sens, la lucidité et le libre-arbitre sont des dons divins. Il appartient à chacune et chacun d’en faire quelque chose ; de « remplir ou trahir sa mission », comme l’écrivait Frantz Fanon.

Olivier Mukuna

Photo : l’entrée de la Ka’ba en 1953 lorsque les pèlerins pouvaient encore y pénétrer [ http://ilmfeed.com/25-amazing-photos-hajj-1953/ ].

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