par Bahar Kimyongür (06/03/2016)
Erdal Gökoglu, réfugié turc reconnu en Belgique depuis 2007 a été arrêté le 24 janvier dernier à la frontière germano-polonaise à hauteur de Slubice (Francfort-sur-l’Oder) alors qu’il se rendait au mariage de l’un de ses amis à Wroclaw.Il est menacé d’extradition vers la Turquie sur base d’un mandat d’arrêt international émis par le 4e Chambre de la Cour d’assises d’Istanbul pour son appartenance présumée au mouvement marxiste illégal DHKP-C.
Son dossier turc est ridiculement vide. Erdal est en effet accusé d’avoir sermonné dans les locaux d’une revue étudiante (Ülkemizde Gençlik) à Istanbul, en octobre 2001, un jeune qui trompait sa petite amie avec une autre fille.
Le fait de parler à un jeune menant une double vie sentimentale a fait d’Erdal un leader du DHKP-C !
Erdal Gökoglu a été incarcéré entre juin 1995 et juillet 2001 alors qu’il était étudiant en architecture.
Il a survécu à plusieurs opérations militaires dans les prisons turques. C’est un véritable miraculé.
Son odyssée carcérale a commencé à Ulucanlar (Ankara).
Le 26 septembre 1999, ses compagnons de chambrée ont été torturés à mort. 10 d’entre eux ont été massacrés.
Erdal a été blessé par les balles de l’armée. Les militaires l’ont cru mort et ont mis son corps avec celui des 10 détenus tués dans les douches de la prison.
Après avoir découvert par hasard qu’il était toujours vivant, les militaires l’ont déporté vers la prison de Burdur (ouest de la Turquie)
Le 5 juillet 2000, l’armée intervient cette fois à la prison de Burdur avec des bulldozers après que les prisonniers politiques aient refusé de comparaître à leur procès en raison des mauvais traitements qu’ils subissaient sur le chemin du tribunal. Durant l’opération, le détenu Veli Saçilik a eu son bras sectionné par une pelleteuse.
Le bras de Veli Saçilik a finalement été retrouvé dans la gueule d’un chien errant (voir pièce jointe).
Erdal Gökoglu a une nouvelle fois été blessé par les militaires alors que son corps portait encore les séquelles de l’opération d’Ulucanlar.
Il a ensuite été déporté vers la prison de Bursa.
Lorsque le gouvernement a annoncé l’ouverture imminente de prisons de haute sécurité de type F, Erdal a participé au vaste mouvement de grève de la faim qui s’est soldé par la mort de dizaines de détenus.
Le 19 décembre 2001, l’armée est intervenue dans 20 prisons pour mater la grève de la faim et organiser la déportation des détenus vers les prisons de type F.
28 détenus ont été massacrés à coups de gaz, de matraques et par balles. A Bayrampasa, six femmes sont mortes dans l’incendie de leur dortoir, déclenché par le déluge de feu de l’armée postée les toits.
Erdal Gökoglu, a été gravement blessé mais a malgré tout poursuivi sa grève de la faim, malgré sa déportation vers la prison de type F d’Edirne.
Après plusieurs mois de grève de la faim, Erdal Gökoglu a été alimenté de force à l’hôpital d’Edirne.
Aujourd’hui encore, Erdal souffre de séquelles de cette intervention. Il a en effet contracté le syndrome de Wernicke-Korsakoff (amnésie, ataxie…)
En 2001, il est laissé pour mort aux portes de la prison en vertu de l’article 399 du Code de procédure pénale turque (CMUK). La loi prévoit une remise en liberté de six mois pour raisons médicale. Cette libération conditionnelle est renouvelable selon l’état du détenu.
La même année, Erdal est exfiltré du pays par ses amis pour qu’il puisse recevoir des soins médicaux adéquats.
En 2002, Erdal introduit une demande d’asile politique en Belgique, demande reconnue en 2007.
Depuis son arrivée en Belgique, Erdal n’a jamais été lié au moindre trouble de l’ordre public.
Incarceré en Pologne
Il est inadmissible qu’un Etat européen, la Pologne en l’occurrence, honore une demande d’extradition émanant du régime d’Ankara alors qu’un autre Etat européen, la Belgique, a décidé de protéger Erdal Gökoglu des persécutions et des tortures qu’il a subies Erdal des années durant.
Actuellement, Erdal Gökoglu est jugé dans la ville de Gorzow Wielkopolski.
Il comparaît dans une cage en verre, menottes aux poignets et chaînes aux pieds.
Il est détenu à la prison de Goleniow.
Ses conditions de détention sont inhumaines et sa santé, extrêmement fragile.
Erdal Gökoglu est traité comme une personne dangereuse alors qu’il est en danger.
Les livres, journaux et effets personnels sont interdits. Sa cellule est fouillée deux fois par jour. On lui impose le port de l’uniforme. Il est interdit de préau. Cela fait donc près de 50 jours qu’il est privé de sortie.
Erdal Gökoglu est en grève de la faim.
Il demande la fin de ses mauvais traitements et son rapatriement en Belgique.
Nous appelons les démocrates belges, polonais et européens à protéger Erdal Gökoglu des prisons turques et polonaises.
Bahar Kimyongür (Tél.: +32 485 37 35 32)