Les grosses orchades, les amples thalamèges.. Littératures vagabondes – états d’âme à La Thalamège
20 juillet 2017
20/07/2017
MÉSENFIN…
Mésenfin, de quoi vous plaignez-vous bon sang ?
Vous avez l’OTAN pour vous protéger ! Quel besoin avez-vous d’une « armée nationale » en plus ? Pour quoi faire ? Filez votre pognon comme on vous l’a dit à qui saura quoi en faire et envoyez vos militaires à Pôle Emploi, avec les pékins. S’ils tiennent ab-so-lu-ment à travailler, qu’ils aillent au vrai Q.G. de Bruxelles essayer de se faire embaucher. Aux conditions patronales, of course. C’est tendance, non ?
Certains antimilitaristes auraient-ils jamais cru qu’ils en arriveraient un jour à souhaiter un coup d’État militaire, quoi qu’il en coûte ? On est sûrs, pourtant, qu’il y en a.
Comment dit-on « vendre son pays à l’étranger » en français non post-moderne ? Crime de haute trahison ? Bof…
Le vrai chef des armées.
Et n’allez pas croire, chers amis Français qu’il n’y a que vous. Non, non, on ne vous parle pas des Belges (des quoi ?).
Petit échantillon de ce qui se passe dans la terre des libres et des braves :
Le retour des mercenaires du Pentagone inquiète les militaires US en activité
Wayne Madsen – Strategic Culture – 14 juillet 2017
Pendant que le secrétaire américain à la Défense James Mattis et le conseiller en sécurité nationale H.R. McMaster examinent la politique militaire américaine en Afghanistan, The New York Times a publié, le 10 juillet 2017, un article exposant une menace qui pourrait bouleverser la stratégie de défense des États-Unis et la renvoyer à un passé amer.
L’histoire du Times était focalisée sur le paragraphe suivant :
« Erik D. Prince, fondateur de la firme de sécurité privée Blackwater Worldwide, et Stephen A. Feinberg, financier milliardaire qui possède l’entreprise militaire géante DynCorp International, ont étudié des propositions visant à utiliser des mercenaires [de leurs entreprises], plutôt que des troupes américaines en Afghanistan, à la demande pressante de Stephen K. Bannon, le stratège en chef de M. Trump, et Jared Kushner, son gendre et conseiller principal, selon des personnes informées au sujet de ces conversations ».
L’histoire de Blackwater et de Dyncorp est celle de crimes de guerre odieux en Irak et dans les Balkans et de fraude massive au détriment des contribuables américains dans le cours d’incursions militaires dans le monde entier. Après avoir été l’objet d’une enquête sur ses activités en tant que chef de Blackwater, Prince, dont la sœur, Betsy DeVos, est secrétaire à l’Éducation de Donald Trump, a vendu la société et déplacé ses opérations mercenaires à l’étranger vers Abu Dhabi.
La société de Prince basée à Abu Dhabi, Reflex Responses (R2), a recruté et formé des forces du monde entier, en particulier de Colombie, du Chili, du Honduras, d’Afrique du Sud et de Roumanie, en tant que mercenaires pour le prince héritier Sheikh Mohamed bin Zayed al-Nahayan. Il y a une interdiction stricte d’embaucher du personnel militaire musulman, car on ne peut pas vraiment compter sur eux pour tuer d’autres musulmans. Les mercenaires, basés dans la grande ville militaire de Zayed, en dehors d’Abu Dhabi, sont commandés par des officiers des ex-forces spéciales des États-Unis, de Grande-Bretagne, de France et d’Allemagne. R2 recrute du personnel mercenaire via une société écran off-shore, Thor Global Enterprises, installée dans les îles Vierges britanniques. Des mercenaires de R2 auraient combattu dans le cadre de la coalition saoudienne dans la guerre civile du Yémen contre les forces opposées à la domination saoudienne du pays. Prince utilise le nom de code « Kingfish » dans toutes les communications et documentation relatives à R2.
Source : http://lesakerfrancophone.fr/le-retour-des-mercenaires-du…
Wayne Madsen est un journaliste et essayiste américain, né en 1954 en Pennsylvanie, d’une mère américaine et d’un père danois. Il est l’auteur de nombreux ouvrages inédits en français. En tant que journaliste, il a publié des articles dans CorpWatch (en), CounterPunch, CovertAction Quarterly (en), In These Times, Multinational Monitor (en), The American Conservative, The Progressive et The Village Voice. Il a publié des éditoriaux dans Atlanta Journal-Constitution, Columbus Dispatch, Houston Chronicle, Philadelphia Inquirer, Miami Herald et le Sacramento Bee.
Retour à l’Hexagone
Idéologiquement, nous sommes à des années-lumières de Causeur. Mais quand ils disent des choses qu’on pense aussi, on ne voit pas pourquoi on ne les citerait pas. Deux fois de suite en l’occurrence, et sur Paris les deux fois.
Paris n’est plus vraiment Paris
Elisabeth Lévy – Causeur – 20 juillet 2017
En quelques décennies, Paris est devenue une ville sans mystères. Toujours plus citoyenne, écologique, sportive et participative, la capitale devient, comme le dit sa maire, une « ville pacifiée ».
Je ne sais pas qui a dit que Paris serait toujours Paris, mais il s’est sacrément planté. Il aura fallu quelques décennies de grands projets, d’expérimentations urbaines et d’idées fumeuses pour transformer presque complètement la ville de Gavroche et de Proust en terrain de jeux pour bobos innovants et touristes pressés. Philippe Muray, qui est certainement l’un des meilleurs chroniqueurs des saccages parisiens de la fin du XXe siècle (et sans conteste le plus drôle), observait que « la plupart des choses nouvelles, de nos jours, se cachent derrière les anciens noms ».
Bientôt, les humains de dernière génération ne sauront plus qu’il y avait avant, à la place de ce conglomérat de commerces, bureaux et musées, ce simulacre qu’on appelle encore Paris, une vraie ville, pleine de miasmes et d’opportunités, de recoins oubliés et de vitrines éclairées, de possibilités d’intrigues et de promesses de rencontres. « Les sortilèges de Paris, écrit Antoine Blondin, tiennent aux monuments et aux sites, mais également à cette impression, qui vous envahit soudain, au débouché d’une rue banale, que le système nerveux du monde passe par là. »
Piétons partout, vigueur nulle part
Peut-on penser sans éclater de rire que « le système nerveux du monde passe par là » quand ce sont des hordes de cyclistes coiffés de leurs casques ridicules qui passent sous vos fenêtres ? Quel cœur palpite sur le boulevard Saint-Michel, principal axe de notre célèbre quartier latin, désert dès 20 heures parce qu’il n’y a plus un bistrot et encore moins de librairies entre les boutiques de fringues ? Et quel sortilège a pu donner naissance au panneau d’information planté place du Panthéon et ainsi rédigé : « Sur le plan du paysage, il s’agit de respecter la conception minérale, tout en la réinventant. Spatialement, la symétrie, les percées visuelles et l’équilibre général de la place sont des équilibres à respecter » ? Ce sortilège-là, comme tous ceux que la machine municipale crache à jets continus, n’a pas grand-chose à voir avec les sortilèges de Paris dont parlait Blondin.
En l’occurrence l’irrésistible prose de la municipalité était destinée à vendre le projet de piétonisation qui, après celle de la République, devait concerner sept places parisiennes. Sans doute faut-il punir encore un peu plus les automobilistes et, au passage, créer partout des lieux où 100 Nuit debout pourront s’épanouir. En présentant le projet, la maire a expliqué qu’il visait à « donner plus de place à celles et ceux qui ont envie de vivre dans une ville plus pacifiée, avec moins de voitures et moins de stress ». En somme, Paris ne veut plus être le système nerveux mais la camomille du monde. Quel progrès. Et si une ville, justement, n’était pas une ter……
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Source : https://www.causeur.fr/paris-anne-hidalgo-berges-pietons-…
Paris est un cauchemar
Elisabeth Lévy – Causeur – 10 juillet 2017
Festival Fnac Live, place de l’Hôtel de Ville à Paris, 6 juillet 2017
Savez-vous pourquoi, à la différence de Roland-Garros, le tournoi de Wimbledon s’interrompt le dimanche ? Pour laisser une journée de calme aux habitants du quartier (et au gazon). En entendant, cette information dimanche matin (sur France Inter), après une nouvelle nuit gâchée, j’ai ressenti une immense jalousie pour les Londoniens. Une ville qui fait encore prévaloir la vie concrète de ses habitants sur les exigences des jeux du cirque apparaît déjà comme l’un des derniers refuges de la civilisation. Et le centre de Paris, ce week-end, offrait une inquiétante illustration de la barbarie.
On ne peut pas dire que la fête a viré au cauchemar comme dans les récits de faits divers, car la fête est le cauchemar. Précisément, ce que notre bonne maire appelle la fête : trois soirs de suite, tout le centre de Paris, de la Bastille au Palais-Royal, a été livré à un fracas indescriptible doublé d’un embouteillage géant où des milliers de malheureux qui avaient le mauvais goût de sortir du boulot ou d’avoir à traverser Paris d’est en ouest, ce qui, en plein mois de juillet devrait être une promenade de santé, se sont retrouvés piégés des heures durant. Un spectacle rythmé à intervalles réguliers par des concerts de klaxons excédés et impuissants, tandis que, sur les trottoirs des grappes de passants tentaient à grand peine de progresser. Dans une atmosphère saturée de fumées d’échappement et de colère, des altercations éclataient pour un rien. En quoi que nous y soyons habitués, la présence de centaines de policiers transpirant dans leurs équipements – et heureusement munis de bouchons d’oreille –, achevait de donner à l’ensemble un petit air de guerre.
Sauver le pôle Nord, détruire Paris
Vous vous demandez quelle catastrophe a bien pu survenir en plein Paris sans que vous en fussiez informés. Celle-ci avait pour nom le festival Fnac Live. Trois jours de concerts gratuits, de 17 heures à minuit, offerts au bon peuple de Paris sur le parvis de l’Hôtel de Ville (les privilégiés ayant pu assister au concert de Julien Clerc à l’intérieur). Ce qui, en bon français, signifie que madame le maire croit bon d’offrir à ses copains de la Fnac une belle campagne de pub. On en a vu d’autres direz-vous, alors que Paris se couvre de bâtiments siglés Vuitton, Pinault ou Arnault. Certes. Mais pour que la Fnac puisse utiliser mon temps de cerveau disponible, il a fallu réduire en bouillie celui de milliers de gens.
En effet, pour que cette sauterie se déroule sans anicroche, on a interrompu la circulation sur les quais hauts dans le sens est-ouest, envoyant ainsi tout le trafic vers la rue de Rivoli, et fermé tous les accès entre la rive droite et la rive gauche de la Seine d’Austerlitz à Palais Royal (que les non Parisiens me pardonnent ces détails topographiques). En résumé, pour boucler le parvis de l’Hôtel de Ville, on a paralysé la capitale. Ajoutons que le malheureux quartier coincé entre Notre-Dame et l’Hôtel de ville paye déjà un lourd tribut à la fabrication du Parisien nouveau, avec Paris-Plage, qui à partir de minuit, déverse tous les week-ends dans les rues son contingent de noctambules, gracieux vocable qui cache des individus avinés et braillards. C’est ce qu’on appelle la poésie de la nuit. Notre maire est en croisade pour le climat. Il est étrange de vouloir sauver le pôle Nord et de s’ingénier, en même temps, à détruire par tous les moyens les conditions de la vie humaine à Paris.
On me dira certainement que tous les malheureux qui ne partent pas en vacances et les touristes ont bien le droit de s’amuser. Pardon, mais je ne vois pas pourquoi l’amusement de quelques milliers devrait se payer de la souffrance d’un nombre bien plus considérable de leurs compatriotes. Qui leur rendra les heures de vie perdues dans ce bruit et cette fureur ? Ne peut-on pas organiser un concert dans une salle ou, si on tient au plein air, dans le bois de Vincennes ? On finit par penser que pourrir l’existence de ceux qui refusent d’adhérer au nouveau monde fait partie du programme.
L’espace public privatisé
On croyait par ailleurs que la lutte contre le bruit, la pollution et le trafic automobile étaient les priorités de l’équipe Hidalgo. De ce point de vue, chapeau l’artiste : la multiplication des manifestations destinées à montrer au monde entier que notre maire gouverne une ville-monde « made for sharing » aboutit à créer presque chaque jour d’énormes engorgements dans la capitale. Tant pis pour toi, mec, si t’es un bourgeois, ou peut-être bien un rentier, qui roule en bagnole. Bref un salaud de riche doublé d’un ringard. Si t’étais cool t’irais au concert Fnac en rollers.
Mais le plus grave est que la municipalité se permette de privatiser l’espace public à des fins commerciales (car la Fnac, chère Anne Hidalgo, ne cherche pas à élever les masses mais à faire du profit). Dans le moindre communiqué de la municipalité, les mots « citoyen » et « démocratie » se déclinent à toutes les sauces. On découvrira dans le prochain numéro de Causeur1 quelques-unes des ridicules inventions participatives de la municipalité pour réinventer la ville et la rendre conviviale. Conviviale tu parles ! Certes, les Parisiens sont invités à donner leur avis sur toutes sortes de sujets sans le moindre intérêt. Mais quand il s’agit de décisions qui affectent lourdement leur existence et celle de tous les habitants de la région, Anne Hidalgo fonce sur le mode Attila.
L’ordre festif est en marche
C’est ainsi qu’elle a décidé de profiter de travaux sur les quais pour fermer les voies sur berge parce qu’elle voulait rendre la chose irréversible avant une éventuelle élection de Fillon. Quant à l’adhésion des citoyens dont on fait tant de cas, par ailleurs, on découvre sur le site de la mairie que, sur ce dossier, « la participation à l’enquête publique a été très forte avec 292 contribution » (un raz de marée en effet), et, encore plus rigolo, que le taux d’avis favorables est de 15,4 % mais que c’est tout à fait normal pour ce genre de consultation où seuls les mécontents s’expriment. Il n’y a qu’à mieux expliquer aux gens, ils comprendront. Une fois que nous serons tous rééduqués nous irons à vélo aux différentes fêtes organisées aux quatre coins de la ville et les embouteillages n’existeront plus. Reste à savoir qui travaillera mais c’est un détail.
Pour la piétonisation des voies sur berges, il a fallu un vote du Conseil de Paris. Pour le festival Fnac, il suffit d’une convention avec la ville et le tour est joué. Autant dire qu’au désastre citadin s’ajoute un intolérable déni de démocratie. Dans ce paradis citoyen qu’est Paris toute protestation est ensevelie sous un sabir techno à la sauce « new age » ou simplement tournée en ridicule : quel drôle de zèbre il faut être, tout de même, pour protester contre un concert, gratuit de surcroît – le culturel et le social heureusement réunis. La bonne conscience avec laquelle le petit monde municipal nous pourrit la vie, se contentant de ricaner des mauvais coucheurs, réfractaires à la ville que l’on s’emploie à réinventer pour eux, a de quoi rendre dingue. Est-il possible qu’on ne puisse rien faire pour obliger nos gouvernants à respecter nos droits les plus élémentaires, comme celui de dormir en paix entre le 1er juillet et le 31 août ? Qu’il n’y ait pas contre leur pouvoir exorbitant la moindre faille juridique ? Que nous acceptions sans nous révolter cette tentative (largement réussie hélas) de « changer la vie » et pour le pire ? Le plus terrible serait en tout cas de découvrir qu’une majorité de mes concitoyens approuvent ce que Muray appelait à raison l’ordre festif. Désormais, ce ne sont pas les bruits de bottes mais ceux des sonos qui nous font marcher droit. Cela s’appelle le progrès.
Source : https://www.causeur.fr/paris-anne-hidalgo-festival-fnac-1…
Possible que Mmes Lévy et Hidalgo ne s’aiment pas. Mais nous non plus on n’aime pas ce que fait Mme Hidalgo. D’ailleurs, on n’aime pas du tout non plus ce qu’a fait avant elle M. Delanoë.
Et s’il n’y avait que ça !
Mais puisqu’on y est, tiens, c’est les vacances, on ne va pas se gêner (faites pas attention, on a le bourdon).
Paris sous la Nouvelle Vague
Thomas Morales – Causeur – 11 juin 2017
Cet été, vous avez le choix entre Paris Plages et une sélection de six courts métrages réalisés par les hussards de la Nouvelle Vague. Six films sortis des années 60 avant que la grande lessiveuse de la mondialisation heureuse nous asperge d’un jet moralisateur. Les bords de Seine méritent mieux qu’un décor en carton-pâte, ersatz d’un communisme balnéaire. Cette utopie si chère à notre ami Jérôme Leroy a été dévoyée dans son esprit et son application par un marketing doucereux. En août, nous préférerons toujours relire René Fallet dans une chambre mansardée que nous prélasser sur les Quais dans une atmosphère suffocante où les promeneurs sont transformés en écocitoyens responsables, les dragueurs en prédateurs et les touristes en machines à sous. Paris n’a pas toujours été cette capsule avancée du progressisme froid et inflexible.
L’air propice à la flânerie
En 1965, chaque quartier conservait sa typicité comme un vin AOC. Le flâneur observait les différentes classes sociales s’agréger, s’affronter et d’une certaine manière se compléter. Le « vivre-ensemble » des Trente Glorieuses, malgré ses injustices, prenait une forme particulière à Paris. L’air était propice à la flânerie, aux rencontres fortuites et aux questions existentielles. Une communauté de destins qui semble aujourd’hui bien éloignée de notre réalité. L’avenir n’avait pas encore le goût amer des cures d’austérité et des carcans européens. Cette liberté naïve et bravache irriguait le cinéma d’avant-garde. Barbet Schroeder, jeune producteur en vogue, eut l’idée de confier une caméra 16 mm et de la pellicule couleur à six cinéastes avec pour mission : la découverte d’un quartier.
Les Éditions Montparnasse sortent en DVD ce document irrésistible d’audace intitulé Paris vu par…. Chaque réalisateur a su capter, à sa façon, l’identité d’un arrondissement, son parfum presque inodore qui pourtant s’imprègne à nos vêtements et colle à notre âme. Dans Saint-Germain-des-Prés de Jean Douchet, Katherine une américaine de passage fait la douloureuse expérience de la bohème et de son corollaire, le vagabondage amoureux.
Micheline Dax rue Saint-Denis
Les étudiants dans la force de l’âge sont prêts à tout pour passer une nuit avec une si belle étrangère si possible dans une garçonnière, à l’ombre de l’Institut. Jean Rouch nous amène du côté de la Gare du Nord où un couple tente de trouver un peu d’espoir dans un mariage récent mais déjà assombri par la vacuité du quotidien. Le bruit des travaux d’urbanisme autour de la gare vient rythmer leur engueulade du petit-déjeuner. Dans la rue, Odile se lamente sur son sort quand elle est abordée par un inconnu suicidaire. Jean-Daniel Pollet a choisi la rue Saint-Denis pour illustrer la relation trouble entre Léon, un plongeur introverti et une prostituée interprétée par la turbulente Micheline Dax. Dans Place de l’Étoile, Éric Rohmer s’intéresse à la vie d’un vendeur de chemises (Jean-Michel Rouzière). Cet employé modèle doit traverser cette place jusqu’au jour où il a une altercation avec un passant, ce qui l’oblige à modifier son parcours et dérègle un temps sa vie routinière. Philippe Sollers figure furtivement au casting de ce sketch.
Chabrol à La Muette
Le maître Jean-Luc Godard fait également partie de cette aventure. Il signe Montparnasse et Levallois avec la ravissante Joanna Shimkus qui joue le rôle de Monica, une fille partagée entre deux hommes de l’art, un sculpteur contemporain et un carrossier automobile. Elle envoie à ses deux amants deux pneumatiques et pense soudainement s’être trompée de destinataire. Qui a reçu la lettre de rupture et celle d’amour ? S’en suit un portrait cristallin de la femme en proie au doute et de l’homme touché dans sa virilité. Enfin, Claude Chabrol transporte sa caméra à La Muette chez un couple de bourgeois qu’il interprète avec Stéphane Audran. Dans son environnement naturel, il déploie toute son ironie et sa hargne du système. Conformément à ses habitudes, il s’empiffre à table, flirte avec la bonne et délaisse son fils qui préfère garder ses boules Quiès durant les repas plutôt que de supporter la comédie maritale de ses parents jusqu’au drame… Dans l’œil de ces six réalisateurs, Paris reprend de la hauteur et de la profondeur comme si la modernité ostentatoire de notre époque avait stoppé cet élan créatif des sixties.
Source : https://www.causeur.fr/paris-douchet-rouch-chabrol-godard…
Paris vu par…
DVD de Jean Douchet, Jean Rouch, Jean-Daniel Pollet, Éric Rohmer, Jean-Luc Godard et Claude Chabrol
Éditions Montparnasse.
Et Truffaut en prime (le 16 octobre 1970).
Mis en ligne le 20 juillet 2017.