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26 avril 2024

Pourquoi il faut dissocier les vocables «islamophobie» et «antimusulman»


par Robert Bibeau

Par Khider Mesloub.

 

Le sordide assassinat de Samuel Paty, cet enseignant décapité en France, a suscité l’horreur et l’indignation générales. Ce crime a relancé le débat sur l’instrumentalisation de l’islamophobie, cette arme idéologique brandie par les islamistes comme missile de destruction de la liberté d’expression, voire de terrorisme politique ; pire, de terrorisme meurtrier. Cet acte terroriste commis par un islamiste au motif que l’enseignant, par l’utilisation des caricatures comme support pédagogique, aurait « blasphémé » la religion musulmane, devenu l’arme de dissuasion massive de la critique du dogme islamique, voire l’instrument de justification politique et de légitimation « morale » du terrorisme perpétré en Occident.

Pour la clarification de l’analyse, il importe d’emblée, par souci de rigueur intellectuelle, de procéder à une définition rigoureuse des termes islamophobie et antimusulman, délibérément amalgamés par les idéologues de l’islamisme. Tout le monde s’accorde sur la fabrication idéologique récente du néologisme islamophobie.

L’islamophobie est-elle une « haine des musulmans », à combattre, ou bien une critique de l’islam en tant que religion, à défendre ? Un droit de critiquer librement la religion musulmane, comme tout autre religion, sans pour autant être considéré comme hostile aux musulmans, sans encourir l’accusation de racisme ? Apportons quelques éléments de réponse.

Sémantiquement, le terme islamophobie est formé du radical islam et du suffixe phobie. Si le premier mot appartient à l’usage courant du vocabulaire, compréhensible par tout le monde, le second vocable, en revanche, relève de la terminologie psychiatrique. Il définit la peur irrationnelle de quelque chose, la crainte déraisonnable relevant de la psychopathologie. Autrement dit, islamophobie signifie : la peur irrationnelle de l’islam. L’auteur du rejet de l’islam serait ainsi victime d’une pathologie psychiatrique. Il n’est donc pas responsable de son acte. Juridiquement, il pourrait bénéficier de l’irresponsabilité pénale car il était, au moment de la commission de son « forfait d’islamophobie », atteint d’un trouble psychique ayant aboli son discernement ou sa perception de l’islam. Ainsi, même le choix spécieux du terme islamophobie est inapproprié. Pour notre part, « haine-de-l’islam » serait plus adéquat pour désigner une personne exprimant un rejet viscéral du culte musulman. Cette locution implique une dimension active et rationnelle de l’expression du rejet de l’islam, et n’exonère aucunement son auteur de sa responsabilité. Il assume sa haine de l’islam, au titre de dogme religieux ; comme il proclamerait son droit de haïr les autres religions, ou le marxisme, ou le libéralisme, ou le bouddhisme, etc. C’est son droit le plus absolu de ne pas aimer telle religion, tel dogme, telle idéologie. On est dans le registre de la pensée, de la liberté d’expression, de conscience. Avec le choix de leur vocable, les idéologues islamistes s’embourbent eux-mêmes dans leur néologisme à connotation psychiatrique. La folie religieuse engendre une sémantique folle. Une pensée aliénante.

A l’évidence, associer deux termes aussi radicalement antinomiques est une opération tendancieuse. Dès sa création et sa propagation, le mot islamophobie (à l’évocation terrifiante) visait à jeter le trouble (au sens pathologique) dans l’appréhension de la question de l’islam. Subrepticement, ce terme a été introduit comme une arme de neutralisation de toute critique de l’islam. Ce n’est pas un hasard qu’il se soit exclusivement imposé et répandu en Europe et dans les autres pays occidentaux, dans lesquels la notion de blasphème est absente.

Depuis longtemps tombé en désuétude, le délit de blasphème ne fait en effet pas partie du paysage intellectuel de la France, et de manière générale des pays occidentaux. Ainsi, ces pays n’interdisent pas la critique libre de la religion. Le blasphème n’est donc pas criminalisé, contrairement aux pays musulmans.

De façon concertée, afin de contourner l’absence de législation sur le blasphème, dans le dessein d’instaurer l’interdiction de toute critique de l’islam, d’aucuns ont pondu un clone du blasphème édicté comme une fatwa : l’islamophobie. Pour l’imposer dans les consciences et lui donner une certaine légitimité, le terme islamophobie est assimilé, (pour ne pas dire rendu synonyme) au vocable antimusulman. Et le tour de prestidigitation idéologique a bien réussi. En réalité, contrairement à ce qu’affirment les islamistes et les islamo-gauchistes, le terme islamophobie ne vise pas à protéger les victimes de racisme antimusulman, mais bien la religion de la critique.

De fait, alors que la critique de l’islam ressortit du débat d’idées, de la liberté de mener des controverses philosophiques sur la religion, elle est maintenant considérée comme une atteinte aux musulmans, voire comme un attentat contre les musulmans. Comme si le fait de critiquer l’islam revenait à s’attaquer aux musulmans (en personne).

En effet, associer la critique de l’islam à une attaque contre les musulmans est très insidieux. C’est une imposture. Une malhonnêteté intellectuelle. Cela relève, sans jeun de mot, de la mauvaise FOI. Car, si la critique ou la haine des musulmans relève du racisme, légitimement condamnable et répréhensible, (du reste c’est un délit : il est passible de condamnation judiciaire) ; la critique de l’islam, elle, ne vise qu’à débattre librement du dogme de la religion musulmane. Elle relève de la liberté d’expression.

En Occident, la liberté de conscience comme le droit de la critique de la religion sont communément admis. En particulier, lorsqu’il s’agit de pays laïques comme la France, connue pour ses controverses anticléricales. En l’espèce, la liberté de critique prime sur toute autre considération, qui plus est religieuse. Pour insister sur le cas de la France, il ne faut pas oublier qu’elle fut le premier pays à mener une guerre impitoyable contre l’Eglise, notamment pendant la Révolution de 1789, illustrée par le mouvement collectif de déchristianisation. Sans omettre les diatribes corrosives anticléricales initiées par les grands philosophes des Lumières durant tout le XVIIIe siècle. La France est ainsi un pays où la critique contre la religion est ancestrale, où le débat-réquisitoire sur les religions est ancré dans la sphère philosophique et politique, où le droit à la caricature constitue un trait culturel.

Au vrai, la question philosophique et politique qui se pose à notre époque moderne sécularisée est la suivante : est-il légitime de critiquer librement l’islam ? Est-il légitime ou anormal, à notre époque marquée par l’islamisme, d’identifier comme radicalement dangereux certains courants de l’islam, notamment le salafisme engagé dans une Croisade verte totalitaire contre toute l’humanité, au nom de son dogme musulman doctrinaire, son islam coranique littéraliste théocratique ? Doit-on les combattre ou respecter leurs pratiques islamistes rétrogrades pour ne pas être accusés d’islamophobie ? N’est-ce pas au nom de l’islamophobie qu’on veut réduire au silence toute critique du dogme islamique ? Paradoxalement, ce sont les musulmans intégristes qui invoquent l’islamophobie pour circonscrire tout débat sur les questions relatives au dogme de l’islam, particulièrement ses aspects rétrogrades défendus avec obstination par les islamistes. L’arme massive dissuasive de l’islamophobie a été inventée par les islamistes pour neutraliser et criminaliser toute critique de la religion islamique. Pour verrouiller tout débat contradictoire, libre et démocratique sur l’islam.

En effet, le brandissement systématique de l’accusation d’« islamophobie » vise à assimiler toute critique de la religion à du racisme. À cet égard, après chaque attentat, certains musulmans dits modérés ou radicaux, par une forme d’inversion accusatoire, n’hésitent pas à jeter la confusion et semer le trouble par l’agitation de l’épouvantail « islamophobie », avec leur discours victimaire excipé pour quasiment exonérer la culpabilité des terroristes, acculés, selon leurs délires paranoïaques de persécution, à la commission de leurs forfaits du fait du climat d’islamophobie régnant en France (sic). Or, comme on l’a souligné plus haut, littéralement, étymologiquement, le mot « islamophobie » désigne ceux qui ont « peur de l’islam », et non ceux qui haïssent les musulmans. Dans tous les cas de figure, les musulmans sont présentés comme une « communauté » ostracisée, victime d’un racisme institutionnel (sic).

Ironie de l’histoire, plus gravement, en France (et dans d’autres pays occidentaux, notamment le Canada et l’Angleterre), les islamo-gauchistes, en association avec certaines organisations musulmanes d’extrême-droite, ont érigé le combat contre l’islamophobie en principe de la défense des « pauvres ». Autrement dit, par une approche réductrice et stéréotypé, les islamo-gauchistes en arrivent à considérer tous les « musulmans » comme une catégorie sociale composée exclusivement d’individus misérables. Cette approche paternaliste et misérabiliste de l’islam réduit à une religion de « Gueux » est sociologiquement erronée et politiquement raciste. Elle participe au renforcement de la manipulation religieuse opérée notamment par l’islam relativement au voilement de la division de la société en classes sociales antagoniques, pour mieux souder les classes dominées de confession islamique à leurs maîtres dans le cadre d’une communauté musulmane égalitaire fantasmée.

Depuis plus de quarante ans, d’abord avec les mollahs en Iran, puis tous les islamistes de tous les pays musulmans ou non, le vocable islamophobie permet d’englober dans la même réprobation et condamnation les « racistes » et les critiques vigilants, même lorsqu’ils sont musulmans ou ex-musulmans. Le procès en « islamophobie », plus performant que celui en apostasie, sert à intimider, censurer, réduire au silence, toute personne qui voudrait user de sa liberté d’expression notamment à l’égard du dogme islamique, comme cela est appliqué dans les pays musulmans.

Tout le monde s’accorde sur la nature de l’islamisme. L’islamisme constitue un courant religieux, mais aussi une organisation politique. Partout, certes il œuvre à imposer son idéologie coranique littéraliste, mais il vise surtout la conquête du pouvoir.

Une chose est sûre : longtemps, les puissances impérialistes se sont accommodées des mouvements islamistes, dès lors qu’ils opéraient dans leur « aire islamique », pour déstabiliser des puissances rivales (notamment URSS, l’Irak, la Syrie). L’islamisme était l’allié de l’impérialisme et du sionisme, tant que les centaines de milliers de victimes décapitées étaient musulmanes établies en terre d’islam. Mais, depuis que certains d’entre eux se sont invités, par la grâce de la politique « immigrationniste » impulsée par le grand capital apatride pour tirer à la baisse les salaires, dans le cœur de leurs respectifs pays avec leurs « mœurs collectives salafistes rétrogrades » et leurs menées solitaires terroristes, ils sont devenus « encombrants ». Pour enrayer la propagation virale de l’islamisme, quelle que soit sa version (bégnine ou létale), il importe au plus haut point de confiner la religion islamique au sein de la sphère privée et de proscrire son intrusion dans l’espace public.

À l’évidence, aujourd’hui, pour prouver leur sincérité dans leur souhait d’impulser un débat en vue de moderniser l’islam, les musulmans devraient accepter de dissocier les deux vocables « islamophobie » et antimusulman. S’il faut absolument conserver le second terme pour lutter contre le racisme antimusulman (en vrai anti-arabe ancré dans la culture française), notamment auprès des juridictions afin de condamner les coupables ; il faudrait a contrario fondamentalement bannir l’usage du premier vocable forgé politiquement pour museler tout débat critique sur l’islam.

En effet, afin d’éviter cette dérive totalitaire fondée sur l’instrumentalisation du vocable inquisitoire « islamophobie », brandi pour museler toute liberté d’expression, en particulier la liberté de critiquer le dogme islamique, il suffirait de forger un terme plus précis, tel « musulmanophobie ». Ce vocable « musulmanophobie », dépourvu d’ambiguïté sémantique et politique, éviterait l’amalgame avec le terme islamophobie connoté idéologiquement, agité comme épouvantail par les islamistes et les islamo-gauchistes pour verrouiller toute liberté d’expression et disqualifier les laïques, notamment les « musulmans » laïques.

À cet égard, pour commencer, les musulmans ne devraient plus brandir ce glaive (islamophobie) pour trancher (proscrire) toute critique de l’islam, sous couvert d’atteinte à la croyance musulmane.

De manière générale, dans cette entreprise d’obscurcissement des consciences, à l’évidence, à dessein, ils amalgament délibérément deux registres : « race » et religion. Deux entités qu’il faut absolument différencier. En effet, la nationalité n’est pas réductible à la religion. La nationalité est une entité juridique reconnue internationalement. Pour prendre l’exemple de l’Algérie, on naît algérien(enne) car nous sommes procréés par des parents algériens. Rien ne peut réfuter cette donnée. Nous portons notre identité algérienne de la naissance à la mort. Même si on change de pays, de nationalité, on demeurera toujours le fruit de géniteurs algériens.

En revanche, la religion, elle, relève d’un choix individuel, de la seule conscience de la personne. La religion n’est pas imprimée dans les gènes de la personne dite croyante. C’est le résultat de la transmission éducative, pour ne pas dire de l’endoctrinement opéré dès l’enfance par les institutions familiale et scolaire (dans le cas de pays musulmans). On ne naît pas musulman, on le devient. En outre, Musulman ne constitue pas une caractéristique héréditaire immuable. À plus forte raison, « les Musulmans » ne sont absolument un peuple. Un Algérien peut, au cours de sa vie, se convertir à une autre religion, à de multiples successifs dogmes, perdre la foi. En dépit de ses multiples conversions religieuses, il demeure Algérien.

Une fois admis ce postulat, la distinction entre « race » (ou nationalité) et religion deviendra aisément acceptable pour tout citoyen de confession musulmane. Et par extension, l’admission de la possibilité d’être Algérien et adepte d’une religion autre qu’islamique, Algérien et libre penseur ou athée, Algérien chrétien ou bouddhiste. Algérien n’est pas synonyme de musulman, tout comme musulman n’est pas synonyme d’Algérien.

Par ailleurs, afin de pouvoir débattre librement, les musulmans devraient procéder à la désacralisation de la religion musulmane. S’inscrire dans une dynamique psychologique « désanxiogène », un état d’esprit dépassionné, désangoissant. Sans ce préalable de désacralisation, indispensable à l’ouverture d’esprit pour un dialogue dépourvu de toute emprise irrationnelle, de toute passion irraisonnable, de toute appréhension hérétique, de toute terreur profanatrice, de tout sentiment blasphématoire, les proclamations d’intention des musulmans désireux d’amorcer des réformes demeureront lettre morte. Une fois seulement cette condition acceptée et accomplie, ils pourront plus aisément engager des débats controversés sur l’islam sans se sentir personnellement offensés ou agressés, ni éprouver quelque culpabilité religieuse, sans éprouver le sentiment de commettre un sacrilège, un « péché ».

Car, rationnellement, dans un débat critique sur l’islam, ce qui est sacré c’est le locuteur et l’interlocuteur, et non l’islam, doctrine religieuse, objet de débat. La critique libre de la religion est plus sacrée que l’interdiction de la critique religieuse consacrée.

Khider Mesloub

 

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