1956: L’école de filles d’El Flaye transformée en poste de commandement militaire (photo: Jean Claude Depoutot)
C’était il y a 65 ans, dans les djebels de Kabylie. J’avais 11 ans. J’ai assisté à l’incendie par le FLN de l’école d’El Flaye où je vivais, pour empêcher l’armée française de la transformer en poste militaire. Opération en partie ratée, car les bâtiments ont tenu bon.
Pour ce 23 mai 2021, avant d’évoquer des souvenirs d’enfant et l’impact qu’a eu cet événement sur mes engagements politiques d’adulte, je veux d’abord rendre hommage aux victimes du massacre de représailles de civils commis le lendemain par l’armée à quelques kilomètres d’El Flaye. Gloire aux martyrs et paix à leurs âmes …
Par Gilles Munier (chapitre 1)
Placé en garde à vue en octobre 2005 pour avoir violé une résolution des Nations unies – en fait pour avoir combattu l’embargo génocidaire imposé au peuple irakien -, j’ai été interrogé à Paris deux jours durant par la Brigade financière, puis mis en examen par le juge Courroye (1).
Ayant du mal à trouver le sommeil lors des deux nuits passées en cellule, je me suis demandé ce qui avait bien pu déclencher mon activisme politique dit « pro-arabe ».
Je pense que le déclic s’est produit quand j’avais 11 ans, le 23 mai 1956, quand mon père – Henri Munier – est monté au maquis algérien pour rencontrer le colonel Amirouche (2), suivi par mon départ précipité d’El Flaye où je vivais : un village de Petite-Kabylie surplombant la vallée de la Soummam.
Vers 23 heures, Lucien Lame, compagnon de ma mère (3), était entré dans notre chambre nous dire de nous habiller rapidement – ma sœur, mon frère et moi – et de le suivre. Il fallait quitter l’école qui allait être incendiée ou dynamitée, comme d’autres l’avaient été au cours des derniers mois dans la montagne, car le Front de Libération Nationale (FLN) craignait qu’elle ne soit transformée en poste militaire.
A la tombée de la nuit, mon père et Bernard Linglin, un collègue partageant ses convictions indépendantistes, guidés par un maquisard, avaient pris la direction du PC d’Amirouche situé, disait-on, quelque part dans le massif de l’Akfadou, à plusieurs jours de marche à pied à travers les djebels.
Un clown nommé Mitterrand …
Presque 50 ans plus tard, dans la cellule de la Brigade financière, des souvenirs me sont revenus à l’esprit pêle-mêle ; et je me suis remémoré peu à peu ce que devait être mon ressenti à l’époque.
Au début de la guerre, les accrochages entre l’armée française et le FLN, rapportés par La Dépêche de Constantine, me faisaient penser aux batailles entre Tuniques bleues et Indiens. J’étais résolument du côté des Peaux-Rouges depuis l’incendie d’une partie de la forêt de Yakouren, entre Bougie et Tizi Ouzou. J’avais été choqué par la mort des singes qui peuplaient les bords de la route Bougie-Tizi Ouzou… Pour moi, Amirouche était l’alter ego kabyle d’Emiliano Zapata, le révolutionnaire mexicain magnifiquement interprété par Marlon Brando dans le film qui avait été projeté au cinéma de Sidi Aïch.
Dans la cour de l’école de garçons, mes camarades – dont les frères ou les cousins étaient monté au maquis – parlaient surtout de la force surhumaine d’Ali, compagnon du Prophète, applaudi dans « Naissance de l’islam », film égyptien également projeté à Sidi Aïch, ou encore de l’évasion spectaculaire de la prison de Constantine de Mostefa Ben Boulaïd, chef de la wilaya des Aurès, condamné à mort (4).
Le souvenir du passage à El Flaye de François Mitterrand, en campagne électorale dans le département de la Nièvre, nous faisait encore rire. Pour sa propagande, l’ancien ministre de l’Intérieur qui clamait en 1954 : « L’Algérie, c’est la France, et la France ne reconnaîtra pas chez elle d’autre autorité que la sienne» se devait de parader en Kabylie, bastion de la rébellion. Des petits drapeaux français en papier avaient été distribués pour l’ovationner. Qui pouvait croire que le bonhomme habillé d’un pantalon de golf, sans grande prestance, qui grimpait essoufflé dans la montée escarpée du village à l’école, allait bientôt être nommé ministre français de la Justice et faire guillotiner plusieurs dizaines de résistants algériens ?
Des oreilles en bandoulière
En 1956, la région était à feu et à sang. L’école de filles, où j’habitais, avait une vue imprenable sur la vallée et les djebels avoisinants. J’y ai assisté, de la fenêtre du salon, à l’incendie d’une mechta (5) par l’armée, à plusieurs kilomètres au loin sur le versant d’un oued. Je me demande encore si les silhouettes qui semblaient fuir étaient celles de survivants ou des soldats qui les pourchassaient. Des hélicoptères, surnommés « Bananes volantes » (6) survolaient régulièrement notre douar – celui des Béni Oughlis (7) – pour déposer des commandos de chasse. Un matin, des militaires étaient tombés dans une embuscade un peu plus haut dans les virages de la montagne, et des balles perdues avaient sifflé au-dessus des tuiles du toit de l’école, une ou deux s’écrasant sur le balcon où je me trouvais.
Un après-midi de forte chaleur, j’avais été impressionné de voir le célèbre colonel Pierre Jeanpierre, commandant un convoi rutilant de la Légion étrangère stationné à El Flaye (8), demander à Geneviève, ma mère, l’autorisation de laisser son régiment s’approvisionner en eau fraîche à l’école. Elle lui signala que l’’eau n’était pas vraiment potable car elle avait refilé la fièvre typhoïde à ses enfants, mais l’avertissement n’avait pas inquiété le colonel: ses Bérets verts avaient l’estomac solide !
Comme beaucoup d’enfants du village, j’ai été choqué – voir effrayé – quand j’ai croisé un villageois dont le nez avait été coupé par le FLN pour le punir de fumer (9); et je l’étais encore plus quand un tirailleur sénégalais passait avec en bandoulière les oreilles de ses victimes enfilées dans un fil de fer (10).
L’École brûle
Pendant que des djounoud, en uniforme de l’Armée de Libération Nationale (ALN), mettaient le mobilier et les affaires personnelles des instituteurs en sécurité, et s’apprêtaient à incendier les bâtiments, nous avons pris le sentier conduisant à la mosquée du village où des familles nous attendaient avec du café et des gâteaux pour nous réconforter. Derrière nous des flammes s’élevaient de l’école. Le militaire du contingent, de garde dans un garage réquisitionné à l’entrée du village, a dû penser que sa dernière heure était arrivée…
Il ne fallait pas s’attendre à ce que l’armée, calfeutrée et en alerte dans les casernes du voisinage, vienne nous chercher, car des tranchées avaient été creusées sur la route et des maquisards étaient peut-être postés en embuscade.
A l’aube, prudemment, nous avons emprunté le sentier muletier descendant vers Sidi Aïch en prenant garde que les militaires ou les harkis qui observaient la progression de notre colonne, à chaque trouée entre les figuiers de barbarie et les aloès, ne nous prennent pas pour des « fellaghas » rusant pour les attaquer. Des tirs sans les sommations d’usage étaient toujours possibles.
J’ai su plus tard que le commissaire politique du FLN à El Flaye avait prévenu mes parents de l’opération en début de soirée, et que des dispositions avaient été prises pour nous loger à Sidi Aïch. Nous l’avons été – à bras ouverts – chez Larbi Alilat, un ami de mes parents, connu pour son influence dans le douar Beni Oughlis et pour son engagement indépendantiste (11).
Retour du PC d’Amirouche
Nous avons appris une dizaine de jours plus tard que mon père et son collègue étaient redescendus du PC d’Amirouche et avaient été arrêtés. Depuis nous étions sans nouvelles.
Dans « J’étais instituteur en Kabylie insurgée », témoignage de deux pages publié en août 1956 dans France-Observateur (12) – mon père décrit la situation réelle dans la vallée de la Soummam déclarée « pacifiée » par Robert Lacoste, gouverneur socialiste de l’Algérie. Il y parle brièvement de son aller-retour au maquis:
« Quant à nous (Henri Munier et Bernard Linglin), après un voyage de plusieurs jours à travers différents maquis, nous fumes amenés au PC d’Amirouche et de son lieutenant Mira Abderrahmane. Bien traités, nous avons pu observer et questionner librement les maquisards qui nous gardaient. Nous fûmes ensuite libérés sans qu’aucune condition ne nous ait été posée.
Dès notre retour à Sidi Aïch, sans même pouvoir retrouver nos familles, nous fûmes arrêtés, interrogés et transférés de nuit à Bougie. Là, mis au secret, sans recevoir de nourriture, pendant 48 heures, nous fûmes longuement questionnés par le 2ème Bureau et la Police judiciaire. Après quinze jours, on nous mit en résidence surveillée, en attendant une interdiction de séjour. »
Et de conclure, plus loin, dans un paragraphe intitulé : « Confiance quand même »:
« Nous avons dit tout ce que nous devions dire. Nous avons voulu témoigner parce que nous persistons à croire en l’avenir.
La France est devenue l’ennemie n°1 de l’Islam : elle tient cependant le moyen de renverser la vapeur et, en demeurant l’alliée fidèle et l’éducatrice des peuples d’un future Confédération nord-africaine, de conserver tout ce qui peut l’être, et d’être un pont naturel entre l’Occident et l’Orient musulman ».
Le retour du djebel était bien plus dangereux qu’à l’aller. Mon père risquait d’être abattu par une patrouille de l’armée, au fusil de chasse pour faire passer son assassinat pour une liquidation du FLN (13).
Mon père est toujours resté discret sur cet épisode de sa vie, sans doute pour lui permettre de poursuivre en secret son engagement anticolonialiste au côté du FLN (14).
Un « Patos » en Kabylie
Dans l’argot des Pieds noirs – les Français d’Algérie -, les Français métropolitains étaient des « Patos », des lourdauds qui ne comprendraient jamais ce que c’était de vivre avec les musulmans. A l’Assemblée algérienne, le lobby colonial, financé par les gros colons et les notables, faisait barrage à tout projet d’émancipation de la population dite « indigène ».
A l’inverse, en Kabylie et sans doute ailleurs dans les campagnes d’Algérie, les métropolitains jouissaient d’un a priori favorable.
Sur le site Internet Ath Waghlis, Larbi Alilat a raconté son premier entretien avec mon père lors d’une assemblée générale d’anciens élèves d’El Flaye et de Sidi Aïch. Extraits (15) :
« Un jeune instituteur récemment venu de France, intervint pour nous « conseiller ». Du fond de la salle, je l’interpellais et lui dis : « Vous n’avez pas à vous occuper de nos affaires. Vous êtes un étranger ». Que voilà un crime de lèse-colonisation ! Henri Munier, le jeune instituteur, me regarda avec étonnement. Il ne s’attendait pas à une intervention aussi « insolente » de la part d’un « indigène », car, sincèrement, il pensait qu’il se trouvait en « France ». Homme intelligent, il chercha à comprendre : il se rapprocha des indépendantistes et découvrit l’âme profonde de notre peuple… Henri Munier apprécia et approuva notre volonté d’indépendance. Aussi, c’est très naturellement et très simplement qu’il rejoignit nos rangs dès l’implantation du FLN dans la région ».
Massacre sans nom
Puis, concernant la réaction de l’armée à l’incendie de l’école :
« Les locaux scolaires furent incendiés : il fut nécessaire d’utiliser des bombes. De Sidi Aïch, les soldats en entendaient les détonations et devaient se douter de ce qui se passait : ils ne pensèrent pas aller au secours de la douzaine de leurs compatriotes qui vivaient à l’école. Ils préférèrent aller très nombreux, en passant par la route départementale (qui traverse lkhlidjene, encercler les villages Ath Soula et Agouni. Au matin, l’officier commandant le détachement rassembla la population. Muni d’une liste, il fit l’appel de plus de soixante personnes qui seront froidement abattues. Pendant ce temps, certains de ses hommes éparpillés autour du village tiraient à vue sur tous ceux qui cherchaient à se dégager du piège tendu par l’armée ennemie. Et ce fut toute la matinée un massacre sans nom ».
Dans « Aventures d’un géographe », Yves Lacoste (16) – fondateur de la revue Hérodote – relate ce qui s’est passé à El Flaye, et la réaction de Paule Doumain, institutrice et compagne de mon père:
« Le lendemain matin, un détachement français monta de la vallée. Un jeune lieutenant aligna contre un mur une dizaine de femmes, menaçant de les fusiller pour complicité car les hommes du village étaient passés au maquis. Paule vint se mettre aussi contre le mur. Le lieutenant hésita et finalement laissa tout le monde partir ».
Dans France-Observateur, mon père mentionna deux autres massacres perpétrés par l’armée début 1956 dans le douar Beni Oughlis. Concernant le dernier en date : celui effectué en représailles à l’incendie de notre école, il précisa :
« Soixante-cinq paysans, dont une femme, sont alignés au bord de la route, entre Djenane et Semaoun, et abattus à la mitraillette.
Dans le presse du lendemain : 39 fellagahs tués à Djenane… »
Et plus loin :
« Nous pourrions parler longuement aussi de la technique employée par certains officiers pour obtenir le ralliement des villages, sur la rive droite de la Soummam : on fusille les suspects, puis on donne un délai au village pour se rallier. Les malheureux fellahs se trouvent pris entre deux feux…
… Des officiers parfaitement honnêtes et sincères dirigent cette « pacification». Mais il y a loin d’un état-major à l’échelon exécutif »..
Sans doute parce qu’on ne dit pas ce genre de choses aux enfants, je n’ai entendu parler de ces abominations que bien plus tard (17).
Exfiltration vers la France
Sur le site Ath Waghlis, Larbi Alilat ajoute :
« Henri Munier, qui se trouvait au moment du « génocide » au village de Djenane, non loin de là, constata que le comportement des djounoud et de la population vis-à-vis d’eux ne changea pas. La nouvelle de la tuerie fut reçue avec une douleur sereine et une froide volonté de continuer la lutte quels qu’en soient les sacrifices. A Sidi Aïch, ils camouflèrent d’abord tout ce qu’ils avaient rapporté de la montagne chez un de leurs collègues avant d’annoncer leur retour aux autorités. La gendarmerie les arrêta, mais quelques jours après les libéra et les plaça en résidence surveillée à Bougie. J’organisais l’évasion d’Henri par Alger où un refuge lui fut réservé, il rejoignit la France ».
Mon père a été exfiltré par le FLN, car il n’était plus possible de quitter normalement l’Algérie. Après le vote des Pouvoirs spéciaux au gouvernement Guy Mollet par l’Assemblée nationale, le 12 mars 1956 – communiste compris – l’armée avait carte blanche pour rétablir l’ordre. Le 17 mars, François Mitterrand, ministre de la Justice, lui avait transféré les pouvoirs judiciaires par décret.
Larbi Alilat révèle qu’à la même époque Guy Desson, député du Parti socialiste SFIO dans le département des Ardennes, opposé à la politique du gouvernement Guy Mollet en Algérie (18) avait donné son accord pour rencontrer le colonel Amirouche. Il avait annulé le voyage pour assister au Festival de Cannes, en tant que président du Conseil supérieur de la cinématographie…
A la mi-juin 1956, j’ai revu des camarades d’école à Bougie – aujourd’hui Bejaïa – où nous avons passé notre examen d’entrée en 6ème. Ils m’ont appris que l’école de filles n’avait pas été détruite par l’incendie et qu’elle allait être transformée en poste militaire. Puis, comme tous les ans aux vacances d’été, j’ai quitté l’Algérie pour la France. Je n’y reviendrai qu’en septembre 1962, deux mois après l’indépendance.
Suite à ces événements, ma mère a été expulsée du département de Constantine. Elle est restée dans la famille Alilat – avec ma sœur Dominique et mon frère Olivier – jusqu’à sa nomination dans une école de la côte algéroise; et en Algérie jusqu’à sa retraite à la fin des années 70.
Paule Doumain, compagne de mon père, a également été interdite de séjour dans le département de Constantine. Nommée à Biskra, elle rejoignit mon père en France.
A suivre…
Notes :
(1) Sujet traité dans un autre chapitre.
(2) Début 1956, Amirouche Aït Hamouda (1926-1959) commandait les maquis implantés sur la rive gauche de la vallée de la Soummam, sous l’autorité de Krim Belkacem (1922-1968), co-fondateur du FLN, chef de la Wilaya III historique et futur signataire des Accords d’Evian. Chargé d’assurer la sécurité des chefs du FLN réunis en congrès en août 1956 près d’Akbou (Congrès de la Soummam). Amirouche succéda à Krim Belkacem et à Saïd Mohamedi (1912-1994) à la tête de la wilaya lorsqu’ils seront nommés membre du CCE (Comité de coordination et d’exécution) basé au Caire.
(3) En 1956, mes parents vivaient quasi séparément. Mon père était tombé amoureux de Paule Doumain, pied noire anticolonialiste, institutrice à l’école de garçons d’El Flaye, qu’il épousa plus tard.
(4) Titulaire de la Croix de guerre 1939-1945, cofondateur du FLN en 1954, chef de la Wilaya I (Aurès), Mostefa Ben Boulaïd (1917-1956) fut arrêté en Tunisie au retour d’une mission en Libye et livré aux autorités françaises qui le condamnèrent à mort. Évadé, il mourut dans un attentat organisé par le SDECE, service secret français.
(5) Petit hameau.
(6) L’hélicoptère Vertol H-21, à deux rotors, fabriqué aux États-Unis était appelé « Banane volante » en raison de sa forme étrange.
(7) Tribu Amazigh (berbère) dont l’implantation dans la vallée de la Soummam remonte loin dans l’histoire.
(8) Le colonel Pierre Jeanpierre (1912-1958), ancien résistant interné en 1944 au camp de Mauthausen, figure légendaire de la Légion étrangère, est mort en mai 1958 dans la région de Guelma, dans l’écrasement de son hélicoptère touché par un tir provenant d’une katiba de l’Armée de libération nationale algérienne (ALN).
Comme en France, l’armée n’avait théoriquement pas le droit de pénétrer dans les écoles sans mandat.
(9) Sentence réservée aux Algériens qui ne respectaient pas l’ordre de boycottage du tabac. Elle fut annulée par le Congrès de la Soummam en 1956.
(10) Le régiment des Tirailleurs sénégalais – dissous en 1960 – était un corps de troupes coloniales. Il était déclaré sénégalais parce que son centre de recrutement était situé au Sénégal, mais enrôlait des combattants dans toutes les colonies françaises d’Afrique noire.
(11) Membre dans sa jeunesse du Parti Populaire Algérien (PPA) de Messali Hadj (1898-1974), puis du FLN, Larbi Alilat (1922-2019) assurait clandestinement – entre autres – le transit des djounoud vers les maquis implantés dans la vallée de la Soummam.
Larbi Alilat participa – avec le Réseau Al Malik créé secrètement avec des proches – à l’organisation à Alger de la manifestation monstre du 11 décembre 1960 qui fit capoter le projet d’ « Algérie algérienne » (inféodée à la France) proposé par le général de Gaulle.
La presse internationale qui suivait la « tournée des popotes » mouvementée effectuée par le général de Gaulle en Algérie, assista stupéfaite au déferlement de manifestants venus des quartiers populaires et des bidonvilles algérois, scandant des slogans de soutien au FLN, au GPRA (Gouvernement provisoire de la République Algérienne). ou réclamant une « Algérie musulmane » et l’indépendance totale du pays. Le général de Gaulle autorisa l’armée à rétablir l’ordre. Bilan : plus de 200 morts.
Les manifestations patriotiques gagnant tout le territoire, le général de Gaulle abandonna son projet de « troisième voie » et reprit contact avec le GPRA. Quinze mois plus tard les négociations aboutirent à la signature du cessez-le-feu.
(12) « J’étais instituteur en Kabylie insurgée » par Henri Munier (France-Observateur, n°326 du 9 août 1956). L’hebdomadaire de gauche, anticolonialiste, avait été fondé en 1950 par Claude Bourdet, compagnon de la Libération. Après plusieurs changements de directions et de noms, il est aujourd’hui appelé L’Obs.
(13) L’Echo d’Alger, quotidien proche des extrémistes pieds noirs, fera ensuite courir le bruit que mon père avait aidé les maquisards à incendier l’école. La rumeur courrait toujours dans le régiment où Jean Claude Dupoutot, médecin appelé du contingent, soignait militaires et civils à El Flaye (1958-1960). (La guerre d’Algérie d’un médecin appelé du contingent. Octobre 1958 – juillet 1960).
(14) Sujet traité dans un autre chapitre.
(15) « 22 mai 1956 – Douloureux anniversaire à Ath waghlis » (Ath Waghlis – 26 mai 2008 – http://athwaghlis.over-blog.com/article-36184551.html), article repris par le quotidien El Watan.
(16) Ed. des Équateurs (Paris, 2018). Yves Lacoste – pas de lien de parenté avec le gouverneur Robert Lacoste – était un ami de mon père et de Paule Doumain.
Son épouse Camille Lacoste-Dujardin, ethnologue, est l’auteure de « Opération oiseau bleu. Des Kabyles, des ethnologues et la guerre d’Algérie » (La Découverte, 1997), qui relate la tentative du SDECE de constituer un faux maquis en Kabylie en 1956, avec des djounoud retournés. L’Opération oiseau bleu se solda par un cuisant échec : les djounoud étaient de vrais maquisards qui rejoignirent le maquis avec armes et bagages quand ils en reçurent l’ordre … Et Krim Belkacem remercia le Gouvernement général, par courrier, de lui avoir procuré des armes qui allaient servir à libérer son pays!
(17) L’anéantissement quasi-total d’une section de l’infanterie coloniale française dans les gorges de Palestro, le 18 mai 1956, avait soulevé une vive émotion en France. L’armée qui recherchait le commando de l’ALN, répliqua en massacrant des civils et en rasant un village. Le 19 juin 1956, François Mitterrand, ministre de la Justice, fit guillotiner les deux premiers militants du FLN condamnés à mort – Mohamed Ben Zabana et Abdelkader Ferradj – dans la cour de la prison Barberousse à Alger.
(18) Guy Desson finira par quitter le Parti socialiste SFIO. Il créa le Parti Socialiste Autonome (PSA), puis rejoignit le PSU (Parti Socialiste Unifié) opposé à la guerre d’Algérie.
Rennes – 23 mai 2021
Photo : Jean Claude Depoutot
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