CONTRE UNE LIBYE « FRACTUREE » …
31 août 2022
CONTRE UNE LIBYE « FRACTUREE » …
Une fois de plus, le gouvernement français de 2022, non content d’être l’héritier satisfait de celui de Nicolas Sarkozy, exécuteur de Mouammar Kadhafi et destructeur de la Libye, se manifeste à l’encontre d’un peuple qui a reculé d’un demi-siècle dans son processus de développement économique, politique et culturel à la suite de l’agression subie en 2011 !
Les grands médias français se gardent de couvrir les informations concernant ce « chef d’œuvre » de la politique franco-anglo-américaine qu’est devenue la Libye d’aujourd’hui après avoir été la première puissance du continent africain avant l’interventionnisme armée de l’Occident ! Le silence quasi-total, comme celui imposé sur la guerre du Yémen, victime de l’armée saoudienne, ou sur les massacres en Afrique noire, notamment en République démocratique du Congo (environ 5 millions de victimes en une quinzaine d’années), peut être comparé à la campagne propagandiste permanente en faveur de l’Ukraine, sans respect du contradictoire.
L’Occident – dont la France – ne respecte pleinement la liberté d’expression que lorsque cela ne lui coûte rien et lorsque sa réputation n’est pas trop menacée. Le cas de la Libye est à ce propos « difficile » et la recommandation officielle est de ne pas trop « remuer » l’affaire (qui va cependant bientôt refaire surface avec le procès Sarkozy-Guéant sur l’argent libyen).
C’est pourquoi les autorités françaises tentent, avec la plus grande discrétion, de favoriser la mise en œuvre d’un projet de Fédération rassemblant les différentes régions de la Libye, affaiblissant considérablement le rôle de l’Etat pour le plus grand intérêt des pétroliers. Le mépris pour le principe de « l’égale souveraineté » des Etats, mis pourtant en avant en faveur de l’Ukraine, est grossier. Les choix du peuple libyen n’ont pas d’existence réelle pour les Occidentaux : les ingérences doivent finir par l’emporter définitivement, malgré une évolution politique progressive : l’un des fils de Mouammar Kadhafi, Saïf-al-Islam, avait obtenu lors d’un sondage pour les élections présidentielles (qui n’ont pas eu lieu) 50% de positions favorables !
Pour la France et la plupart des puissances du monde, le seul intérêt que présente la Libye est son pétrole – qui, il est vrai, est d’une qualité supérieure. Accessoirement, le territoire libyen peut faire obstacle au mouvement migratoire venant d’Afrique subsaharienne. L’ « Humanisme » occidental ne va pas jusqu’à s’intéresser aux hommes et aux femmes de Libye, tout comme à la « belle » époque coloniale, il avait admis la conquête de la Libye par l’Italie de Mussolini !
La seule différence d’avec l’avant-guerre « italien », c’est qu’il y a désormais un véritable cartel d’Etats s’ingérant dans les affaires intérieures libyennes (le Qatar, l’Egypte, la Turquie, les Etats-Unis, la Russie, la France, etc. attisant les querelles entre tribus, clans, milices, etc.) afin de tirer un profit optimal en puisant dans les ressources libyennes.
Le gouvernement français, qui entend conserver les avantages acquis par son action liquidatrice du régime de Mouammar Kadhafi, vise avant tout à organiser le pays pour que soit garantie la circulation du pétrole. C’est le souhait des grandes compagnies !
Il n’est pas question de laisser place à une élection présidentielle qui permettrait la victoire d’un candidat « insuffisamment » pro-occidental.
De plus, le fédéralisme permettrait un partage du pays en zones d’influence, comme durant les années d’après la Seconde Guerre mondiale où la France, par exemple, contrôlait le Sud, c’est-à-dire, la région du Fezzan.
Cette diplomatie française – illustration s’il en était besoin d’une politique étrangère éloignée de ce qui serait exigible dans une démocratie mais qui veut faire croire qu’elle est inspirée, surtout en Afrique, de la volonté de protéger les droits de l’Homme et des Peuples contre les « intrus » (tels les Russes !) – ne fait que prolonger sous des formes nouvelles la politique de subordination coloniale pratiquée de longue date. La France n’est pas encore guérie de cette pathologie méprisante pour les civilisations et les peuples non-européens comme en témoigne avec brutalité un certain racisme.
Suivre avec vigilance la politique occidentale vis-à-vis de la Libye, et particulièrement celle du régime d’Emmanuel Macron, c’est tenter de veiller à ce que les atteintes au principe fondamental de « l’égale souveraineté des Etats » garanti par la Charte des Nations Unies ne soient pas trop faciles à développer contre un peuple qui ne menace personne, qui tente d’assurer simplement sa survie, malgré une opinion internationale anesthésiée.
Robert Charvin
1er septembre 2022