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16 avril 2024

L’OTAN : alliance défensive ou instrument de guerre?


L’OTAN : alliance défensive ou instrument de guerre?

Robert Bibeau

Sep 20

L’OTAN : alliance défensive ou instrument de guerre?

  Ce texte est disponible en format PDF:
OTAN-Alliance-défensive-ou-instrument-de-guerre-juin-2009-EAG

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale,
les relations entre les pays occidentaux et
l’URSS s’étaient rapidement transformées, passant
d’une alliance saluée contre le nazisme à une
confrontation entre « pays démocratiques » et « pays
communistes » que l’on nomme la Guerre froide et
qui opposait deux alliances politiques et militaires :
l’OTAN et le Pacte de Varsovie.

L’OTAN a été mise en place à Washington, en 1949,
et regroupait alors douze pays : les États-Unis, le
Canada, et dix pays d’Europe de l’Ouest et du Nord.
En Occident, elle est souvent perçue comme une
alliance défensive ayant été établie face à la menace
militaire des pays du « bloc communiste ». Mais
l’alliance militaire des pays communistes, le Pacte de
Varsovie, n’a vu le jour qu’en 1955, en bonne partie
en réponse à l’adhésion de la République fédérale
allemande (Allemagne de l’Ouest) à l’OTAN.

Au sein de l’OTAN naissante, le déséquilibre des
forces était énorme entre, d’une part, les ÉtatsUnis, puissance dominante aux plans économique,
politique et militaire et, d’autre part, les pays
européens affaiblis, en ruines. En même temps
que la forte présence des bases et le déploiement
des armes nucléaires étasuniennes se présentaient
comme une garantie sécuritaire pour l’Europe
occidentale, cela représentait une sérieuse limitation
à la souveraineté de ces États.

Un argument souvent invoqué par le gouvernement canadien pour
tenter de donner une légitimité à la guerre en Afghanistan est le fait
que celle-ci est menée sous l’égide de l’OTAN – l’Organisation du Traité
de l’Atlantique Nord – une alliance militaire de laquelle le Canada est
un membre fondateur. Le gouvernement soutient que le Canada doit
s’acquitter de ses obligations au sein de cette Alliance et faire sa part
dans la « guerre contre le terrorisme ».
Les origines de l’OTAN

1949 — 1991
une Alliance sous contrôle étasunien
malgré certains remous
L’OTAN est une organisation dont la structure
est très complexe, composée d’une myriade
de comités et dont des pans importants sont peu
connus, étant marqués par le secret militaire. Aucun
vote n’y est pris; les décisions ou les déclarations
sont arrêtées par consensus au terme de multiples
discussions, négociations et tractations à divers
niveaux, en privé, sur la place publique et au sein
des comités. Dans un tel contexte, il va de soi que
le déséquilibre des forces et des moyens font en
sorte que, dans l’ensemble, ce sont les points de
vue étasuniens qui finissent par prévaloir au sein de
l’OTAN.

Mais cela ne va pas sans résistance, ni sans
exception. Le cas le plus connu est celui de la
France qui, sans quitter l’OTAN comme telle, s’est
retirée de 1966 à 1995 du commandement militaire
intégré de l’Alliance. Mais la participation de la Grèce
et de l’Espagne ont aussi connu des hauts et des
bas.

En décembre 1979, les divisions ont été les plus
fortes au sein de l’OTAN, lorsque l’annonce du
déploiement de missiles Cruise et Pershing II (comme
vecteurs nucléaires) en Europe de l’Ouest a suscité
la controverse et une mobilisation impressionnante
des sociétés civiles. Cette annonce donna lieu à
des mouvements de protestation d’une ampleur
jamais vue auparavant, des milliers de personnes
étant même prêtes à participer à des actions de
désobéissance civile.

Au cœur de ces mobilisations, se retrouvent
la peur et le refus d’une conflagration nucléaire
entre les deux super-puissances, sur le « théâtre »
européen. Cette crise connaîtra son dénouement par
la ratification d’un traité entre les États-Unis et l’URSS
sur l’élimination des missiles aux portées courte et
intermédiaire.

Avec la dissolution du bloc communiste, tous les
pays d’Europe de l’Est et les ex-républiques de
l’URSS sont devenus des bassins de ressources et de
main d’œuvre à bon marché pour les grands capitaux
du monde. Mais la relative suprématie économique
des États-Unis est tombée de moitié, comparée à
ce qu’elle était un demi-siècle plus tôt. Par contre,
leur suprématie militaire est totale et historiquement
sans précédent. Elle sera donc la carte maîtresse
des États-Unis, jouée une première fois par George
Bush père lors de la Guerre du Golfe de 1991. Ce
fut le coup d’envoi d’un soi-disant « nouvel ordre
mondial ».

Dans un tel contexte, la chute du mur de Berlin
(1989) et la dissolution du Pacte de Varsovie et de
l’URSS (1991) n’ont pas entraîné la dissolution de
l’OTAN; la stratégie étasunienne était, au contraire, de
tirer avantage de l’élargissement de cette Alliance. En
janvier 1994, l’OTAN lancait donc son « Partenariat
pour la paix » en vue de l’adhésion des ex-États
communistes. Au cours des 15 années qui ont suivi,
l’OTAN est passée de 16 à 28 pays membres.
L’objectif des États-Unis était d’élargir à la fois le
mandat, le terrain et les moyens d’intervention de
l’OTAN pour l’étendre à « l’affrontement des dangers »
et à la « résolution de crises » partout dans le monde.
(voir encadré)

L’OTAN après 1991 :
une nouvelle vocation mondiale
Concept stratégique
de l’OTAN (1999)

• Article 24 : « (…) la sécurité de
l’Alliance doit aussi s’envisager dans un
contexte global. Les intérêts de sécurité
de l’Alliance peuvent être mis en cause par
d’autres risques à caractère plus général,
notamment des actes relevant du terrorisme,
du sabotage et du crime organisé, et par
la rupture des approvisionnements en
ressources vitales. (…) »

• Article 56 : « (…) Étant donné que les
forces de l’Alliance peuvent être appelées à
opérer au-delà des frontières de la zone de
l’OTAN, il faut disposer de moyens souples,
mobiles, rapidement déployables et aptes à
soutenir des opérations prolongées (…) »
En 2002, à l’initiative de Donald Rumsfeld,
une Force de réaction rapide de l’OTAN fût
créée, composée de 25 000 soldats. Puis,
en 2006, la déclaration finale du Sommet de
l’OTAN à Riga alla beaucoup plus loin :
« l’Alliance doit être capable de lancer et
d’appuyer simultanément des opérations
interarmées de grande envergure et des
opérations de moindre ampleur, pour la
défense collective et la réponse aux crises,
sur son territoire et au-delà, à sa périphérie
et à distance stratégique. »

L’objectif visé est de pouvoir mener
simultanément deux opérations de grande
envergure, comptant 60    000 militaires
chacune et six opérations moyennes avec
30 000 militaires, pour un total opérationnel
de 300 000 militaires!

La fin de la Guerre froide devait apporter
au monde les « dividendes de la paix » par
la réaffectation d’une part importante des
budgets militaires à des fins socialement
utiles et environnementalement viables.
Mais après des réductions initiales, les
budgets militaires ont recommencé à
croître. Pourquoi ?

Carte illustrant l’expansion de l’OTAN
Légende:
Pays membres avant 1999
Pays membres depuis 1999
Prochains pays membres :
Ukraine et Géorgie

Depuis 1991, les États-Unis ont poursuivi une
politique d’encerclement à l’égard de la Russie.
En témoignent l’élargissement de l’OTAN et les
pressions en faveur de l’adhésion prochaine de la
Georgie et de l’Ukraine; en témoignent également
les projets liés au « bouclier antimissile » en
Pologne et en République tchèque, de même que
l’établissement de bases militaires étasuniennes en
Afghanistan et ailleurs en Asie centrale.

D’autre part, suite à la fin de la Guerre froide,
l’Europe économique et politique s’est grandement
consolidée et la question de la doter de moyens
militaires autonomes et significatifs a acquis une
nouvelle importance. Objectivement, le maintien et
l’élargissement de l’OTAN sont venus couper l’herbe
sous le pied de la consolidation d’un pôle militaire
européen autonome. Ainsi, la récente résolution
du Parlement européen (19/02/2009) sur le rôle
de l’OTAN dans l’architecture de sécurité de l’Union
européenne fait le constat que « 94 % des personnes
qui vivent dans l’Union européenne sont citoyens de
pays membres de l’OTAN »… D’ailleurs, au Sommet
de l’OTAN des 4 et 5 avril 2009, Barack Obama a
déclaré que « la sécurité de l’Europe est directement
liée à celle des États-Unis », bref… qu’elle restera sous
contrôle étasunien à travers l’OTAN.

Le contrôle étasunien sur l’OTAN s’est même
renforcé avec l’élargissement de l’Alliance à des
pays recherchant davantage la « protection » et les
investissements directs des États-Unis que ceux de
l’Europe occidentale. C’est ainsi que l’opposition de
la France et de l’Allemagne à l’invasion étasunienne
de l’Irak en 2003 a été dénigrée par l’administration
Bush comme étant le fait de la « vieille Europe »,
alors que de nombreux dirigeants de pays de la
« nouvelle Europe » signaient une lettre commune
d’appui à cette guerre…

L’OTAN et la stratégie des États-Unis

Après la dissolution de l’URSS et la fin de la Guerre froide, un des objectifs
stratégiques des États-Unis est d’empêcher l’émergence d’une autre puissance
capable de rivaliser militairement avec eux. Au nombre des rivaux potentiels, il y
a la Russie et la Chine, mais aussi… l’Europe.

Le Canada et l’OTAN

Depuis le début, le Canada se situe au sixième
rang en regard de sa participation aux budgets
civils et militaires de l’OTAN. En 2005-2006, le Canada
a contribué à la hauteur de 160 $ millions et 114
employés. Du 16 juin 2005 au 27 juin 2008, c’est le
général canadien Ray Hénault qui occupait le poste
de président du Comité militaire, le poste militaire
le plus élevé de l’OTAN. D’après le Ministère des
Affaires étrangères, l’OTAN est « la pierre angulaire
des relations du Canada avec l’Europe. Le Canada
bénéficie considérablement du poids diplomatique,
des compétences techniques et des capacités
militaires de l’OTAN. »

La contribution du Canada au système aéroporté
de détection lointaine est la troisième en importance
parmi les membres de l’OTAN. De plus, le Canada sert
de terrain d’entraînement pour les forces de l’OTAN.
L’Opération Maple Flag qui se déroule à Cold Lake,
en Alberta, est l’un des plus importants exercices
de combat aérien au monde. Une des bases
d’entraînement les plus controversées est située à
Goose Bay, au Labrador. Les peuples autochtones
se sont opposés à l’utilisation de cette base qui
perturbe l’utilisation de leur territoire. La base de
Goose Bay est en train d’être agrandie comme site
d’entraînement pour les opérations spéciales et les
forces expéditionnaires.

Cela démontre que la politique étrangère et militaire
du Canada est intimement liée à celle de l’OTAN et
illustre l’émergence du Canada en tant que nouvelle
force militaire en mesure de mener des interventions
telles que celle en Afghanistan.

Tiré de NATO at 60 years,
Alliance Canadienne pour la Paix
(notre traduction)

Le Canada est souvent perçu comme un joueur de second ordre à l’OTAN. Toutefois,
en ce qui concerne les contributions à l’OTAN, le Canada ne cède pas sa place. En fait,
le Canada est bien intégré dans la structure de commandement de l’OTAN et il s’engage
dans des guerres telles que celles en Yougoslavie (1999) et en Afghanistan (2001).

Des blindés canadiens
« Léopard C2 » et leur
équipage en attente pendant
qu’un hélicoptère Blackhawk
décolle de la base Ma’Sum
Ghar près de la ville de
Bazaar-e-Panjwayi.
10 décembre 2006

Le 17 avril 2007, l’aboutissement de la
transformation de l’OTAN en instrument militaire
global de l’hégémonie étasunienne était décrit ainsi
par Daniel Fried, Secrétaire d’État adjoint (étasunien)
aux affaires européennes et eurasiennes :
« Depuis la Guerre froide et son rôle
régional dans les années 1990, l’OTAN
s’est transformée en une organisation
transatlantique effectuant des missions
globales, de portée globale avec des
partenaires globaux. (…) Tout appartient
potentiellement à la zone de l’OTAN…
L’OTAN est en train de développer
les capacités et les perspectives
politiques nécessaires pour s’attaquer
aux problèmes et aux éventualités qui
surviennent dans le monde entier. »

Un tel développement de l’OTAN entre directement
en contradiction avec le mandat de l’Organisation
des Nations Unies (ONU) dont le but premier est
de « maintenir la paix et la sécurité internationales »
et avec celui du Conseil de sécurité auquel l’ONU
confère, en vue d’assurer une action rapide et
efficace, « la responsabilité principale du maintien de
la paix et de la sécurité internationales ».

La volonté de l’OTAN d’agir de façon autonome
et en fonction de ses seuls intérêts partout dans
le monde entre aussi en contradiction avec l’article
53 de la Charte des Nations Unies qui stipule
qu’ « aucune action coercitive ne sera entreprise en
vertu d’accords régionaux ou par des organismes
régionaux sans l’autorisation du Conseil de sécurité ».
Pour les États-Unis, depuis plusieurs années déjà,
il n’est pas nécessaire d’obtenir cette autorisation.
En effet, dès 1988, dans le cadre d’une polémique
autour de la résolution 1203 du Conseil de sécurité
sur le Kosovo, Madeleine Albright répond ainsi à
la question « Cette OTAN du XXIe siècle, devra-t-elle
toujours disposer d’un mandat précis du Conseil de
sécurité de l’ONU pour agir? » : « Non… car, dans une
telle hypothèse, l’OTAN ne serait plus qu’une simple
filiale de l’ONU »…

Dernièrement, on observe une tendance encore
plus inquiétante : un rapprochement institutionnel
entre l’OTAN et l’ONU et une volonté d’accréditer
officiellement l’OTAN comme force internationale
de paix (!) au service de l’ONU. C’est le sens d’un
accord qui a été signé le 23 septembre 2008 entre
le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki Moon, et celui
de l’OTAN, Jaap de Hoop-Scheffer, sans que cela
n’ait été approuvé ni même porté à la connaissance
du Conseil de sécurité. Cet accord a été fortement
dénoncé par la Russie et la Chine, de même que
par Hans von Sponeck, un ex-assistant secrétaire
général de l’ONU qui écrit :

« Dans la période actuelle de confrontation,
on est en droit de s’attendre à un niveau de
neutralité particulièrement élevé de la part du
secrétariat des Nations Unies. L’accord ONU/
OTAN est tout sauf neutre et ne restera donc pas
sans conséquences sérieuses… »

L’OTAN, l’ONU
et le droit international

L’OTAN en guerre
Les membres de l’OTAN sont responsables d’au
moins 75 % des dépenses militaires mondiales,
allouant maintenant 1 000 milliards de dollars US par
année à cet effet. En dollars constants, les dépenses
militaires de l’OTAN ont augmenté de 31 % de 2000 à
2008. Le déséquilibre des forces au sein de l’OTAN est
illustré par le fait que les États-Unis sont à eux seuls
responsables de la moitié des dépenses militaires
mondiales (donc des deux tiers des dépenses militaires
de l’OTAN).

Cette augmentation des dépenses militaires de
l’OTAN de même que l’encerclement objectif de la
Russie par l’expansion de l’OTAN et sa poussée en
Asie centrale par la guerre en Afghanistan ont pour
effet de relancer la course aux armements avec la
Russie et avec la Chine. En mars 2009, le président
russe, Dmitri Medvedev, déclarait : « Les tentatives
d’étendre l’infrastructure militaire de l’OTAN aux frontières
de notre pays (…) nous obligent à améliorer nos forces
armées, à leur donner une forme plus moderne (…). La
première tâche, c’est d’améliorer la capacité de riposte
de nos forces. Et avant tout de nos forces nucléaires
stratégiques (…). Cette modernisation sur une grande
échelle des forces armées débutera en 2011. » De son
côté, de 2000 à 2008, la Chine a augmenté son budget
officiel de défense de 16 % par année en moyenne,
les augmentations les plus marquées étant celles des
deux dernières années (18 % et 27 %).

Mais l’OTAN ne fait pas que préparer la guerre et
adopter des postures menaçantes, elle fait la guerre.
À deux reprises depuis la fin de la Guerre froide,
l’OTAN a mené des offensives militaires d’envergure
déterminées par les intérêts stratégiques des ÉtatsUnis. Une première fois, en ex-Yougoslavie, où une
campagne de « bombardements humanitaires » de 78
jours – du 23 mars au 11 juin 1999 – a fait des milliers
de victimes en plus de détruire les infrastructures
civiles de la Serbie et s’est soldée par l’établissement
d’un protectorat de l’OTAN au Kosovo, maintenant
« indépendant ». Et une deuxième fois – très loin
de l’Atlantique nord – en Afghanistan, où la guerre
se poursuit toujours, après plus de sept années, et
engage de plus en plus de troupes étrangères.

Dans les deux cas, le choix de faire la guerre a été
rapide et délibéré de la part de l’OTAN, ne laissant
aucun temps pour explorer d’autres avenues. Ainsi,
dans le cas de la Serbie, l’accord de Rambouillet,
proposé par les États-Unis au début de 1999, avait
été conçu pour qu’il soit rejeté et fournisse le prétexte
de la guerre. Son Annexe B, gardée secrète par les
États-Unis et les diplomates alliés, demandait rien de
moins que le libre passage et l’immunité du personnel
de l’OTAN sur tout le territoire de la Yougoslavie.

L’existence de cette annexe – et donc la supercherie
– fut rendue publique par un journal allemand… deux
semaines après le début des bombardements. En ce
qui concerne l’Afghanistan, la guerre a été décidée
et dirigée par les États-Unis, menant une coalition de
pays, principalement des membres de l’OTAN, dont le
Canada. Ceux-ci ont invoqué, dès le 4 octobre 2001,
l’article 5 du Traité de Washington (Charte de l’OTAN), en
vertu duquel toute attaque contre un pays de l’OTAN,
lancée de l’extérieur de ce pays, est interprétée comme
une attaque contre tous les pays de l’OTAN.

Mais dans les deux cas également – tout comme les
États-Unis pour l’Irak d’ailleurs – les fauteurs de guerre
ont réussi à faire cautionner leur action après coup par
le Conseil de sécurité des Nations Unies, au mépris du
droit international et même de la Charte de l’ONU.

Les pressions étasuniennes incessantes au sein de
l’OTAN en faveur de l’accroissement des dépenses
militaires des pays membres, de la modernisation
technologique à outrance et de « l’interopérabilité »
accroissent aussi l’intégration et la dépendance
des pays membres tant au niveau des structures
de commandement que des équipements et de la
formation du personnel militaire. En ce qui concerne le
Canada, les soldats qui sont déployés en Afghanistan
vont maintenant compléter leur entraînement dans une
grande base étasunienne à Fort Bliss, au Texas. Aux
plus hauts échelons, plusieurs généraux canadiens
vont parfaire leur formation au US Army War College;
ils occupent même des postes de commandement
au sein de l’armée étasunienne comme les chefs
d’état-major de la défense canadienne, Rick Hillier
et Walt Natynczyk, qui furent tous deux général
commandant adjoint du IIIe Corps à Fort Hood, au
Texas. Cette fonction a même amené l’actuel chef
d’état-major, Walt Natynczyk, à être déployé en Irak,
en 2004, en tant que général commandant adjoint du
Corps multinational, commandant 35 000 soldats dans
le cadre d’une guerre illégale!

Concept stratégique
de l’OTAN (1999)

• Article 46 : « Pour protéger la paix et
prévenirlaguerreoutouteformedecoercition,
l’Alliance maintiendra dans l’avenir prévisible
une combinaison appropriée de forces
nucléaires et de forces conventionnelles (…).
Mais ses forces conventionnelles ne peuvent
à elles seules assurer une dissuasion
crédible. Les armes nucléaires apportent une
contribution unique en rendant incalculables
et inacceptables les risques que comporterait
une agression contre l’Alliance. Elles restent
donc indispensables au maintien de la
paix. »

• Article 62 : « L’objectif fondamental
des forces nucléaires des Alliés est politique :
préserver la paix et prévenir la coercition ainsi
que toute forme de guerre. Elles continueront
à jouer un rôle essentiel en maintenant tout
agresseur dans le doute quant à la façon dont
les Alliés riposteraient en cas d’agression
militaire. Elles démontrent qu’une agression,
quelle qu’en soit la forme, n’est pas une
option rationnelle. La garantie suprême de
la sécurité des Alliés est apportée par les
forces nucléaires stratégiques de l’Alliance,
en particulier celles des États-Unis; les forces
nucléaires indépendantes du Royaume-Uni et
de la France, qui ont un rôle de dissuasion
propre, contribuent à la dissuasion globale et
à la sécurité des Alliés. »

En 1995, paraissait un inquiétant
document du Commandement
stratégique des États-Unis
(STRATCOM) qui décrivait les
armes nucléaires comme les plus
importantes de l’arsenal.
Àla différence des armes chimiques ou
biologiques, l’extrême destruction résultant
d’une explosion nucléaire est immédiate et qu’il
n’existe que peu ou pas de moyens de réduire son
effet ». Le document conseillait aux planificateurs de
ne pas donner l’image de gens « trop rationnels ou
réfléchis… le fait que les États-Unis puissent devenir
irrationnels et vindicatifs si leurs intérêts vitaux sont
attaqués devant être partie intégrante de l’identité
nationale à projeter. »

Le 8 juillet 1996, à la demande de l’Assemblée
générale des Nations Unies, la Cour internationale
de justice de La Haye (CIJ), donna un avis juridique
désavouant cette orientation en statuant que la
menace ou l’utilisation d’armes nucléaires serait
généralement contraire aux règles du droit international
applicable aux conflits armés et, en particulier, aux
principes et aux règles du droit humanitaire.
Mais, trois ans plus tard, cette politique se retrouve
en toutes lettres dans le nouveau concept stratégique
de l’OTAN en 1999 (voir encadré). Une telle politique,
qui considère la possession d’armes nucléaires et la
menace réelle de leur usage comme indispensable
à la sécurité d’un groupe de pays, est tout à fait
contraire à l’obligation de désarmement nucléaire
contenue dans le Traité sur la non-prolifération des
armes nucléaires.

«Une politique nucléaire
illégale et menaçante »

Alors que l’OTAN se présente comme suprême
garante des valeurs de droit, de liberté et de
démocratie, elle a déjà accueilli en son sein des
dictatures : le Portugal de Salazar et la Grèce des
colonels. Son histoire, son fonctionnement et ses
actions sont caractérisés par les jeux de coulisse,
la contrainte, la menace et même la guerre. En
tant qu’instance supra-nationale, dont une bonne
part des activités est, de surcroît, couverte par le
secret militaire, l’OTAN échappe totalement au
contrôle démocratique. Et il arrive souvent que les
gouvernements de ses pays membres, dans le cadre
de leurs engagements « envers l’OTAN », adoptent
des politiques qui sont contraires à la volonté des
populations de ces pays.

C’est encore le cas aujourd’hui alors que les
projets guerriers concoctés par « nos » dirigeants
politiques au sein de l’OTAN vont à l’encontre de la
volonté populaire dans presque tous les pays qui
en sont membres. C’est, en effet, en fonction de
ces délibérations à huis-clos que les Parlements de
l’Allemagne, du Canada, de l’Italie et de l’Angleterre –
pour ne nommer que ceux-là – votent de poursuivre
leur implication dans la guerre en Afghanistan malgré
l’opposition de leurs populations à 68 %, 58 %, 56 %
et 54 % respectivement.

Pour le retrait du Canada de l’OTAN

L’OTAN, nettement dominée par les ÉtatsUnis, agit maintenant comme bras armé de
l’hégémonie étasunienne à l’échelle mondiale.
Bien loin d’être un facteur de paix dans le
monde, l’OTAN attise les tensions, renforce
les divisions, initie délibérément des guerres,
menace de déclencher une guerre nucléaire
et entraîne le monde dans une nouvelle
course aux armements aux conséquences
potentiellement catastrophiques pour toute la
planète.

En fait, l’OTAN est au cœur même de
politiques et de procédés qui vont à l’encontre
de rapports égalitaires entre pays, fondés sur
le respect du droit international. Pour être
conséquente, notre opposition à la guerre
d’occupation en Afghanistan et au virage
militaristedelapolitiqueétrangèrecanadienne
doit s’accompagner de l’exigence du retrait du
Canada de l’OTAN, qui est le véritable maître
d’œuvre de ces politiques guerrières et antidémocratiques.
OTAN et démocratie
Logo du contre-sommet qui a eu lieu à
Strasbourg, France du 1er au 5 avril 2009.

 

Soldier silhouette on grunge NATO flag. United army, military concept.

Pour en savoir plus :

1. Nils Andersson, Que signifie un retour complet de la France au sein de l’OTAN ?, 10 février 2009 :
http://www.france.attac.org/spip.php?action=autoriser&arg=5258
2. Alliance canadienne pour la paix, NATO at 60 years, http://www.acp-cpa.ca/en/NATOFactsheet1.pdf
3. The United Nations and NATO: which security and for whom?, Current Concerns, 2009,
No 2 : http://www.currentconcerns.ch/index.php?id=711
4. Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif de la Cour internationale de
justice, 8 juillet 1996 : http://www.icj-cij.org/docket/files/95/7494.pdf
5. Paul-Marie de la Gorce, Retour honteux de la France dans l’OTAN, Le Monde diplomatique, janvier
1996 http://www.monde-diplomatique.fr/1996/01/DE_LA_GORCE/2285
6. Dominique Vidal, Ce que voulait de Gaulle en 1966, Le Monde diplomatique, avril 2008
http://www.monde-diplomatique.fr/2008/04/VIDAL/15800
7. Noam Chomsky, Hegemony or Survival, Metropolitan Books, Henry Holt and Company,
New York, 2003

Ce fascicule fait partie des textes préparatoires au Sommet populaire québécois contre la guerre
et le militarisme. Il a été produit par le Comité de suivi du Collectif Échec à la guerre pour stimuler
la réflexion concernant le rôle actuel de l’OTAN dans le monde et la participation du Canada à
cette alliance militaire. Une version approfondie de ce texte est également disponible en ligne
pour les personnes intéressées à en savoir plus. Pour une position critique détaillée sur le
Canada, l’OTAN et la guerre en Afghanistan, voir aussi Le Canada dans la guerre d’occupation
en Afghanistan, Collectif Échec à la guerre, février 2007.

65 ouest de Castelnau, bureau 302
Montréal, Québec
H2R 2W3
Tél. : 514-919-7249 (919-PAIX)
Courriel : info@echecalaguerre.org

 

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