Etats-Unis et Israël craignent une explosion au front nord de la Palestine occupée
14 novembre 2023
Les Etats-Unis et Israël craignent une explosion au front nord de la Palestine occupée
Publié par Gilles Munier sur 14 Novembre 2023, 09:13am
Catégories : #Gaza, #Hezbollah, #Cisjordanie, #Hamas
Des combattants de la branche armée du Hezbollah s’entraînant à Aaramta, un village du sud du Liban, en mai 2023 – Photo : Hassan Ammar
Par Abdel Bari Atwan (revue de presse : Chronique de Palestine – 10 novembre 2023)*
Les États-Unis cherchent-ils à obtenir un cessez-le-feu à Gaza pour limiter les dégâts pour Israël, ou est-ce juste une sinistre comédie ?
Alors que les tensions se développent et que les affrontements s’intensifient sur le front du Sud-Liban entre les groupes de la résistance [libanaise] et l’armée d’occupation israélienne, il est clair que la perspective cauchemardesque qui hante l’administration américaine – l’extension de la guerre contre Gaza en une conflagration régionale – devient de plus en plus probable.
Dans son discours de vendredi, le premier responsable du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a reporté la décision de participer à la guerre ou de la déclarer, mais n’a pas exclu cette possibilité. Les événements récents pourraient conduire à l’activation de cette option.
Mardi soir, l’armée israélienne a déclaré que 20 missiles avaient été tirés depuis le territoire libanais contre des bases et des colonies en Galilée et qu’elle avait bombardé les environs de plusieurs villages libanais en réponse à ces tirs.
La chaîne al-Manar du Hezbollah a fait état de frappes de missiles par la Syrie sur des positions israéliennes sur le plateau du Golan occupé, que le système Iron Dome a tenté d’intercepter.
Plus tôt, le ministre iranien des affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, a révélé que son homologue américain Anthony Blinken avait envoyé un message à Téhéran par l’intermédiaire du gouvernement irakien, l’assurant que Washington cherchait à obtenir un cessez-le-feu à Gaza.
Il a accusé les États-Unis de mentir et de jouer avec le temps tout en étant un partenaire de l’assaut continu et implacable d’Israël.
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Il ne serait pas surprenant que Blinken, qui ne cesse d’afficher sa dévotion à Israël, mente en son nom et tente de faire croire aux Iraniens qu’il est sensible à leurs préoccupations afin d’empêcher la guerre de s’étendre et d’être rejointe par le Hezbollah.
Il a tenté de maintenir cette tromperie en se rendant à Jérusalem occupée, soi-disant pour faire pression en faveur d’une sorte de cessez-le-feu.
Il y a deux possibilités.
La première est que les États-Unis souhaitaient en fait une sorte de cessez-le-feu, dans l’intérêt même d’Israël (parce que ses objectifs militaires sont irréalisables, que ses massacres de civils, en particulier de femmes et d’enfants, provoquent une réaction mondiale et retournent l’opinion publique contre lui, et pour lui épargner les conséquences d’une guerre régionale plus vaste).
Mais Netanyahou a refusé de s’engager dans une quelconque trêve, car cela serait interpérét comme une victoire par le Hamas et entraverait son double objectif d’éradiquer complètement le mouvement et d’obtenir la libération inconditionnelle de tous les prisonniers israéliens.
L’autre possibilité est que M. Blinken soit totalement de mèche avec Netanyahu et qu’il n’ait exercé aucune pression sur lui, mais qu’il ait au contraire adopté sa position, à savoir que tout cessez-le-feu doit être empêché jusqu’à ce que ces objectifs soient atteints.
Les deux sont plausibles. Il est clair depuis le début que Netanyahu utilise la guerre pour prolonger sa vie politique et celle de son gouvernement fasciste et éviter d’être emprisonné pour corruption et abus de pouvoir.
En outre, grâce à la puissance du lobby israélien aux États-Unis, Netanyahu a plus de poids à Washington que le président Joe Biden lui-même, et il peut se permettre d’ignorer les demandes pressantes de Washington, notamment en ce qui concerne un cessez-le-feu ou même des « pauses » humanitaires.
L’ancien premier ministre israélien, chef de l’armée [criminel de guerre] Ehud Barak a déclaré mardi qu’Israël ne pouvait pas soutenir une opération à long terme et que s’il n’atteignait pas ses objectifs en deux ou trois semaines, il se dirigerait vers des frictions avec les États-Unis.
« L’Amérique ne peut pas dicter à Israël ce qu’il doit faire. Mais nous ne pouvons pas les ignorer », a-t-il déclaré. Il a ajouté qu’il faudrait peut-être un an pour éliminer le Hamas, mais a noté que le soutien occidental s’affaiblissait en raison du nombre de victimes civiles à Gaza et de la crainte de déclencher une guerre catastrophique beaucoup plus large dans la région.
Les chances que cela se produise sont désormais très élevées, et le déclencheur ou le détonateur pourrait venir du Sud-Liban.
Même si la résistance libanaise restait à l’écart, ce qui est inconcevable, des groupes de résistance alliés comme les brigades Qassam du Hamas (qui ont lancé lundi 17 missiles contre des colonies de Galilée) et la Saraya al-Quds du Jihad islamique ont tous deux été très actifs sur le front libanais, avec le soutien direct du Hezbollah.
Les États-Unis mènent actuellement une troisième guerre mondiale en Ukraine, et tout indique qu’ils sont en train de perdre.
Aujourd’hui, ils sont attirés dans une deuxième guerre au Moyen-Orient par leur plus proche allié, ses lobbyistes et ses fidèles à Washington.
Vladimir Poutine devrait être reconnaissant au Hamas d’avoir détourné l’attention de la planète de sa guerre en Ukraine, ainsi qu’à des gens comme Blinken d’avoir entraîné les États-Unis et les pays occidentaux aux côtés d’Israël dans une nouvelle guerre.
En fin de compte, Netanyahu partira vaincu et le Hamas restera fermement enraciné dans le sol, tout comme en Irak et en Afghanistan, les États-Unis sont partis « la queue entre les jambes » tandis que la résistance irakienne et les talibans sont restés.
Et si la guerre de Gaza s’étend et que le front libanais s’ouvre définitivement en réponse à la tromperie de Blinken, même les porte-avions que les États-Unis ont déployés dans la région pourraient en pâtir.
Il convient de rappeler l’attaque du quartier général des marines américains à Beyrouth en 1983. Deux cent quatre-ving quatre soldats avaient été tués en une seule opération martyre. Et c’était il y a 40 ans, avant l’ère des missiles de précision et des drones.
Abdel Bari Atwan est le rédacteur en chef du journal numérique Rai al-Yaoum. Il est l’auteur de L’histoire secrète d’al-Qaïda, de ses mémoires, A Country of Words, et d’Al-Qaida : la nouvelle génération. Vous pouvez le suivre sur Twitter : @abdelbariatwan
*Source et Traduction : Chronique de Palestine
Version originale : 8 novembre 2023 – Raï al-Yaoum: