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28 avril 2024

L’ONU est un moulin à paroles


Jacques-Marie Bourget : «L’ONU est un moulin à paroles»
Publié par: Hocine NEFFAHle: 02 décembre, 2023Dans: A La Une, ACCEUIL, Actualité, Actualité Afrique, Actualité_Ameriques, Actualité_Maghreb, Actualité_Moyen_Orient, Géopolitique Imprimer Email

Un journaliste palestinien pleurant la mort de deux de ses confreres, Said Al-Tawil et Mohammed Sobh Photo THE NEW YORK TIMES

Le grand reporter de guerre, Jacques-Marie Bourget, est un fin analyste des questions politico-médiatiques. Il connaît une grande part de ce volet entouré d’opacité et de mensonges sciemment entretenus. Lui-même a été victime de la machine sioniste, qui a failli lui coûter la vie après que l’armée de l’entité sioniste lui a logé une balle dans le poumon alors qu’il faisait son travail en tant que reporter de guerre dans les territoires occupés. Il est mieux placé que personne pour répondre à nos questions sur ce qui se passe en Palestine en général et à Ghaza en particulier. Pour répondre à la dérive médiatique occidentale et se démarquer de l’entité sioniste, Jacques-Marie Bourget rétorque que «tout cela donne un journalisme « capitaliste », pratiqué par des gens contents de dire le faux en faisant semblant de le croire vrai, n’ayant pas le moindre doute sur leur « travail », leur regard. Voilà pourquoi la cause de Ghaza ou de la Palestine, qui ne sont ni des pays « blonds » ni des rouages essentiels de la haute finance, est considérée comme triviale. Le bon est forcément l’Israélien vu comme un «semblable», un Occidental luttant contre l’ignorance », souligne-t-on.
Il n’hésite pas à rappeler que l’Occident n’est autre que l’appendice des USA et que rien ne peut se faire en maintenant les structures de l’Organisation des Nations-unies en l’état.
Jacques-Marie Bourget souligne que «cette institution n’a ni sens ni pouvoir, c’est un moulin à paroles, sachant qu’Israël n’a pas tenu compte de 226 Résolutions de cette ONU-là », rappelle-t-il.

L’Expression : Les médias occidentaux ont fait montre d’une partialité manifeste dans le traitement de l’agression sioniste contre Ghaza. Quelle lecture faites-vous de cette dérive ?
Jacques-Marie Bourget : À mes yeux ce n’est pas une lecture nouvelle. Après une lente décadence qui a commencé dans les années 70, le mal n’a fait que s’aggraver. D’un côté la presse écrit a commencé à péricliter, des capitalistes ont supprimé ou concentré des titres, le métier a glissé vers une certaine insécurité qui pousse à l’obéissance : « Si tu n’es pas content du contenu de ton journal, tu peux choisir le chômage ». Une vieille garde de professionnels, plus ou moins formés dans l’esprit du Conseil national de la résistance, a pris sa retraite pour être remplacé par des sujets dociles.
La pensée unique, celle qui convient à l’oligarchie, a été confortée par le rôle des écoles de journalisme qui, en réalité, formatent les étudiants qui ne doivent avoiraucun jugement personnel et sont juste priés d’obéir en « petits soldats de l’Atlantisme ». Enfin, même plus précaire, le métier de journaliste est devenu « chic »au sein de la bourgeoisie et ses enfants trustent les postes. Dans cette profession, on ne trouve pas un fils d’ouvrier, mais juste des créatures du « libre marché ». La montée de l’individualisme social a fait le reste, on se moque de ce que l’on écrit ou dit, si le maître est content et que le salaire tombe à la fin du mois.
Dernier clou sur le cercueil, la disparition de la « gauche », perdue dans des combats « sociétaux », les joutes des ONG, la « lutte pour la démocratie mondialisée », plutôt que de se battre sur les vrais problèmes français. Tout cela donne un journalisme «capitaliste», pratiqué par des gens contents de prêcher le faux pour avoir le vrai, n’ayant pas le moindre doute sur leur « travail », leur regard. Voilà pourquoi la cause de Ghaza ou de la Palestine, qui ne sont ni des pays « blonds » ni des rouages essentiels de la haute finance, est considérée comme triviale. Le bon est forcément l’Israélien, vu comme un «semblable», un Occidental luttant contre l’ignorance.

L’entité sioniste est protégée par des puissances impérialistes qui prennent en otage l’ONU. Le temps est-il venu de revoir et de réviser les mécanismes qui régissent cette auguste organisation ?
Bien sûr l’ONU, que De Gaulle qualifiait de « machin », est au crépuscule. Cetteinstitution n’a ni sens, ni pouvoir, c’est un moulin à paroles, sachant qu’Israël n’a pastenu compte des 226 Résolutions de cette ONU-là. Le système du veto bloque touteinitiative et le débat se réduit à une sorte de poker sans gagnant. Par ailleurs, néeaprès la Seconde Guerre mondiale, les Nations unies ne représentent plus le monde tel qu’il est. Citons un pays-continent comme l’Inde, qui n’a pas voix au chapitre, pas plus qu’un seul pays d’Afrique ! Sauf si éclate une nouvelle guerre mondiale, l’ONU ne changera pas. Il faut s’habituer à son impuissante injustice.

Les 15 membres du Conseil de sécurité de l’ONU se réunissent pour discuter du conflit à Gaza. UN Photo/Eskinder Debebe

La Ligue arabe à montré encore une fois son immobilisme face au drame que subit le peuple palestinien. Cette organisation ne paie-t-elle pas le prix de la normalisation d’une partie de ses membres avec l’entité sioniste ?
En ces temps où les humoristes ont le vent en poupe, la Ligue arabe fait rire, hélas.
Comment des pays qui, il y a deux mois, se tapaient sur le ventre avec Israël peuvent-ils subitement changer sincèrement de cap? Les réunions de la Ligue arabe devraient être supprimées, ce qui réduirait la pollution. Le panarabisme, une très belle idée, est mort, fracassé par les réalités du capitalisme et les égos de certains dirigeants.

Les USA et l’Europe ont soutenu l’agression sioniste contre les enfants et des populations sans défense à Ghaza. Assistons-nous à la déroute de ce qui était communément appelé les « valeurs démocratiques et de droits de l’homme » en Occident ?
Ghaza est un champ de fosses communes. Mais il y en a une dont on parle peu : la fosse commune du droit international. Ayant vécu toutes les guerres, entre 1967 et 2000 (quand les Israéliens m’ont logé une balle dans le poumon), je n’ai jamais vu de telles images. Une telles concentration d’explosifs sur un si petit territoire. Le plus fou des réalisateurs de films n’aurait pas imaginé une telle cruauté, un tel mépris de la vie, de l’humanité, de la culture, de l’histoire. Le besoin d’éradiquer les Palestiniens se fait sentir, on veut les voir disparaître.
Le procureur de la CPI, un gadget politique qui n’est qu’un outil de l’Occident destiné
à punir les pauvres et les mal pensants, est venu faire des moulinets à Rafah, aux porte de Ghaza. Puis il est reparti en Hollande où, pourtant, il a sur son bureau des dossiers de crimes commis contre les Palestiniens depuis six ans… Il a repris sa sieste. En regard, comment ne pas comparer avec le sort réservé à la Russie. Les obus de Poutine à peine tombés que les as de la CPI étaient déjà en train de commenter « des crimes de guerre ». Le président russe a été mis en examen, recherché comme un pilleur de banques. Camus disait : «La première victime de la guerre est la vérité », ajoutons, depuis la barbarie de Ghaza, que c’est aussi le droit.

Certains médias voulaient orienter l’opinion vers la notion de terrorisme pour faire le black-out sur la résistance et le droit palestiniens de se défendre contre le colonialisme, dont l’entité sioniste est l’expression édifiante. Comment analysez-vous cette donne ?
Dans l’histoire, le terroriste c’est toujours le faible, celui qui lutte avec ses moyens, pour sa liberté, la libération de sa terre, les derniers « terroristes » célèbres furent Jean Moulin et les révolutionnaires algériens. Ben Laden, créé par les Américains, n’était pas terroriste tant qu’il luttait contre l’Urss. Après le 11 septembre le ton a changé. Maintenant Washington qualifie tout adversaire de « terroriste », ce qui évite de fournir plus de détails.
C’est inscrit dans la Charte de l’ONU, tout homme dont la terre est occupée a le droit de combattre pour recouvrer sa patrie. Les médias et autres bavards oublient cette notion. La Palestine est occupée et les combattants ont le devoir de se battre pour sa liberté. Personne n’évoque cette légitimité, Israël ne peut impunément et sans risque occuper une terre qui n’est pas la sienne. Ajoutons que ce colonialisme est un fait particulièrement étrange, alors que cette pratique a disparu de la planète.

Jacques-Marie Bourget, grand reporter et spécialiste des questions politico-médiatiques

Des dizaines de journalistes ont été assassinés par l’armée sioniste, mais on n’entend pas Reporters Sans Frontières (RSF). Cette organisation ne serait-elle pas en connivence avec l’entité sioniste ?
La duplicité de RSF commence à être connue, c’est un outil de Washington. Notons un détail qui ferait rire si l’histoire n’était pas triste. Il se trouve qu’un journaliste est mort dans un kibboutz, le 7 octobre, sans doute tué par un obus ou un missile « ami », israélien. Eh bien, RSF comptabilise ce mort dans sa liste de tous les confrères tombés à Ghaza sous les bombes barbares ! RSF est une engeance démonétisée qui, en l’occurrence, a touché un Prix « Nobel » décernée par Israël, une somme de 350000 dollars. Après cela, difficile de parler d’indépendance.

Hocine NEFFAH

L’Expression: Nationale – «L’ONU est un moulin à paroles» (lexpressiondz.com)

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