Des pharmacies britanniques boycottent la société pharmaceutique israélienne TEVA
22 août 2014
Solidarité Palestine
Des pharmacies britanniques boycottent
la société pharmaceutique israélienne TEVA
Ghulam Esposito Haydar
Jeudi 21 août 2014
Des pharmaciens britanniques boycottent le fabricant de génériques TEVA installé en Israël en raison du siège de Gaza en cours et de l’occupation illégale de la Palestine.
Ghulam Esposito Haydar, contributeur régulier à 5Pillarz et membre clé de la campagne de boycott, a déclaré que des centaines de pharmacies du pays n’allaient plus accepter les produits de TEVA, présents dans quelque 60 pays. Le groupe espère qu’il va forcer le gouvernement britannique aussi bien que le régime israélien à modifier leur politique à l’égard du peuple palestinien.
Le communiqué de presse qui suit a été publié par un groupe qui soutient la campagne :
« La campagne #BoycottTEVA est une initiative de l’industrie en faveur de l’achat conforme à l’éthique de médicaments génériques au Royaume-Uni même. Il est prudent de déclarer que la sécurité des patients est du plus grand intérêt dans cette campagne et que les boycotts ne seront appliqués qu’avec le consentement des patients et une continuité médicale alternative. La campagne n’a pas de motivation politique ou religieuse mais s’appuie plutôt sur l’éthique des relations commerciales avec une entité affiliée à un pays dans lequel un système actif d’apartheid est en place. Le boycott n’a été lancé qu’après de longues délibérations et consultations sur l’impact d’un boycott sur les patients et le secteur en général. Des mesures sont prévues pour assurer une non-interruption des médications essentielles et non essentielles dans les régions où le boycott aura été lancé.
L’inquiétude croissante concernant la situation imposée au peuple palestinien par le régime israélien tant à Gaza qu’en Cisjordanie devient de plus en plus angoissante. Israël continue à s’enrichir par le biais de sa politique d’occupation de la Cisjordanie, de Jérusalem-Est et de la bande de Gaza et ce, en appliquant une politique d’apartheid et d’épuration ethnique qui continuent à opprimer le peuple palestinien, également via la confiscation des terres, la violence militaire et le siège illégal de la bande de Gaza.
Les Palestiniens sont traités en citoyens de second rang dans leur propre pays. Le siège qui frappe actuellement toute la bande de Gaza punit collectivement toute une population de réfugiés pour les crimes supposés de quelques-uns. L’accès aux fournitures d’énergie élémentaires, à la nourriture et aux médicaments est très sévèrement restreint. Très fréquemment, des tensions éclatent dans cette région et Israël tue sans discrimination de nombreux civils, dont des femmes et des enfants innocents.
En tant qu’acteurs de l’industrie pharmaceutique, nous avons la capacité d’appliquer certaines mesures de pression afin de mettre un terme à cela via le mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement & Sanctions).
Les produits pharmaceutiques TEVA sont une composante importante de l’industrie pharmaceutique. TEVA est le premier fabricant mondial de médicaments génériques, avec une gamme de plus de 1.000 produits pharmaceutiques et une présence dans quelque 60 pays. La société emploie actuellement environ 45.000 personnes dans le monde et a réalité 20,3 milliards de dollars de rentrées nettes en 2013. TEVA fournit plus de boîtes de médicaments au NHS (Service national britannique de la santé) chaque année que toute autre société – cela représente environ 15 % du total des médicaments dans le Royaume-Uni. Des millions de patients utilisent ses médicaments. On estime qu’en moyenne, chaque seconde de chaque jour, les patients du Royaume-Uni consomment plus de 250 comprimés ou capsules de marque TEVA ou fournis par TEVA.
Le Protocole de Paris, qui régule les relations financières entre Israël et l’Autorité palestinienne, constitue une partie importante des accords d’Oslo de 1993. Le protocole a placé Israël et le futur État palestinien sous la même enveloppe de taxation. En général, cela signifie que les Palestiniens continuent de dépendre de la politique, des lois douanières et des services d’Israël pour l’importation et l’exportation de marchandises. De plus, le ministère israélien de la Santé a insisté pour que l’importation de médicaments en Cisjordanie et dans la bande de Gaza ne soit permise que pour des médicaments qui sont reconnus en Israël. Cette décision a impliqué que le marché arabe voisin (avec des exceptions mineures) soit refusé à la population et à l’industrie pharmaceutique palestiniennes. Le marché palestinien est par conséquent incapable de conserver des relations d’importation ou d’exportation avec les marchés les plus proches de lui et les plus naturels. D’autres produits pharmaceutiques importants qui se sont vu refuser l’accès sont les génériques bon marché manufacturés principalement en Inde, en Chine et dans les pays de l’ancienne URSS. Cette exclusion provient du fait que les médicaments reconnus en Israël sont principalement importés de l’UE, de l’Amérique du Nord et de l’Australie.
Comme dans d’autres cas, des intérêts économiques sont souvent déguisés en « raisons sécuritaires ». Ceci peut être prouvé par l’incapacité de l’industrie palestinienne d’envoyer des médicaments en bloc (généralement vers de grosses chaînes de pharmacie en Europe et en Amérique du Nord) via le tout proche aéroport Ben Gourion. Partant, les marchandises sont acheminées via la Jordanie avec une lourde taxation en frais ajoutés. Uniquement dans le cas de produits pharmaceutiques, on recourt parfois à des « raisons de qualité » en conjonction avec des justifications économiques et politiques. Un de ces cas consiste dans le refus d’autoriser les sociétés pharmaceutiques palestiniennes dans les institutions médicales – hôpitaux et pharmacies – de Jérusalem-Est occupée et concerne même les vaccins administrés dans les écoles à gestion palestinienne. En d’autres occasions, des raisons politiques et économiques viennent se greffer sur l’humiliation d’un peuple occupé. Cela se perçoit dans la demande formulée par les représentants palestiniens des importantes sociétés multinationales auprès de leurs collègues israéliens de pouvoir bénéficier d’une lettre de « non-objection » qui leur permettrai d’obtenir une licence d’importation de la part du ministère israélien de la Santé. Cette demande doit être introduite par des représentants palestiniens autorisés, même en l’absence d’une telle exigence en ce qui concerne leurs homologues israéliens.
En raison des restrictions susmentionnées imposées par le régime israélien, Israël et ses sociétés multinationales tirent parti de plusieurs façons de la situations que nous venons de décrire. Depuis les quatre principales sociétés originellement israéliennes (Teva, Perrigo Israel – anciennement Agis – Taro et Dexcel Pharma), jusqu’aux sociétés plus modestes (comme Trima), toutes les firmes israéliennes bénéficient d’un accès facile au marché palestinien, libres de douanes et de perturbations dues aux check-points (par exemple, le changement de camions aux check-points de chargement). Les fabricants israéliens et leurs agents ne doivent pas améliorer leurs produits afin de les vendre dans les Territoires palestiniens occupés. Par conséquent, les sociétés et multinationales israéliennes peuvent vendre des médicaments qui ne sont pas étiquetés en arabe à une population parlant l’arabe.
Le boycott est-il efficace ?
TEVA est l’un des principaux contributeurs de l’économie israélienne et est lié pour une part importante aux Forces de défense israéliennes. L’an dernier, TEVA a payé à l’État d’Israël 565 millions de dollars en taxes accumulées depuis 2005. Les dépenses des FDI s’élevaient à 5,5 % du PIB d’Israël, c’est-à-dire à environ 16,5 milliards de dollars.
Depuis que nous avons lancé la campagne #BoycottTEVA le 18 juillet 2014, environ 300 pharmacies dans tout le pays ont rallié le boycott. Nous prévoyons que bien plus encore feront de même si nous en croyons les informations qui nous parviennent depuis.
Il est inévitable que certaines pharmacies peuvent toujours avoir en stock certaines gammes de produits TEVA par nécessité et ce, pour une ou plusieurs raisons telles l’absence d’alternative ou la préférence du patient. Nous visons à réduire la chose au minimum via des mesures éducatives et la recommandation d’alternatives.
Nous espérons monter une campagne à plusieurs niveaux afin d’expliquer ce dilemme éthique :
1) aux patients
2) aux pharmaciens et pharmacies
3) aux grands distributeurs qui livrent aux pharmacies
4) aux groupements de pharmacies
5) aux agences de gestion des médicaments du Groupe de la Commission clinique (CCG), lesquels décident des formulaires/budgets de prescription
6) à l’Association de défense des pharmacies (PDA) qui fait campagne au nom des pharmaciens
7) à la Commission pharmaceutique locale (LPC) qui propose des services et la défense des intérêts pharmaceutiques au nom des pharmaciens
8) au Conseil pharmaceutique général (GphC), qui est l’autorité de contrôle des pharmaciens.
BDS
La campagne de Boycott, Désinvestissements & Sanctions (BDS) prend de l’expansion et s’intensifie dans le monde entier, elle continue d’avoir un impact sur l’image d’un pays, Israël, qui, malgré l’occupation de la Palestine et sa politique d’apartheid, se targue toujours d’être « la seule démocratie du Moyen-Orient ».
L’objectif de cette campagne consiste à mettre la pression à la fois sur le gouvernement et sur le régime d’Israël afin de changer leur politique vis-à-vis du peuple palestinien. Nous espérons que l’application de pressions par le biais du boycott contribuera à faire passer le message à notre cabinet que les habitants du Royaume-Uni ne toléreront plus les atrocités et les crimes contre l’humanité dont est victime la population palestinienne. »
Les participants
Murtaza Master, propriétaire du groupe Masters de pharmaciens dans les West Midlands, a écrit à ses fournisseurs pour leur demander que ses six pharmacies ne se voient plus livrer de produits TEVA. La lettre de Monsieur Master disait que la chaîne allait « tenter d’annuler les achats TEVA pour les 12 mois à venir ».
Nadim Tahir, directeur de la pharmacie on-line iPharm UK, a déclaré qu’il avait entendu parler la première fois de cette campagne sur les médias sociaux. « Ce n’est pas une question de religion, mais d’humanité », a-t-il dit. « Nous ne commandons plus rien à Teva et nous discutons avec les patients pour leur expliquer pourquoi ce boycott a lieu. »
Amir Riaz, propriétaire de la pharmacie on-line i-Dispense, a décrit les coûts du boycott de Teva comme « marginaux ». Il a déclaré : « J’ai eu une réunion avec les partenaires et nous avons conclu que cela ne nuirait pas aux intérêts des patients – et c’est alors que nous avons décidé d’évincer Teva. »
Asad Khan, directeur de la pharmacie Elaj, à Leeds, a déclaré que son boycott avait été hâté par les requêtes des patients en faveur d’une alternative aux génériques de TEVA. Et d’ajouter : « Après ce qui s’est passé au Moyen-Orient, les gens sont davantage conscients de la provenance de leurs marques de médicaments. Je pense que les pharmaciens vont assumer la chose eux-mêmes. »
Shaheed Fazal, directeur de la chaîne de pharmacies Dispharma, dans les West Midlands, a déclaré que le boycott était une « prise de position éthique » dont il espérait qu’elle allait apporter une « solution durable au conflit ».
Vous pouvez soutenir la campagne Boycott TEVA par vos « j’aime » sur sa page Facebook, sur le lien suivant :
https://www.facebook.com/BoycottTEVAPharmaceuticals?fref=ts
Source : Boycott TEVA
Traduction pour le site de la Plate-forme Charleroi-Palestine : JM Flémal.