Dossier de Libye par C. de Broeder et M. Lemaire
22 octobre 2011
Face aux ambitions hégémoniques de l’impérialisme, l’information est une arme au service de la paix. Sa diffusion est un acte de résistance. Dénoncer ne suffit plus, il faut expliquer, informer, transmettre
Les médias occidentaux dans leurs larges majorités ont de tout temps accepté les versions de l’armée israélienne et ferment les oreilles aux autres sources.
Dossier de Libye
n°38 22-10
C.De broeder & M.Lemaire
Mouammar Kadhafi aurait été arrêté et blessé.
Le dirigeant déchu serait blessé aux deux jambes, ajoute l’agence de presse britannique Reuters.
Mouammar Kadhafi aurait été capturé à Syrte et serait gravement blessé, selon un commandant des forces du nouveau régime à Syrte et une télévision libyenne.
Le colonel tentait de quitter la ville de Syrte lorsque son convoi a été attaqué par l’OTAN.
« Kadhafi a été arrêté. Il est gravement blessé mais il respire encore », a déclaré à l’AFP Mohamed Leith, un de commandants venus de Misrata, à l’ouest de la ville de Syrte, affirmant avoir vu Mouammar Kadhafi de ses propres yeux, Selon lui, Kadhafi portait un costume kaki et un turban autour de la tête.
De son côté, la télévision libyenne « Libye Libre » a affirmé que « Kadhafi a été arrêté en même temps que son fils Mouatassim ainsi que Mansour Daou (le chef des services de sécurité intérieure), et Abdallah Senoussi », le chef des renseignements libyens, dans la ville de Syrte.
Il n’était pas possible dans l’immédiat de confirmer officiellement auprès du Conseil national de transition (CNT), la capture de Kadhafi et de ses proches. L’annonce de ces arrestations est intervenue alors que la ville de Syrte, dernier bastion du régime déchu et région natale de Mouammar Kadhafi, était en train de tomber aux mains des combattants du CNT.
Il n’était pas possible dans l’immédiat de confirmer officiellement auprès du Conseil national de transition (CNT), cette capture.
Le porte-parole principal du CNT, Jalal el-Gallal, et le porte-parole militaire du CNT, Abdul-Rahman Busin, ont déclaré jeudi que les informations de presse faisant état de l’arrestation de Moammar Kadhafi n’étaient pas confirmées.
AFP
Octobre 20th, 2011 Posted in Evènements/Politique
http://www.inversalis-productions.eu/blog/2011/10/mouammar-kadhafi-aurait-ete-arrete-et-blesse/
Kadhafi a été assassiné exactement comme le Che !
Le docteur Moussa Ibrahim, porte parole du gouvernement libyen, nous informe que Mouammar Kadhafi était dans un convoi de plusieurs voitures. Les pilotes assassins de l’OTAN ont bombardé le convoi. Sa voiture a été touchée, Il était blessé grièvement. Les traitres rebelles l’ont emmené dans un pickup à Misrata. Il est décédé en route. Les traitres lui ayant tiré une balle dans la tête ; puis une autre dans l’abdomen pour simuler une mort lors d’un combat.
Kadhafi, comme Che guevara, a été fait prisonnier au combat puis a été assassiné.
http://mai68.org/spip/spip.php?article3350
Domenico Losurdo : La conclusion barbare d’une guerre colonialiste barbare : Kadhafi assassiné.
Il y a quelques jours Gianfranco Fini a exprimé ses regrets pour les hésitations initiales montrées en Italie à l’occasion du déchaînement de la guerre OTAN contre la Libye. Il est clair que le Président de la Chambre (des députés, NdT) n’arrive pas à rompre avec son passé de champion du fascisme et du colonialisme.
Voici ce que j’ai écrit dans mon livre « Il linguaggio dell’Impero »[1]:
« Celui qui prend une position nette contre la politique d’Israël est facilement suspecté d’antisémitisme ; mais pourquoi faire valoir à sens unique cette herméneutique du soupçon ? Prenons, pour ce qui concerne l’Italie, un homme politique de premier plan comme Gianfranco Fini.
Sa manœuvre de rapprochement de l’ « Etat juif » a commencé il y a pas mal d’années quand il a jugé opportun de ne critiquer chez Mussolini que sa législation antisémite : « Jusqu’en 1938, c’est-à-dire une minute avant la signature des lois raciales [antisémites], je crois qu’il est très difficile de juger le fascisme de façon entièrement négative ».
Et les lois raciales contre les « indigènes » (arabes et noirs) dans l’empire colonial fasciste ?
Et les massacres en Ethiopie ?
Et l’utilisation massive d’ypérite et de gaz asphyxiants, les camps de concentration ?
Comme on peut voir, on ne critique du fascisme que l’antisémitisme, sans aucune prise de distance avec l’expansionnisme et le racisme colonial. On pourrait penser que les déclarations rapportées ci-dessus renvoient à une phase intermédiaire de l’évolution de Fini. Il n’en est rien. Le voici en 2004, déjà vice-premier ministre, se lancer dans une célébration acritique de la conquête et de l’occupation de la Libye, où « les Italiens ont aussi apporté, en même temps que les routes et le travail, ces valeurs, cette civilisation, ce droit qui représente un phare pour toute la culture, pas seulement la culture occidentale ».
[…]
En ce point il convient d’examiner comment un leader arabe (Kadhafi) a répondu à Fini : « Vous êtes maintenant devenu antifasciste, et voilà une chose juste. Je sais que vous avez aussi présenté vos excuses aux Juifs, pour ce que les fascistes italiens ont fait aux Juifs. Si vous faisiez aussi la même chose envers les Libyens, en présentant vos excuses aux Libyens, dans ce cas vous pourriez recevoir des éloges ».
On comprend bien qu’un nostalgique du colonialisme comme Gianfranco Fini ait été depuis le début parmi les plus ardents défenseurs de la guerre de l’OTAN. La supériorité morale de Kadhafi par rapport non seulement à Fini mais aussi aux bouchers de Washington et de Bruxelles est claire.
[1] « Le langage de l’Empire. Lexique de l’idéologie étasunienne », Ed. Laterza, Bari, 2007.
Domenico Losurdo
Publié sur le blog de l’auteur jeudi 20 octobre 2011,
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio
http://domenicolosurdo.blogspot.com/
Manlio Dinucci : Qui a vraiment tué Kadhafi.
Subject: Armes de distraction de masse
Le killer de Las Vegas venu de Sicile
Les images de Kadhafi lynché et tué par une foule féroce de miliciens ont été diffusées à l’échelle mondiale, pour démontrer qu’en Libye il s’est agi d’une rébellion populaire qui s’est terminée par le renversement de l’odieux dictateur.
Version simpliste, appartenant aux puissantes « armes de distraction de masse » utilisées dans l’opération Protecteur Unifié.
Toute autre est la réalité qui vient au jour, comme le montre la reconstruction documentée des événements faite le 21 octobre par le quotidien britannique The Telegraph.
Après avoir joué un rôle clé dans la conquête de Tripoli, les agents de la Cia et du service secret britannique MI6, qui opèrent sur le terrain en Libye, se sont concentrés sur la chasse à Kadhafi, qui avait échappé aux bombardements massifs de l’OTAN.
Tandis que les drones et autres avions espions, dotés des appareils les plus sophistiqués, survolaient jour et nuit la Libye, des forces spéciales étasuniennes et britanniques passaient au crible la zone de Syrte, probable refuge de Kadhafi. Celui-ci a été obligé, ces dernières semaines, de rompre le silence téléphonique, en utilisant un portable peut-être de type satellitaire. La communication a été interceptée, confirmant sa présence dans la zone.
Quand un convoi de plusieurs dizaines de véhicules est sorti de la ville, il a immédiatement été repéré par les avions espions : un Rivet Joint étasunien (qui peut repérer l’objectif à 250 Kms de distance), un C160 Gabriel français et un Tornado Gr4 britannique.
A ce moment là, un drone Predator étasunien, qui avait décollé de Sicile et télécommandé via satellite depuis une base proche de Las Vegas, a attaqué le convoi avec de nombreux missiles Hellfire.
Même si cela n’est pas spécifié, il s’agit d’un des Predator MQ-9 Reaper déployés à Sigonella (Sicile), où se trouve le personnel affecté à l’approvisionnement et à la manutention, et conduits par un pilote et un spécialiste des senseurs, tous deux assis à leur console aux Etats-Unis, à plus de 10mille Kms de distance. Le Reaper, en mesure de transporter une charge guerrière d’une tonne et demi, est armé de 14 missiles Hellfire (« feu d’enfer ») à tête antichar, explosive à fragmentation ou thermobarique. Immédiatement après, le convoi a été frappé aussi par des chasseurs bombardiers français Mirage-2000 avec des bombes Paveway de 500 libbres et des munitions de précision Aasm (Armement Air-Sol Modulaire), elles aussi à guidage laser. Cette attaque a été décisive pour la capture de Kadhafi.
Ces faits démontrent que, en réalité, c’est l’OTAN qui a capturé Kadhafi, en le poussant dans les mains de miliciens musulmans de Misrata, animés d’une particulière haine à son égard. Et que c’est l’OTAN qui a vaincu cette guerre non seulement en larguant sur la Libye 40-50mille bombes en plus de 10mille missions d’attaque, afin d’ouvrir la voie aux « rebelles », mais en infiltrant en territoire libyen services secrets et forces spéciales pour réaliser et diriger les opérations de guerre. Le plan -décidé à Washington, Londres et Paris- était d’éliminer Kadhafi, qui dans un procès public aurait pu révéler des vérités incommodes pour les gouvernements occidentaux. Il n’est donc pas exclu que parmi la foule de miliciens hurlants, derrière le « jeune homme au pistolet en or » à qui on attribue le meurtre de Kadhafi, il y avait bien plus d’experts killers de profession.
Manlio Dinucci
Edition de samedi 22 octobre 2011 de il manifesto
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20111022/manip2pg/02/manip2pz/312006/
Jean-Louis Le Touzet : Racisme, coups et torture dans les geôles de l’après-Kadhafi.
Amnesty International publie un rapport qui dénonce les violences faites aux prisonniers en Libye.
Aveux extorqués, prisonniers battus, cellules surchargées où sont enfermés à la fois migrants, déplacés et soldats loyalistes, racisme contre la population libyenne noire : le rapport publié par Amnesty International «sonne comme une première alarme à l’intention des nouvelles autorités libyennes», explique Samira Bouslama, qui a mené la mission avec trois chercheuses.
L’ONG a pu visiter onze centres de détention à Zawiya, Tripoli et Misrata. Selon elle, les prisonniers «sont presque toujours détenus sans décision légale et pour la plupart sans autorisation du parquet général». Ils sont placés en détention par des conseils locaux, parfois militaires, ou des brigades armées «et bien loin de tout contrôle du ministère de la Justice».
Les délégués de l’organisation se sont entretenus avec «une centaine de prisonniers en août et septembre», indique Samira Bouslama. Aucun ne s’était vu présenter un mandat d’arrêt, et beaucoup «avaient en fait été enlevés chez eux par des ravisseurs non identifiés qui font des raids chez les combattants ou les fidèles présumés de Kadhafi», dit le rapport.
Fouet. Selon la chercheuse, les prisonniers qui leur ont été soumis (le plus jeune avait 16 ans et le plus âgé 77 ans) «n’ont pas été pris les armes à la main». Pour la plupart, il s’agissait de gens sortis de leur maison, de fidèles du Guide et notoirement connus comme tels, de migrants subsahariens, ou alors de Libyens noirs suspectés d’avoir soutenu le régime de Kadhafi. Une majorité de Noirs ont été arrêtés parce que noirs. Ils se sont plaints à chaque fois de racisme et d’un comportement esclavagiste. Selon eux, «leurs « frères » libyens ne les voient pas comme Libyens, mais comme des Africains», insiste la chercheuse.
Cette dernière a aussi interrogé deux geôliers à Misrata. «Pourquoi traitez-vous si mal les Noirs ?» Réponse des deux geôliers : «Ils ont soutenu le régime. On leur a donné des terres. On a pris soin d’eux pendant toutes ces années et, quand la révolution a éclaté, ils ont pris les armes contre nous. Ce sont des esclaves.»
Au moins deux gardiens, dans des centres de détention différents, ont admis frapper les prisonniers pour leur extorquer des «aveux» plus rapidement. Sur le sol de l’un des centres, les délégués d’Amnesty International ont retrouvé un bâton, une corde et un tuyau en caoutchouc, qui pourraient servir à frapper les prisonniers, y compris sur la plante des pieds – méthode de torture baptisée falaqa. Dans un centre de détention, ils auraient entendu des bruits de coups de fouet et des cris provenant d’une cellule proche.
Selon le rapport, les prisonniers sont soumis aux coups et à la torture, plus particulièrement au début de leur détention. Comme une sorte de «bienvenue» à leur arrivée. Entre un tiers et la moitié des prisonniers sont des personnes originaires d’Afrique subsaharienne soupçonnées d’être des mercenaires. Un homme originaire du Niger, initialement présenté à Amnesty International comme étant «un mercenaire et un tueur», s’est effondré et a expliqué qu’il avait «avoué» après avoir été frappé sans discontinuer deux jours durant. Il a nié avoir participé aux combats. Les Libyens noirs, notamment originaires de la région de Tawargha, qui a servi de base aux forces pro-Kadhafi lors de leurs manœuvres visant à reprendre le contrôle de Misrata, sont particulièrement vulnérables, souligne le rapport. «On leur fait signer des confessions extorquées sous la torture. Ils signent un document qui va les condamner…»
«Isolés». Le Conseil militaire de Tripoli a été alerté le mois dernier par Amnesty International concernant ces cas de torture. Pour toute réponse : «Ce sont des agissements à mettre sur le compte de quelques cas isolés.» Vendredi, l’ONU a fait part de son inquiétude concernant «les cas de 7 000 prisonniers» détenus dans 67 centres de détention. Salira Bouslama se montre, elle, très inquiète : «Comment vont être traités les prisonniers de Syrte et de Bani Walid, les deux dernières villes qui résistent ?»
Jean-Louis Le Touzet
15 Octobre 2011
(Libération)
Décès de Kadhafi : l’ONU demande une enquête…
L’ONU demande une enquête sur les circonstances, toujours pas claires, entourant la mort de Mouammar Kadhafi.
Le Haut commissariat de l’ONU aux droits de l’homme a demandé vendredi la mise sur pied d’une enquête sur les circonstances entourant la mort de l’ex-« Guide » Mouammar Kadhafi.
« A propos de la mort de Kadhafi hier (jeudi), les circonstances ne sont toujours pas claires. Nous estimons qu’une enquête est nécessaire », a déclaré aux journalistes le porte-parole du Haut commissariat, Rupert Colville, se référant aux vidéos qui ont été publiées jeudi par les médias.
« Il devrait y avoir une enquête compte tenu de ce que nous avons vu hier (jeudi) », a-t-il insisté.
Ainsi, il a estimé que les « deux vidéos » de Kadhafi publiées jeudi, « une de lui vivant, une de lui mort, (…) étaient très inquiétantes ».
Il n’a toutefois pas indiqué qui devait se charger de mener l’enquête, rappelant que le Conseil des droits de l’homme de l’ONU avait mandaté cette année une commission d’experts pour faire la lumière sur les violences en Libye.
(Source AFP)
21-10
http://www.liberation.fr/monde/01012366988-deces-de-kadhafi-l-onu-demande-une-enquete
Bahar Kimyongür : Le sang du lion et le festin des rats.
Syrte ou la Stalingrad du désert, aura résisté de tout son sang contre la barbarie céleste de l’OTAN et ses mercenaires indigènes.
Au milieu de ruines fumantes de la ville martyre, un lion est mort. Un lion qui, de son vivant comme dans sa trépas, aura rendu sa fierté à sa patrie, à son peuple, à son continent et à tous les damnés de la terre.
Autour de son corps agonisant, tels des rats affamés, les barbares du CNT et de l’OTAN se sont disputés des lambeaux de sa noble chair.
« C’est nous qui l’avons achevé » clament les rats du Shape et de l’Elysée.
« Non, c’est nous. » rétorquent les rats indigènes.
Le corps lacéré de Kadhafi, c’est la Libye lacérée, donnée en pâtures à l’OTAN et au CNT.
La Libye de Kadhafi était un pays fier. Ses citoyens ne devaient pas quémander l’aumône à la porte des seigneurs européens.
La Libye de Kadhafi était un pays prospère. Elle était l’Eldorado de toute l’Afrique. Un pays de cocagne assurant le plein emploi.
La Libye de Kadhafi était un pays paritaire. Les femmes étudiaient et réussissaient mieux que les hommes. Les femmes décidaient. Les femmes dirigeaient. Les femmes combattaient.
La Libye de Kadhafi était un pays généreux. Ecoles gratuites munies d’équipements les plus modernes. Hôpitaux gratuits ne manquant de rien. Cette Libye a entre autres, financé RASCOM 1, un satellite de télécommunications qui allait permettre à tous les Africains de téléphoner quasi gratuitement, eux qui payaient les tarifs téléphoniques les plus chers au monde. L’Europe avait été jusqu’à coloniser les réseaux de communication africains, forçant le continent à verser 500 millions de dollars par an pour le transit vocal des Africains sur ses satellites.
La Libye de Kadhafi était un pays solidaire. Dotée d’un ministère chargée de soutenir la révolution mondiale, cette Libye a accueilli à bras ouverts tous les résistants du monde, a financé d’innombrables mouvements de libération : Black Panthers, militants anti-Apartheid, résistants chiliens, salvadoriens, basques, irlandais, palestiniens, angolais. Habités par leurs fantasmes primaires, des journaleux européens ont rapporté que des snipers féminins des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) avaient été enrôlés par Kadhafi. Pure intox. En revanche, les guerriers du mouvement de libération du Sahara occidental, le Front Polisario, protégeaient bel et bien Tripoli de la barbarie de l’OTAN/CNT.
La Libye de Kadhafi a fait l’expérience de la démocratie directe. Kadhafi n’avait qu’un rôle symbolique, celui du vieux sage à la fois redouté et rassurant. La population était encouragée à débattre et à choisir sa destinée à travers les Comités populaires. Pas besoin de parlement ni de partis.
Hélas, la Libye de Kadhafi n’est pas parvenue à faire vivre une démocratie durable. Les luttes personnelles ont pris le dessus sur les intérêts collectifs. Comme bien des révolutions, la Libye de Kadhafi a connu sa dégénérescence idéologique et son cortège de souffrances et d’injustices.
La Libye de Kadhafi n’est pas parvenue à instaurer la concorde entre clans et tribus de la Tripolitaine et de la Cyrénaïque.
La Libye de Kadhafi a cru que seule la force viendrait à bout des djihadistes endiablés d’Al Qaida, des opportunistes et des renégats pro-occidentaux.
La Libye de Kadhafi a tenté de briser son isolement international, pensant que les rats de l’Elysée, du 10 Downing Street, du Palais Chigi ou de la Maison Blanche viendraient manger dans sa main. Ces rats se sont en réalité sournoisement glissés la manche de sa tunique. Ils ont saisi l’occasion pour infiltrer son pays, le saboter, le ruiner et le pomper pour un siècle.
A présent, les rats d’Europe et les rats du CNT étanchent leur soif dans la crinière du lion.
Mais le lion s’est dérobé à leurs griffes pour rejoindre Lumumba et Sankara, les autres enfants martyres de l’Afrique héroïque.
Buvez, hordes de lâches, buvez ! Que son sang brûle vos entrailles comme le Zaqqoum !
Pleurez patriotes libyens pleurez ! Que vos larmes engloutissent vos bourreaux et leurs armées !
Bahar Kimyongür
par Comité Valmy
21 octobre 2011
http://www.comite-valmy.org/spip.php?article1980
1 Médias et Manipulation de l’opinion / Vidéos
1-1 Allain Jules : L’OTAN/CNT ou le brevet du mensonge.
On ne le dira jamais assez, l’OTAN/CNT est passé maître ès art en désinformation.
Leurs mensonges atteignent des cimes. C’est un signe qui ne trompe pas, un aveu de faiblesse.
Une personne sûre de sa force n’a pas besoin d’annoncer urbi et orbi qu’elle est victorieuse. Qu’elle a pris une ville. Qu’elle a réussi à capturer une personnalité. Quelle a réalisé un sans faute dans un lieu hostile lors d’une opérations, etc.
De même qu’ils nous mentent en nous regardant droit dans le blanc des yeux, ils tuent en riant aux éclats. La vie d’un Libyen ne représente rien à leur yeux. Il n’y a que les pétro-dollars et le gaz.
Ces gens n’ont pour religion que le fric. Rien d’autre.
Depuis ce matin, il est annoncé que les renégats de Benghazi, après avoir buté mille fois devant Syrte, comme par hasard, sont parvenus à entrer jusqu’au centre ville de l’oasis. Sans résistance en plus alors qu’on sait très bien que tôt ce matin de violents combats se sont déroulés et qu’ils ont été rudes pour eux. Bani Walid est…..vert et sous contrôle loyaliste.
Il y a maintenant confirmation que l’OTAN mène des négociations avec des mercenaires arabes issus du Qatar, des Émirats Arabes Unis d’Égypte, de Jordanie et de Tunisie, pour venir à bout des kadhafistes mieux organisés que les barbares du CNT…Ces derniers ne peuvent pas gagner un m2 de la Libye sans l’apport des bombardements meurtriers et aveugles des terroristes de l’OTAN. Vous croyez que ces gens peuvent prendre la Libye militairement ? Que nenni. Il fallait donc inventer une fausse révolution.
Allain Jules
octobre 19th, 2011
Posted in Evènements/Politique
http://www.inversalis-productions.eu:80/blog/2011/10/l’otancnt-ou-le-brevet-du-mensonge/
1-2 Capture d’écran de CNN montrant Kadhafi ensanglanté lors de sa capture. (AFP -)
http://www.liberation.fr:80/monde/01012366942-muammar-al-kadhafi-le-guide-supprime?xtor=EPR-450206
1-3 vidéo : Mouammar al Kadhafi ou le paradoxe libyen (Arte 2008) :
http://mai68.org/spip/spip.php?article2561
1-4 Vidéo : Voici les vraies raisons pour lesquelles ils ont assassiné Kadhafi (14’39) :
http://mai68.org/spip/spip.php?article3194
1-5 Vidéo : Voici comment l’OTAN a protègé les civils de Syrte (59 ») :
http://mai68.org/spip/spip.php?article3313
1-6 Vidéo : KADHAFI EST DEVENU UN HÉROS AFRICAIN (5’27) :
http://mai68.org/spip/spip.php?article3152
1-7 Vidéo : Hugo Chavez rend hommage au martyr Kadhafi
Réseau Voltaire | 21 octobre 2011
http://www.voltairenet.org/Hugo-Chavez-rend-hommage-au-martyr
2 Dossier
2-1 Claude Beaulieu : Kadhafi : un symbole anti -impérialiste africain.
Assassiné, il devient un héros du combat des peuples pour la liberté
Les propagandistes de la pressetituée annoncent allègrement que l’OTAN a bombardé le convoi de Mouammar Kadhafi et assassiné celui-ci qui n’a pas survécu à ses blessures.
L’annonce de son décès a été confirmée par les marionnettes de l’impérialisme installées dans un prétendu CNT, par Obama, Sarkozy et Cameron, principaux responsables de l’actuelle agression contre la Libye souveraine.
Cette guerre impérialiste menée sous des prétextes mensongers a été soutenue par une ONU manifestement sous contrôle de l’OTAN.
Elle a été facilitée par l’abstention au Conseil de sécurité, de la Russie et de la Chine dont les dirigeants portent ainsi indirectement, une part de responsabilité dans les massacres barbares infligés à l’héroïque peuple libyen.
Kadhafi, le seul chef d’État légitime de la Libye, est rentré dans l’histoire de l’humanité en rejoignant la cohorte des combattants africains contre l’impérialisme et assassinés par celui-ci. Il a pris la stature d’un symbole de la lutte des peuples africains pour l’indépendance et la liberté, celle d’un héros de l’ensemble des peuples du monde qui combattent un ennemi commun : l’impérialisme étasunien et ses vassaux dont la France officielle de Sarkozy est l’un des pires, celui qui manifeste la plus grande soumission et se voit confiées les plus sales et les plus criminelles missions.
En France, l’UMPS ainsi que tous les partis euro-atlantistes et occidentalistes soutiennent la guerre coloniale contre le peuple libyen.
Cette agression barbare a même reçue l’approbation des dirigeants de partis qui se prétendent démagogiquement, à la »gauche » de la « gauche ». Ceux-là portent aussi une responsabilité directe dans l’assassinat de Kadhafi qui était prévisible.
La lutte du peuple libyen va pensons-nous, se poursuivre. Elle sera soutenue par les anti-impérialistes du monde entier.
La France sort discréditée de cette aventure impérialiste criminelle qui souligne combien le retrait de notre pays de l’OTAN et de l’Union Européenne porteuses de guerres d’agression occidentalistes est urgente.
« Un peuple qui en opprime un autre ne saurait être un peuple libre » disait Marx. Nous devons en effet, libérer la France !
Vive la lutte pour l’indépendance, la liberté et la souveraineté des peuples, en Afrique et dans le monde entier.
Gloire à Mouammar Kadhafi et au peuple libyen.
Claude Beaulieu, président du Comité Valmy
20 octobre 2011
par Comité Valmy
http://www.comite-valmy.org:80/spip.php?article1976
2-2 La communauté internationale salue la disparition de Kadhafi.
La communauté internationale a salué jeudi la mort de Mouammar Kadhafi après 42 ans de règne sans partage à la tête de la Libye, espérant la fin prochaine de l’intervention de l’Otan.
Le président des Etats-Unis Barack Obama a affirmé que la disparition de l’ex-dictateur marquait «la fin d’un chapitre long et douloureux» pour les Libyens et appelé les nouvelles autorités de Tripoli à bâtir un pays «démocratique» et «tolérant». «Je suis très fier du travail que nous avons effectué dans cette opération. Et je suis encore plus fier de ce que les Libyens ont réussi», a-t-il estimé.
Obama, dont l’administration avait pris soin de ne pas apparaître seule au premier rang dans la lutte contre le régime libyen, n’a pas manqué de faire le rapprochement avec les tensions en cours dans le reste du monde arabe. «Pour la région, les événements d’aujourd’hui prouvent une fois de plus que les régimes à poigne finissent toujours par disparaître (…) Les jeunes rejettent avec force la dictature. Et les dirigeants qui essaient de leur refuser leur dignité n’y parviendront pas», a prédit le président américain.
La France, en pointe dans l’intervention de l’Otan en Libye, a salué par la voix du président Nicolas Sarkozy une «étape majeure» pour la libération de la Libye, estimant qu’une «page nouvelle» s’ouvrait pour le peuple libyen, «celle de la réconciliation dans l’unité et la liberté». Son ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, a souligné que l’intervention de l’Otan serait «évidemment terminée» dès que le CNT proclamerait la libération du territoire libyen. Londres «ne va pas pleurer» Le secrétaire général de l’Otan, Anders Fogh Rasmussen, a estimé que la fin de l’opération «historique» de l’Otan était «désormais beaucoup plus proche». Il a appelé les Libyens à «prévenir toutes représailles contre des civils et à faire preuve de retenue dans le traitement réservé aux forces vaincues».
Le Premier ministre britannique David Cameron, dont le pays a lui aussi été à l’avant-garde dans le conflit libyen, s’est dit «fier du rôle joué» par Londres dans la chute du «dictateur brutal», dont la disparition «renforce les chances pour les Libyens de se forger un avenir fort et démocratique». Sans se prononcer sur les circonstances du décès, son ministre des Affaires étrangères William Hague a indiqué qu’il désapprouvait «les exécutions extrajudiciaires» tout en assurant qu’il «n’allait pas pleurer».
«La guerre est finie», a affirmé le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi, qui fut un allié de Kadhafi et réticent à le lâcher au début du soulèvement.
«A l’évidence, ce jour marque une transition historique pour la Libye», a réagi le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon. Il a toutefois averti que «le chemin à parcourir pour la Libye et son peuple allait être difficile et pavé de défis».
La chancelière allemande Angela Merkel, dont le pays a refusé de participer à l’opération militaire de l’Otan, a souhaité que le Libye puisse prendre «un nouveau départ politique dans la paix».
Appels à la réconciliation
Peu de réactions par contre au Proche-Orient, toujours sous le coup du «printemps arabe», et en Afrique. Le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, a espéré que la mort de Kadhafi «tourne la page de la tyrannie» et que les Libyens regardent «l’avenir sans sentiments de rancune ni revanche».
Le voisin égyptien, qui s’est lui-même libéré du régime Moubarak en début d’année, a espéré «que le peuple libyen ouvrira une nouvelle page et reconstruira son pays après la mort du colonel Mouammar Kadhafi». Le Caire s’est dit «prêt à aider à la reconstruction de ce pays».
Le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki a salué l’élimination du dirigeant libyen, qui comme celle de Saddam Hussein, démontre selon lui la «capacité du peuple à vaincre les dictateurs».
L’ex-Premier ministre libanais Saad Hariri, leader de l’opposition anti-syrienne, a voulu voir dans la mort de Kadhafi un signe de «la fin inévitable de tous les tyrans».
L’Union africaine a constaté qu’un chapitre d’histoire était fini. «Nous espérons que la Libye devienne un pays plus stable, qui s’occupe de réconciliation et de reconstruction», a déclaré une source proche de l’organisation.
Le gouvernement sud-africain, qui a longtemps refusé, au nom de la souveraineté africaine, toute intervention extérieure, a souhaité que cette mort amène une cessation des hostilités et un retour de la paix, exhortant le CNT à la «réconciliation».
Seul à adopter une position radicalement différente, le président vénézuélien Hugo Chavez, soutien sans faille de Mouammar Kadhafi, a de son côté condamné «l’assassinat» de l’ex-dirigeant libyen, un «martyr» et un «grand combattant».
(Source AFP)
21-10
http://www.liberation.fr:80/monde/01012366965-la-communaute-internationale-salue-la-disparition-de-kadhafi?xtor=EPR-450206
2-3 Le lynchage de Mouammar Kadhafi.
La mort de Mouammar el-Kadhafi a été saluée par une explosion de joie dans les palais gouvernementaux occidentaux à défaut de l’être par le peuple libyen.
Pour Thierry Meyssan, cet assassinat militairement inutile n’a pas été perpétré par l’Empire uniquement pour l’exemple, mais aussi pour déstructurer la société tribale libyenne
Durant 42 ans, Mouammar el-Kadhafi a protégé son pays du colonialisme occidental.
Il rejoint aujourd’hui Omar al-Mokhtar au panthéon des héros nationaux libyens.
Jeudi 20 octobre 2011, vers 13 h 30 GMT, le Conseil national de transition libyen a annoncé la mort de Mouammar el-Kadhafi. Bien que confus, les premiers éléments laissent à penser qu’un convoi de voitures a tenté de quitter Syrte assiégée et a été bloqué et partiellement détruit par un bombardement de l’OTAN. Des survivants se seraient mis à l’abri dans des canalisations. M. Kadhafi, blessé, aurait été fait prisonnier par la brigade Tigre de la tribu des Misrata qui l’aurait lynché.
Le corps du « Guide » de la Grande Jamahiriya arabe socialiste n’a pas été conservé dans sa ville natale de Syrte, ni transporté à Tripoli, mais acheminé comme trophée par les Misrata dans la ville éponyme.
La tribu des Misrata, qui a longtemps hésité à choisir son camp et est quasi absente du CNT, aura finalement investi Tripoli après son bombardement par l’OTAN, et aura lynché Mouammar el-Kadhafi après le bombardement de son convoi par l’OTAN. Elle aura même transféré son corps dans sa ville pour marquer son triomphe. En juillet, le « Guide » aura maudit les Misrata, leur enjoignant de partir à Istanbul et Tel-Aviv, faisant allusion au fait que leur tribu est issue de juifs turcs convertis à l’islam.
Un flot de commentaires préparés à l’avance a été déversé instantanément par les médias atlantistes visant à diaboliser Mouammar el-Kadhafi et, de la sorte, à faire oublier les conditions barbares de sa mort.
Les principaux dirigeants de la Coalition ont salué la mort de leur ennemi comme marquant la fin de l’opération « Protecteur unifié ». Ce faisant, ils admettent implicitement que celle-ci ne visait pas à mettre en œuvre la Résolution 1973 du Conseil de sécurité, mais à renverser un régime politique et à en tuer le leader, alors même que l’assassinat d’un chef d’État en exercice est interdit en droit états-unien et universellement condamné.
De plus, le lynchage de Mouammar el-Kadhafi montre la volonté de l’OTAN de ne pas le déférer à la Cour pénale internationale qui n’aurait pas été plus en mesure de le condamner pour crime contre l’humanité que le Tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie ne put prouver la culpabilité de Slobodan Milosevic malgré deux ans de procès.
Dans le torrent de boue déversé par les médias atlantistes pour salir sa mémoire, reviennent en boucle des accusations mensongères, ce qui montre a contrario que ces médias disposent de peu d’éléments authentiques utilisables à charge.
Ainsi revient l’affaire de l’attentat contre la discothèque La Belle à Berlin (5 avril 1986, 3 morts), jadis utilisée comme prétexte par l’administration Reagan pour bombarder son palais et tuer sa fille (14 avril 1986, au moins 50 morts). À l’époque, le procureur allemand Detlev Mehlis (celui qui truquera deux décennies plus tard l’enquête sur l’assassinat de Rafik el-Hariri) s’appuya sur le témoignage de Mushad Eter pour accuser un diplomate libyen et son complice Mohammed Amairi. Cependant, la télévision allemande ZDF découvrira plus tard que Mushad Eter est un faux témoin et un vrai agent de la CIA, tandis que le poseur de bombe Mahammed Aamiri est un agent du Mossad [1].
Ou encore, l’affaire de l’attentat de Lockerbie (21 décembre 1988, 270 morts) : les enquêteurs identifièrent le propriétaire de la valise contenant la bombe et son retardateur sur la foi du témoignage d’un commerçant maltais qui avait vendu un pantalon se trouvant également dans la valise piégée. La justice écossaise mit alors en accusation deux agents libyens Abdelbaset Ali Mohmed Al Megrahi et Al Amin Khalifa Fhimah et le Conseil de sécurité prit des sanctions contre la Libye. En définitive, pour obtenir la levée des sanctions, la Libye accepta d’extrader ses deux agents (le premier fut condamné à la prison à vie, le second fut innocenté) et de payer 2,7 milliards de dollars d’indemnités, tout en persistant à proclamer sa complète innocence. En définitive, en août 2005, un des chefs d’enquête écossais déclara que la pièce à conviction principale, le retardateur, avait été déposé sur les lieux par un agent de la CIA. Puis l’expert qui avait analysé le retardateur pour le tribunal admit l’avoir lui-même fabriqué avant que la CIA ne le dépose sur les lieux. Enfin, le commerçant maltais reconnu avoir été payé 2 millions de dollars pour porter un faux témoignage. Les autorités écossaises décidèrent de réviser le procès, mais l’état de santé d’Abdelbaset Ali Mohmed Al Megrahi ne le permit pas.
L’actuelle campagne de désinformation comprend aussi un volet sur le train de vie décrit comme somptueux du défunt et sur le montant pharaonique de sa fortune cachée. Or, tous ceux qui ont approché Mouammar el-Kadhafi, ou simplement ceux qui ont visité sa maison familiale et sa résidence après leur bombardement peuvent attester qu’il vivait dans un environnement comparable à celui de la bourgeoisie de son pays, bien loin du bling bling de son ministre du Plan, Mahmoud Jibril. De même, aucun des États qui traquent la fortune cachée des Kadhafi depuis des mois n’a été en mesure de la trouver. Toutes les sommes significatives saisies appartenaient à l’État libyen et non à son « Guide ».
À l’inverse, les médias atlantistes n’évoquent pas le seul mandat d’arrêt international émis par Interpol contre Mouammar el-Kadhafi avant l’offensive de l’OTAN. Il était accusé par la Justice libanaise d’avoir fait disparaître l’imam Moussa Sadr et de ses accompagnateurs (1978). Cet oubli s’explique par le fait que l’enlèvement aurait été commandité par les États-Unis qui voulaient éliminer l’imam chiite avant de laisser l’ayatollah Rouhollah Khomeiny rentrer en Iran, de peur que Sadr n’étende au Liban l’influence du révolutionnaire iranien.
Les médias atlantistes n’évoquent pas non plus les critiques que des organisations de la Résistance anti-impérialiste et nous-mêmes avions formulées contre Mouammar el-Kadhafi : ses compromis récurrents avec Israël.
Pour ma part, je peux attester que, jusqu’à la bataille de Tripoli, le « Guide » a négocié avec des émissaires israéliens, espérant parvenir à acheter la protection de Tel-Aviv. Je dois aussi attester que, malgré mes critiques sur sa politique internationale, et le dossier complet à ce sujet que la DCRI française lui a aimablement communiqué à mon sujet en juillet dans l’espoir de me faire arrêter, Mouammar el-Kadhafi m’a accordé sa confiance et m’a demandé d’aider son pays à faire valoir ses droits aux Nations Unies [2] ; un comportement bien éloigné de celui d’un tyran.
Les médias atlantistes n’ont pas non plus cité les ingérences que j’ai condamnées de la Libye dans la vie politique française, notamment le financement illégal des campagnes électorales présidentielles de Nicolas Sarkozy et de Ségolène Royal. Le « Guide » avait en effet autorisé son beau-frère Abdallah Senoussi à corrompre les deux principaux candidats en échange de la promesse de l’amnistier ou de faire pression sur la Justice française pour clore son dossier pénal [3].
Surtout, les médias atlantistes n’évoquent pas l’œuvre principale du « Guide » : le renversement de la monarchie fantoche imposée par les anglo-saxons, le renvoi des troupes étrangères, la nationalisation des hydrocarbures, la construction de la Man Made River (les plus importants travaux d’irrigation au monde), la redistribution de la rente pétrolière (il fit d’une des populations les plus pauvres du monde, la plus riche d’Afrique), l’asile généreux aux réfugiés Palestiniens et l’aide sans équivalent au développement du Tiers-monde (l’aide libyenne au développement était plus importante que celle de tous les États du G20 réunis).
La mort de Mouammar el-Kadhafi ne changera rien au plan international. L’événement important était la chute de Tripoli, bombardée et conquise par l’OTAN —certainement le pire crime de guerre de ce siècle—, suivie de l’entrée de la tribu des Misrata pour contrôler la capitale. Dans les semaines précédant la bataille de Tripoli, l’écrasante majorité des Libyens ont participé, vendredi après vendredi, à des manifestations anti-OTAN, anti-CNT et pro-Kadhafi. Désormais, leur pays est détruit et ils sont gouvernés par l’OTAN et ses fantoches du CNT.
La mort du Guide aura par contre un effet traumatique durable sur la société tribale libyenne. En faisant tuer le leader, l’OTAN a détruit l’incarnation du principe d’autorité. Il faudra des années et beaucoup de violences avant qu’un nouveau leader soit reconnu par l’ensemble des tribus, ou que le système tribal soit remplacé par un autre mode d’organisation sociale. En ce sens, la mort de Mouammar el-Kadhafi ouvre une période d’irakisation ou de somalisation de la Libye.
Thierry Meyssan
[1] Enquête du magazine Frontal, diffusée par la ZDF le 28 août 1998.
[2] Ce que j’ai fait à titre militant, sans rémunération aucune. Ndla
[3] Abdallah Senoussi avait été condamné par contumace en France pour l’attentat contre le DC-10 d’UTA (19 septembre 1989, 170 morts
Réseau Voltaire
20 octobre 2011
http://www.voltairenet.org:80/Le-lynchage-de-Mouammar-Kadhafi
2-4 JEAN-LOUIS LE TOUZET, LUC MATHIEU : Muammar al-Kadhafi, le Guide supprimé
Ndlr : La publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage toutes les analyses des auteurs mais doit être vu comme information.
Reportage
Le dictateur libyen est mort, hier à Syrte, après une intervention de l’Otan et dans des conditions encore floues.
Un pantin de 69 ans ensanglanté. C’est la toute première image de la capture du leader libyen, hier à Syrte, en début d’après-midi. Première photo prise par un téléphone portable par un combattant qui assure que le leader se cachait dans un tunnel. Un tunnel ? Plutôt une conduite d’égout. A 16 heures, Kadhafi était mort selon les premières dépêches. Son corps transporté vers Misrata, à 250 km. Mort au combat, armes à la main. C’est la version avancée jusqu’en fin de journée par plusieurs témoins. Kadhafi aurait été surpris, il se serait battu, il se serait caché, il serait mort au combat sous les balles du Conseil national de transition (CNT).
Hier soir pourtant, Gérard Longuet, ministre de la Défense, a avancé une autre version.
Des avions de chasse de l’Otan, dont certains français, auraient stoppé le convoi des derniers proches du Guide qui cherchaient à fuir à bord de 4×4. La colonne aurait ensuite été stoppée par un tir avant que des accrochages au sol ne scellent le sort de Kadhafi. D’où des blessures graves aux jambes, certaines dues à ces tirs venus du ciel, selon d’autres témoignages.
«Que voulez-vous ?» Qui dit vrai ? Ce jeune homme qui tient un automatique plaqué or et qui assure qu’il serait celui de Kadhafi et qu’il se serait servi de cette arme pour tirer une balle dans l’estomac du Guide ? Un combattant le lui prend des mains et le fait virevolter devant une caméra : «C’est le revolver de Kadhafi !» La confusion est totale car, selon certains, Kadhafi aurait supplié : «Ne tirez pas !» D’autres rapportent que, avant de sombrer, inconscient, Kadhafi aurait dit : «Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ?»
Sur d’autres images, on voit des combattants qui tentent de maintenir debout le Guide tandis qu’il semble s’adresser à eux en criant. Tête nue, revêtu d’un treillis, il a du sang sur le visage, sur les épaules, et sa chemise en est trempée. Sur les premières vidéos parvenues, il n’est pas possible d’établir avec certitude qu’il s’agit bien du dictateur déchu tant la caméra bouge, son visage apparaissant rarement plein champ. Un combattant du CNT, totalement excité, semble tenir un pistolet très près de sa tête mais il n’est pas possible de déterminer s’il en fait usage. Kadhafi est ensuite hissé sur le capot d’une voiture qui démarre, surchargée de combattants surexcités. C’est apparemment à partir de ce moment que sont prises d’autres photos et d’autres vidéos qui avaient été diffusées auparavant dans la journée. Sa mort a été annoncée hier par le porte-parole officiel du CNT à Benghazi, l’avocat Abdel-Hafez Ghoga : «Nous annonçons au monde que Kadhafi a été tué aux mains des révolutionnaires.»
«Achevé». Le front de mer de Syrte apparaît comme un gigantesque champ de tir où les combattants déchargent à tout va. Autour de l’hôpital, les insurgés essaient de vérifier si Kadhafi est bien mort. «Ils l’ont sans doute achevé en route», avance un médecin.
Le CNT a aussi annoncé hier que Mouatassim, l’un de ses fils, médecin et officier, avait été tué. Sur des images, on voit un corps avec une balle dans la nuque, la main droite tranchée. A côté, des dépouilles de soldats loyalistes. Elles portent des vêtements bleus. Un médecin avance cette hypothèse : «Kadhafi leur avait ordonné le bleu pour que ses soldats ne se tirent pas dessus.»
Hier soir, le CNT ne pouvait confirmer ni la capture ni la mort de Saïf al-Islam, le dauphin désigné, qui faisait partie du dernier carré de fidèles. Dans l’ambulance qui conduisait le corps de Muammar al-Kadhafi vers Misrata, celui de son ministre de la Défense, Aboubakr Younès, mort lui aussi au combat. Ou achevé ?
http://www.liberation.fr:80/monde/01012366942-muammar-al-kadhafi-le-guide-supprime?xtor=EPR-450206
3 Courrier des lecteurs & trouvé sur le net & témoignage
3-1 QU’AVEZ VOUS FAIT POUR EMPÊCHER ÇA ? ! ?
(Cette question ne s’adresse évidemment pas aux bien trop rares personnes parmi vous qui ont tenté quelque chose. Elle s’adresse à celles et à ceux, bien plus nombreux, qui s’en sont foutu royalement. Pourquoi la population française avait-elle manifesté massivement en 1991 contre la guerre d’Irak alors que pourtant Saddam avait été placé à la tête de ce pays par la CIA, et n’a rien fait contre la guerre de Libye alors que Kadhafi combattait l’impérialisme de toutes ses forces et soutenait toutes les révolutions de gauche qui le lui demandaient ?
J’accuse en particulier ici l’immense majorité des militants qui osent, malgré leur passivité si ce n’est pire, se prétendre encore « de gauche », « d’extrême gauche » ou « anarchistes ».)
3-2 Mali : manifestations de masse pro-Kadhafi.
D’importantes manifestations en faveur de la Grande Jamahariya arabe libyenne et de son guide Mouammar Kadhafi ont eu lieu au Mali, vendredi 14 octobre 2011.
La Jamahariya a été attaquée par une coalition internationale en mars, prétendument pour protéger les civils du tyran, en réalité pour installer un gouvernement fantoche.
Les manifestants arboraient des T-shirt et des pancartes à l’effigie du colonel Kadhafi et scandaient leur volonté de mourir pour sauver la Libye. Des brigades internationales sont en cours de formation pour s’opposer à la recolonisation de l’Afrique.
La Jamahariya consacrait une part de sa rente pétrolière au développement d’États africains, dont le Mali [1]. L’aide libyenne au développement de l’Afrique était plus importante que la totalité de l’aide occidentale.
Réseau Voltaire | 18 octobre 2011
3-3 La « Libye libre » de Clinton.
Accueillie à l’aéroport de Tripoli par une foule de miliciens au cri de « Allah Akbar », la secrétaire d’Etat Hillary Clinton s’est dite « fière de poser le pied sur le sol d’une Libye libre ».
Donc, après avoir rencontré le président du Cnt Mustapha Abdel Jalil, elle a tenu une conférence de presse dans un centre islamique pour préciser de quelle manière les Etats-Unis entendent contribuer à l’avenir du pays.
Avant tout l’OTAN continuera à « protéger les civils libyens tant que n’aura pas cessé le danger constitué par Kadhafi et ses acolytes ». Les termes temporels sont assez vagues : selon un haut fonctionnaire de la suite de Clinton, Kadhafi et les siens sont restés un « élément létal de troubles » qui pourrait bloquer l’évolution du pays. Ceci signifie que l’OTAN se prépare à surveiller la Libye avec ses propres forces militaires.
Clinton a ainsi abordé le thème de la reconstruction économique, en soulignant que la Libye a « la chance de posséder des richesses et des ressources ». Ce dont elle a besoin ce sont des « expertises et une assistance technique internationales ». Dans ce but sera créé un comité conjoint étasunien-libyen, pour définir les priorités du pays. Tout comme ils sont en train de le faire en Tunisie et en Egypte, les Etats-Unis établiront un partenariat avec la Libye, pour renforcer le commerce, les investissements et les liens entre les entreprises des deux pays et intégrer plus étroitement la Libye dans les marchés globaux. Le programme ne laisse pas de doutes : les Etats-Unis, en passant par-dessus les autres « amis de la Libye » parmi lesquels l’Italie, ont l’intention d’amener le pays africain dans leur sphère de domination économique.
C’est dans ce cadre que s’insère l’« assistance économique » à la Libye. Jusqu’à présent, a admis Clinton, elle a été relativement maigre, à cause de la politique d’austérité et d’une forte opposition du Congrès. De février jusqu’à maintenant les Usa ont fourni au Cnt des aides d’un montant de 135 millions de dollars. Bien peu de choses, si on considère que les fonds souverains libyens congelés en février dernier dans des banques étasuniennes (par une opération qui, dans le code pénal, s’appelle « rapine à main armée ») se montent à environ 32 milliards de dollars. Le Trésor Usa l’a qualifiée de « plus grosse somme d’argent jamais bloquée aux Etats-Unis », s’engageant à la garder « en dépôt pour l’avenir de la Libye ». Jusqu’à présent cependant il l’a gardée bien étroitement : ce que Washington a donné au Cnt se monte à 0,4% des capitaux libyens confisqués. A Tripoli, Clinton a annoncé que « nous sommes en train de travailler pour restituer des milliards de dollars des capitaux congelés ». Quand et dans quelle mesure, cela dépend clairement de la disponibilité du nouveau gouvernement libyen à ouvrir les portes du pays aux multinationales étasuniennes et à mettre l’économie sous la supervision de Washington, soit directement soit à travers le Fonds monétaire international.
En fonction de ce plan, Clinton annonce qu’allait être doublé le nombre d’étudiants libyens formés aux Etats-Unis avec le programme Fulbright et que seront ouverts dans toute la Libye de nouveaux cours de langue anglaise avec des enseignants étasuniens. Ce seront des écoles non seulement de langue mais aussi de démocratie : ceci étant garanti par le fait que « le Gouvernement des Etats-Unis soutient les droits humains partout et pour quiconque ».
Mondialisation.ca,
Le 20 octobre 2011
ilmanifesto.it
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20111020/manip2pg/09/manip2pz/311902/
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio
http://www.mondialisation.ca:80/index.php?context=va&aid=27192
4 Analyse – Géopolitique et stratégie – Réflexion
4-1 Thierry Meyssan : La guerre contre la Libye est une catastrophe économique pour l’Afrique et l’Europe.
Entretien avec le ministre libyen de la Coopération
L’un des mobiles de la guerre contre la Libye est de stopper le développement du continent noir, de permettre l’installation de la base militaire de l’US Africom en Cyrénaique, et de débuter l’exploitation coloniale de l’Afrique au profit des États-Unis.
Pour comprendre ces enjeux cachés, le Réseau Voltaire à interrogé Mohammed Siala, ministre de la Coopération et administrateur du fonds souverain libyen.
Réseau Voltaire | Tripoli (Libye) | 3 juillet 2011
Réseau Voltaire : Votre pays est riche en gaz et en pétrole. Vous avez capitalisé 70 milliards de dollars au sein de l’Autorité libyenne d’investissement. Comment utilisez-vous cette manne ?
Mohammed Siala : Nous disposons d’importantes ressources, mais elles ne sont pas renouvelables. Nous avons donc créé l’Autorité libyenne d’investissement pour protéger la richesse des générations futures, comme l’ont fait les Norvégiens par exemple. Cependant, nous consacrons une partie de ces fonds au développement de l’Afrique. Cela signifie que nous avons placé plus de 6 milliards de dollars dans des actions de développement du continent, en matière d’agriculture, de tourisme, de commerce, de mines, etc.
Nous avons placé le reste des fonds dans des secteurs différents, des pays différents, des monnaies différentes. Partout, y compris aux USA et en Allemagne, ce qui leur a malheureusement permis de geler certains de nos avoirs.
Réseau Voltaire : Techniquement, comment ce gel est-il mis en œuvre ?
Mohammed Siala : Le gel des avoirs est régi par les lois bancaires du pays où ils sont placés. La règle est qu’ils bloquent nos comptes, mais que nous pouvons en obtenir parfois la libération si nous portons le litige devant un Comité des réclamations et si nous prouvons qu’ils étaient destinés à certains usages. Par exemple, je viens à l’instant de plaider le dégel de fonds destinés à verser des bourses aux 1 200 étudiants que nous avons envoyés en Malaisie. Nous essayons de faire de même pour tout ce qui touche aux allocations sociales ou aux frais d’hospitalisation de nos ressortissants à l’étranger.
Il arrive que certains pays nous autorisent à utiliser des fonds pour l’achat de nourriture ou de médicaments. En principe, c’est notre droit, mais beaucoup refusent de dégeler les sommes nécessaires ou font traîner les choses. Par exemple, en Italie, l’État refuse tout usage de nos avoirs. En Allemagne, l’État autorise les usages humanitaires, mais ce sont certaines banques qui refusent de dégeler les fonds nécessaires. Les interprétations de la résolution sont complètement différentes selon les États. Nous réclamons une règle claire : ce qui est permis est autorisé et ce qui ne l’est pas est interdit. Pour le moment, l’interprétation est politique et la force prévaut sur le droit.
Réseau Voltaire : Est-ce le seul problème que vous rencontrez pour vos approvisionnements ?
Mohammed Siala : Nous devons aussi faire face au blocus maritime que l’OTAN a mis en place sans base légale. Ils interdisent notre approvisionnement, ou le retardent, y compris pour des cargaisons alimentaires. Ils s’appliquent surtout à empêcher notre livraison en essence, même si cela n’est pas prévu par les résolutions pertinentes de l’ONU. Nous avons ainsi un pétrolier qui patiente depuis un mois à Malte. Pour chaque bateau, ils discutent le double usage de ce qu’il transporte. L’essence est destinée aux véhicules civils. Mais ils disent qu’elle peut l’être aussi par des voitures de l’armée. Nous répondons qu’ils ne peuvent nous interdire de l’utiliser pour les ambulances, etc. Quoi qu’il en soit, depuis le début du conflit, ils empêchent toute livraison d’essence. Or, nous sommes dépendants des raffineries étrangères pour environ un tiers de notre approvisionnement. D’où la pénurie actuelle. En théorie, ils ont uniquement le droit d’inspecter les navires pour s’assurer qu’ils ne transportent pas d’armes. Mais en pratique, ils déploient illégalement un blocus maritime.
Ils ont ordonné à des bateaux russes et chinois de faire demi-tour. Leurs États doivent alors déposer une plainte devant le Comité des sanctions de l’ONU pour discuter de l’interprétation des résolutions. C’est une procédure interminable et dissuasive. Aucune base légale ne les autorise à agir ainsi, mais ils le font de force, sûrs de leur impunité.
Nous parvenons toutefois à nous approvisionner par voie terrestre, mais cela est dérisoire : nous avons besoin d’un mois pour transporter par camion ce que nous pouvons décharger en une journée dans nos ports.
Réseau Voltaire : Votre pays a multiplié les constructions d’infrastructures, notamment les gigantesques travaux d’irrigation de la Man Made River. Quels sont vos projets en cours ?
Mohammed Siala : Il existe un chemin de fer qui parcourt l’Afrique du Nord, sauf la Libye. Nous voulons le compléter pour nous intégrer dans l’économie régionale et la dynamiser. Les Chinois construisent le tronçon Tunisie-Syrte. Les Russes sont chargés de Syrte-Benghazi. Une négociation était en cours avec l’Italie pour le tronçon Benghazi-Égypte ainsi que pour les locomotives. Nous avons aussi commencé la construction d’une ligne transcontinentale nord-sud, avec le tronçon Libye-N’Djamena. Ce sont des investissements considérables d’intérêt international et nous avions cru que le G8 nous aiderait. Il l’avait promis, mais nous n’avons rien vu venir.
Nous sommes âpres en affaires et nous avons utilisé les appels d’offre pour obliger nos prestataires à baisser leurs prix. Lors de sa visite ici, Vladimir Poutine a convenu d’aligner les tarifs des entreprises russes sur ceux de ses compétiteurs chinois. Nous avons pu ainsi diversifier nos partenaires.
Réseau Voltaire : Avec la guerre, que vont devenir ces projets ?
Mohammed Siala : Tous ces chantiers sont interrompus avec le gel des avoirs. Mais nous poursuivons les appels d’offre pour les tronçons à réaliser parce que nous sommes certains que la guerre est momentanée et que les travaux reprendront. Nous nous préparons à poursuivre les contrats provisoirement interrompus pour raison de « force majeure ».
La guerre a désespéré nos partenaires. Les Chinois ont ici 20 milliards de dollars de contrats, les Turcs 12 milliards. Viennent ensuite les Italiens, les Russes, puis les Français. Ce n’était pas leur intérêt de laisser faire cette agression, encore moins d’y participer. Probablement certains ont–ils reçu des compensations en dessous de table, mais nous n’avons aucune information précise à ce sujet. D’autres espèrent avoir plus en conquérant notre pays et en s’attribuant eux-mêmes les contrats de reconstruction.
Réseau Voltaire : Quelles sont les conséquences du gel de vos avoirs pour l’Afrique ?
Mohammed Siala : En bloquant nos avoirs, ils ont aussi bloqué nos actions de développement en Afrique. Le continent ne parvient qu’à exporter des produits bruts. Nous investissons pour qu’ils soient transformés en Afrique et commercialisés par les Africains. Il s’agit de créer des emplois et de conserver la plus-value en Afrique. D’un côté les Européens nous encouragent car cette politique assèche les flux migratoires, d’un autre, ils s’y opposent parce qu’ils doivent renoncer à l’exploitation coloniale.
Les Occidentaux veulent maintenir l’Afrique dans une situation où elle n’exporte que des produits bruts, des commodités.
Par exemple, lorsque le café produit en Ouganda est exporté en Allemagne d’où il est commercialisé, la plus-value reste en Allemagne. Nous avons financé des installations pour la torréfaction, la mouture, le packaging etc. La part de rémunération des Ougandais est passée de 20% à 80%. Évidemment, notre politique entre en conflit avec celle des Européens. C’est un euphémisme.
Nous finançons des rizières au Mozambique et au Libéria, à hauteur de 32 millions de dollars par projet et créons chaque fois 100 000 emplois. Nous visons d’abord l’autosuffisance alimentaire de chaque État africain, et seulement après les marchés d’exportation. Sans aucun doute, nous entrons en conflit avec ceux qui produisent et exportent du riz, surtout s’ils spéculent avec.
Nous construisons aussi des routes. Par exemple depuis la Libye à travers le Niger. Nous avons déjà relié le Soudan à l’Érythrée ce qui bouleverse l’économie régionale et ouvre des perspectives de développement. Il désormais possible de faire circuler des marchandises par route et par mer.
Réseau Voltaire : Peut-on dire que la Libye a peu d’alliances diplomatiques, mais que vous avez élaboré des alliances économiques qui vous protègent. Peut-on parler de diplomatie des investissements ?
Mohammed Siala : Oui.
Par exemple, nous finançons pour 50 millions de dollars la construction par des entreprises chinoises d’un canal de 32 kilomètres au Mali pour l’irrigation des zones agricoles. Le gel de nos avoirs interrompt d’importants projets agricoles dans ce pays. S’il se poursuit, un problème alimentaire se posera rapidement et les populations reprendront et accélèreront leur migration vers l’Europe. En définitive, les Européens ne peuvent pas se permettre de stopper notre effort de développement du continent. Ils n’ont pas d’alternative à notre politique.
Réseau Voltaire : Disposez-vous d’un dispositif qui vous permette de payer vos commandes sur le marché international malgré le gel de vos avoirs. Votre pays est attaqué, je pense bien sûr à l’achat d’armes et munitions.
Mohammed Siala : Nous résistons depuis quatre mois et demi. Nous avons tiré les leçons de l’embargo et étions prêts au premier jour. Beaucoup d’États nous observent et veulent prendre des mesures similaires pour se protéger eux aussi de l’impérialisme.
Thierry Meyssan
Réseau Voltaire | 3 juillet 2011
Thierry Meyssanhttp://www.voltairenet.org/La-guerre-contre-la-Libye-est-une
4-2 Dix questions sur la mort de Kadhafi.
Au milieu de l’euphorie sur la mort du dirigeant libyen Kadhafi, on peut faire pas mal de remarques critiques. Quand l’Otan se réjouit, les peuples du Sud et les contribuables feraient bien d’être prudents…
Bert De Belder
Une exécution préméditée ?
Le colonel Mouammar Kadhafi est mort. Tout indique qu’il a été abattu de sang-froid après avoir été blessé et fait prisonnier par les rebelles du Conseil national de transition (CNT), armés et entraînés par l’Otan. Selon les lois de la guerre, l’exécution d’un prisonnier de guerre est un crime de guerre. Amnesty International a déjà réclamé une enquête[1]. Mais dans le monde politique occidental et dans les médias, pas une seule voix ne s’élève. Kadhafi était en effet le diable en personne ; comme le dit littéralement le premier ministre britannique Cameron, il s’agissait de « la lutte entre le bien et le mal[2] ». [C’est une constante britannique, exactement les même mots que Tony Blair pour Milosevic]
Protéger des civils en les bombardant ?
Selon une version précédente de la mort de Kadhafi, il aurait succombé à un bombardement de l’Otan sur son convoi. Le mandat de la résolution 1973 des Nations Unies autorise la protection des civils et la création d’une no-fly zone. Il est difficile de concevoir comment le bombardement d’autos en fuite s’inscrit dans ce cadre ! Les longs mois de bombardements des villes de Beni Oualid et de Syrte, au lieu de protéger les civils, en ont tué des centaines et ont jeté sur les routes des milliers de réfugiés.
Protéger les civils ou mettre des rebelles au pouvoir ?
Lors du vote de la résolution des Nations Unies qui a donné le coup d’envoi de la « guerre humanitaire » contre la Libye, on a juré ses grands dieux que la cible n’était pas Kadhafi en personne et que le « changement de régime » n’était pas à l’ordre du jour. Pourtant c’est précisément ce que l’Otan a fait. Le ministre de la Défense De Crem ment en disant que « la coalition internationale peut intervenir contre tout ce qui est lié au régime Kadhafi, donc contre Kadhafi lui-même[3] ». Selon le ministre français des Affaires étrangères Juppé, on peut maintenant mettre fin à l’opération militaire parce que « l’ensemble du territoire libyen est sous le contrôle du Conseil national de transition[4] ».
Vers une « occupation humanitaire » avec le soutien de la Belgique ?
« Les efforts de la communauté internationale doivent maintenant s’orienter vers la reconstruction du pays », déclare le gouvernement belge, qui libère pour cela immédiatement 6 millions d’euros. Tout comme pour les bombardements de l’Otan, il semble y avoir unanimité là-dessus dans le monde politique belge, surtout dans les partis du gouvernement. Les députés N VA Luykx et Francken trouvent d’ailleurs aussi que « notre engagement militaire doit maintenant déboucher sur un engagement civil en Libye[5] ». Idem chez Groen!, qui espère que maintenant « on va pouvoir édifier pour tous les Libyens un État de droit démocratique » pour lequel la Belgique doit s’engager[6].
Que coûte au contribuable belge la guerre de l’Otan ?
La Belgique est aujourd’hui bien positionnée en Libye, affirme De Crem, grâce à notre participation active à l’intervention. Six F-16 belges ont effectué 473 bombardements. Combien de victimes civiles ont fait ces bombardements, c’est quelque chose que même à huis clos, la commission parlementaire spéciale n’a pas le droit de savoir. Sur le coût des efforts de guerre de la Belgique, ils peuvent bien savoir quelque chose, même si c’est par tranches successives : il était d’abord question de 12 millions d’euros pour trois mois ; après cinq mois, on avait déjà dépensé 35 millions ; aujourd’hui, après sept mois, il s’agirait de 10 millions d’euros par mois ! Et ça en temps de crise économique et de sévères mesures d’austérité…
Vive la Libye libre ?
Ce que signifie « l’édification d’un État de droit » sous occupation humanitaire de l’Otan, on l’a vu en Afghanistan et en Irak. Après dix et huit ans respectivement d’occupation, ces pays n’ont ni démocratie, ni sécurité, ni développement, mais le contraire : un régime de marionnettes répressif, une guerre civile sanglante et une misère croissante. Nous pouvons nous attendre à la même chose en Libye, ou pire, vu la structuration complexe en tribus, les grandes contradictions à l’intérieur de la CNT (entre fondamentalistes islamiques, dirigeants repentis du régime Kadhafi, hommes de paille de la CIA et autres) et l’immixtion occidentale pour les gros intérêts économiques, pétroliers entre autres.
Rien que des mauvais points à Kadhafi ?
On peut, à bon droit, se poser beaucoup de questions sur le colonel Kadhafi et sa politique qui appelle pas mal de critiques. Mais, écrit la journaliste Olivia Umurerwa Rutazibwa de MO sur Facebook, « il n’est pas nécessaire de tenir avec Kadhafi pour avoir la nausée devant l’allégresse à peine contenue devant l’annonce de la mort de cet homme ». Il y a aussi « le silence complet sur quoi que ce soit qu’il aurait pu faire de positif pour l’Afrique ou pour son pays ». En 1969, Kadhafi était le héros de la libération de la Libye et dans les années qui ont suivi, il a été le grand promoteur de l’unité arabe et africaine contre toute forme de néocolonialisme. Il a apporté à son pays et à son peuple un certain degré de prospérité et de bien-être, avec une 53e place à l’échelle de développement humain des Nations Unies. En Afrique, il jouissait d’ailleurs d’un grand crédit.
Kadhafi, détesté par tous les Libyens ?
Dans une partie de la population libyenne aussi Kadhafi conservait un soutien, comme en témoigne le fait qu’après la prise de Tripoli il a fallu encore deux mois avant que Beni Oualid et Syrte ne tombent. On n’a pas eu un soulèvement de l’ensemble du peuple contre un dictateur détesté comme en Tunisie ou en Égypte, mais une guerre
civile dont un camp a été soutenu pendant sept mois par des avions de combat de l’Otan et des forces spéciales.
Qu’est-ce qui attend l’Afrique ?
Mahmood Mamdani, professeur à Kampala (Ouganda) et à New York, avertit : « Des temps sombres nous attendent. De plus en plus de sociétés africaines sont profondément divisées. Les Africains doivent bien réfléchir à la chute de Kadhafi et, auparavant, de Gbagbo en Côte d’Ivoire. Ces événements vont-ils inaugurer une ère d’interventions extérieures, chacune favorablement accueillie à l’intérieur pour assurer le changement de régime politique d’un pays après l’autre[7] ? » « La conquête de fait de la Libye par les États-Unis et leurs partenaires impérialistes annonce une version moderne de la “ruée sur l’Afrique” de la fin du 19e siècle », écrit le journaliste en vue John Pilger[8]. Il y aura plus de troupes des États-Unis en Ouganda, au Sud-Soudan, en République centrafricaine et en République démocratique du Congo. Il y a longtemps que les États-Unis rêvent d’une base pour Africom, le haut commandement des forces étasuniennes en Afrique, sur le sol africain. Avec la Libye, ce rêve peut devenir réalité, une base d’attaque contre le reste du continent.
À qui le tour ?
Et il y a encore tout le reste du Moyen-Orient, où l’Occident veut continuer à miner le printemps arabe ou à le plier à sa volonté. La Syrie est dans la ligne de mire. À l’émission Terzake, Guy Verhofstadt a annoncé qu’il pourrait être nécessaire d’instaurer une no-fly zone sur le nord de la Syrie[9]…
1Amnesty International (http://www.amnesty.org/en/news-and-updates/libyans-must-see-justice-after-death-colonel-al-gaddafi-2011-10-20).
2BBC World, 20 octobre 2011.
3De Standaard Online, 21 octobre 2011.
4Radio Europe 1, 21 octobre 2011.
5De Standaard Online, 21 octobre 2011.
6Sur le site du député Wouter De Vriendt (http://www.wouterdevriendt.be/nieuws/nieuws_detail.php?wdb_id=311).
7Al Jazeera (http://english.aljazeera.net/indepth/opinion/2011/08/201182812377546414.html).
8Sur son site (http://johnpilger.com/articles/the-son-of-africa-claims-a-continents-crown-jewels).
9Canvas, 20 octobre 2011.
Bert De Belder
http://www.ptb.be/nieuws/artikel/dix-questions-sur-la-mort-de-kadhafi.html?utm_source=ptb2011-10-21&utm_medium=email&utm_content=html&utm_campaign=portalnewsletter
5 Annexe
5-1 Une nouvelle ère
Rupert Colville a estimé que la mort de Kadhafi « met un terme à huit mois d’extrême violence et de souffrances pour le peuple libyen ».
« Une ère commence en Libye qui devrait répondre aux aspirations du peuple en faveur de la démocratie et des droits de l’homme », a-t-il ajouté.
L’ex-leader, 69 ans, en fuite depuis la chute de Tripoli fin août, a été capturé vivant jeudi dans sa région d’origine, près de la ville de Syrte (360 km à l’est de Tripoli) et a été tué, selon le CNT, par balles peu après, dans des circonstances encore floues.
Il est le premier dirigeant arabe à avoir été tué depuis le début du « Printemps arabe », une succession de soulèvements contestant des régimes autoritaires, en Tunisie, Egypte, Libye, Syrie, au Yémen et à Bahreïn.
Le porte-parole du Haut commissariat a insisté sur l’importance de la « justice transitionnelle » qui doit être mise en place par les nouvelles autorités.
« Un aspect clé pour être en mesure de tirer un trait sur l’héritage de 42 années du règne despotique de Kadhafi et sur le conflit sanglant de cette année serait de s’assurer que justice soit faite », a dit ainsi Rupert Colville.
« Les milliers de victimes ayant subi des pertes de vies humaines, des disparitions, la torture et d’autres graves violations des droits de l’homme depuis le conflit survenu en février 2011 ainsi que celles qui ont souffert des violations des droits de l’homme sous le long régime de Kadhafi ont le droit de connaître la vérité », a-t-il ajouté.
Ces personnes ont « le droit de voir la culture de l’impunité prendre fin et d’obtenir des réparations », a-t-il fait valoir, appelant à ce que les responsables de ces crimes soient jugés.
21-10
(Source AFP)
5-2 Robert Bibeau – Chérif Abdedaïm : Le plan américain de « Grand Moyen-Orient » bat de l’aile.
ROBERT BIBEAU – ET – Chérif Abdedaïm (La NR) ( * )
La NR/ « Révoltes » ou « révolutions » arabes, guerre de Libye, enjeux géopolitiques et géostratégiques et la lancinante question palestinienne ont été les sujets débattus avec Robert Bibeau ( * )
La Nouvelle République/
Un bref regard sur les cas égyptien et tunisien. En Tunisie et en Égypte, l’armée aux ordres des États-uniens a délogé les deux tyrans bien connus et pris le pouvoir directement, ce que certains continuent d’appeler la plus grande « révolution » de tous les temps. Révolution que vous appelez duperie, d’ailleurs. D’une part, pourquoi, et d’autre part, cela signifierait-il qu’elles ont été télécommandées par les États-Unis ? Si oui, à quels desseins ?
Robert Bibeau : Il faut toujours adopter un point de vue évolutif et dialectique lorsqu’on analyse un événement historique. Par exemple, le soulèvement égyptien, pas plus que le soulèvement tunisien, n’ont été le fait d’agents secrets qui auraient voulu renverser l’ordre établi au sein de ces deux dictatures. Des dictateurs se créent de nombreux ennemis, à commencer par leur propre peuple qu’ils pressurent et martyrisent, et de ce fait, les dictateurs s’entourent de moyens de répression important, ce qui les fait d’autant plus détestés de leurs commettants. Puis un jour, face à autant d’injustice que leur politique dictatoriale engendre, une étincelle jaillit et met le feu à toute la plaine. Le processus de soulèvement populaire est toujours aussi mystérieux et imprévisible. Il a eu lieu, ce processus, dans les deux cas qui nous préoccupent. Mais, dès que ce soulèvement a lieu, vous avez aussitôt des milliers, sinon des millions de gens qui embarquent dans le train de la Révolte qui n’est pas encore une Révolution. Rassembler des millions de révoltés pacifiques qui crient à tue-tête sur des centaines de places publiques entre Tunis et Le Caire ne crée pas un mouvement révolutionnaire. Surtout si parmi ces insurgés, ce qui est inévitable, se dissimule des milliers d’agents secrets et de mercenaires à la solde du pouvoir en place. On ne peut parler de soulèvement révolutionnaire que si les insurgés remettent en question le pouvoir d’État et tentent de s’emparer de tout le pouvoir d’État pour fonder un nouvel ordre social. Si les insurgés demandent que le dictateur soit limogé et qu’on leur offre qu’une junte militaire qui les oppriment prennent les rênes du pouvoir et dirigent la nation comme du temps de Moubarak, mais sans Moubarak, alors vous avez changé votre bonnet blanc pour un blanc bonnet, ce n’est pas une révolution.
Robert Bibeau : C’est au cours du mouvement populaire lui-même que Mme Hillary Clinton, secrétaire d’État des États-Unis, ayant bien pris soin de vérifier auprès de ses ambassades au Caire et à Tunis que la situation avait été reprise en main par les armées égyptienne et tunisienne, a soudainement proclamé que le « Printemps arabe » visait à obtenir des élections dites « démocratiques », entendez par là des élections organisées par les riches et les potentats locaux pour faire élire avec beaucoup de moyens financiers un représentant de la classe dominante. Bref, la révolte arabe se résumait, selon elle, à une lutte pour l’obtention d’un coupon de vote avec la mise en concurrence de centaines de partis marginaux, dont aucun n’a de chances de l’emporter, mais qui auront l’immense privilège de pouvoir s’afficher et placarder dans les rues pendant la mascarade électorale. Un ou deux de leurs leaders se retrouveront députés grassement payés. Seul, le candidat des riches avec ses moyens énormes et le soutien des médias bourgeois aura une chance de l’emporter dans ce type d’élections bien connu aux États-Unis, où il y a des élections quasi permanentes et une misère totalement permanente.
Jamais le jeune qui s’est immolé en Tunisie, jamais les manifestants enragés au Caire ou à Alexandrie n’avaient lancé ce slogan pour des élections, sauf quelques partis petits bourgeois dont c’est la spécialité, se vendre à la grande bourgeoisie nationale pour servir de courroie électorale de transmission entre le pouvoir pseudo démocratique et le peuple floué encore une fois. Les révoltés réclamaient des emplois, une baisse des prix des denrées de base, de l’eau, des services sanitaires et éducatifs, des logements, la fin du couvre-feu , de l’état d’urgence et des lois spéciales de répression, l’abaissement des taxes et de la vie chère, un meilleur pouvoir d’achat. Qu’ont-ils obtenu après avoir démantelé leurs barricades place Tahrir ? Rien, absolument aucune de leurs revendications n’a été satisfaite, mais les médias bourgeois à la solde ont répandu la rumeurs que la « Révolution » était victorieuse et que l’Égypte après Moubarak et la Tunisie après Ben Ali ne seraient plus jamais pareilles, qu’ils deviendraient des pays de bonheur où couleraient pour toujours le lait et le miel avec le droit « démocratique » de choisir son dictateur.
Rien n’avait été accompli pour le peuple tunisien et pour le peuple égyptien, rien des demandes et des exigences du peuple, des insoumis, des insurgés floués par les médias bourgeois, la presse internationale, Hillary Clinton et toute la coterie des petits bourgeois occidentaux qui, ces temps-ci, invitent toutes sortes de soi-disant représentants des révoltés venir chanter les louanges de la « révolution » arabe qui n’a rien donné. Les puissances impérialistes occidentales n’ont pas organisé les révoltes de Tunisie ou d’Égypte, mais elles les ont récupérées, et pour ce faire, elles ont laissé tomber leurs thuriféraires Ben Ali et Moubarak. Mais attention, la révolte arabe n’est pas terminée dans ces deux pays, et actuellement, le soulèvement se poursuit, les jeunes ont attaqués l’ambassade israélienne au Caire. En ce moment, les jeunes, les vrais révoltés pas les Twitters et les Internautes à papa, se font tuer et arrêter, bastonner et emprisonner en Égypte et en Tunisie pour défendre leurs vraies revendications et personne n’en parle à la télévision occidentale. Pourquoi ?
La NR/ Passons à la Libye, si vous le permettez. Dans l’un de vos articles, vous disiez que Kadhafi était un « collaborateur compradore des puissances impérialistes venus piller les ressources et le peuple de Libye. Une mésentente survint entre lui et les maîtres du pillage, et entre les pilleurs eux-mêmes (l’Italie en déclin dans son ancienne colonie et la France avide d’étendre sa zone d’influence et de spoliation en Afrique du Nord) ». Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste cette mésentente et pourquoi ?
Robert Bibeau : D’abord, disons que le soi-disant « soulèvement populaire » en Libye n’a rien d’un soulèvement populaire. Depuis quand un soulèvement spontané et populaire d’une population civile ordinaire aligne-t-il des canons anti-blindés et des armes anti-aériennes dès les premières secondes de combat ? Vous avez un canon mitrailleur vous dans votre garage ? En Libye, ce sont les tribus de Cyrénaïque que des forces étrangères ont motivées à se soulever, qu’elles ont armées, infiltrées et soutenues par des mercenaires professionnels payés par les services secrets français notamment, puis par des Jihadistes extradés d’Afghanistan et du Soudan qui ont lancé le mouvement insurrectionnel, auquel se sont joints des bandits de grand chemin, des bandes criminelles et probablement des gens ordinaires emportés par le mouvement. En Libye, c’est clairement une intervention étrangère dirigée par la France qui au début croyait qu’elle viendrait à bout du gouvernement Kadhafi très rapidement (trois jours, disait Sarkozy) avec l’aide des mercenaires, des bandits, des jihadistes et des transfuges de l’armée nationale libyenne.
Depuis que la France a perdu le contrôle du « département d’outre-mer » algérien – rappelez-vous que c’est ainsi que les impérialistes français identifiaient la terre arabe et berbère d’Algérie – ce pays n’a plus de source « nationale » de pétrole. L’Italie, qui a toujours considéré la Libye comme sa néo-colonie, partageait le contrôle de la Libye avec la Grande-Bretagne, puissance de tutelle de l’Égypte et avec les États-Unis. Sarkozy, voyant le piètre état du gouvernement Berlusconi, empêtré dans ses scandales érotiques et une économie en faillite, a jugé le moment favorable pour ravir la tutelle de la Libye à son ami et concurrent. Il a demandé l’aide du Royaume-Uni afin de s’assurer que les mercenaires et autres renégats pourraient infiltrer la Libye en passant par l’Égypte notamment. Sarkozy a poussé l’ignominie jusqu’à exiger, via l’OTAN, que l’Italie, qu’il s’apprêtait à dépouiller de sa néo-colonie, contribue et participe à l’agression en offrant ses bases navales et aériennes à sa coalition de criminels de guerre à laquelle s’est joint le Canada dès le début des opérations. Sarkozy a rapidement compris que l’Algérie n’était pas favorable à cette agression militaire et qu’elle n’aiderait en rien au coup fourré, c’est pourquoi il l’a menacée et il s’est tourné vers l’Égypte collaboratrice et pas du tout révolutionnaire.
On connaît la suite : la capture de la « faible » Libye ne s’est pas faite du tout selon les plans prévus. La résistance du peuple libyen a été bien supérieure à tout ce que les services secrets français avaient prédit, et Sarkozy a dû se résoudre à appeler l’OTAN et surtout le porte-avion Abraham Lincoln et les avions américains à la rescousse afin de sauver la mise. Le porte-avion qui était en mer d’Oman a dû être rapatrié en vitesse pour prêter main-forte aux attaquants. La suite, c’est que Sarkozy et Cameron sont allés parader en toute hâte, comme des voleurs, dans Tripoli ravagée. La résistance n’est absolument pas vaincue ou éteinte et la France est enferrée dans une rasque (bourbier) dont elle n’est pas près de se dégager. Que Kadhafi ait été un méchant personnage ou un collaborateur récalcitrant des puissances impérialistes n’a rien à voir dans cette agression. Qu’on le veuille ou non, Kadhafi était le dirigeant légal de la Libye, et son remplacement ou sa succession était exclusivement l’affaire interne du peuple libyen. Les comploteurs étrangers manipulant l’ONU et lui faisant renier sa propre charte n’étaient aucunement justifiés d’organiser le bombardement et l’invasion de ce pays souverain.
La NR/ D’après-vous, quels sont les objectifs géopolitiques et géostratégiques de cette guerre néo-coloniale en Libye ?
Robert Bibeau : Voilà une question des plus intéressantes. Les agents petits-bourgeois infiltrés dans le mouvement de gauche, adorent les conspirations. Ils lisent les communiqués et les messages secrets des ambassades américaines à travers le monde et y trouvent confirmation à tous leurs fantasmes. Cela leur permet de jouer les grands analystes géostratégiques. Tous ces petits-bourgeois ne font pas confiance à leurs sens et à la lecture de la réalité pour analyser le monde. Leurs seules grilles d’analyse géopolitique mondiale, ce sont les communiqués émis par le Pentagone. Nous y reviendrons lors de votre prochaine question.
Robert Bibeau : Pour l’instant, revenons à la Libye. Les puissances impérialistes sont à la fois en collusion, en partenariat, pour agresser et dépouiller les pays du monde, les néo-colonies d’Asie, d’Amérique latine, d’Afrique bien évidemment et même des ex-pays de l’Est, mais elles sont également en concurrence, ces puissances, afin d’accaparer le plus de richesses possibles pour le bénéfice de leur grande bourgeoisie nationale et transnationale. Pendant ce temps, l’autre loup, leur concurrent, rôde aux alentours, espérant faire main basse sur ces ressources et sur ces marchés quand les hyènes américaines et ouest- européennes se seront épuisées à tenter de se repartager les ressources de ces peuples qui résistent.
La NR/ La Libye faisait partie du lot que Washington avait mis sur la sellette des pays à « contrôler », comme l’avait révélé le général US Wesley Clark en mars 2007. Quelle serait la place de la France et de la Grande-Bretagne dans ce nouvel échiquier ; alors qu’a priori, Sarkozy tente de mener le bal ? Les États-Unis se laisseraient-ils prendre de vitesse ?
Robert Bibeau : Par cette question, j’ai peur que vous ne fassiez frémir de plaisir tous les analystes politiques de haut vol. Noam Chomsky et ses amis adorent ce type de question. Voyez-vous, Washington, le Pentagone s’évertuent à manigancer, à comploter, à élaborer des plans d’agression, des plans de reconfiguration du Grand Moyen-Orient. Et vous noterez que très régulièrement ces plans ultra-secrets sont largement diffusés dans la presse à scandale entre les confessions de Jacqueline Kennedy, la conspiration du 11 septembre, l’assassinat de JF Kennedy, la mort de Lady Di et la résurrection d’Elvis Presley.
Je n’ai que faire de ces plans secrets de contrôle de tel pays et de telle zone géostratégique. Je répète que les puissances impérialistes regroupées dans l’OTAN sont à la fois en collusion et en rivalité pour spolier les ressources naturelles, les ressources énergétiques, la plus- value et les marchés de par le monde. Les États-Unis, première puissance économique et militaire du monde depuis quelques dizaines d’années, sont aujourd’hui en très grande difficulté financière et ne sont déjà plus la première puissance industrielle du monde. Leurs alliés ouest-européens se débattent avec les crises grecque, espagnole, portugaise, irlandaise, italienne, et tous ces gens sont dépendants de l’achat de leurs bons du trésor national par leur concurrent et terrible ennemi chinois. C’est dans ce contexte économique (l’économie servant d’assise à la puissance militaire) que vous devez analyser les événements politiques et militaires dans le monde. Je n’ai aucunement besoin de lire les rapports secrets du Pentagone pour voir que les États-Unis d’Amérique ont été mis en échec partout dans le monde.
Robert Bibeau : En 2006, leur misérable troufion sioniste s’est fait battre par le Hezbollah arabe dans le Sud Liban, l’Irak n’explose pas actuellement simplement parce que l’Iran maintient le couvercle sur la marmite et contrôle effectivement l’Irak, le Pakistan se réaligne en direction de la Chine suite à l’assassinat extra judiciaire de Ben Laden dans une datcha pakistanaise, les américains ont perdu un de leurs alliés fidèles, la Turquie ne cherche même plus à joindre l’Union Européenne et ne décolère pas contre Israël depuis l’attaque du bateau turque pour libérer Gaza, les dernières troupes américaines seront bientôt expulsées d’Afghanistan. Personne ne parvient à contrôler la Somalie ni le Yémen, la Syrie sortira grandie de cette agression étrangère sur son sol, en Égypte et en Tunisie, les vraies révoltes sont en marche, au point que le troufion israélien songe à réoccuper le Sinaï pour éloigner sa frontière des menaces des révoltés égyptiens en colère. En Libye, rien n’est terminé et la France s’installe dans un bourbier qu’elle va regretter. L’Iran poursuit sa politique indépendante soutenue par la Chine et la Russie. L’Algérie et le Maroc se tiennent aussi loin qu’ils le peuvent de toutes ces agitations par peur des contagions qui ne manqueront pas de survenir.
Robert Bibeau : Monsieur, soyons sérieux, où il est le Grand Moyen-Orient réaménagé par les plans secrets de George W. Bush et son digne successeur Barak Obama ?
La NR/ En Libye, nous assistons aux crimes de guerre de l’Otan. Pourquoi les Nations unies, et tous ceux qui ont voté la résolution 1973, ne réagissent-ils pas au détournement de ladite résolution de son « but » initial ? Sommes-nous en train d’assister à une légalisation du crime d’État ?
Robert Bibeau : Le problème n’est pas le « détournement » de la soi-disant Résolution inique. Vous avez totalement raison, la résolution de l’ONU était totalement illégale en vertu de la charte onusienne et illégitime en vertu de la situation sur le terrain libyen, un pays qui subissait une agression menée par des para-militaires étrangers et des royalistes nationaux totalement discrédités. Certains pays qui ont laissé passer cette résolution inique, je songe à la Chine et à la Russie, le regrettent, et c’est ce qui me fait penser qu’ils ne laisseront jamais passer semblable résolution frauduleuse à propos de la Syrie. Mais à plus long terme, ce qu’il faut bien comprendre, c’est que les organisations internationales comme l’ONU ne sont pas des organisations libres et indépendantes. Ce sont des organismes d’accréditation des activités de subversion internationales des puissances impérialistes qui les manipulent et leur font sanctionner tous leurs méfaits ; c’était ainsi dans le passé et il en sera de même dans l’avenir. La crise libyenne n’a pas été un tournant dans ces pratiques néo-coloniales à l’ONU, l’instrument diplomatique des États-Unis.
La NR/ Certains pensent que l’un des objectifs de cette guerre serait « de s’assurer le contrôle de la région et protéger Tel-Aviv, notamment contre les pays hostiles à Israël dont les trois principaux sont l’Iran, la Syrie et la Libye. » D’après-vous, Israël aurait-il une implication dans ces « révoltes » ?
Robert Bibeau : Israël n’est qu’une des puissances impérialistes qui s’activent en terre arabe. L’ensemble de la politique impérialiste ouest-européenne et états-unienne n’est pas déterminée par et pour Israël, contrairement à ce que laissent entendre les courants conspirationnistes et les lobbyistes israéliens. Quand tout allait bien pour les puissances impérialistes occidentales, quand elles dominaient le monde en collaboration avec le social-impérialisme soviétique et maintenant qu’elles le dominent en concurrence avec la Chine, depuis l’effondrement du bloc révisionniste en 1991, l’État sioniste (Israël) avait un rôle particulier à jouer dans cette partie du monde. Israël était la base avancée de l’impérialisme occidental au Levant, la base militaire états-unienne et l’éperon planté dans le flanc du monde arabe. Maintenant que tout va mal pour les puissances occidentales au point où on se questionne aux États-Unis s’ils pourront payer leurs fonctionnaires à chaque mois d’août de chaque année, au point où elles se demandent à Bruxelles si elles n’expulseront pas certains pays de l’alliance européenne contre nature, quand tout va mal au point qu’un groupe paramilitaire comme le Hezbollah a défait par deux fois la quatrième armée « la plus puissante du monde », au point où les États-Unis mettent fin à leur programme spatial et au projet de fabrication de l’avion de chasse F-35 faute d’argent, Israël perd de plus en plus de son importance stratégique et symbolique.
Les américains et les occidentaux peuvent blanchir leur argent mafieux ailleurs qu’en Israël, vous savez. Quand Israël aura perdu toute importance géostratégique, il ne vous restera plus à vous peuples arabes à terminer le travail et à retourner tous ces immigrants ashkénazes là d’où ils viennent en Europe et en Amérique. Non, la guerre en Libye n’a rien à voir avec la faillite du projet sioniste en terre palestinienne. Non, Israël et ses quelques kilomètres carrés n’est pas l’épicentre de la politique universelle intergalactique. Retournez les « conspirationnistes et les lobbyistes » à leur téléréalité.
La NR/ Comment appréhendez-vous l’après-Kadhafi ? Ne va-t-on pas assister à un nouvel Irak avec notamment une division du pays et une guerre fratricide entre différentes tribus ?
Robert Bibeau : La guerre fratricide entre différentes tribus libyennes – initiées et impulsées par quelques puissances occidentales dont la France a déjà eu lieu se poursuit en ce moment. Mais voyez-vous, quand les tribus dissidentes de Cyrénaïque réaliseront qu’elles ont servi de chair à canon et de justification pour saccager leur pays tout entier et que rien des richesses nationales ne leur est retourné, qu’elles ont troqué un exploiteur italien contre un exploiteur français et britannique, alors vous verrez le vent tourner définitivement. Je ne donnerai pas cher de la peau des mercenaires du CNT et des royalistes détestés (qui ont été renversés il y a des années) à ce moment-là. D’ici là, comptez les semaines avant que cela se produise. Et les quelques avions canadiens, français, britanniques et du Qatar renégats ne seront plus d’aucune utilité.
La NR/ Vous êtes de ceux qui ont soutenu l’idée qu’il y aura un État palestinien souverain ? Comment voyez-vous la réalisation d’un tel objectif, nonobstant l’état actuel de la tragédie palestinienne ?
Robert Bibeau : Les individus et les gouvernements qui aiment la Palestine doivent s’opposer farouchement à la résolution de trahison nationale, pilotée par la bande de traîtres de l’Autorité palestinienne à l’ONU. Le peuple palestinien ne résiste pas et ne verse pas son sang depuis soixante-quatre ans (Résolution 181 illégale et illégitime de l’ONU en 1947) pour récupérer 20% de sa terre nationale sans Al Qods et sans retour des réfugiés, sans libération des 11 000 prisonniers politiques, sans démolition du mur de la honte israélien en Cisjordanie, etc. Cette résolution de trahison nationale ne vise qu’à officialiser avec le soi-disant accord palestinien l’arnaque perpétrée en 1947 à l’ONU. Un héros de la résistance arabe disait récemment à Beyrouth, au Liban : « Le peuple palestinien et les peuples arabes n’ont jamais mandaté quiconque pour renoncer à 80% de la terre palestinienne et arabe à Al Qods et au droit de retour de tous les réfugiés palestiniens de la diaspora. ».
Robert Bibeau : Le drame palestinien se résoudra un jour, et à la satisfaction du peuple palestinien. Quand les puissances impérialistes décadentes seront en bouleversement interne complet avec des révolutions populaires sur les bras, la crise économique s’approfondissant sous les coups de boutoir de leurs concurrents de l’alliance de Shanghai (Russie, Iran, Syrie, États de l’ancienne Union soviétique, possiblement l’Inde) sous la gouverne de la nouvelle puissance impérialiste chinoise, la destinée d’une bande de paumés emmurée et encerclée au milieu de plus de quatre cents millions d’Arabes qui en auront assez de leur arrogance et de leurs crimes contre l’humanité, ces misérables réchappés national-socialistes-sionistes vomissant leur racisme sont à la veille de ravaler leur crachat grossier. Noam Chomsky, qui aime bien ces sionistes, les a récemment avertis : à vouloir tout prendre de la terre palestinienne (refus de la résolution Abbas à l’ONU), « vous sionistes risquez de tout perdre ». Comme ces paroles sont prophétiques, monsieur Chomsky !
La NR/ Quels moyens de lutte, d’après vous, pour atteindre un tel but, sachant qu’Israël est soutenu par les puissances occidentales alors que le soutien arabe à cette cause ne se limite qu’à des déclarations, comme on l’a vu dans la plupart des cas ?
Robert Bibeau : Je viens de l’expliquer, et Gilad Atzmon (2), jazzman réputé et anti-sioniste conséquent, l’a bien expliqué dans un texte récent. Le jour où les impérialistes ont cessé d’appuyer les Afrikaners impérialistes s’en fut fait du pouvoir d’apartheid en Afrique du Sud. Dans ce cas, l’impérialisme occidental, alors triomphant, passa le témoin à une bande de collaborateurs fiables, noirs et blancs, sous la gouverne de l’icône de la lutte anti-apartheid, Nelson Mandela. Je ne suis pas assuré que cette fois les impérialistes prendront la peine de trouver une icône anti-apartheid palestinienne crédible et sereine. Je crois plutôt que les centaines de milliers d’Israéliens sionistes riches possédant le double passeport s’enfuiront et abandonneront la chair à canon israélienne, les ashkénazes pauvres et les sépharades pauvres sur le terrain. J’ai absolument confiance que le grand peuple palestinien victorieux traitera avec la plus grande clémence son bourreau d’hier et trouvera avec ceux qui restent un terrain d’entente juste et équitable, comme il en fut pendant des siècles sur cette terre de passage avant l’intrusion du sionisme meurtrier.
La NR/ Pour vous, la première injustice commise à l’encontre des Palestiniens fut le 29 novembre 1947, avec le vote de la résolution 181 pour le partage de la Palestine. Résolution que vous qualifiez d’illégitime. Pourquoi ? Quelle aurait été la procédure à tenir par la SDN face à la situation ?
Robert Bibeau : La Société de nations (SDN) ou l’ONU n’avait aucun droit d’intervenir en Palestine sous mandat britannique. Le territoire de la Palestine, découpage arbitraire conclu entre la France et la Grande-Bretagne au lendemain de la première guerre mondiale, avait été fixé unilatéralement par les puissances impérialistes. Une fois ce découpage réalisé, il appartenait aux peuples résidant sur ces territoires de décider de leurs sorts respectifs à l’occasion de ce grand mouvement de décolonisation amorcé suite à la fin de la Seconde guerre mondiale. Jamais aucun référendum n’a été tenu dans ce territoire sous protectorat britannique, et vous savez pourquoi ?
Parce que à l’évidence, la nation palestinienne en cours de constitution sur ce territoire de la Palestine du mandat Britannique aurait rejeté toute décision inique, injuste, illégitime et illégale de partage de sa terre ancestrale pour en céder une parcelle, si petite soit-elle, à une coterie religieuse venue d’Europe où les occidentaux de diverses origines leur avait fait un bien mauvais sort. L’ONU n’avait pas à réparer un tort contre une minorité religieuse persécutée en Europe en créant un préjudice encore plus grand contre un peuple qui n’avait rien, absolument rien à voir avec ces persécutions religieuses. La question juive est une question de persécution religieuse et en aucun cas une question nationale. Dieu – Yahweh n’est pas un agent immobilier et il n’a jamais garanti l’usufruit d’une terre ou d’une propriété à quelque peuple que ce soit. Les radotages de la Thorah n’ont pas à être considérés par la communauté internationale ou par l’ONU.
La NR/ Vous êtes l’un des rares analystes qui croient que cette demande d’adhésion risque de piéger les Palestiniens eux-mêmes, puisque dans ce cas, ils doivent « renoncer à 80% de la terre de la Palestine de 1947, renoncer à Al Qods (Jérusalem) et renoncer définitivement au droit de retour sur leur terre pour les millions de réfugiés de 1948, 1967 et 1973 ». Vu le rapport de force actuel, dans quelle mesure cela serait-il réalisable ?
Robert Bibeau L’un des grands problèmes de notre temps agité, excité, rapide et frustré, c’est l’égocentrisme, l’égoïsme et le narcissisme. Mêmes les analystes politiques se comportent comme si un événement historique (un conflit entre un peuple autochtone et une communauté religieuse expatriée et exfiltrée) devait se régler du temps de leur vivant. L’histoire de l’humanité n’est pas soumise aux contraintes de notre narcissisme petit-bourgeois. L’histoire arabe au Levant date de siècles et de siècles et le rapport de force actuel entre la quatrième armée du monde défaite dans tous ses conflits depuis l’an 2000 et le peuple palestinien emprisonné, massacré et spolié depuis 1947 n’est qu’un court instant dans l’historicité arabe.
Robert Bibeau : Voyez-vous monsieur, un jour, les forces mauresques ont occupé l’Espagne chrétienne et cette occupation a duré 800 ans avant que le dernier calife de Grenade l’éblouissante ne soit chassé de la terre espagnole qu’il occupait. Qui aurait dit huit cent ans auparavant qu’un jour Ferdinand d’Aragon et Isabelle de Castille expulseraient le dernier sultan mauresque de la terre ibérique, puis que l’Inquisition chasserait ensuite tous les juifs pratiquants de la terre chrétienne d’Espagne ? La Palestine dans dix, quarante ou cent ans redeviendra terre des palestiniens car les palestiniens résistent et ne veulent pas disparaître, et tant que ce peuple ne voudra pas disparaître, il ne disparaîtra pas.
La NR/ Vous êtes de ceux qui soutiennent le boycott comme moyen de pression sur Israël. En France, des activistes de la campagne BDS ont été jugés pour actes antisémites, alors qu’actuellement, on amorce une nouvelle campagne, celle de l’islamophobie. N’assiste-t-on pas à la judaïsation de la société française ?
Robert Bibeau : La judaïsation de la société française est un mythe. Le peuple français est parmi les peuples les plus athées de la terre. Ils ne sont pas du tout en train de se convertir au judaïsme. De plus, le peuple français dans sa grande majorité désapprouve les sévices que les israéliens sionistes font subir aux palestiniens. Mais le peuple français vit sous la dictature des riches qui lui imposent leur politique de soutien à leurs amis impérialistes israéliens avec lesquels ils font du commerce, du blanchiment d’argent, de la recherche sur les armes de destruction massive, armes que les israéliens testent ensuite sur le peuple palestinien (rappelez-vous les bombes au phosphore blanc et les armes à sous munitions avec résidus d’uranium appauvri lors du massacre de Gaza en 2008-2009) etc.
Robert Bibeau : Quand vous demandez, comme vous le faites, si je veux faire pression sur Israël, c’est qu’au départ, vous me coincez dans un dilemme que je refuse absolument. Votre question présuppose que l’État sioniste – la main sanglante de l’impérialisme au Proche-Orient – est incontournable, éternel, imbattable, qu’Israël est là pour rester et dominer et que donc la résistance palestinienne doit implorer les thuriféraires des impérialistes américains de céder un peu de terrain, un peu de droits, que la résistance doit « faire pression » sur la « grande puissance impérialiste » israélienne pour lui arracher quelques concessions. Tout cela est faux. C’est une façon de laisser croire, comme le fait Mahmoud Abbas, que la résistance veut 20% de la terre palestinienne. C’est faux, la vraie résistance arabe veut 100% de la terre palestinienne pour les palestiniens. La puissance impérialiste israélienne doit être totalement éradiquée du Proche-Orient, détruite dans ses fondements comme quelque chose de mauvais dont on ne peut récupérer ne serait-ce qu’une parcelle.
Aucun compromis n’est possible avec cette puissance impérialiste ; tant qu’elle survivra, elle fera ce pourquoi elle a été créée, c’est-à-dire occupée, spoliée, tuée, dominée, exploitée. La contradiction fondamentale entre le peuple palestinien et le sionisme, qui est l’idéologie de l’impérialisme israélien, est de nature antagoniste. Ou bien la nation palestinienne opprimée disparaît ou l’impérialisme et l’État impérialiste israélien disparaissent. Les deux entités ne peuvent survivre sur le même sol national palestinien.
Robert Bibeau : Alors, non, je ne soutiens pas le boycott comme moyen de pression sur Israël, pas du tout. On ne peut faire « pression » sur un État pour qu’il se fasse hara-kiri et disparaisse. Je soutiens le boycott strictement comme moyen d’interpeller et de sensibiliser la population des pays occidentaux sur l’agression sioniste contre le peuple palestinien, sur la cause palestinienne, sur les souffrances et la résistance du peuple palestinien, etc. Le BDS est une vaste campagne de propagande pour la juste cause palestinienne. Voyez-vous, chaque fois que nous tenons une ligne de piquetage pour le Boycott – BDS, nous devons apporter de l’information, des tracts pour dire aux gens ce que nous faisons là. Chaque fois que l’on présente une résolution pour qu’une assemblée syndicale adopte une mesure de rétorsion ou de boycott ou de retrait des investissements, nous devons expliquer, justifier notre proposition et de la sorte, nous sensibilisons notre auditoire à cette injustice qu’est l’accaparement de la terre palestinienne par des religieux hystériques à la solde d’impérialistes véreux et mafieux, rien de plus. Le peuple palestinien ne sera jamais libéré par le boycott et par le BDS. À la fin, s’il est payant pour les grands et les petits capitalistes d’investir dans l’entité israélienne, l’intérêt capitaliste prévaudra si bien que vous aurez rapidement atteint la limite de l’efficacité de ce mouvement BDS.
D’ailleurs, le peuple d’Afrique du Sud n’a pas été libéré par le boycott, c’est la petite bourgeoisie opportuniste et réformiste qui fait circuler ce mythe. L’impérialisme international comprenant sa branche canadienne avec Brian Mulroney, ex-Premier ministre réactionnaire, est arrivé à la conclusion un certain jour qu’il était préférable de démanteler la colonie de peuplement traditionnelle du Cap et de donner à la bourgeoisie noire locale le rôle de jouer, comme dans toutes les autres néo-colonies d’Afrique, au portefaix de l’impérialisme auprès du prolétariat national sur africain. La chose a été plus longue et plus pénible en Afrique du Sud qu’ailleurs en Afrique, à cause de l’importante minorité blanche raciste, voilà tout.
Robert Bibeau : La contradiction qui persiste au sein du camp impérialiste en ce moment à propos de la question palestinienne est celle entre une faction (l’Europe occidentale par exemple) qui pense qu’il est temps d’accorder un bantoustan au peuple palestinien et de laisser la bourgeoisie compradore palestinienne (l’Autorité palestinienne sans autorité et l’OLP) jouer son rôle fantoche d’entremetteur local pour la gestion et l’exploitation du prolétariat palestinien. L’autre faction plus intransigeante (sioniste israélien et USA) pense que ce temps n’est pas encore venu et que d’autres spoliations sont encore possibles, une faction sioniste complètement hystérique pense même que le génocide total du peuple palestinien est envisageable et réalisable, ce qui résoudrait définitivement la question palestinienne, ne pensez-vous pas ? Voyez-vous, la plupart des groupes occidentaux de « soutien au peuple palestinien » voudraient enfermer leurs adhérents dans ce dilemme : « Quelle faction impérialiste supportez-vous ? » les « conciliants gentils » qui veulent en finir et redonner « rapidement » 20% de leurs terres aux palestiniens (ceux-là ne comprennent pas qu’Israël refuse ce deal plus qu’avantageux pour lui), ou la faction « négociatrice » des supporteurs du peuple palestinien qui envisage une négociation éventuelle pour rétrocéder quelque chose comme 10 ou 12% des terres palestiniennes à leurs ayant droits. Les deux groupes sont des suppôts de la théorie de faire « pression » sur Israël. Je ne fais partie ni de l’une ni de l’autre de ces factions de « soutien au peuple palestinien ».
J’ai écouté le peuple palestinien et les peuples arabes, et ce qu’ils veulent, c’est toute la terre spoliée, tout l’espace colonisé depuis 1947, avant la résolution de l’ONU. Alors, en bon militant d’une organisation de soutien, j’adhère aux revendications du peuple que je soutiens. Je ne me donne pas le droit de dicter au peuple palestinien ce que doit être sa lutte et ce qui lui revient de droit ou non, ou s’il devrait s’imposer des restrictions dans ses revendications. Ils ont droit à toute la terre et ils veulent toute la terre. Je veux toute la terre palestinienne pour les Palestiniens. Comme les choses sont simples quand on ne s’évertue pas à les rendre compliquées (4).
____________________________________________________________________
( * ) Entretien réalisé par Chérif Abdedaïm. Copie PDF du numéro de La Nouvelle République (Pp. 11, 12, 13) http://www.lnr-dz.com/pdf/journal/journal_du_2011-10-12/lnr.pdf et
L’article en ligne sur La Nouvelle République (Alger) http://www.lnr-dz.com/index.php?page=details&id=5694
( * ) Robert Bibeau Un expert canadien en politique internationale ayant occupé plusieurs responsabilités : enseignant en histoire, géographie et économie, coordonnateur membre de la web-éducation en matière de programme informatique éducatif avec différents ministères, membre d’une douzaine de jurys nationaux et internationaux dans le secteur du multimédia, auteur et conférencier recherché, journaliste QUI PUBLIE SUR une dizaine de magazines Web.
(1) http://www.centpapiers.com/chomsky-parle-de-%e2%80%9coccupy-wall-street%e2%80%9d-et-de-l%e2%80%99effondrement-imminent-d%e2%80%99israel/83418
(2) http://www.centpapiers.com/la-rasque-francaise-en-libye/83440 et http://www.oulala.net/Portail/spip.php?article5320
(3) http://www.gilad.co.uk/writings/gilad-atzmon-obama-the-palestinian-state-zionist-schizophren.html
(4)http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=24891 aussi http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/il-y-aura-un-jour-un-etat-101530
http://www.agoravox.fr:80/tribune-libre/article/le-plan-americain-de-grand-moyen-102706
ROBERT BIBEAU
Chérif Abdedaïm