Par Alexandre Lemoine (revue de presse : Observateur continental – 27/0/22)*
Le chancelier allemand Olaf Scholz accompagné par une grande délégation de représentants d’affaires s’est rendu au Qatar, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis (EAU). L’objectif annoncé de cette tournée consistait à passer des accords sur la coopération énergétique. Un tel accord a été conclu avec les EAU sur la livraison de gaz naturel liquéfié (GNL) et de gasoil à l’Allemagne.
L’intérêt de M. Scholz pour le tiers monde mérite attention, même si en principe ce thème au sein du gouvernement relève du ministre de la Coopération économique. En mai, le chancelier s’est rendu au Sénégal, au Niger et en Afrique du Sud pour s’entretenir sur la coopération économique, la lutte contre la pandémie, les changements climatiques et la lutte contre le terrorisme islamique. Mais il a également parlé de la situation en Ukraine et de l’influence de la Russie sur les prix des hydrocarbures et des vivres. Ce n’est pas un secret que M. Scholz a tenté d’inciter les pays africains à adopter une position antirusse, mais sans succès.
Il serait utile de rappeler que le ministre fédéral de l’Économie et de la Protection du climat Robert Habeck s’est rendu en mars au Qatar pour acheter du GNL, mais il est revenu les mains vides, car il n’avait pas accepté de signer des contrats à long terme qui sont désavantageux aujourd’hui à cause des prix élevés. Ainsi, Olaf Scholz a décidé de « refaire un passage ». Et ce fut un succès aux EAU. D’après le site allemand rnd, dans les mois à venir l’Allemagne recevra du gaz et du gasoil en provenance des EAU. Il est question de 137.000 mètres cubes de GNL qui sera acheminé à Hambourg cette année déjà. Le groupe allemand RWE a signé un contrat prévoyant également des livraisons en 2023. Alors que le groupe de transport Hoyer devrait signer avec les EAU un accord sur une livraison immédiate, en septembre, de 23.000 tonnes de gasoil. Après quoi, l’Allemagne recevra 250.000 tonnes de ce carburant tous les mois.
On ignore encore si les négociations avec le Qatar et l’Arabie saoudite se sont soldées par des contrats aussi impressionnants.
Mais cette fois, c’est un autre combustible qui était au centre de l’attention, l’hydrogène, que l’Allemagne considère comme le « combustible du futur ». Et elle espère en recevoir des pays arabes, car l’abondance du soleil permettra de produire de l’hydrogène écologiquement pur directement par décomposition de l’eau. Or l’Arabie saoudite comptait précisément construire un grand nombre de panneaux solaires, notamment dans le but d’obtenir de l’électricité pour décomposer l’eau de mer.
En revanche, la presse allemande ne parle pas volontiers de la présence de représentants de groupes militaires au sein de la délégation. Car ce que les Allemands peuvent proposer aujourd’hui aux pays en développement, ce sont avant tout des armes de qualité. L’Arabie saoudite a été certainement intéressée par la possibilité de recevoir de nouveau des armes dont elle a été privée à cause de la participation à la guerre contre le Yémen et du meurtre du journaliste Jamal Khashoggi en 2018. Sachant que c’est le prince héritier Mohammed ben Salmane qui était accusé d’avoir commandité cet assassinat. La rencontre d’Olaf Scholz avec le prince héritier saoudien est censée montrer au monde entier qu’il en est fini avec les querelles.
La presse allemande perçoit la rencontre du chancelier avec le prince héritier précisément comme un signe de réconciliation, ce qui devrait rétablir la coopération interrompue. C’est la visite en Arabie saoudite qui doit être considérée comme le plus important succès d’Olaf Scholz.
*Source : Observateur continental