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3 décembre 2024

Libye / La contestation monte contre « le gouvernement non démocratique » du CNT


 

 Mercredi 4 janvier 2012 18h17

La contestation monte contre le « gouvernement non démocratique » du CNT
Manifestation anti-CNT sur la place de l’arbre à Benghazi.
   LIBYE03/01/2012 

Depuis la mi-décembre, des manifestations contre le Conseil national de transition (CNT) s’organisent un peu partout en Libye, notamment à Benghazi, la première ville à s’être révoltée contre l’ancien régime. Après l’enthousiasme des premiers mois, les Libyens attendent notamment du nouveau pouvoir qu’il soit plus transparent et qu’il dissolve les milices armées nées de la révolution.

Le CNT a été créé le 27 février 2011, pendant l’insurrection contre le régime du colonel Kadhafi, et a été officiellement reconnu par la France le 10 mars puis par le reste de la communauté internationale.

« Nous avons été très patients mais aujourd’hui, nous n’avons plus aucune raison de nous taire »

  Naima B. vit à Benghazi et a participé aux manifestations contre le CNT.
 Depuis le 12 décembre, tous les jours, des gens se réunissent sur la place de l’arbre. Il y a parmi eux des activistes de la société civile, mais également d’anciens combattants de la révolution ou de simples citoyens. Il y a plus de monde en fin de journée, quand les gens quittent leur  travail.
Ces manifestations sont particulièrement importantes à Benghazi, qui a été le berceau de la révolution libyenne, mais elles n’ont rien de régional. Nous défendons les droits de tous les Libyens sans exception. Il y a des manifestations aussi à Misrata ou à Zaouia.
Nous demandons avant toute chose la formation d’une armée libyenne pour assurer notre sécurité. Il est inadmissible qu’un pays souverain n’ait que des milices. Il faut que les combattants choisissent : soit ils adhèrent à une armée régulière soit ils déposent les armes. Il y a encore trop d’armes en circulation dans le pays. [Le CNT a annoncé le 25 décembre qu’un registre des combattants allait être créé dans la perspective de leur intégration au sein des forces de sécurité ndlr]
« Nous ne connaissons même pas tous les membres du Conseil »
Nous reprochons également au CNT un manque de transparence. Ses réunions se font à huis clos et nous ne sommes informés que du résultat, jamais du processus de décision. Ce n’est pas démocratique ! D’ailleurs, nous ne connaissons même pas tous les membres du Conseil, seulement les fondateurs. Pendant le conflit armé, les leaders du CNT disaient ne pas vouloir révéler les noms de leurs membres pour préserver leur sécurité. Mais pourquoi les cacher aujourd’hui ? [Le président du CNT Mustapha Abdeljalil s’est rendu à Benghazi le 26 décembre en compagnie du Premier ministre libyen et a promis qu’un site internet sera bientôt en ligne avec les noms de tous les membres du CNT ainsi que leurs CV ndlr]
Nous ne sommes pas satisfaits non plus de la justice : les autorités procèdent à des arrestations arbitraires, même parmi d’anciens rebelles. Des gens sont emprisonnés et n’ont pas droit à un procès. Il pourrait s’agir parfois de règlements de compte personnels. Pendant ce temps-là, d’anciens responsables du régime continuent vive dans l’impunité . Nous appelons à une justice équitable pour tous.
La gestion de l’argent public pose aussi problème. En avril dernier, Mustapha Abdeljalil, le président du CNT, a déclaré qu’il y avait eu des magouilles et des détournements d’argent de la part de certains nouveaux responsables. Mais depuis, c’est le silence radio. Nous ne savons pas qui sont les personnes impliquées dans ces affaires, ni où est passé l’argent. Pendant ce temps, nous autres citoyens sommes obligés de faire la queue devant les banques pour retirer nos salaires, car les distributeurs sont vides.
Il y a enfin la question des morts et des blessés de la révolution. Le gouvernement n’a toujours rien fait pour identifier les corps enterrés dans des fosses communes. Les familles des disparus ne savent donc toujours pas ce qu’il est advenu de leurs enfants. Il y a pourtant un ministère dédié aux martyrs de la révolution. [Contacté par FRANCE 24, le représentant du Conseil local de transition de Misrata, Ibrahim Beit Almal, a reconnu que les familles des martyrs n’étaient pas suffisamment prises en charge par le CNT.]
Mais les blessés sont très mal pris en charge. Les cas les plus graves ont été envoyés à l’étranger, notamment en Tunisie. Mais le personnel des ambassades libyennes à l’étranger n’a pas changé avec le départ de Kadhafi et rien n’est fait pour prendre en charge ces patients et payer les frais d’hospitalisation. [Contacté par FRANCE 24, le représentant du Conseil local de transition de Misrata, Ibrahim Beit Almal, a rétorqué que les blessés étaient correctement pris en charge par les ambassades. Il a toutefois reconnu que les moyens manquaient, à cause des fonds de l’ancien régime gelé à l’étranger pour soigner correctement les blessés restés en Libye.]
« Nous demandons aujourd’hui la dissolution du CNT »
Le président du CNT et le Premier ministre sont certes venus à Benghazi le 26 décembre, mais ils ne se sont pas rendus sur la place de l’arbre. Ils n’ont rencontré que quelques contestataires qu’ils avaient eux-mêmes choisis. Nous ne croyons donc pas à leurs promesses. S’ils veulent réellement discuter avec nous, qu’ils viennent nous voir là où nous manifestons. Nous avons été patients avec eux tant que le pays était en guerre.
Aujourd’hui, nous n’avons plus aucune raison de nous taire. Notre position est devenue plus radicale : nous demandons aujourd’hui la dissolution du CNT et la création d’un nouveau Conseil capable de répondre à nos revendications. 
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