Les Russes, des Russes par Ahmed Halfaoui
5 mars 2012
http://www.lesdebats.com/editions/050312/les%20debats.htm
Les Russes, des Russes
Un journaliste du Nouvel Observateur qui écrit de Moscou nous «informe» que «les Russes semblent déjà frustrés par l’élection annoncée de Poutine». Inutile de se demander comment on peut voter pour quelqu’un et être frustré qu’il soit élu. Le sujet n’est pas là. «Les Russes» avec un pronom défini, c’est-à-dire «tous les Russes» pourrait-on être tenté de croire, ce qui est voulu. C’est ce que, d’ailleurs, vont croire une bonne partie des lecteurs qui lisent en diagonale et qui n’ont aucune raison de ne pas croire ce qu’ils lisent. Dans l’article, il nous raconte que «dans le train 109, qui relie la ville de Novy Ourengoï, située juste sous le cercle arctique, à Moscou, les passagers ne cachent pas leurs nombreuses frustrations, indiquant que son nouveau mandat ne sera pas facile». Ce ne sont déjà pas tous les Russes mais uniquement les passagers d’un train et, encore, ils ne disent pas exactement ce que suggère la manchette du papier. Plus loin on peut lire ceci : «Même si le ressentiment envers M. Poutine n’est pas unanime, les passagers du train, de la 1re à la 3e classes, sont loin d’adhérer aux images de propagande qui le présentent comme le seul dirigeant que les Russes peuvent aimer et admirer».En dehors du fait qu’il rapporte que ce ne sont pas tous les Russes qui sont frustrés, le reporter a l’air d’avoir vraiment fait son travail, puisqu’il suggère avoir parcouru le train et interviewé les gens, du plus riche au plus pauvre, dans la pitoyable gymnastique de ce journalisme, en vogue, embarqué (Embedded) dans la machine propagandiste atlantiste. Une tentative maladroite qui tente de remettre en cause la popularité de celui qui va déranger bien des plans. Toujours dans les médias, il y a ces deux journalistes qui, revenus du quartier de Baba Amr (Homs), déclarent : «On avait vraiment l’impression que nous étions directement visés», dans une volonté désespérée de diaboliser une armée régulière en butte à une insurrection qui ne lui fait pas de cadeau (plus de 2 000 soldats tués). Le narcissisme en prime, qui les fait «directement viser» dans des combats de rue où ils auraient été le centre du monde.
Le but est patent, qui est d’imposer un type de regard aux opinions publiques, qui leur fera accepter toutes les options concoctées au profit de l’entreprise de réduction de toutes les résistances aux forces de l’argent et tous leurs crimes. Comme l’assassinat de Mouammar Kadhafi dont «la Commission (d’enquête de l’ONU) est dans l’incapacité de confirmer que… c’est un assassinat illégal et réclame un complément d’enquête». D’autres journalistes, deux Britanniques, le reporter Nicholas Davies et le cameraman Gareth Mongomery-Johnson, sont faits prisonniers par une bande armée à Tripoli.
Vous pourrez toujours aller chercher dans la presse une seule ligne qui informe du fait. Pourtant un communiqué de Human Right Watch (HRW) a été diffusé par l’Agence France Presse (AFP) qui a, quand même, obligé le Foreign Office d’en parler, en s’en tenant au strict minimum et en disant qu’ils bénéficiaient d’une assistance consulaire. Nicholas Davies et Gareth Mongomery-Johnson ne font pas partie du comité de rédaction international unifié.