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25 avril 2024

De la stratégie de l’entrisme à l’action militaire



13 octobre 2012

Contribution : QATAR
De la stratégie de l’entrisme à l’action militaire
Par Ali El Hadj Tahar
Caractérisée par la vassalité aux grandes puissances, par le prosélytisme wahhabite, par les investissements financiers massifs en Europe et aux Etats-Unis ainsi que par les médiations régionales, la politique étrangère du Qatar compte aussi sur l’influence médiatique d’Al Jazeera, le fer de lance contre ses cibles.Al Jazeera n’est pas un outil de communication, mais un instrument de propagande orienté par la CIA et le Mossad et dirigé par un émir sorti de Docteur Folamour de Stanley Kubrick ou de 1984 de George Orwell.

Le Qatar se faufile entre les grands et se crée une place de «conciliateur modéré» qui l’autorise à s’asseoir à la même table que les Etats-Unis, Israël, l’Iran, l’OLP, le Hamas palestinien et le Hezbollah libanais. Enfin plus maintenant, car il a grillé ses cartes en Libye et en Syrie, se rendant également suspect chez Mahmoud Abbas, Hassan Nasrallah et Ahmadinejad. En tout cas, la politique étrangère qatarie qui monte les marches quatre par quatre contraste fort avec la diplomatie algérienne d’un pas en avant deux pas en arrière. Le jour de l’aïd, en août 2012, le président Bouteflika disait refuser l’ingérence dans les affaires des autres peuples, entendant par-là celles du peuple syrien, mais il ne va pas à Téhéran au sommet des Non-Alignés pour clamer ce point de vue ni pour parler de la Palestine ou du Mali.

Le Qatar a fait le plein de révolutions durant les «printemps arabes». Il a même fait sa première guerre à l’étranger, sur le front libyen, en fournissant 8 avions à l’OTAN et 5 000 hommes aux rebelles du CNT ! Pour l’Occident, la fréquentation du Qatar fait moins flagrant qu’une Arabie Saoudite qui n’a même pas le Smig en matière de droits de l’homme et où les femmes ne peuvent pas conduire un véhicule. Pourtant, le Qatar n’est pas moins une dictature. Polygame, chef d’un système ne tolérant pas la mixité, son émir est devenu fréquentable bien que cheikh Abdellah Ben Khaled Al-Thani — qui accueillait les terroristes d’Al-Qaïda dans sa ferme quelques années plus tôt — soit toujours ministre de l’Intérieur. Pourtant, ce même Hamad qui a activement participé au renversement de Kadhafi n’a pas été invité par l’ancien président français à la célébration de la chute de Tripoli. Un Sarkozy en précampagne électorale avec comme slogan le terrorisme et les bougnouls, lui a préféré la compagnie du Premier ministre anglais, David Cameron, et celle de l’écrivain-soldat, Bernard Henry-Levy !
Marine Le Pen ne cessant d’insulter Sarkozy pour son amitié avec cet émir décadent, il ne pouvait tout de même pas se le coltiner dans la ville conquise de Tripoli ! Non seulement Sarkozy lui vole donc la vedette en Libye, mais il amène avec lui un Anglais et un sioniste notoire. Cheikh Hamad se rendra alors en visite officielle aux Etats-Unis en avril 2011 où il sera remercié par Obama pour le rôle qu’il a joué dans les «révolutions arabes». Mais n’oubliant pas sa douce France, cet émir fair-play et bon parieur décide alors de soutenir à la fois Hollande et… Sarkozy durant leurs campagnes électorales ! Si l’un perd, l’autre gagne, comme au turf. Ce n’est pas pour rien que l’écurie du Cheikh possède un pur-sang champion du monde !Amis parachutés devenus indocilesLes Maghrébins, quant à eux, ne sont pas aussi dociles que le croyait le faiseur de «printemps arabes», ce Qatar qui croit que les «révolutions» qu’il a concoctées pour eux à coups de «Dégages !» sont éternelles et aussi rentables qu’une poignée d’actions de son fonds souverain dans un hôtel parisien ou un cheval à Longchamp. Malgré la victoire aux législatives du parti Ennhada, la venue à Tunis de Cheikh Hamad à l’occasion du premier anniversaire de la chute de Benali a été annulée à cause des protestations médiatiques et citoyennes. En outre, on a vu comment, le 24 mars 2012, l’équipe d’Al Jazeera a été huée par 15 000 hommes lors d’un rassemblement progressiste et républicain à Monastir. «Ni Qatar ni Al Jazeera, le peuple tunisien est libre», scandait la foule.

Le Qatar a-t-il trouvé en l’Égypte un autre os qui ne veut pas se laisser avaler ? Morsi dit vouloir créer «un équilibre stratégique régional», mais qui lui a fourni l’idée très sophistiquée de se débarrasser du maréchal Tantaoui et de l’armée après le coup monté de l’assassinat de 16 gardes-frontières au Sinaï ? Libéré de l’armée, unique rempart contre les dérives totalitaires, il fermera 31 des tunnels reliant le Sinaï à Gaza quand Moubarak en fermait à peine un par an… Le Caire adopte un même double langage que Doha. Quand le ministère égyptien de l’Intérieur disait que les éventuels candidats au «djihad» en Syrie auraient affaire à la loi antiterroriste, Morsi attaquait Damas lors du sommet des Non-Alignés à Téhéran, montrant qu’il est d’abord un islamiste avant d’être un président supposé incarner la sagesse et la pondération. Décidément, le virus de l’ingérence est très contagieux ! Ce n’est pas ainsi que l’Égypte pourra reconquérir la place dans le concert arabe qui lui a été subtilisée par Ryadh et Doha.
A moins que les deux milliards de dollars octroyés par Hamad au Caire aient fait tourner des girouettes et que Morsi compte «développer» son pays uniquement avec le vent qatari, l’aumône américaine et les promesses de prêt du FMI ! On ne peut pas enterrer la vieille haine libyenne pour les monarchies uniquement pour avoir soutenu des rebelles anti-kadhafistes. Une révolution c’est plus profond qu’un simple changement de régime et cela, les peuples de Libye, d’Égypte et de Tunisie sont en train de l’apprendre à leurs dépens tout en tirant des leçons pour l’avenir. En votant pour le parti de Mahmoud Jibril, les Libyens ont cru dire «non» aux islamistes mais l’ex-ministre du Plan de Kadhafi est lui aussi un vieil ami de Hamad, qui l’a sorti au bon moment de son chapeau de magicien. Nous parlerons plus en détail de Jibril, cette excroissance d’Al Jazeera, dans un prochain article.
Après la prise du pouvoir par le CNT, le Qatar s’est cru dans sa propre maison, irritant au plus haut point les nouvelles autorités, notamment le représentant de la Libye auprès de l’ONU, Mohamed Abdel Rahman Shalgam, et le président du conseil américano-libyen, Fadil Al-Amine, qui a dit que son pays avait «annulé toutes les autorisations octroyées à Qatar pour assurer la vente de son pétrole».
Au pompage illicite de pétrole, il y avait aussi de l’intelligence pure et simple : le général qatari, Al-Attiyah, qui avait dirigé les opérations anti-Kadhafi, a continué de rendre visite à ses protégés islamistes (les katibas d’Ismaïl Al-Salabi et d’Abdelhakim Belhadj) pour renforcer leur influence. Dans les colonnes du journal algérien Al Khabar, ce même Mohamed Abdel Rahman Shalgam a affirmé, accusateur, que l’opération de collecte d’armes en Libye était une «supercherie», car «le groupe chargé de cette opération sous supervision qatarie, va collecter des armes et les redistribuer à d’autres». Même Mahmoud Jibril avait déclaré en 2011 que les pétrodollars qataris alimentaient «les rivalités et les circuits de désaccords entre les rebelles et les divers courants qui gèrent la période post-Kadhafi, et ce, en répandant la sédition entre les frères libyens».Libye, Mali et 10 000 missiles perdusDurant l’offensive de l’OTAN, l’armée qatarie a participé à la désignation des unités qui ont reçu les missiles antichars qataris, soit neuf cargaisons. Une partie des armes fournies aux groupes islamistes libyens a ensuite disparu, en plus de «10 000 missiles sol-air» qui se sont volatilisés, selon le Spiegel qui cite l’amiral Giampaolo Di Paola, président du Comité militaire qui regroupe les chefs d’état-major des pays de l’Otan(1).

On donne des armes à des terroristes d’Al-Qaïda notoirement connus, puis on s’étonne qu’ils disparaissent dans la nature. Une dotation camouflée en perte sous le sigle des «printemps arabes» par le canal qatari afin que cela fasse bourde ! C’est la énième affaire d’armes disparues depuis l’affaire des Stinger offerts aux talibans quand ils étaient alliés contre Moscou et que les Américains ont fait semblant de vouloir récupérer avant de faire oublier l’affaire révélée par la presse. Apparemment, l’OTAN c’est Alzheimer ! Il y en a eu des missiles et des armes de perdus depuis la Bosnie, la Tchétchénie, l’Irak, et maintenant la Syrie et le Mali où Al-Qaïda et d’autres islamistes de service en reçoivent par bateaux et avions entiers ! Finis les temps où les AIS et autres MIA se battaient à coups de mahchoucha et de haches. Pour en découdre avec Kadhafi, autant de missiles pouvaient disparaître si nécessaire ! Pour déboulonner El-Assad, dernier raïs arabe, autant de missiles peuvent disparaître, ce qui montre que le terrorisme n’est pas près de s’achever au vu des arsenaux fournis par Doha et Ryadh avec la bénédiction de l’Oncle Sam. Le Times du 14 septembre 2012 écrit qu’un bateau libyen a amené une cargaison de 400 tonnes d’armements vers la Turquie à destination de l’Armée syrienne libre, dont des missiles anti-aériens Sam 7.
Le journal anglais précise que le bateau libyen Liberté du commandant Omar Mousaeeb a mouillé au port turc Iskenderun avec l’autorisation de déchargement des autorités portuaires. Tout le monde sait que l’ASL c’est Al-Qaïda mais peu importe pour détruire la Syrie et, si possible, dégommer le dernier bastion de la résistance arabe face à Israël, le seul pays arabe ayant une séparation des champs religieux et politique et dont l’économie est autosuffisante dans le domaine de l’agriculture, du textile et de la confection et dont l’industrie pharmaceutique exporte vers une trentaine de pays.
Autant d’armes peuvent s’égarer pour détruire cette Syrie qui a accueilli 500 000 Palestiniens, un million de Libanais durant les années 1980 et 1990, et 1,5 million d’Irakiens, et qui a surtout libéré le Liban des griffes israéliennes. Une partie des armes «perdues» se trouve chez les groupes terroristes qui occupent le nord du Mali et qui se renforcent de jour en jour face à l’impunité. Mokhtar Belmokhtar, l’un des chefs d’Aqmi, a d’ailleurs affirmé en avoir «tout naturellement» récupéré une partie. Selon une source de la Direction du renseignement militaire français (DRM), citée par le Canard Enchaîné, le Qatar financerait les groupes islamistes qui sévissent au Mali.
Après la publication de l’information du Canard Enchaîné en mars et en juin derniers, et probablement après une mise en garde algérienne lors de la venue du ministre de la Défense qatari à Alger, Doha veut détourner l’attention en annonçant, le 2 août 2012, que le Croissant-Rouge qatari (CRQ) avait signé un accord avec son homologue malien pour acheminer ensemble une aide humanitaire d’une valeur de 1,35 million d’euros vers la région occupée. Il est donc nécessaire de rappeler que lors de l’invasion de la Libye, le Qatar a acheminé des armes aux islamistes anti-Kadhafi dans des caisses de son Croissant rouge, comme le montre une vidéo sur YouTube et Dailymotion !(2) Le Qatar ne s’est jamais soucié de la famine en Somalie, en Ethiopie ou dans les autres pays du Sahel et qui se découvre des vertus humanitaires après avoir été pris en flagrant délit de soutien de terroristes islamistes !
A. E. T.
(A suivre)1.http://tunisie-secret.overblog.com/a…104632146.html
2.http://www.dailymotion.com/video/xjl…iles-grad_news
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