L’Egypte tremble, un nouveau Pharaon émerge
29 novembre 2012
Alterinfo
L’Egypte est ébranlée. Ce pays est déchiré. La gauche est devenue la droite. Les Frères Musulmans, qui ont pris fait et cause pour les opprimés, sont devenus l’Establishment. Et une nouvelle gauche est apparue, comprenant, paradoxalement, les libéraux, les centristes, les laïcs et les gauchistes de style occidental – en fait, tous les autres sauf les Islamistes.
Le problème est apparemment la passe autoritaire qui marquerait le dernier décret de Mohamed Morsi, lui conférant l’immunité contre la cour constitutionnelle, alors que l’Egypte s’apprête à s’embarquer dans la phase capitale de l’adoption d’une nouvelle constitution. La grande crainte est que les islamistes forcent la majorité silencieuse à renter dans le rang.
Ce danger existe vraiment. Même un libéral comme Mohamed el Baradei s’est exprimé pour dire que Morsi était un « nouveau Pharaon ». Mais Morsi ne montre aucun remords. C’est un vieux renard, qui a débordé les militaires et les vestiges de l’ère Moubarak par sa dernière performance sur Gaza, démontrant à Washington qu’il peut servir les intérêts occidentaux dans la région plus efficacement et de façon plus crédible que n’importe qui d’autre en Egypte.
Le conflit de Gaza a été transformé par Morsi en jeu d’échecs politico-diplomatique de première classe. Il a accouché d’un accord qui soulage les Etats-Unis et Israël. Mais tandis que le fer est encore chaud, il a également frappé pour consolider son emprise sur le pouvoir en émettant ce décret fatidique, calculant qu’il n’a désormais rien à craindre des militaires et des institutions de sécurité pro-américains.
Pour l’administration de Barack Obama, Morsi est devenu un cadeau de Dieu : il est un dirigeant légitime, démocratiquement élu, qui est prêt à favoriser l’agenda des Etats-Unis. Et, pour couronner le tout, il est aussi un islamiste. L’exemple de Morsi, en tant que collaborateur secret, encourage Washington à pousser les Frères à prendre également le pouvoir en Syrie – ainsi qu’en Jordanie, Inch Allah !
Morsi a vraiment excellé. Il a même conclu avec le FMI un ensemble de mesures de sauvetage de 4,2 milliards de dollars pour l’économie égyptienne – avec les compliments d’Obama, bien sûr ! En outre, il a dans sa cagnotte 2 milliards de dollars de la part du Qatar et de la Turquie, chacun. Seuls les Saoudiens gardent une distance prudente.
Mais pour s’affermir, Morsi doit d’abord se défaire du défi bruyant que pose la Nouvelle Gauche. Comment il y parviendra reste à voir ! Aura-t-il du sang sur les mains lorsque tout cela sera fini ?