Tunisie : les heurts reprennent à Siliana, la crise menace de s’étendre
1 décembre 2012
Tunisie : les heurts reprennent à Siliana, la crise menace de s’étendre
samedi 1er décembre 2012, par La Rédaction
Des heurts ont éclaté samedi pour le cinquième jour consécutif à Siliana, épicentre de la colère des Tunisiens face aux espoirs déçus deux ans après la première révolution arabe, et la crise menaçait de s’étendre, des violences ayant été signalées dans d’autres régions. Comme les deux jours précédents, une centaine de jeunes ont attaqué les policiers à Siliana, 120 kilomètres au sud-ouest de Tunis, à coups de pierres, et un agent a été blessé à la tête, selon une journaliste.
Les forces de l’ordre ont répliqué avec de grandes quantités de gaz lacrymogène, et les protestataires bâtissaient de nouveau des barricades de pneus et de branches enflammées. Selon des témoins, à une vingtaine de kilomètres plus à l’est, des habitants de Bargou ont barré une route et jeté des pierres sur des véhicules de la police qui a répliqué avec des gaz lacrymogènes.
Signe des tensions croissantes, des heurts ont également eu lieu dans la nuit de vendredi à samedi entre des manifestants disant soutenir les habitants de Siliana et des policiers au Kef (nord-ouest) et à Sbeïtla (centre-ouest, région de Kasserine), selon des médias locaux et des témoins. Ces villes, respectivement à 70 kilomètres à l’ouest et à 120 kilomètres au sud de Siliana, sont considérées comme des points de tensions importants. Comme Siliana, elles sont situées dans l’intérieur de la Tunisie, zone marginalisée où les manifestations avaient été violentes lors de la révolution de 2010-2011.
À Siliana, l’armée s’est retirée de la ville à la demande de la police, alors que la population avait favorablement accueilli la venue des militaires, la police étant accusée d’usage excessif de la force. « L’armée a proposé de venir et assurer la sécurité pendant quelques jours, mais le ministère de l’Intérieur a refusé », a expliqué un policier, des propos confirmés par deux de ses collègues.
Le gouvernement, dirigé par les islamistes du parti Ennahda, a exclu de céder à la pression de la rue. Des négociations sont néanmoins en cours à Tunis avec la principale centrale syndicale, l’UGTT, qui réclame la démission du gouverneur de Siliana, un plan d’aide économique et le retrait des renforts policiers. Alors que les crises se succèdent depuis l’été, le président Moncef Marzouki a appelé vendredi soir à la formation d’un gouvernement restreint à même de stabiliser le pays, le cabinet actuel se montrant incapable de répondre aux attentes de la population, selon lui.
Le ministre des Droits de l’homme et porte-parole du gouvernement, Samir Dilou, a jugé ces déclarations « dangereuses » tout en indiquant que la proposition était examinée. Le discours du président « comporte plusieurs points importants et dangereux qui seront discutés au sein du gouvernement dans les prochaines heures », a-t-il dit, selon l’agence officielle TAP. Le chef de l’État, un laïque allié aux islamistes, n’a pas le pouvoir de remanier le gouvernement, mais il a indiqué avoir « peur » que les violences, déclenchées par l’exaspération de la population face à la misère et au chômage, ne s’étendent.
Ces questions étaient au coeur de la révolution de janvier 2011 qui avait marqué le début du printemps arabe. Mais l’économie, minée par l’insécurité et la crise de la zone euro, son principal partenaire commercial, peine à se rétablir. Ces troubles interviennent à l’approche du deuxième anniversaire, le 17 décembre, du début de la révolution tunisienne, déclenchée par l’immolation d’un vendeur ambulant de Sidi Bouzid (centre-ouest).
Outre les manifestations sociales, les attaques menées par des groupuscules salafistes se sont multipliées ces derniers mois. Parallèlement, la Tunisie est plongée dans une impasse politique, sans compromis en vue sur la future Constitution.
(01 Décembre 2012 – Avec les agences de presse)
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