La Libye se désintègre….
3 septembre 2013
La Libye se désintègre….
Le fils de Kadhafi a été capturé par les insurgés en novembre 2011 et était détenu depuis lors dans la prison de Zintan. Les autorités locales ont ignoré les demandes du gouvernement d’envoyer Saïf al-Islam dans la capitale. Les régions libyennes sont de facto indépendantes et ne se soumettent pas au pouvoir central.
Zintan est loin d’être la seule ville qui n’obéit pas aux autorités officielles libyennes. Pour Oleg Fomine, coprésident du Comité russe de solidarité envers le peuple libyen, le fait est que, aujourd’hui, il n’y a pas vraiment de pouvoir unique en Libye.
« La Libye est scindée en différentes régions qui ne se soumettent pas au pouvoir central. Il y a même une fragmentation à un niveau moins élevé. En fait, ce sont des groupes de bandits, des bandes armées qui dirigent le pays. Ils dictent leur loi dans les régions où ils se trouvent. Cela veut dire qu’il n’y a pas de pouvoir central, et que le pouvoir est dans les mains de ces groupes armés, qui s’opposent régulièrement. »
Une des régions les plus problématiques est la Cyrénaïque. 80 % du pétrole libyen provient de là. Les revenus de sa vente ne remplissent pas les caisses de l’État parce qu’il est volé par les groupements des tribus locales et les islamistes. Mohamed Khalifa al-Cheikh, le ministre de l’Intérieur, a tenté de les combattre. Cependant, ayant pris conscience de l’inutilité de ses essais, il a récemment démissionné. Les experts prévoient que la situation va s’aggraver.
« Le pouvoir central s’affaiblit. Cela concerne surtout les relations entre Tripoli et la Cyrénaïque. En 1950, lorsque la Libye a obtenu son indépendance, le pays était composé de trois régions : la Cyrénaïque, la Tripolitaine et le Fezzan. Le Fezzan est une grande région déserte du Sud. La Tripolitaine, où se trouve la capitale Tripoli, et la Cyrénaïque, et son centre Benghazi, sont toujours en concurrence, » explique Benyamin Popov, directeur du Centre de partenariat des civilisations de l’Institut d’État des relations internationales de Moscou.
Mouammar Kadhafi est originaire de Syrte, une ville de la Tripolitaine. Au temps de la Jamahiriya, les habitants de la Cyrénaïque pensaient que le dirigeant était plus bienveillant envers ses compatriotes et ils se sentaient donc défavorisés. Il n’est pas étonnant que les premières actions contre Kadhafi aient commencé à Benghazi justement. Cependant, après sa chute, il est apparu qu’il était l’élément qui maintenait la Libye unie. Benyamin Popov remarque que le système a commencé à s’effondrer une fois cet élément parti.
« Le pays se désintègre lentement sous nos yeux. Le fait que Zintan ne veuille pas donner Saïf Kadhafi le montre bien. Cela fait déjà trois fois que les tribus de la Cyrénaïque annoncent qu’ils veulent que Barka (c’est le nom de la région en arabe) devienne semi-autonome ou même totalement autonome. L’important pour eux est que la région ait ses propres lois et qu’elle dépende moins de Tripoli. »
Il faut ajouter que l’opération des forces de l’OTAN, qui a mené à la destitution de Kadhafi, n’a pas poussé que la Libye au bord du désarroi. Le fait est que des Touaregs servaient dans l’armée du chef de la Jamahiriya. Ce peuple vit dans la région à la charnière de la Libye, du Niger, du Burkino-Fasso, du Maroc, de l’Algérie et du Mali. Après la chute de Kadhafi, ces combattants très bien formés sont retournés dans leur patrie, au nord du Mali, et y ont créé leur propre État, l’Azawad. Les islamistes ont rapidement pris aux Touaregs le contrôle de plusieurs villes sur le territoire de l’Azawad, dont la capitale Tombouctou. « Les séparatistes ont pu être maîtrisés seulement après l’intervention militaire française au Mali.