par Karen Freifeld
NEW YORK (Reuters) – Les autorités bancaires de l’Etat de New York réclament le licenciement d’une dizaine de dirigeants de BNP Paribas, en plus du paiement de plus de dix milliards de dollars, pour régler l’enquête en cours sur des soupçons d’infraction aux sanctions contre l’Iran et plusieurs autres pays, apprend-on de source proche du dossier.
Des membres de la « direction générale » sont visés, selon une des deux personnes interrogées samedi par Reuters.
L’autre croit savoir que le responsable de la réglementation bancaire pour l’Etat de New York, Benjamin Lawsky, ne devrait pas demander le départ des deux ou trois principaux dirigeants de la banque aux Etats-Unis. Certains employés ont été remerciés et d’autres départs sont attendus, a-t-on ajouté.
BNP Paribas et le bureau Benjamin Lawsky n’ont pas souhaité commenter ces informations.
BNP Paribas est également en discussion avec d’autres autorités américaines, notamment le département de la Justice et le procureur de Manhattan.
Les autorités américaines cherchent à savoir si la banque française a cherché à contourner les sanctions imposées par les Etats-Unis à plusieurs pays et principalement au Soudan, entre 2002 et 2009.
De source proche des négociations, on estime que la transaction en cours avec les autorités américaines prévoit le versement d’une amende qui pourrait être supérieure à dix milliards de dollars (7,3 milliards d’euros) ainsi qu’une reconnaissance par la banque de sa culpabilité.
La banque pourrait également se voir interdire pendant un certain temps de régler des transactions en dollars.
La durée d’une telle suspension, potentiellement dévastatrice, n’est pas précisée, ni les activités concernées.
« QUELQU’UN L’A FAIT »
BNP Paribas compense des milliards de dollars via New York chaque jour, souligne-t-on, que ce soit dans le trading, les comptes ouverts chez elle ou les transactions sur les marchés des changes. La banque pourrait alors perdre des transactions rentables mais aussi perdre les clients concernés.
Le montant définitif de l’amende n’est pas fixé, explique-t-on, mais les négociations portent désormais sur une somme « supérieure à huit milliards de dollars ».
Le département des services financiers de l’Etat de New York et le parquet de Manhattan obtiendraient chacun deux milliards de dollars, l’autre moitié étant répartie entre le département de la Justice et d’autres autorités concernées par les enquêtes, notamment le département du Trésor.
Benjamin Lawsky, un ancien procureur fédéral qui a à son actif la condamnation de grandes banques telles que Standard Chartered ou Credit Suisse à de lourdes peines, a fait savoir qu’il centrait son enquête sur le thème de la responsabilité personnelle.
« Si une banque commet une infraction pénale ou si une banque commet de graves violations de la réglementation, c’est que quelqu’un au sein de cette banque l’a fait. Une société est une chose inanimée », a déclaré Benjamin Lawsky le mois dernier.
D’autres facteurs doivent aussi être pris en compte avant de décider si la haute direction doit être tenue pour responsable des activités de ses subordonnés, a-t-il toutefois ajouté.
Il faut, a-t-il dit, regarder « ce qu’ils ont fait ou ce qu’ils n’ont pas fait ou ce pour quoi ils ont mis la tête dans le sable ou ce qu’ils n’ont pas contribué à changer. »
« Il faut une analyse soigneuse, quand il s’agit d’individus, de leur vie et de leur carrière », a-t-il ajouté.
Depuis le 13 février, date à laquelle BNP a pris une provision de 1,1 milliard d’euros en vue d’une éventuelle amende, l’action a perdu plus de 13%.
(Aruna Viswanatha et Douwe Miedema, Mathilde Gardin et Danielle Rouquié pour le service français)