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24 avril 2024

La crise des liquidités européennes financée par l’argent du trafic de paiement des Etats


La crise des liquidités européennes financée par l’argent du trafic de paiement des Etats

Liliane Held-Khawam -suissesse d’origine libanaise née à Héliopolis- est la fondatrice de Pro Mind Consulting S.A. Spécialisée dans le conseil en stratégie d’entreprise et en management Mme Held-Khawam a mis au point un système de gestion qui intègre le développement des processus, des projets et des compétences humaines. Cette méthodologie, appelée MPC, vise une gestion d’entreprise basée sur l’Humain. Auteur de l’ouvrage Le Management Par le Coaching (MPC): le cadre à la recherche de ses repères (publié aux éditions Promind), elle est également la fondatrice de http://www.hr4free.com et http://www.management4free.com qui a pour mission de ré-humaniser l’économie en mettant gratuitement à disposition de tous des outils de RH et de Management. http://viaf.org/viaf/95216793/
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La BCE et ses alliées financeraient les déficits des pays de la zone euros depuis 2008 à travers le système de trafic de paiement commun. La méthode semble pour le moins surprenante! Dès le 29 avril 2011, un éminent économiste allemand, membre du cabinet de conseil du ministre allemand de l’Economie, du nom de Hans-Werner Sinn titrait son article ainsi : « La stratégie secrète de renflouage menée par la BCE » (1). Les excédents des pays exportateurs financeraient les déficits des autres.

L’histoire commence en 2007-2008. Le marché financier est secoué par la crise des subprimes. Les dirigeants européens étaient confrontés à un double danger. Le premier consistait à devoir renflouer les banques commerciales européennes imprudentes et spéculatrices. Le deuxième était de sortir certains pays de la zone euros à court de liquidités de la menace de défauts de paiements.

Si tout le monde connaît l’histoire du sauvetage des banques suite à la crise des subprimes qui a vu partir en fumée Lehmann Brothers, l’épisode du renflouement des Etats européens déficitaires l’est moins. Les établissements financiers internationaux secoués par leur propre crise, refusent dès 2007 de financer les pays européens en difficultés appelés PIGS (Portugal, Irlande, Grèce et Espagne). Or, tous ces pays ont dû renoncer dans le cadre de leur intégration à l’UE à se faire financer par leur banque centrale (par ex. loi de G Pompidou de 1973 en France) et à passer exclusivement par les marchés privés. Par conséquent, si ceux-ci refusent de le faire alors les pays courent le risque du défaut de paiements! C’est alors que la BCE et ses alliées entrent en piste.

Or, toutes ces banques centrales –avec la BCE en tête- ont elles aussi une interdiction de financer leur Etat. Donc, la BCE n’a statutairement pas le droit de financer en direct un Etat-membre de sa zone. Pourtant c’est exactement ce qui s’est fait grâce à Target2, acronyme pour « Système de transfert express automatisé transeuropéens à règlement brut en temps réel ». C’est donc la plateforme de trafic de paiement commune à l’ensemble de la zone euros. Tous les pays PIGS avaient eu la bonne idée de s’y connecter en 2008…

Target est donc une plateforme sur laquelle sont effectuées toutes les opérations de paiement entrantes ou sortantes d’un pays qui lui est connecté. Cette plateforme donne quotidiennement le solde des flux financiers d’un pays.

GraphiqueTarget

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Quand un pays possède un déficit de sa balance des comptes courants, celui-ci peut être compensé par un apport de capitaux privés. Mais dès 2007 cet afflux d’argent privé s’est révélé insuffisant. Les banques centrales l’ont alors compensé…
Prenons l’exemple de l’Espagne sur le graphique1 (4). Elle présente un solde de Target à – 200 milliards d’euros. Par conséquent, elle doit les compenser par un emprunt de l’étranger via la BCE de 200 milliards d’euros faute de quoi elle est déclarée en défaut de paiement. A l’inverse, sur ce graphique l’Allemagne présente un solde excédentaire de 450 milliards d’euros. Cela revient à un prêt accordé à l’étranger via la BCE.

Le professeur Sinn relève dans son article que les recouvrements du compte Target de la Banque centrale allemande étaient de 323 milliards d’euros en mars 2011 alors que les déficits cumulés des PIGS entre 2008 et 2010 étaient de 365 milliards.
Target qui est tout de même le trafic de paiement entre pays est devenu le vecteur de financement des pays déficitaires de la zone euros.(2) Ce système crée donc toujours plus un clivage entre les pays riches et les pays pauvres sans que les causes ne semblent guérir. Rappelons qu’à ce jour l’ensemble de la zone euros est engluée sur le plan économique. Même l’Allemagne commence à s’essouffler…

Un autre élément pénalise déjà les pays exportateurs car ces artifices comptables et gestionnels ont des conséquences immédiates. Quand les pays qui ont bénéficié des excédents de leurs voisins effectuent les paiements de leurs transactions ordinaires, cet argent revient vers les pays exportateurs. Cela génère un risque d’inflation. C’est pourquoi selon M Sinn les banques centrales des pays exportateurs réduisent « les émissions de liquidités pouvant faire l’objet d’emprunts par les acteurs économiques nationaux. En clair, les prêts des banques centrales des pays exportateurs (Allemagne mais aussi la Suisse largement associée) ont été détournés au profit des pays déficitaires.

Ces critiques sont balayées par Mme Philippine Cour-Thimann dans le cadre d’une présentation au club du CEPII (3) en juin 2013. Elle reconnaît que (slide 6) « les soldes Target reflètent ces mesures (non conventionnelles) dans un contexte de segmentation des marchés de financement bancaire». Dans son exposé, elle affirme aussi qu’il n’existe pas de risque à moins d’une dissolution de la zone euro.

On peut constater qu’une forte solidarité a été instaurée entre les pays de la zone euros. Ceci a une double conséquence immédiate. Les pays excédentaires font d’une part des pays déficitaires des assistés de longue durée. D’autre part, le développement des projets nationaux des pays excédentaires est soumis à de fortes restrictions pour cause d’indisponibilité de crédits et/ou par peur de l’inflation. On peut craindre alors que ces pays moteurs de la zone euro voient leur compétitivité régresser et leur tissu économique local s’épuiser en raison de financements insuffisants…. A suivre…

Liliane Held-Khawam | 18 Octobre 2014

(1) https://www.project-syndicate.org/commentary/the-ecb-s-secret-bailout-strategy/french
(2) http://www.cesifo-group.de/ifoHome.html

(3) http://www.cepii.fr/docs/files/reunions/communications/2013-6 27%20Target2/PCT_2013_06_27_Club%20du%20CEPII_Target2%20et%20la%20crise%20en%20zone%20euro.pdf

(4) http://leblogalupus.com/2012/08/12/lallemagne-sinquiete-des-desequilibres-du-systeme-interbancaire-europeen-target2/

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 A lire également sur le même thème:

http://leblogalupus.com/2012/07/15/zone-euro-defiance-de-tres-grande-ampleur-via-target2-lallemagne-continue-de-financer-lespagne-et-litalie/

http://leblogalupus.com/2011/12/08/bce-et-target2-voici-pourquoi-la-france-pourrait-etre-desormais-du-mauvais-cote-de-la-balance/

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